Peu d’études sur la nationalisation de la sidérurgie au Québec et sur la grande entreprise

ENTREPRISES ET NATIONALISATIONS. BILAN DE LA LITTÉRATURE

Depuis quelques décennies, l’ histoire des entreprises constitue une approche privilégiée par les historiens de l’ histoire économique. L’étude de la structure et des stratégies des entreprises, et en particulier des grandes entreprises, permet de mieux saisir la part de l’organisation dans la croissance des économies. C’est ainsi que nous pouvons mesurer le poids des grandes sociétés anonymes par rapport aux sociétés familiales dans le fonctionnement d’une économie nationale. Nous pouvons également comparer la façon dont les entreprises (ou les divisions d’ entreprises) s’ intègrent les unes aux autres, que ce soit de manière horizontale ou verticale, ou encore en privilégiant la diversification. Nous pouvons évaluer les mérites de structures fortement centralisées par rapport à d’ autres qui le sont moins, et ainsi de suite. L’ organisation des entreprises peut en bonne partie servir de révélateur de la marche d’une économie nationale. Il serait fastidieux, de faire le tour de toutes les structures et stratégies recensées par l’ historiographie dans le cadre du présent mémoire3• À la place, il nous semble préférable de concentrer notre attention sur deux d’entre elles bien en place pendant la période que nous étudions et qui ont fait l’objet de nombreux travaux. Il s’agit, d’une part, de la structure multidivisionnelle et de l’autre, le holding. Deux auteurs ont fourni des études globales sur ces structures. D’ un côté, Alfred D. Chandler, dans ses recherches consacrées aux entreprises américaines, allemandes et britanniques. Et de l’autre, Youssef Cassis, qui nous fournit une description assez complète des entreprises ayant opté pour la structure du holding.

Multidivisionnelles et holdings

D’emblée, une définition de la structure multidivisionnelle et du holding s’impose. La première est définie par Alferd Chandler Jr comme une entreprise décentralisée dans laquelle les cadres exercent leurs fonctions à quatre niveaux différents. Chaque niveau a un domaine de fonctions et un degré d’autorité différents. Les quatre niveaux administratifs d’ une entreprise qUi adopte la structure multidivisionnelle sont: l’unité opérationnelle, les directions départementales, la direction de division et la direction générale4 • Quant aux holdings, l’encyclopédie Universalis le définit comme suit: « Les sociétés « holdings », appelées aussi sociétés de portefeuille ou sociétés de participations, sont des entreprises dont les actifs sont constitués par des participations dans des entreprisès industrielles, commerciales ou financières; ces participations sont acquises dans le but d’obtenir la direction et le contrôle des sociétés concernées. Elles ne disposent pas en propre des moyens techniques d’ exploitation acquis par les sociétés contrôlées ou filiales et peuvent, comme les autres sociétés, détenir des participations minoritaires ne permettant pas le contrôle des entreprises concernées.5 »

Alfred Chandler Jr est considéré comme celui qui a fourni une première explication d’ensemble de l’ évolution des grandes entreprises dans les pays développés au XXe siècle. Avant lui, l’ histoire des entreprises se campait essentiellement dans des monographies de firmes ou de secteurs industriels spécifiques, lesquelles, trop souvent, étaient rédigées dans une perspective apologétique ou polémique. Aux États-Unis, les débats tournaient autour des Rockefeller, Carnegie et autres barons industriels de ce monde6• Chandler leur reprochait de ne pas faire l’effort de comprendre les changements de gestion des entreprises américaines. Son premier ouvrage, Stratégies et Structures de l ‘entreprise 7, publié en 1962, établit une nouvelle approche en histoire des entreprises par des études comparatives et descriptives de grandes firmes américaines. Suivront La Main visible des Managers en 1977 (une synthèse de l’ évolution organisationnelle des entreprises américaines) et Organisation et performance des entreprises en 1992 (analyse comparative de la montée de la grande entreprise dans trois nations différentes: les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’A llemagne)8. On doit à Chandler d’avoir fait de l ‘ histoire des entreprises une discipline universitaire grâce à ses généralisations sur la relation entre la stratégie et la structure, la distinction entre les secteurs de base et périphériques et le rôle des grandes entreprises et de l’innovation9• On lui doit également la présentation de la structure multidivisionnelle des grandes sociétés américaines qui établit une séparation claire, voire rigide, entre la direction dédiée à la stratégie et les divisions liées aux opérations quotidiennes lO

• Selon Chandler, la stratégie et la structure sont les ressources utilisées par l’entreprise afin de répondre au marché. La structure est donc intimement liée à la nature du ou des marchésll

• Dans l’industrie sidérurgique, Chandler estime que la plupart des grandes ‘entreprises, surtout américaines, ont adopté la forme multidivisionnelle. C’est ce qu’ont fait les entreprises américaines Armco, National Steel et UnIted States Steel, mais tout en conservant une direction centralisée plutôt que décentralisée, et ce, même si leurs ventes, leurs actifs et leur volume croissent rapidementl2

• La structure multidivisionnelle utilise de manière optimale le potentiel administratif des entreprises pour profiter de la croissancelJ

La transformation des marchés Nous nous sommes attardés sur quelques ouvrages de référence pour situer le contexte économique mondial, européen et canadien dans lequel évolue Dosco. Et comme cette dernière concentre ses activités dans les secteurs sidérurgique et houiller, nous avons également pris connaissance d’ouvrages traitant de l’évolution de ces secteurs au cours du XXe siècle. L’Histoire économique mondiale : 1945-1990 d’Herman van der Wee donne un très bon tableau des différents secteurs industriels après la Seconde Guerre mondiale ainsi que de l’évolution des grandes régions du monde. Les États-Unis sortent du conflit avec une nette supériorité technologique et une suprématie économique tandis que les pays européens connaissent un ralentissement de leurs activités29

• Les États-Unis optent pour la libéralisation des marchés mondiaux. En Europe plusieurs mesures restrictives sont adoptées pour rétablir l’équilibre de la balance des paiements. Dès les années 1950, la production industrielle dans le monde connaît un taux de croissance annuel élevé (5.6 % en moyenne de 1948 à 1971) et dont le facteur principal consiste dans la reprise de l’économie dans les pays occidentaux3o

• Malgré ce fait, quelques récessions obscurcissent le paysage économique; en 1951 -1952 en Europe et en 1957-1958 en Europe, aux États-Unis et au Japon31

• On assiste également à une automatisation progressive de la production.

Plusieurs entreprises doivent se moderniser pour affronter la concurrence sur les marchés mondiaux (libéralisation des marchés). Certes, le charbon et l’ acier vont bénéficier de la reprise après 1958. Mais Van der Wee montre bien l’ apparition, au cours des années 1950, des prem iers signes dénotant l’existence d’une capacité excédentaire dans ces secteurs et même l’accélération du remplacement du charbon par le pétrole et le gaz naturel. L’acier subit lui aussi la concurrence de métaux plus légers comme l’aluminium ou de matières synthétiques comme le plastique32 • Cette évolution a bien entendu joué sur le devenir de Dosco et des entreprises oeuvrant dans les mêmes secteurs. Dans le domaine des secteurs de l’acier et du charbon, l’ouvrage de Henry Peyret La stratégie du fer33 est incontournable, car il nous donne plusieurs renseignements sur l’évolution des industries et des marchés des différents continents du monde. Nous avons également consulté l’ article de Philippe Mioche « La reconstruction de la sidérurgie européenne 1945-1949 : sérénité des uns, nouveau départ pour les autres»34 et de Jean Barrette « L’industrie sidérurgique »35. Nc>us nous servons des ouvrages de Peyret et Mioche comme références dans l’établissement du portrait de la conjoncture mondiale des industries du charbon et de l’ acier. L’ouvrage de Barrette nous sert, quant à lui, à détai 11er le portrait de l’entreprise à l’étude.

Le livre Un siècle d ‘histoire industrielle-Belgique, Luxembourg, Pays-Bas- Industrialisation et sociétés 1873-197336 écrit par René Leboutte, Jean Puissant et Denis Scuto illustre bien l’évolution économique et industrielle de la Belgique, du Luxembourg et des Pays-Bas du début du XXe siècle jusqu’en 1973. L’importance de cet ouvrage, en ce qui nous concerne, c’est qu’il met en lumière le développement et les transformations des industries houillère et sidérurgique dans le Benelux. La Belgique possède de grands bassins houillers et des centres sidérurgiques tandis que le Luxembourg a une longue tradition industrielle dans le secteur de la sidérurgie et sa principale richesse du sous-sol est le minerai de fer. Quant aux Pays-Bas, il possède des charbonnages exploités dans le Limburg. La troisième partie de l’ouvrage se consacre principalement aux Trente Glorieuses (1944-1973) et nous apporte plusieurs informations pertinentes sur les secteurs qui nous intéressent. On apprend, par exemple, qu’une crise charbonnière touche la Belgique en 1957-1958, ce qui exige une restructuration importante de l’industrie. Et depuis la fin des années 1950, le secteur du charbon est entré dans une phase de déclin. Les combustibles solides, qui couvraient

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Table des matières

RÉSUMÉ
REMERCIEMENTS
TABLE DES MATIÈRES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
LISTE DES CARTES
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : La nationalisation de la sidérurgie au Québec: le cas de Dominion Steel and Coal Corporation, un point de vue différent
1. Entreprises et nationalisations. Bilan de la littérature
1.1 Multidivisionnelles et holdings
1.2 La transformation des marchés
1.3 Les nationalisations: approches comparatives et primauté de l’ État
1.4 Traiter les nationalisations
1.5 Peu d’études sur la nationalisation de la sidérurgie au Québec et sur la grande entreprise
1.6 Sur Dosco
1.7 Sur la grande entreprise
2. Hypothèses de travail
3. Présentation et utilisation des sources
4. Méthodes et stratégies de recherche 32
CHAPITRE 2 : LE CHARBON, LA SIDÉRURGIE ET DOSCO 34
1. Après la Seconde Guerre, un monde en changement 34
1.1 L’industrie du charbon
1.2 La sidérurgie
2. Les holdings
2.1 La genèse de Dosco
2.2 Hawker Siddeley Group
2.3 A.V.Roe Canada Ltd.
2.4 Dominion Steel and Coal Corporation, Ltd. (Dosco)
3. Les administrateurs communs de Hawker Siddeley Group,
d’A.V.Roe Canada et de Dosco
3.1 Qui sont-ils?
CHAPITRE 3: LES VICISSITUDES DE LA DOSCO
1. Les années 1960 ou le combat contre la concurrence
1.1 Pas de profits majeurs pour la première moitié des années 1960
1.2 De 1965 à la nationalisation: des années de déception
1.3 Une expansion qui coûte cher
2. Une critique du concept de cycle de vie du produit
2.1 Le charbon plus que jamais
2.2 La concurrence s’intensifie dans l’acier
3. Les tourments de A. V.Roe Canada, Ltd
3.1 Annulation du programme Arrow
3.2 Le gouffre financier d’A.V.Roe Canada, Ltd.
3.3 Le gouvernement du Québec intéressé par Dosco
4. LA transaction entre Hawker Siddeley Canada et Sidbec
4.1 La transaction
4.2 L’ après-Dosco
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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