PERCEVOIR LE DOUTE AUTREMENT

PERCEVOIR LE DOUTE AUTREMENT

LE DOUTE, UNE ERRANCE DIFFICILE

Douter, se sentir troublé, perdu dans son univers intérieur, ambivalent, hésiter, pris entre ses besoins et ceux des autres; vouloir partir mais ne pas trouver la force de le faire; se taire lorsque qu’on voudrait parler. Voilà des exemples de doutes que l’on peut qualifier d’errances. Selon le Petit Robert (2004), douter est un sentiment d’incertitude. Dans ce sens, il suscite, selon les circonstances, des interrogations anxiogènes, inhibe la moindre initiative; il provoque de longues et douloureuses ruminations qui paralysent toute activité et obstruent les facultés d’analyse et de jugement. La personne se situe dans une période plus ou moins longue de désorganisation et de chaos qui freine sa capacité d’agir. Je connais cet état, il m’habite depuis des années.

La naissance du doute dans ma vie

Je viens de cette famille aisée où j’ai grandi dans le sentiment de ne pas être à la hauteur des exigences de mes parents. Habitée par la peur de me tromper; j’ai appris à céder a place aux autres et à les idéaliser.  Au lieu de réagir à cette situation en développant des habiletés afin de prouver à mes parents mes capacités, sournoisement un sentiment de vide, d’insécurité et d’incapacité m’envahit. À l’adolescence, le vide de mon enfance se transforme en labyrinthe dans lequel j’erre prisonnière, les autres sont tout et moi, rien. Je me sentais perdue et ne m’aimais pas. Je cherche des points d’ancrage dans ma vie et n’en trouve pas. À cette époque, mi-vivante mi-morte, je suivais les autres le ventre plein de ce malaise. Cette errance s’est intensifiée lorsque j’ai eu à décider de mon orientation de vie. La seule chose que je pouvais envisager était la recherche d’un chemin pour être heureuse. Longtemps, j’ai porté une souffrance intérieure proche du chaos, une désorganisation impossible à maîtriser tant l’anxiété et la honte d’exister se manifestaient comme des ombres envahissantes. L’idéalisation des autres m’enfonçait encore plus dans cette souffrance. Ce comportement, intimement relié à mon manque de confiance et d’estime, a interféré pendant des années dans ma vie personnelle et professionnelle et, encore aujourd’hui, j ‘ ai cette tendance.

L’expression du doute dans ma vie personnelle

Mon doute balance entre le manque de confiance et d’estime et entre une vision idéale de ce que je dois faire et de ce que je veux être. Voici un extrait de mon journal de maîtrise qui illustre comment le doute peut devenir paralysant en présence d’une personne que j’idéalise. Il s’agit d’un extrait que j’ai écrit lors d’un séminaire de groupe durant ma maîtrise :  Le doute apparaît lorsque je suis devant une situation ou avec une personne qui représente ce que j’aspire d’être, c’est-à-dire: quelqu’un de créatif, en harmonie avec soi, épanoui socialement, qui s’affirme, prend sa place, fait preuve de confiance en soi et qui a développé des compétences spécifiques dans un domaine. En situation de doute, je ressens un sentiment d’infériorité qui m’envahit qui se manifeste par un vide. J’ai l’impression que mon corps se désintègre. Je deviens molle et j’ai une boule dans la gorge. Je me retrouve sans ressource pour faire face à la situation et ne trouve plus de point d’appui intérieur. Alors, je me compare et me diminue face à ce que font les autres qui représentent alors l’autorité. Ils possèdent la connaissance et les compétences, je ne suis plus rien, et par le fait même, je n’ai plus accès à mes compétences. Je perds le contrôle de moi et deviens paranoïaque. Des scénarios catastrophiques proches du désespoir se martèlent dans ma tête, je crois que les autres me jugent et me trouvent incompétente. Dans cette situation de déséquilibre, j’évite de montrer ce que je ressens et je me juge sévèrement. Souvent, tout de moi est remis en cause et j’en viens à me détester. Je voudrais me frapper, crier ou encore, me sauver et fuir loin, très loin pour ne pas sentir cette souffrance et la honte d’avoir une si faible estime de moi. Journal de maîtrise, juin 2002 Mon extrait de journal rejoint bien la théorie sur les « structures du soi» élaborée par Tory Higgins. (Higgins, 1989; Higgins, Bond, Klien & Strauman, 1986; Higgins et al, 1986; voir Vallerand, 1994, p. 167). Selon cette position théorique, il existe un «soi idéal» affecté à ce que l’on voudrait posséder, c’est-à-dire à nos idéaux; un « soi obligé », affecté à ce que l’on sent comme devoir posséder, c’est-à-dire à nos croyances et nos valeurs; un soi réel, affecté à ce que l’on croit posséder, c’est-à-dire à ce que nous percevons de notre réalité. Ces trois structures ont une influence sur les émotions. D’après Higgins (voir Vallerand, 1994), plus il existe un écart entre le « soi réel» et le « soi idéal », plus il y a risque de dépression car il se crée chez la personne une démobilisation, une perte de motivation à rechercher des idéaux difficiles et voire même impossibles à atteindre. Toutefois, plus l’écart existe entre le « soi obligé» et le « soi réel », plus le risque d’anxiété augmente car en plus de ne pas atteindre ses objectifs, la personne subit une pression  additionnelle, celle reliée à ce qu’elle devrait réussir (Vallerand, 1994). Prise dans de tels enjeux, la personne ne croit plus en ses capacités, se déprécie, s’isole, prend moins de risque; elle devient en quelque sorte dépossédée de son pouvoir d’action. Son estime et sa confiance sont également ébranlées par des expériences troublantes et infructueuses. Dans mon extrait, les deux aspects de l’écart avec le «soi réel» sont représentés. L’écart entre mon « soi réel» et mon «soi idéal» se manifeste par ma relation avec une personne qui représente ce que j’aspire d’être. La résultante dépressive reliée à cet écart est illustrée par le sentiment de vide et de désespoir que je décris comme ceci dans le texte: J’ai l’impression que mon corps se désintègre. Je deviens molle et j’ai une boule dans la gorge. Je me retrouve sans ressource pour faire face à la situation et ne trouve plus de point d’appui intérieur. Alors, je me compare et me diminue face à ce que font les autres qui représentent alors l’autorité. lis possèdent la connaissance et les compétences, je ne suis plus rien … L’écart entre mon « soi réel» et mon « soi obligé» est illustré lorsque j’écris que je me compare à quelqu’un qui a « développé des compétences spécifiques dans un domaine» et qui «possède les connaissances et les compétences ». La résultante anxieuse reliée à cet écart est illustrée dans le texte comme ceci lorsque j’écris qu’en leur présence «je perds contrôle de moi et deviens paranoïaque. Des scénarios catastrophiques proches du désespoir se martèlent dans ma tête, je crois que les autres me jugent et me trouvent incompétente ». Pourtant, ce ne sont pas les autres qui me jugent mais moi en me disant que je devrais être aussi compétente qu’eux. Avec les années, je me suis forgé un idéal de perfection que j’attribue aux personnes que j’idéalise. Je me compare à elles, les trouvant mieux que moi dans ce qu’elles entreprennent, dans leur manière d’être. Lorsque je suis  impliquée dans ce processus de comparaison, moins je me fais confiance, plus je dévalorise mes capacités au profit de celles des autres, j’invalide mon pouvoir d’action et renforce mon sentiment d’incompétence. Le sentiment d’incompétence telle que nommée dans mon extrait de journal fait référence aux habilités, aux compétences et aux connaissances que possèdent les personnes. Le Petit Robert (2004) définit ce type de compétence comme étant «une connaissance approfondie, reconnue qui confere le droit de juger ou de décider en certaines matières ». Elle devient le résultat d’un apprentissage personnel ou d’un enseignement par lequel la personne s’expose en expert dans un domaine particulier. Il me semble que notre éducation et notre culture occidentale prennent appui sur cette défmition de la compétence pour en faire une valeur sociale axée sur la réussite et la performance. Cette définition devient même une croyance dans ma vie. À tel point que je me crois incapable d’accéder à une expertise si poussée dans un domaine, particulièrement en ce qui concerne ma vie professionnelle.

L’expression du doute dans ma vie professionnell

Aussi longtemps que je me rappelle, travailler suscite la peur de me tromper et celle de ne pas être à la hauteur des attentes du milieu. Ma vie professionnelle est source de doute. J’ai le sentiment de n’être jamais assez, d’autant plus que je me reconnais peu de compétences. J’ai choisi une direction professionnelle qui ne m’a aidée en rien sur ce plan. Bachelière en musicothérapie, dès le début de mes études je me sentais moins armée  musicalement que mes confrères et consœurs pour entreprendre des études universitaires dans ce domaine. La musique était une valeur importante de mon éducation familiale. Mes sœurs et moi apprenions le piano sous l’autorité des religieuses. Personnellement, je le faisais sans passion; malgré tout, la musique est devenue une partie de mon identité. Ce n’est pas par choix éclairé que j’ai étudié dans ce domaine mais par un besoin pressant d’appartenance sociale. Mon père avait toujours valorisé la réussite sociale comme étant une des valeurs les plus importantes. À vingt ans, je ressentais l’urgence de trouver un point d’ancrage social afm de parvenir à me définir dans la société et être reconnue dans ma propre famille. Une amie de l’époque, que j’idéalisais énormément, étudiait en musique; alors, plutôt que de faire référence à mes besoins, j’ai suivi son chemin. Je me suis inscrite d’abord en enseignement de la musique au baccalauréat où il s’offrait aussi une option en musicothérapie. Par la suite, j’ai laissé les études d’enseignement de la musique pour bifurquer dans la concentration en musicothérapie.

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Table des matières

REMERCIEMENTS
RÉSUMÉ
TABLE DES MATIÈRES
LISTE DES FIGURES
INTRODUCTION 
CHAPITRE 1
PERCEVOIR LE DOUTE AUTREMENT
1.1 Le doute, une errance difficile
1.1.1 La naissance du doute dans ma vie
1.1.2 L’expression du doute dans ma vie personnelle
1.1.3 L’expression du doute dans ma vie professionnelle
1.2 La musicothérapie, une expérience thérapeutique
1.2.1 L’improvisation musicale, l’être musical, le champ du jeu en musicothérapie active, l’expérience esthétique
1.2.2 La musicothérapie dans ma pratique
1.3 Les sources du doute dans ma pratique
1.4 Le doute, un point commun partagé par les autres
1.5 Le doute, un état porteur de créativité
1. 6 Question et obj ectifs de recherche
CHAPITRE 2
MÉTHODOLOGIE
2.1 Une méthodologie renouvelée
2.1.1 La recherche constructiviste d’orientation empirique
2.1.2 L’approche qualitative-inductive de recherche
2.1.3 La recherche phénoménologique de type existentiel
2.1.4 La démarche heuristique
2.1.5 La praxéologie
2.1.6 Lejoumal de bord
2.1.7 L’entretien avec mon directeur de maîtrise
2.2 L’influence de la théorie ancrée pour mon étape de compréhension
2.2.1 La démarche de la théorie ancrée selon Pierre Paillé
2.2.2 Ma démarche adaptée du modèle proposé par Paillé
2.2.3 Les étapes de ma démarche
CHAPITRE 3
L’ÉTAPE DE COMPRÉHENSION
3.1 La naissance d’une théorie
3.2 Doute paralysant
3.2.1 Les origines des constructions mentales dans l’état de doute paralysant, le manque de transparence et la comparaison
3.2.2 Le manque de transparence
3.2.3 Présentation de mes différents types de comparaison
3.2.4 Conclusion sur l’état de doute paralysant
3.3 Doute de transition
3.3.1 Définition du doute de transition
3.3.2 Les formes de l’état de doute de transition
3.4. Les accès aux voies de passage et les voies de passage
3.4.1 La définition des voies de passage
3.4.2 Accès intrapsychique vers les voies de passage: les prises de conscience défricheuse et les prises de conscience lampe de poche
3.4.3 Le jeu de l’activité mentale dans la bascule vers l’état de doute créateur
3.4.4 L’accès corporel aux voies de passag
3.4.5 Les voies de passage
3.5. Doute créateur
3.5.1 Discussion sur la juxtaposition des mots «doute» et «créateur»
3.5.2 Au carrefour de l’état de doute créateur
3.5.3 Le processus créateur de l’état de doute
3.6 Différentes répercussions de cette réflexion dans ma vie
3.6.1 Mes transformations
3.6.2 Le passage d’un sentiment de vide vers un espace vivant
3.6.3 La relation avec mon intime
3.6.4 Mes changements vécus au quotidien
3.6.5 La quête d’un rêve, un désir ou une obligation
3.6.6 Le défi du risque de l’action
CONCLUSION 
BffiLIOGRAPHIE

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