PATIENTS SOUS TRAITEMENT ANTICOAGULANT ORAL PAR ANTI-VITAMINE K

Hémostase primaire

      L’hémostase primaire est la succession d’événements, qui aboutissent à la formation d’un amas de plaquettes agrégées sur la brèche vasculaire [43]. Elle comporte plusieurs étapes, et fait intervenir plusieurs acteurs.
Les intervenants
– Le vaisseau : La paroi du vaisseau comporte 3 tuniques concentriques : l’intima, la média et l’adventice. La monocouche de cellules endothéliales au contact du sang est non thrombogène: elle empêche l’activation des plaquettes, régule négativement la coagulation, et synthétise des protéines du système fibrinolytique. Le sous-endothélium, quant à lui, est thrombogène. En effet, mis au contact du sang, il provoque l’adhésion des plaquettes. Les fibroblastes de l’adventice portent une protéine membranaire : le facteur tissulaire, qui active la coagulation [43].
– Les plaquettes : Formées dans la moelle osseuse à partir du mégacaryocyte, ce sont des structures discoïdes anuclées. Leur durée de vie est de 7 à 10 jours. Des granules sont présents dans le cytoplasme des plaquettes. Leur contenu sera sécrété via le système canaliculaire, ouvert lors de l’activation. Les granules alpha contiennent de nombreuses protéines spécifiques de la plaquette. Les granules denses contiennent l’adénosine diphosphate (ADP) le collagène, la thrombine entre autres [43].
– Le facteur de Willebrand (FW) et le fibrinogène : Ils sont présents à la fois dans le plasma et dans les granules alpha des plaquettes. Le FW est également présent dans la matrice sous-endothéliale, où il a la conformation nécessaire à sa fixation sur la plaquette, ce qui n’est pas le cas pour le FW circulant. Le FW joue un rôle déterminant dans l’adhésion des plaquettes à la brèche vasculaire ; tandis que le fibrinogène est impliqué dans l’agrégation des plaquettes entre elles [43].
Les étapes La lésion vasculaire entraine une vasoconstriction temporaire, et met en contact le sang avec les structures du sous-endothélium. Les plaquettes vont s’agréger pour boucher la brèche vasculaire, avec une succession très rapide d’évènements [43].
– Adhésion : Le FW du sous-endothélium sert de colle entre le vaisseau lésé et la plaquette. Cette dernière peut également se fixer directement au collagène du sousendothélium.
– Activation : L’adhésion des plaquettes au sous-endothélium déclenche des signaux intracellulaires, qui aboutissent à une série de réponses :
-changement de forme des plaquettes qui deviennent sphériques;
-sécrétion rapide du contenu des granules denses et des granules alpha ;
-métabolisme des prostaglandines ;
– remaniement des phospholipides membranaires.
– Recrutement des plaquettes
Les produits secrétés ou formés lors de l’activation des plaquettes, ont des récepteurs plaquettaires spécifiques ; ils se fixent sur les plaquettes qui passent à proximité et les recrutent, amplifiant le processus d’activation plaquettaire. La thrombine, produite au terme des réactions de la coagulation qui se déroulent à la surface des plaquettes, est elle-même un puissant agent pro-agrégant, et promoteur de l’accroissement du thrombus plaquettaire [43].
– Agrégation des plaquettes : L’activation des plaquettes entraîne un changement de conformation de l’intégrine alpha IIb3, qui lui permet de reconnaître, et de fixer le fibrinogène qui possède plusieurs sites de reconnaissance pour l’alpha IIb3 activée. Ces interactions vont permettre d’accrocher les plaquettes les unes aux autres, pour former un agrégat de plaquettes [43].

Pharmacologie des AVK

       Les AVK sont utilisés dans la prévention primaire et secondaire de la thrombose veineuse profonde (TVP) et dans la prévention d’embolies systémiques. Les AVK sont des molécules difficiles à utiliser pour les raisons suivantes:
– leur fenêtre thérapeutique est étroite ;
– la grande variabilité de la réponse individuelle, inhérente aux facteurs génétiques et environnementaux ;
– les nombreuses interférences alimentaires et médicamenteuses ;
– les méthodes biologiques de surveillance, difficiles à standardiser ;
– la nécessité d’une bonne coopération entre le patient et le médecin, pour un équilibre thérapeutique optimal, et une bonne compréhension du traitement par le patient pour éviter les accidents [63].

Conduite pratique du traitement par AVK

       Le traitement anticoagulant oral peut être débuté avec une dose moyenne d’entretien ou avec une dose d’environ le double de la dose moyenne d’entretien. Des doses de charge ne présentent aucun avantage. En effet, elles rendent plus difficile l’atteinte de la dose d’équilibre et sont potentiellement dangereuses. Il est habituellement proposé d’utiliser un AVK à demi-vie longue pour un meilleur équilibre. La dose initiale, toujours probatoire, doit être aussi proche que possible de la dose d’équilibre et dépend de la spécialité d’AVK utilisée. Il est recommandé de commencer le traitement avec une dose de 20 mg de Préviscan (1comprimé), de 5 mg de Coumadine et de 4 mg de Sintrom. Elle doit être adaptée en fonction des résultats biologiques. Si le traitement se fait en une seule prise quotidienne, celle-ci s’effectue de préférence le soir. Le premier contrôle INR est effectué 2 à 3 jours après la première prise, un INR supérieur à 2 annonce un surdosage à l’équilibre et doit faire réduire la posologie. Il permet surtout de dépister une hypersensibilité. Il faut ensuite augmenter ou diminuer la dose par 25% selon le médicament, et vérifier l’INR 3 à 5 jours après chaque modification de dose. Il ne faut jamais faire de dose de charge car dangereuse. [64] Chez le sujet âgé, défini comme une personne de plus de 75 ans ou de plus de 65 ans et polypathologique, la dose initiale doit être réduite de moitié afin d’éviter le risque de surdosage. En effet, il existe une forte sensibilité aux AVK liée à une réduction de la clairance métabolique; d’où la nécessité d’une surveillance plus stricte que chez l’adulte [26]. L’établissement la dose moyenne d’équilibre demande au minimum 1 semaine et parfois beaucoup plus. Pendant cette période, les contrôles d’INR ont lieu tous les 3 jours. Quand la dose d’équilibre est trouvée, les contrôles sont espacés de 15 jours puis de 30 jours. Dans certains cas, il peut être nécessaire d’alterner 2 doses différentes un jour sur deux, par exemple 1 comprimé de Préviscan un jour et 1,5 comprimé le jour suivant. Le risque hémorragique augmente de façon exponentielle avec l’augmentation de l’INR qui ne doit pas dépasser 5 [64]. En relais de l’héparine, les AVK sont généralement co-prescrits précocement, en même temps ou 1 à 3 jours après introduction de l’héparine et pendant au minimum 5 jours [4, 26]. Pendant toute la phase de recherche de l’INR cible, en raison du temps de latence de l’action anticoagulante des AVK, l’héparine est maintenue à dose adaptée. Elle est arrêtée lorsque l’INR est dans la zone thérapeutique recherchée, 48 à 72 h après l’introduction de l’AVK. L’INR cible n’est généralement pas atteint lors de ce premier contrôle. Toutefois, s’il est atteint lors du premier contrôle, alors y a un risque de surdosage à l’équilibre [64]. Il est nécessaire de donner au patient un carnet de surveillance du traitement par AVK dans lequel il note la dose d’AVK prescrite et les résultats de l’INR. Par ailleurs une éducation appropriée du patient est nécessaire et fournit les explications indispensables: la notion d’une interdiction de toute injection intramusculaire et de toute prise médicamenteuse sans avis médical, le conseil d’un régime alimentaire équilibre et régulier [64].

La iatrogénie médicamenteuse

    La iatrogénie médicamenteuse, selon la définition de l’organisation mondiale de la sante (OMS), regroupe «toute réponse néfaste et non recherchée à un médicament survenant à des doses utilisées chez l’homme à des fins de prophylaxie, de diagnostic et de traitement». La iatrogénie médicamenteuse représente tous les incidents imputables à un médicament par le biais d’un professionnel de santé ou non. Elle peut être liée à un problème de prescription, de dispensation, d’administration ou d’observance. Les effets indésirables qui en découlent ne sont pas forcément dus à un mauvais usage des thérapeutiques [32]. La iatrogénie médicamenteuse regroupe donc: Le ou les effet(s) indésirable(s) d’un médicament, défini(s) par l’OMS comme « toute réaction nocive et non voulue à un médicament, se produisant aux posologies normalement utilisées chez l’homme pour la prophylaxie, le diagnostic ou le traitement d’une maladie ou pour la restauration, la correction ou la modification d’une fonction physiologique, ou résultant d’un mésusage du médicament ou du produit ». Cette définition englobe donc les effets indésirables survenus lors de l’utilisation du médicament conforme à son Autorisation de Mise sur le Marché (AMM), mais aussi ceux survenus suite à un mésusage dans un cadre d’une utilisation en dehors du cadre prévu dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP).
• Effet indésirable grave : C’est « un effet indésirable létal, ou susceptible de mettre la vie en danger, ou entraînant une invalidité́ ou une incapacité́ importante ou durable, ou provoquant ou prolongeant une hospitalisation, ou se manifestant par une anomalie ou une malformation congénitale» [4].
• Effet indésirable inattendu : C’est un effet indésirable « dont la nature, la sévérité ou l’évolution ne correspondent pas aux informations contenues dans le résumé des caractéristiques du produit ». Lorsqu’il est détecté, on doit en informer le centre régional de la pharmacovigilance [26].
• L’erreur médicamenteuse : Elle se définit comme « un écart par rapport à ce qui aurait dû être fait au cours de la prise en charge thérapeutique médicamenteuse du patient ». L’erreur médicamenteuse est donc évitable. Elle peut survenir dans une ou plusieurs étapes du circuit du médicament telles que la prescription, la dispensation, la délivrance ou le défaut d’observance du patient.
• Un événement indésirable évitable : Il se définit comme un événement indésirable qui n’aurait pas eu lieu si les soins avaient été conformes à la prise en charge considérée comme satisfaisante au moment de sa survenue. Le caractère évitable est apprécié à l’issue d’une évaluation précise de la situation clinique du patient et des conditions de prise en charge [20]. Pour répondre à cette problématique, la pharmacovigilance a pour mission la surveillance des médicaments et la prévention du risque d’effet indésirable résultant de leur utilisation, que ce risque soit potentiel ou avéré. Elle est organisée à l’échelle européenne par l’EMA (European medecines agency) créée en 1995, puis à l’échelon national par l’ANSM avec 31 CRPV repartis sur l’ensemble du territoire français. La iatrogénie médicamenteuse a été évaluée en France grâce aux structures de pharmacovigilance: En 2007, l’étude EMIR estimait le nombre annuel d’hospitalisations dues à des effets indésirables médicamenteux en France à 143915, ce qui représentait 3,6% du total des hospitalisations. Dans un tiers des cas, les effets indésirables étaient considérés comme graves. Le nombre annuel moyen de journées d’hospitalisation dues à un effet indésirable médicamenteux était ainsi estimé à 1 480 885 [18, 20]. Les AVK sont des médicaments emblématiques de la iatrogénèse car : L’histoire de la découverte des AVK montre qu’ils étaient un poison à l’origine de troupeaux de bovins décimés par des complications hémorragiques, puis un raticide, avant d’être des médicaments [47]. L’histoire de la médecine et de la pharmacopée depuis l’antiquité connaît l’ambivalence de toute substance possédant une puissante action pharmacologique : la dose fait le poison. Les AVK sont à l’origine du plus fort taux d’incidence d’hospitalisation pour effet indésirable médicamenteux en France. Ils représentaient 12,3% pour effet indésirable médicamenteux soit 17 701 hospitalisations par an en 2007 [18].

Education thérapeutique des patients sous AVK

       En raison de la iatrogénie importante des AVK, une éducation thérapeutique du patient est nécessaire afin d’améliorer l’équilibre du traitement et de limiter la fréquence des événements indésirables en particulier les accidents hémorragiques. En effet le patient doit être impliqué dans la gestion et la surveillance de son traitement AVK. Les objectifs de l’éducation thérapeutique aux AVK sont les suivants :
1. promouvoir une bonne observance du traitement;
2. connaître le nom de son médicament, sa posologie ; savoir manipuler les comprimés sécables ;
3. savoir quoi faire en cas d’oubli ;
4. connaître l’action des AVK ;
5. connaître les indications du traitement AVK;
6. la maîtrise de la surveillance régulière du traitement par le dosage de l’INR ;
7. aviser le médecin a chaque variation de l’INR pour adapter la dose ;
8.connaître les valeurs cibles de l’INR ;
9. reconnaître un surdosage et un sous-dosage : ce que signifie un INR trop élève ou pas assez élevé ; ainsi que les risques liés à chacune de ces situations
10. connaître les signes d’alarme (hémorragies) ;
11. connaître la conduite à tenir en cas de saignement ;
12. éviter les accidents et les situations à risques ;
13. connaître les sports et activités contre-indiqués ou nécessitant des précautions particulières ;
14. éviter l’automédication ;
15. connaître les interactions alimentaires et les aliments riches en vitamine K;
16. signaler son traitement par AVK à tout soignant ;
17. utiliser et remplir son carnet patient de suivi AVK [6] ;
18. et porter une carte « patient sous AVK » sur soi.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
1. Physiologie de l’hémostase
1.1 Hémostase primaire
1.1.1 Les intervenants
1.1.2 Les étapes
1.2 Coagulation plasmatique
1.2.1 Les protéines de la coagulation
1.2.2 Synthèse des protéines de la coagulation
1.2.3 Les différentes étapes de la coagulation
2. LES ANTIVITAMINE K
2.1. Historique
2.2. Pharmacologie des AVK
2.2.1. Pharmacocinétique
2.2.2. Pharmacodynamie
2.3 Indications des AVK et INR cibles
2.3.1 Les cardiopathies emboligènes
2.3.2 Les prothèses valvulaires mécaniques
2.3.3 Les maladies thromboemboliques veineuses et artérielles
2.3.4 Balance bénéfices-risques
2.4 Contre-indications des AVK
2.4.1 Contre-indications absolues
2.4.2 Contre-indications relatives
2.5 Interactions
2.5.1 Interactions médicamenteuses
2.5.2 Interactions alimentaires
2.6 Présentation des molécules et spécialités
2.7 Effets indésirables
2.7.1 Accidents hémorragiques
2.7.2 Accidents thromboemboliques
2.7.3 Accidents immuno-allergiques
2.8 Usage des AVK en pratique courante
2.8.1 Conduite pratique du traitement par AVK
2.8.2 Comment surveiller un traitement par AVK ?
2.8.3 Comment adapter le traitement ?
2.8.4 Que faire en cas d’oubli de prise?
2.8.5 Comment arrêter un traitement par AVK ?
2.8.6 Que faire en cas de surdosage ou d’hémorragie non grave ?
2.9 LA IATROGENESE
2.9.1 La notion de iatrogénèse
2.9.2 La iatrogénie médicamenteuse
2-9-3 Facteurs de risque hémorragique
2-9-3-1 Facteurs de risque liés au patient
2-9-3-2 Facteurs de risque liés au traitement
2-9-3-3 Les facteurs environnementaux ou intercurrents
3 Mesures et recommandations afin de limiter la iatrogénie des avk
3.1. Recommandations pour la pratique clinique
3. 2 Education thérapeutique des patients sous AVK
3. 3 Les cliniques d’anticoagulants (CAC)
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
1. OBJECTIFS
1.1. Objectif général
1.2. Objectifs spécifiques
2. Patients et méthodes
2.1 Type, période et cadre de l’étude
2.1.1 Type et période d’étude
2.1.2 Cadre de l’étude
2.2 Population étudiée
2.2.1 Critères d’inclusion
2.2.2 Critères de non inclusion
2.3 Méthodologie et paramètres étudiés
2.3.1 Déroulement de l’étude
2.3.2 Paramètres étudiés
2.4 Analyse des données
3. Résultats
3.1 Caractéristiques sociodémographiques de la population étudiée
3.1.1 Répartition selon l’âge et le sexe
3.1.2 Niveaux socio-économique et de scolarisation
3.1.3 Antécédents médicaux
3.2 Indications et durée du traitement anticoagulant
3.3 Niveau de connaissance des patients sur le traitement par AVK et valeurs de l’INR
3.3.1 Niveau de connaissance des patients
3.3.2 Valeurs de l’INR
3.3.3 Facteurs liés au niveau d’éducation thérapeutique des patients sur le traitement par AVK
DISCUSSION
1. METHODOLOGIE
2. RESULTATS
2.1 Niveau de connaissance des patients sur le traitement par AVK
2.1.1 Niveau de connaissance des patients en général
2.1.2.Niveau de connaissance des patients selon la valeur de l’INR
2.2 Facteurs liés au niveau d’éducation thérapeutique
2.2.1 Facteurs liés aux patients
2.2.2 Facteurs liés au personnel médical et paramédical
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES

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