Parcours mémoriels et commémorations en l’honneur de Gustave Flaubert (Rouen-Paris, 1821-2017)

«Vous me trouvez si sévère pour Flaubert, sauf l’appréciation de Salammbô, qui est l’appréciation d’un historien qui abomine les restitutions historiques en roman, je croyais m’être montré bon ami et admirateur suffisant… vous ne savez pas combien l’homme était inférieur à ses livres, et quelques efforts qu’ils fassent, les gens qui ont vécu dans l’intimité de l’auteur, ne peuvent lui trouver la grandeur de ceux qui ne le jugent que d’après ses admirables bouquins… » .

Peu avare de critiques acerbes, Edmond de Goncourt oppose clairement l’homme et l’écrivain. L’un serait à célébrer, l’autre à blâmer. Mais qui saute aux yeux des Rouennais partout dans la cité normande, qui sonne aux oreilles du public, qui bat dans le cœur des lycéens ou futurs agrégés ? Loin de tracer le portrait du prosateur normand , notre interrogation première porte sur le paradoxe de cet homme devenu célèbre pour sa plume mais aussi pour son rapport à son art.

Travailler sur le caractère historique de cet écrivain n’allait pas de soi. Le titre de cette thèse sous-entend que nous allons traiter toutes les commémorations (les célébrations se mêlant aux réalisations artistiques diverses par exemple) de manière exhaustive dans le temps et dans l’espace. Toutefois, la volonté de faire œuvre d’historien a été de créer un discours autour et avec les commémorations, menées à terme ou abandonnées en cours de projet. Ce travail, volontairement hybride, est à prendre comme l’assemblage de nombreuses thématiques parfois inédites, parfois largement travaillées par d’autres et depuis longtemps ; dans tous les cas elles doivent faire corps avec notre recherche de parcours mémoriels. Cette thèse ne devant pas devenir une synthèse, nous avons tenté de trouvé le fil commun à ces commémorations afin d’expliquer la notoriété du romancier normand.

Pour travailler sur un sujet il faut l’aimer tout en gardant un regard critique. Un des préceptes du romancier normand – que la personnalité de l’écrivain disparaisse au profit de l’Art pur – ne nous facilite pas la tâche. Commençons par quelques évidences qu’il faudra préciser et questionner. De son vivant, Gustave Flaubert a refusé tout ce qui pouvait être étranger à l’Art. Il ne cultivait que « l’art pour l’art » répétant souvent que l’œuvre ne lui appartenait plus une fois terminée. Flaubert ne manquait pas d’insister sur la nécessité de garder l’œuvre brute, sans la censurer en partie, sans en changer ou en ôter quelques fragments . Il ne cessera de demander qu’aucun dessin ne vienne illustrer ses livres, tout comme il boudera les nombreuses cérémonies du XIXe siècle, fidèle à son axiome : « Les honneurs déshonorent ; Le titre dégrade ; La fonction abrutit. » .

L’écrivain normand n’appréciait pas non plus les célébrations. Son ami journaliste Charles Lapierre , au moment de la mort de Flaubert en 1880, rappelait les sentiments du Maître : « il avait horreur de ces reportages qui violent le domicile d’un auteur, font connaître les moindres détails de sa vie intime et il ne permettrait au public que les droits de la critique. Il poussait ce scrupule jusqu’au point de n’avoir jamais voulu faire son portrait… » D’ailleurs on sourit devant la définition que le romancier donne du mot « Exposition » dans son Dictionnaire des idées reçues : « Sujet de délire du XIXe siècle. » .

Flaubert détestait « tout ce qui pouvait ressembler à quelque manifestation de cabotinage ». Cette attitude ferme a été analysée par Yvan Leclerc11: l’auteur doit disparaître derrière le principe esthétique de l’impersonnalité afin que le public ne s’introduise pas dans sa vie privée. Le romancier ne veut pas d’illustration pour ses œuvres ; pas de photographies de sa personne. Ce principe sera constant car peu de temps avant de mourir, alors que La Vie moderne préparait la publication de sa féerie Le Château des Cœurs, il proclamait à Émile Bergerat directeur de la publication: « C’est entendu, mais à une dernière condition : c’est que vous ne publierez pas mon portrait. Je ne veux pas être portraituré. Mes traits ne sont pas dans le commerce. J’ai toujours été implacable sur cette question : pas de portrait à aucun prix. J’ai mon idée là-dessus et je veux être le seul homme du XIXe siècle dont la postérité puisse dire : « Il ne s’est jamais fait représenter, souriant, à un photographe, la main dans le gilet et une fleur à la boutonnière » . »  .

On possède donc fort peu de représentations de Flaubert (trois ou quatre photographies, notamment de Carjat et de Nadar ; cinq ou six croquis, dessins ou peintures). Le reste n’est que la multitude des reproductions plus ou moins valables d’après les mêmes prototypes.

L’autre attitude difficile à mettre en œuvre est la crainte vive des mondanités. Comme tout homme de cœur, Gustave Flaubert aimait être flatté et ne rechignait finalement pas à aller à l’encontre de ce qu’il écrivait à ses nombreux correspondants. Son attrait pour les fêtes parisiennes, pendant son Droit à Paris puis dans la seconde partie de sa vie, est réel. Ce bourreau de travail, capable de s’enfermer des jours entiers et de longues semaines, ne respectait heureusement pas toujours ses théories drastiques sur la vie qu’un écrivain devait mener. Il cultivait les échanges épistoliers mais aussi mondains.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE – FLAUBERT EN SON TEMPS
CHAPITRE 1 – UNE OEUVRE FRACASSANTE
A. Madame Bovary
B. Un procès retentissant
C. Le positionnement de la nouveauté
D. L’homme d’un seul roman ?
CHAPITRE 2 – FLAUBERT ET SON MILIEU
A. Flaubert au seuil du grand monde
B. Les lumières de la capitale
C. La Saint Polycarpe
CHAPITRE 3 – PENSER LA POSTÉRITE
A. Illustration et impersonnalité
B. Un ami solide
C. Flaubert en pèlerinage chez les écrivains
DEUXIÈME PARTIE – UNE MÉMOIRE CONFLICTUELLE : LES DIFFICULTÉS DE LA CONSTRUCTION SOCIALE DE LA NOTORIÉTÉ (1880- 1921)
CHAPITRE 4 – DE L’OEUVRE À L’ACTE : UNE PREMIÈRE STRUCTURATION DU
CHAMP PATRIMONIAL
A. Une naissance bourgeoise pour une vie d’artiste
B. Les conditions du principe d’indépendance
C. Les aspirations normandes : Madame Bovary comme référence régionale
D. La polémique du lieu
E. Parisien ou Normand ?
F. Paris, une attirance ambigüe : la reconnaissance de l’artiste
CHAPITRE 5 – DE VIE À TRÉPAS : LES PREMIERS AMIS
A. L’enterrement de l’artiste
B. L’écrivain total
C. La distance biographique
D. Le Comité Flaubert
E. Construire un lieu de mémoire
F. Classer un original
CHAPITRE 6 – AU TOURNANT DU SIÈCLE : LES RÉALISATIONS
A. L’hommage parisien : la première statue
B. La politique statuaire rouennaise
C. La Normandie au sein du territoire national
D. Le centenaire de 1921 à Paris
E. La critique d’un académicien
F. Un ministre à Rouen (1921)
TROISIÈME PARTIE – LA LENTE DÉMOCRATRISATION D’UNE RÉFÉRENCE (1921-2017)
CHAPITRE 7 – L’AFFIRMATION D’UN ESPACE FIGÉ ?
A. La chambre natale
B. La Bibliothèque Flaubert
C. Les célébrations mineures
D. Le centenaire de 1980
E. Le sixième pont de Rouen
CHAPITRE 8 – UNE MAISON D’ÉCRIVAIN SUR DES CIRCUITS LITTÉRAIRES
A. Les parcours touristiques
B. La valorisation d’une maison d’écrivain
C. L’Association des Amis de Flaubert
CHAPITRE 9 – LA MODERNITÉ D’UNE OEUVRE
A. Une référence académique
B. La modernité du Maître
C. Universitaires et chercheurs locaux
CONCLUSION

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