Observation des comportements et analyse des besoins de l’élève

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L’école

Plusieurs auteurs soutiennent l’idée que, si les difficultés comportementales s’expriment au sein de l’école, la cause de ces comportements et une potentielle solution sont à rechercher dans ce contexte (Curonici, Joliat & McCuloch, 2006). Selon Archambault et Chouinard (2009), il ne s’agit pas d’amoindrir le poids des causalités extérieures qui selon eux, ont toute leur place, mais de reconnaitre le rôle de l’école dans le développement des comportements difficiles, tout simplement car c’est bien uniquement sur les facteurs du milieu scolaire que les enseignants vont pouvoir agir.

Des interactions particulières

L’école est l’un des deux environnements où l’enfant passe la plus grande majorité de son temps, avec l’environnement familial. En son sein, il va développer des interactions particulières : le groupe classe, c’est la construction de relations entre pairs et avec un adulte incarnant une figure d’autorité (Robbes & Afgoustidis, 2015). Curonici, Joliat et McCuloch (2006) invitent à appréhender les difficultés de comportement de façon systémique et interactionnelle. Au sein de l’école, l’élève va développer un certain nombre d’interactions, avec ses pairs, avec les adultes et avec son enseignant : les auteurs proposent la recherche de dysfonctionnements au sein même de ces interactions pour comprendre les difficultés comportementales de certains élèves et pouvoir y apporter des solutions.
Leur point de vue est à mettre en lien avec celui de Robbes et Afgoustidis (2015) qui postulent que ces comportements vont avoir tendance à être exacerbés ou au contraire à diminuer en fonction du type de relation d’autorité que l’enseignant va développer au sein de la classe avec ses élèves. Aussi, un enseignant développant une relation d’ « autorité éducative » avec ses élèves, sans tomber dans l’autoritarisme ou le laxisme permissif, viserait à diminuer les éventuelles apparitions des comportements difficiles en classe.

Les aspects didactiques des situations d’apprentissage

Archambault et Chouinard (2009) évoquent également l’importance de contrôler certaines variables didactiques susceptibles d’exacerber les comportements difficiles d’un 8 élève. Ils mettent en évidence les rôles centraux de l’explicitation des apprentissages et des consignes – l’élève doit savoir quoi faire, pourquoi il le fait et comment il peut le faire -, de la motivation de l’élève face à la tâche ainsi que l’importance de la différenciation (une activité trop difficile ou trop facile présente le risque de faire émerger un comportement problématique).
Aussi, si le comportement d’un élève peut parfois trouver ses sources dans une causalité extérieure à l’école, cette dernière n’en reste pas pour autant impuissante pour tenter de proposer à l’élève un cadre contenant lui permettant de réduire les comportements inadaptés. Saint Laurent (2002) le rappelle : améliorer les relations au sein de l’école et favoriser, par sa pratique quotidienne, la réussite dans les apprentissages, peut avoir un impact majeur sur le développement psychoaffectif de l’enfant. Ainsi, un certain nombre de variables peuvent être modulées par l’équipe enseignante pour permettre à l’élève de modifier son comportement.
Cela laisse par ailleurs entendre qu’un comportement n’est pas figé et peut être modifié. Certains procédés issus des travaux en psychologie cognitive permettent de soutenir l’augmentation ou la diminution d’un comportement.

Fonction des comportements difficiles

S’ils ne s’expliquent pas par une raison médicale, Curonici et son équipe (2006) insistent sur le fait qu’un comportement difficile est bien souvent un message, un mode de communication qui cherche à se faire entendre dans un contexte donné, à savoir ici, le contexte scolaire. De ce fait, un sens est à rechercher au travers des manifestations comportementales de l’élève. Les auteurs proposent ainsi une classification des fonctions attribuées aux comportements difficiles.

Une fonction protectrice contre la « peur d’apprendre » (Boimare, 1999)

Pour Curonici (2006), le comportement peut être compris comme une stratégie d’évitement que l’élève adopte face aux situations d’apprentissage par peur d’une mise en échec. Bien souvent, un tel comportement permet de camoufler un sentiment de honte et de précarité en lien avec des difficultés scolaires. La situation d’apprentissage est ainsi évitée et mise à distance pour préserver une estime de soi acceptable. Cette première catégorie fait écho à la théorie de Boimare (1999) sur la peur d’apprendre.
Serge Boimare (1999) développe une théorie de compréhension des troubles du comportement en milieu scolaire comme étant la communication d’une peur d’apprendre. En effet, selon lui, la situation d’apprentissage peut réveiller chez certains enfants des peurs qui viennent se traduire par des comportements spécifiques et inadaptés. Certains enfants construisent une fonction psychique particulière qui vient empêcher l’accès aux apprentissages, si dangereux pour ces personnalités fragiles.
« N’oublions pas qu’apprendre c’est d’abord rencontrer des limites et des règles, c’est pouvoir se confronter à ses insuffisances, c’est accepter d’abandonner ses certitudes, c’est être capable d’intégrer un groupe dans en être le leader, c’est accepter d’être comparé, d’être jugé, de se soumettre. Autant de données qui ne sont pas évidentes à admettre. Elles les sont encore moins pour tous ceux qui ont grandi et se sont construits sur l’absence de repères et de contraintes, sur le refus de la frustration, sur l’illusion de déjà tout savoir, sur le tout « tout de suite » et l’exclusivité dans la relation et ils sont nombreux. » (Boimare, 1999, p 13).
Les comportements difficiles sont, selon Boimare, à comprendre comme des défenses psychiques d’évitement des situations de frustrations ou de mise en échec qui garantissent l’équilibre de l’enfant.

Une fonction adaptative

Curonici et son équipe définissent une seconde fonction possible aux comportements difficiles : une fonction adaptative (2006). Les élèves cherchent à se conformer avec les représentations que les adultes et leurs pairs ont d’eux, c’est-à-dire des enfants déviants par rapport à la norme scolaire. Un cercle vicieux semble alors s’instaurer dans la relation entre l’élève et ses pairs et entre l’élève et les différents adultes de l’école. L’élève accepte son identité d’élève « particulier », « perturbateur » et se maintient dans celle-ci en réitérant ces comportements, qu’il perçoit comme étant attendus par son entourage : l’élève s’engage dans une forme de « conformité déviante » par rapport aux représentations de son entourage ( Curonici & al. 2006). L’élève accepte ainsi d’endosser un rôle social qui lui a été attribué. Un travail sur les représentations est alors à effectuer par l’équipe afin de reconstruire une image de soi plus complexe et donc plus correcte de l’élève.

La recherche de liens ou la lutte contre l’exclusion

Les comportements difficiles amènent bien souvent l’élève à être mis à l’écart voire même exclu du groupe classe. Curonici et son équipe (2006) émettent l’hypothèse d’un paradoxe : tout en présentant des comportements violents qui entrainent inévitablement un isolement ou une exclusion, ces élèves seraient la plupart du temps à la recherche d’un lien fort d’appartenance au système relationnel de la classe.
Comprendre et envisager le comportement de l’élève sous ces différents angles permet à l’enseignant d’accentuer son sentiment de capacité à pouvoir aider l’élève à avoir recours à des comportements plus adaptés. En effet, ces théories suggèrent que tout comportement n’est pas inné, mais a été acquis, appris par l’enfant pour différentes raisons. Aussi, un comportement peut donc être modifié.
Différents travaux présentent les différents procédés sur lesquels l’enseignant peut s’appuyer pour aider un élève à avoir recours à des comportements plus adaptés au milieu scolaire.

Les procédés permettant de modifier un comportement

En appui sur les recherches effectuées en neurosciences et en psychologie cognitive et sociale, un certain nombre de procédés peuvent servir d’appui pour soutenir le processus de modification d’un comportement inadapté. Issus des travaux du courant behavioriste, ces procédés sont au service d’un concept appelé le « conditionnement opérant » fondé sur le postulat selon lequel la conséquence donnée à un comportement va influer sur la répétition ou non de ce dernier (Archambault & Chouinard, 2009). Les auteurs expliquent qu’un comportement volontaire est appris à partir du constat des conséquences qu’il produit sur son environnement. En appui sur les ouvrages de différents auteurs (Archambault & Chouinard, 2009 ; Saint Laurent, 2002 ; Chevallier, Gagbé, Freymont & Lenfant, 2013), sont présentés ici les différents procédés qui découlent du conditionnement opérant.

Le renforcement

Le renforcement est un procédé utilisé pour augmenter la fréquence ou maintenir un comportement cible. Ce procédé repose sur l’identification de renforçateurs, c’est à dire d’une conséquence positive, matérielle ou sociale, qui va suivre un comportement et qui explique sa tendance à se reproduire. Afin que les renforçateurs soient efficaces, ils doivent avoir une signification pour l’élève et être en lien avec ses centres d’intérêts. Saint Laurent (2002) propose même aux enseignants un court questionnaire à faire passer à tous les élèves afin de cibler les renforçateurs envisageables.
Il y a deux types de renforcements, le renforcement positif et le renforcement négatif.

Le renforcement positif

Chevallier et son équipe (2013) décrivent deux types de renforcement positif qui renvoient à deux types de renforçateurs :
– Le renforcement social : c’est à dire féliciter, souligner, porter une attention au comportement attendu. Saint Laurent (2002) insiste sur le fait que ce renforçateur est d’autant plus efficace s’il est immédiat et sincère. Ce type de renforçateur est dit « naturel » car il s’agit d’une réaction immédiate de l’environnement suite au comportement attendu.
– Le renforcement concret ou matériel : il renvoie à des renforçateurs matériels (une récompense) ou fictif (système de points). Ce type de renforçateur permet de combler le besoin de satisfaction immédiate. Saint Laurent (2002) met cependant en garde concernant les récompenses matérielles qui ne font pas toujours sens pour l’élève.
Lorsque le dispositif s’arrête et que la récompense n’est plus présente, le comportement appris a tendance à disparaitre car l’élève ne perçoit pas l’intérêt d’adopter ce comportement. Le renforcement social doit nécessairement être mis en place afin que l’élève comprenne que son comportement a des conséquences directes sur son environnement (Archambault & Chouinard, 2009).
Pour Chevallier et al. (2013), le renforcement positif présente un autre intérêt : celui de « décontaminer la relation » entre l’élève et son enseignant. En effet, le renforcement positif permet à l’élève de découvrir une autre manière d’obtenir l’attention de l’adulte qui diffère de la sanction. Cette dernière, si elle est utilisée trop fréquemment, d’une part perd de son intérêt mais abime la relation et risque de conduire à la rupture.

Le renforcement négatif

A l’inverse du renforcement positif, on parle de renforcement négatif lorsqu’un comportement augmente ou se maintient car une conséquence désagréable a été retirée. C’est le cas lorsque le regard sévère disparait ou que l’élève cesse de se faire rejeter par ses camarades. Ce concept repose sur l’idée que l’on se comporte d’une certaine manière pour éviter une conséquence désagréable. Archambault & Chouinard (2009) donnent un autre 12 exemple très parlant : les élèves ayant une faible estime d’eux même vont éviter les tâches scolaires pour éviter la conséquence désagréable : le risque de l’échec.
Pour être efficace, il est nécessaire que l’élève puisse identifier clairement le comportement dont le renforcement fait l’objet afin que l’élève sache quel est le comportement qui lui vaut le renforçateur pour qu’il puisse le reproduire. Ce type de procédé doit donc aller de paire avec l’explicitation des comportements qui doit passer par une description détaillée (Chevallier & al. 2013). Par ailleurs, le recours au renforçateur doit être systématique : quand l’élève produit le comportement attendu, ce dernier doit systématiquement être suivi d’une conséquence bénéfique pour l’élève. En plus de la systématisation, le facteur temps est également à penser : il ne doit pas s’écouler trop de temps entre le comportement attendu et le renforçateur afin que l’élève puisse percevoir la boucle : « situation comportement conséquence ».

Le modelage

Le modelage s’appuie sur les travaux de Bandura (1969) qui ont démontré qu’un comportement s’apprenait au travers de l’observation. Les enfants imitent un comportement dont ils ont constaté les conséquences positives.
Le modelage consiste ainsi à mettre l’élève en situation d’observateur : en sa présence, l’enseignant renforce le comportement attendu qui vient d’être présenté par un élève. Il permet de soutenir l’explicitation des attentes en démontrant précisément quel est le comportement ciblé. Par exemple, il s’agira pour l’enseignant de féliciter un élève en explicitant précisément pour quel comportement il reçoit ces félicitations (par exemple : « Je te félicite, tu as bien levé la main pour prendre la parole et tu as attendu ton tour en silence, tu as donc le droit d’avoir la parole »). Selon Saint Laurent (2002), le modelage permet à l’enfant d’acquérir des compétences sociales qui n’étaient pas forcément dans son répertoire et ainsi de percevoir clairement quels sont les comportements attendus.

L’ignorance intentionnelle ou extinction

La recherche d’attention est une conséquence agréable souvent visée par l’élève présentant un comportement difficile. Cette attention peut être obtenue au travers de la transgression d’une règle, qui va impliquer une relation duelle avec l’adulte. Celle-ci, même si elle est conflictuelle, va sécuriser l’élève par certains aspects. Aussi, le comportement va être 13 maintenu, selon le principe du renforcement positif explicité précédemment (Chevallier & al. 2013). De ce fait, les auteurs préconisent d’avoir recours à l’ignorance intentionnelle lorsque cela est possible. Cela revient simplement à n’apporter aucune réaction en réponse au comportement que l’on veut voir diminuer. Aussi la conséquence agréable – l’attention de l’enseignant – est retirée et l’élève perd l’intérêt d’avoir recours à ce comportement.
Ce type de procédé, contrairement à ceux présentés précédemment, n’a pas pour visée l’augmentation ou le maintien d’un comportement mais a pour objectif sa diminution. C’est également le cas des procédés qui s’appuient sur la sanction. Les auteurs mettent en avant le nécessaire appui sur ces procédés mais insistent sur le recours plus fréquent au renforcement positif, qui permet de ne pas trop entacher la relation affective entre l’enseignant et son élève.

Des études sous tendant l’efficacité de ces procédés

Un certain nombre d’études mettent en avant l’efficacité des dispositifs se basant sur le renforcement pour modifier les comportements. Ces dispositifs sont notamment utilisés dans le domaine de la psychopathologie dans le cadre de l’autisme ou des troubles du comportement. Lanovaz (2012) fait part des résultats positifs observés chez les enfants autistes pour modifier certains de leurs comportements au travers d’un dispositif qui s’appuie sur le principe du renforcement non contingent : dans son étude, il propose d’identifier le renforçateur qui maintient le comportement cible et d’en annuler les effets en donnant à l’enfant un accès continu à ce dernier. Le comportement perd ainsi sa fonction et l’enfant ne perçoit plus la nécessité d’avoir recour au comportement cible. Ainsi, dans cette étude, la modification du comportement est obtenue par manipulation d’un renforçateur.
Différentes études (Roskam, Kinoo & Nassogne, 2007 ; Perisse, Gerardin, Flament & Mazet, 2006) démontrent l’efficacité des dispositifs thérapeutiques s’appuyant sur le renforcement comme procédé de modification des comportements auprès d’enfants présentant des troubles du comportement ou des troubles de la conduite. Dans les deux études est mise en avant l’efficacité de dispositifs de guidance parentale (une méthodologie présentée et mise en œuvre par les parents au domicile). Ces derniers s’appuient sur la méthode du renforcement positif et notamment le recours au renforcement social. Par ailleurs, dans leur étude, Périsse et son équipe soulignent qu’un tel dispositif permet d’obtenir des résultats satisfaisants dans plusieurs contextes (au sein de la famille et dans le cadre de l’école) et que les progrès de l’enfant ont tendance à se maintenir dans le temps, même suite à l’arrêt du dispositif.

Un dispositif à mettre en place : le contrat de comportement

Le contrat est un dispositif couramment utilisé dans les écoles pour aider l’élève à modifier des comportements inadaptés au milieu scolaire. Ce dispositif s’appuie principalement sur le renforcement positif puisqu’il doit être appréhendé comme un outil d’aide et d’apprentissage et, par conséquent, l’élève doit comprendre aisément qu’il tire des avantages à acquérir ces nouveaux comportements (Archambault & Chouinard, 2009).
« L’enfant doit comprendre que ce sont ses comportements qui sont problématiques et non lui-même » (Richoz, 2009, p 248).

Evaluation fonctionnelle et observation objective des comportements

Avant de mettre en place ce type de dispositif, il convient d’opérer une évaluation fonctionnelle des comportements. Cette phase consiste en une observation objective des comportements difficiles et a pour objectif d’une part de cibler les comportements qui vont être à modifier et d’autre part de s’interroger sur leur fonction, plus précisément à leurs antécédents et leurs conséquences, afin de repérer ce que recherche l’enfant au travers de ces comportements. Ce dernier point est important car, au regard de ce qui a été expliqué précédemment, il va permettre à l’enseignant de construire les renforçateurs : en modifiant ou en déplaçant les conséquences positives sur les comportements attendus, le changement comportemental va pouvoir s’opérer.
L’identification et la description précise des comportements attendus est une des conditions de la réussite du recadrage. Selon Archambault et Chouinard (2009), « un comportement est observable, mesurable, il a un début et une fin, il peut être répété » (p 265). Aussi, les auteurs précisent que le comportement attendu doit être explicite pour l’élève. L’item « être poli » n’est pas un comportement mais une qualité de l’élève ; en revanche l’item « dire bonjour lorsqu’on rentre en classe » constitue un comportement en adéquation avec la définition des auteurs.
C’est en fonction de ces observations que l’on va pouvoir construire l’intervention de recadrage de manière individualisée. La construction du projet d’accompagnement se fait donc en fonction des difficultés observées chez l’élève mais aussi de ses compétences (Chevallier et al, 2013), car les objectifs visés, bien qu’ils puissent être révisés régulièrement tout au long de la mise en place du dispositif, doivent toujours être des objectifs accessibles et atteignables pour l’élève.

Description et mise en place du dispositif

Le contrat de comportement doit faire l’objet d’une entente écrite entre l’élève et l’enseignant. Aussi, lors de sa construction, une phase de négociation importante est à mener auprès de l’élève qui doit comprendre à la fois qu’il n’a plus le choix, que les comportements qu’il présente ne sont plus acceptés et qu’ils doivent être modifiés. Cette phase est importante car elle permet d’intégrer l’élève dans un processus de coopération et d’engagement afin de le responsabiliser et de le mener vers l’autonomie (Archambault & Chouinard, 2009). Afin de matérialiser cette entente, le contrat doit être signé par les différentes parties : l’élève et l’enseignant.
Au sein de cette entente écrite, le contrat doit ainsi préciser un certain nombre de facteurs : il doit préciser, de la façon la plus explicite possible, le ou les comportements attendus et quelles conséquences l’élève en titrera si le contrat est respecté (Saint Laurent, 2002). Ce dernier point est essentiel pour Archambault et Chouinard (2009) car il signifie à l’élève l’engagement que prend l’enseignant au sein du dispositif et pas seulement le sien. Selon les auteurs, trop peu de contrats mettent en évidence ce dernier point, ce qui à leur sens, ne permet pas à l’élève de percevoir le contrat comme un outil d’apprentissage mais au contraire comme un instrument de sanction visant à le forcer. Dans une telle situation, Richoz (2009) souligne que le contrat vient alors renforcer la destruction de la relation affective, selon lui si nécessaire pour obtenir la coopération de l’élève. Aussi, pour que cet aspect ait du sens, l’élève doit également avoir une connaissance explicite des critères de jugement qui permettent de savoir si le renforçateur peut être obtenu.
Par ailleurs, l’élève doit avoir un temps duel avec l’enseignant afin d’avoir un retour rapide sur le respect ou non du contrat. Cette phase de « décompte » doit se faire sur un temps calme et ritualisé et faire l’objet d’une trace écrite (Chevallier et al. 2013). Elle va lui permettre à la fois de matérialiser ses progrès et son évolution et de savoir, selon l’entente établie avec l’enseignant, s’il peut obtenir le renforçateur choisi.
En fonction des résultats, des progrès de l’élève le contrat doit être réajusté régulièrement de façon à ce que les objectifs soient pertinents (ni trop difficiles à atteindre mais présentant tout de même un degré d’exigence adapté) et à proposer des remédiations possibles en fonction des difficultés éventuelles de l’élève.
Saint Laurent conseille de procéder par façonnement : les objectifs visés doivent toujours être atteignables pour l’élève, aussi, l’objectif final peut ne pas être proposé d’emblée (par exemple « finir son travail écrit » peut être décomposé en plusieurs objectifs : finir le quart de son travail puis la moitié…). Etablir des buts réalistes va permettre à l’élève de 16 pouvoir obtenir la conséquence positive : c’est en recevant le renforçateur que l’élève va petit à petit modifier son comportement.

Mise en place du contrat de comportement

Suite aux difficultés rencontrées par l’élève lors de la première période scolaire, une équipe éducative a été mise en place début octobre. A l’issue des échanges qui y ont eu lieu, la psychologue scolaire, le médecin scolaire, l’assistante sociale ainsi que le directeur de 18 l’école ont fait part de la possibilité de faire une demande auprès du dispositif R’école 1. Ce dispositif d’urgence permet à l’équipe de l’école de travailler étroitement avec des partenaires relevant de l’enseignement spécialisé. Un médiateur ASH intervient durant 1 mois auprès de l’élève au sein de la classe pour observer l’enfant (ici, du 5 novembre au 11 janvier). Cet accompagnement s’enrichit des observations d’une enseignante spécialisée une fois par semaine et des réunions régulières impliquant la présence de tous les enseignants de l’école. A l’issue de cette phase d’observation et d’analyse, des aménagements et un protocole institutionnel doivent être mis en place par l’équipe afin de permettre l’élaboration d’un plan d’intervention pour aider l’élève à s’intégrer au milieu scolaire.
A l’issue de cette collaboration, des aménagements institutionnels sont mis en place concernant la gestion des crises et la prise en charge de l’élève durant ces périodes. D’autre part, en accord avec la famille de l’élève, une proposition de recadrage individualisé est apportée au travers de la mise en place d’un contrat de comportement.

Observation des comportements et analyse des besoins de l’élève

Dans un premier temps, il a été convenu d’effectuer une observation la plus objective possible des comportements de l’élève. Aussi, nous nous sommes appuyés sur les déclarations d’incidents qui avaient été remplies jusqu’alors (voir annexe 1 – déclarations d’incidents relatives à l’élève sur la période 1). Cette phase d’observation aura eu pour objectif principal de définir les comportements à cibler en priorité et à faire figurer dans le contrat. Egalement, afin de mieux comprendre ce qui motive l’enfant à recourir à ces comportements, nous analysons en équipe les antécédents et les conséquences de ces derniers afin de pouvoir, par la suite, manipuler les renforçateurs en nous appuyant sur les motivations de l’élève.

Analyse des conséquences et des antécédents : quelles fonctions pour ces comportements ?

Les deux principales conséquences aux comportements de l’élève sont une mise à l’écart de la classe et l’attention qui lui est portée. Ces constats nous évoquent alors deux hypothèses qui rejoignent les théories de Boimare (1999) et de Curonici (2006).

Première conséquence : une mise à l’écart

Il apparait que la plupart des comportements de l’élève le conduisent à une mise à l’écart, voire une exclusion de la classe. La sortie de classe permet indirectement à l’élève d’éviter les situations d’apprentissage imposées par le cadre scolaire. Lors de la première période, l’élève réalisera très peu de travail écrit et participera peu à la vie de classe. Ce 19 constat évoque la théorie de Boimare (1999) selon laquelle la plupart les comportements difficiles d’un élève permettent de camoufler une « peur d’apprendre » relative à la frustration qu’impose la situation d’apprentissage. Par ailleurs, ce constat se renforce au vu d’une régularité : les crises se déclenchent principalement lors de la mise au travail écrit. Malgré d’excellentes performances perçues lors de ses interventions orales, le travail écrit reste difficile pour Sébastien, phase durant laquelle il doit travailler seul, faire face à la frustration de l’apprentissage et laisser une trace de sa performance sur une feuille de papier.
C’est aussi une situation où l’enseignant n’est pas toujours disponible, où il doit accepter que ce dernier s’occupe d’autres élèves, aussi cela nous évoque une autre théorie possible pouvant expliquer les comportements de Sébastien, la recherche d’attention (Curonici & al., 2006).

Deuxième conséquence : un statut privilégié et une attention focalisée

Curonici et son équipe (2006) évoquent la possibilité qu’au travers de ces mises à l’écart, l’élève serait en réalité en recherche d’un lien relationnel fort avec les différents adultes intervenant à ses côtés Effectivement, les comportements de Sébastien lui confèrent rapidement un statut privilégié avec le directeur de l’école qui l’accueille systématiquement lors de ses sorties de classe. Egalement, les crises de colère de l’élève impliquent que l’enseignant doive arrêter d’exercer son travail pour s’occuper exclusivement de cet élève afin de tenter de gérer la situation.
Nous repérons également qu’une attention très forte lui est portée par ses pairs lors de ces situations. Par ailleurs, l’élève se montre explicitement en recherche de leur attention. Il arrive fréquemment à Sébastien de sortir de la classe de son plein gré, sans autorisation. Cependant, lors de ces sorties, il maintient fortement un lien avec l’intérieur de l’espace classe : il grimpe aux fenêtres pour rester visible et faire des signes à ses camarades, il ouvre régulièrement la porte pour pousser des cris ou appeler des camarades.
Pour finir, nous observons que les journées longues sont plus difficiles à supporter pour l’élève et émettons l’hypothèse de l’expression d’une fatigabilité au travers de ces comportements.

Mise en place du contrat et évolutions

Les comportements ciblés et les procédés sous jacents pour les modifier

Les comportements cibles du contrat ont été les suivants (voir annexes 2 – fiches de contrat de comportement):
– Je m’interdis toute forme de violence qu’elle soit verbale ou physique.
– Je ne me déplace pas sans autorisation dans la classe.
– Lorsque je demande de l’aide à l’enseignant, je patiente s’il n’est pas disponible.
– Je fais tous les travaux écrits.
Recours à la violence verbale ou physique :
L’objectif visé au travers de cet item est la diminution des comportements violents. Cette diminution ne peut se travailler qu’au travers du procédé d’extinction (ou ignorance intentionnelle) ou de sanction. L’extinction ne parait pas pertinente au regard de la gravité des conséquences de ce comportement : il ne nous parait pas envisageable en tant qu’enseignant d’ignorer un comportement violent à l’encontre d’autrui ou de lui-même. Aussi, il est fixé avec l’élève que la présence de violence au sein de la classe entrainera immédiatement sa sortie et la rédaction d’une fiche de réflexion. La fréquence et la gravité de ce comportement lors de la première période de l’année en fait, avec la mise au travail écrit, l’objectif principal du contrat.
En parallèle du contrat, une séquence en Education Morale et Civique a été menée dans la classe autour des émotions et de la pratique des messages clairs, afin de soutenir l’acquisition de compétences sociales chez les élèves. Pour Sébastien, il s’agit de lui permettre d’acquérir un nouveau comportement qui peut venir se substituer aux réactions violentes et impulsives.

Effectuer le travail écrit

Afin que Sébastien retrouve une posture et une place d’élève au sein de la classe, il nous parait également primordial qu’il puisse se réinsérer dans une situation d’apprentissage en investissant la modalité écrite du travail. Un certain nombre d’aménagements sont alors proposés, en appui sur l’hypothèse d’une peur d’apprendre chez cet élève. Nous fournissons à l’élève un stylo effaçable afin que la trace qu’il laisse ne soit pas indélébile et que les éventuelles erreurs puissent être camouflées. Egalement, il sera dans un premier temps systématiquement le premier élève de la classe à bénéficier d’une aide de l’enseignant, pour amorcer son travail, réexpliquer les consignes et l’accompagner dans la tâche. Nous utiliserons le renforcement social quand le travail sera effectué tout en insistant si une partie a pu être faite en autonomie. Ce renforcement fait l’objet également d’une trace écrite en commentaire sur les fiches du contrat afin que l’élève puisse présenter ses réussites à sa famille.
Dans un premier temps, nous proposons une différenciation en terme de quantité de travail à effectuer pour chaque exercice proposé, nous indiquerons à l’élève jusqu’où il doit aller à minima pour être en situation de réussite au sein du contrat. Par ailleurs, afin de prendre en compte la possible fatigabilité de l’élève, nous lui octroyons le droit d’avoir recours à un « joker » par jour, lui permettant de ne pas faire un travail écrit demandé.

Les déplacements dans la classe

Le renforcement social est également de mise pour augmenter ce comportement attendu et le renforcement négatif est également employé. Un aménagement très simple de l’espace nous a été proposé : l’élève se déplace régulièrement pour aller prendre du matériel dans la réserve de la classe. C’est lors de ces déplacements qu’il s’arrête régulièrement en chemin pour aller distraire ses camarades. Aussi, nous proposons à l’élève d’avoir sur sa table une réserve personnelle afin qu’il n’ait plus « besoin » de se lever.

Les prises de parole dans la classe

Le procédé central pour réguler les prises de paroles inappropriées reste l’extinction (ou ignorance intentionnelle). La parole de l’élève n’est pas prise en compte si elle ne respecte pas les règles la concernant (lever la main, attendre son tour en silence). Comme pour tous les autres items, le renforcement social est privilégié lorsque le comportement attendu émerge.
Tous ces comportements sont sous tendus par le renforcement social et également par le modelage au travers du comportement des autres élèves. Par ailleurs, à la demande de l’élève, un renforçateur matériel peut également être obtenu. Un dispositif inspiré du système de points est donc couplé à ce contrat : à la fin de chaque semaine, les réussites de l’élève sont comptabilisées afin de les échanger contre un renforçateur choisi par l’élève.

Explicitation des critères de jugement et comptage

Les critères de jugement sont explicités à l’élève afin qu’il puisse reconnaitre ses situations de réussite. La trace écrite de réussite aux items se fait pour chaque demi-journée sur le temps calme du retour en classe en début d’après midi et en fin de journée pendant la copie des devoirs. L’élève remplit lui-même les différents items du contrat en fonction de son sentiment d’échec ou de réussite. Puis vient le tour de l’adulte : c’est alors occasion de faire le point sur les accords et les désaccords et d’expliciter de nouveau les comportements attendus dans ce dernier cas. En fin de semaine, le total des réussites (comptabilisées par l’adulte) est calculé avec l’élève afin de constater si celui-ci peut avoir accès au renforçateur matériel qu’il avait préalablement choisi.

Evolution du contrat et remédiations

Les trois premiers jours, le contrat avait été pensé à la journée. Il ne permettait pas de mettre en évidence les réussites de l’élève (notamment, si les matinées des journées longues étaient plutôt gage de réussite, ce n’était pas le cas des après-midi). Aussi, très rapidement, un contrat à la demi-journée a été proposé.
Suite aux difficultés de l’élève à progresser sur cet item, nous avons ré-explicité les comportements attendus concernant la prise de parole.
En cours de contrat, le renforçateur matériel a été modifié suite à une demande de l’élève. Cependant, il est apparu en cours d’évolution que l’élève se montrait de plus en plus sensible au renforcement social, le renforçateur matériel venant simplement justifier l’intérêt du contrat (ce renforçateur ayant été initialement été mis en place afin de soutenir l’élève dans l’acceptation du dispositif, bien plus que pour modifier les comportements qu’il visait).
Le contrat a été mis en place sur 8 semaines, couvrant la fin de la période 2 et la totalité de la période 3 de l’année scolaire. Suite aux progrès de l’élève, le contrat a été arrêté au début de la période 4. L’élève a pu intégrer le dispositif de classe permettant la gestion des comportements des élèves relativement aux règles de classe établies en début d’année.

Place de la famille dans le dispositif

Au travers des différentes réunions d’équipe éducative, la famille a eu un rôle important dans la mise en place de ce dispositif. Avec son accord, le contrat a pu être élaboré. Après de nombreux échanges, il a été présenté à la famille comme un dispositif d’aide visant à soutenir les réussites et les progrès de l’élève et non pas comme un dispositif visant à souligner ses difficultés. Aussi, à chaque fin de semaine, le contrat doit être vu et signé par la famille afin que cette dernière puisse à son tour féliciter l’élève concernant ses réussites. Afin de soutenir ce mouvement, l’enseignant a la possibilité d’inscrire une appréciation sur le comportement de l’élève qui doit toujours souligner ses réussites et rester encourageante.

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Table des matières

PARTIE 1 : REVUE DE LA LITTERATURE
I. LES COMPORTEMENTS « DIFFICILES » A L’ECOLE
1. Définition
1.1. Appellation utilisée dans cette étude
2. Quelles causes possibles aux comportements difficiles ?
2.1. La famille
2.2. L’école
a. Des interactions particulières
b. Les aspects didactiques des situations d’apprentissage
II. FONCTION DES COMPORTEMENTS DIFFICILES
1. Une fonction protectrice contre la « peur d’apprendre » (Boimare, 1999)
2. Une fonction adaptative
3. La recherche de liens ou la lutte contre l’exclusion
III. LES PROCEDES PERMETTANT DE MODIFIER UN COMPORTEMENT
1. Le renforcement
1.1. Le renforcement positif
1.2. Le renforcement négatif
2. Le modelage
3. L’ignorance intentionnelle ou extinction
3.1. Des études sous tendant l’efficacité de ces procédés
IV. UN DISPOSITIF A METTRE EN PLACE : LE CONTRAT DE COMPORTEMENT
1. Evaluation fonctionnelle et observation objective des comportements
2. Description et mise en place du dispositif
PROBLEMATIQUE
1. Présentation de la situation – cas de Sébastien, 8 ans (CE2)
2. Axe de travail et hypothèses de recherche
PARTIE 2 : METHODOLOGIE
I. MISE EN PLACE DU CONTRAT DE COMPORTEMENT
1. Observation des comportements et analyse des besoins de l’élève
1.1. Analyse des conséquences et des antécédents : quelles fonctions pour ces comportements ?
a. Première conséquence : une mise à l’écart
b. Deuxième conséquence : un statut privilégié et une attention focalisée
2. Mise en place du contrat et évolutions
2.1. Les comportements ciblés et les procédés sous jacents pour les modifier
a. Recours à la violence verbale ou physique :
b. Effectuer le travail écrit
c. Les déplacements dans la classe
d. Les prises de parole dans la classe
2.2. Explicitation des critères de jugement et comptage
2.3. Evolution du contrat et remédiations
2.4. Place de la famille dans le dispositif
PARTIE 3 : RESULTATS
I. EVOLUTION DES COMPORTEMENTS VIOLENTS
II. EVOLUTION CONCERNANT LA MISE AU TRAVAIL A L’ECRIT
PARTIE 4 : ANALYSE DES RESULTATS
PARTIE 5 : DISCUSSION
1. Les limites de l’étude
2. Des facteurs interactionnels à prendre en compte
2.1. La relation avec les pairs
2.2. La relation avec l’enseignant
3. Pour aller plus loin : d’autres aménagements possibles
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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