OBJECTIF ET APPLICATION DES NOUVEAUX TEXTES FORESTIERS

OBJECTIF ET APPLICATION DES NOUVEAUX TEXTES FORESTIERS

Description du système lignager avant la colonisation

Les organisations sociales des populations forestières de cette zone, avant la colonisation, étaient axées sur les liens de parenté. Ces liens de parenté étaient envisagés à deux niveaux différents.
Le premier niveau est le patrilignage, appelé aussi « grande famille ». Il regroupe entre vingt et trente individus tous descendants d’un ancêtre connu. Ce niveau de parenté est, avant la colonisation, la véritable unité du système lignager. En effet, outre l’unité lignagère, il s’agit d’une unité spatiale puisque le lignage est défini par les membres du hameau qui habitent ensemble. Enfin, le lignage représente une unité politique puisque ses membres reconnaissent une certaine autorité au chef du lignage pour la prise de décision et la résolution des conflits.
Le Patrilignage est patrilocal et exogame. Cela signifie que les hommes restent toute leur vie au sein du groupe mais pour se marier, ils doivent aller chercher une femme d’un autre patrilignage.
Enfin, le clan est constitué de patrilignages ayant un ancêtre commun sans qu’il soit toujours possible d’établir un lien avec lui. Contrairement au patrilignage ce niveau n’a aucune structure politique. Il n’apparaît réellement en tant que groupe que quand le clan doit s’unir face à une menace commune, et même en ces cas, chaque lignage conserve une certaine autonomie de décision.
Si le patrilignage est exogame, le clan est endogame c’est-à-dire que tous les mariages doivent s’effectuer au sein du clan. Ces alliances de mariage fondent la cohésion du clan, de surcroît, les membres du clan doivent rester en contact pour pouvoir se marier.
Plusieurs caractéristiques peuvent être attribuées à ce système. La première concerne l’organisation politique. « Les populations de l’Est-Cameroun peuvent être qualifiées, selon divers termes utilisés au sein de la littérature anthropologique, de sociétés à « pouvoir noncoercitif », « égalitaires », « segmentaires », « non corporate », « acéphales » ou « multicéphales » » (Takforian, 2001).
En effet comme nous venons de le voir le pouvoir est atomisé, chaque patrilignage représente une unité de décision indépendante des autres. De plus, chaque chef de foyer conserve toute liberté de décision par rapport au chef de lignage. Son pouvoir tient plus de l’autorité morale, elle est basée sur la reconnaissance de sa capacité à diriger le groupe et, si des membres du lignage contestent cette autorité, le chef peut être destitué et remplacé par un autre jugé plus apte.
Enfin une autre caractéristique de ce système est sa fluidité et sa souplesse. Ainsi, les lignages peuvent à tout moment se scinder en deux ou accueillir de nouveaux membres. Par exemple, un chef de foyer refusant l’autorité du chef de lignage peut quitter le patrilignage avec d’autres membres ou, inversement, un nouveau membre peut être accueilli dans la famille de sa femme.
Cette forme d’organisation va se voir profondément bousculée par la colonisation à la fin du XX siècle mais elle conservera ses traits fondamentaux d’atomisation du pouvoir, et de fluidité des organisations.

Evolution depuis la colonisation

la création des villages A partir du début du XXème siècle l’administration Allemande (puis française après 1918) impose la sédentarisation de ces populations et le regroupement en villages le long des routes. C’est donc à cette période qu’apparaissent les villages sous leur forme actuelle. Ils sont créés pour recenser la population et surtout organiser l’entretien des routes. La constitution de ces villages se fait par l’unification de patrilignages en un même lieu. Cela dit, les patrilignages sont restés indépendants et se sont installés en « quartiers » qui correspondaient directement aux hameaux précoloniaux. Ainsi les villages représentent, dans les premières années qui suivent leur création, des regroupements en un même lieu de hameaux indépendants.
Par ailleurs, avec la création des chefs de villages comme référents pour l’administration, cette dernière impose une forme d’autorité nouvelle. Néanmoins, la fonction de chef de village a, depuis sa création jusqu’à nos jours, d’avantage un rôle représentation auprès des autorités extérieures qu’un rôle d’autorité dans le fonctionnement interne du village. (Geschiere, 1982).
En sédentarisant les populations forestières, l’administration a stoppé les mouvements fréquents des populations et a ainsi entravé les processus de scission tel qu’ils pouvaient avoir lieu auparavant. De plus, au milieu du XXème siècle, le développement de la culture du café et du cacao a pérennisé cette sédentarisation. Ceci a eu pour effet d’accroître la taille des lignages de façon importante.
Face à l’augmentation de la taille des lignages (et donc des villages) leur morcellement a pris de nouvelles formes. Les individus ne pouvant plus se déplacer pour créer un nouveau lignage, ils se sont organisés en sous groupes que l’on a appelé la famille étendue. Celle-ci est composée d’un chef de foyer et de ses descendants (les hommes) directs (sur deux générations ou plus), de leurs conjointes et d’éventuels individus allogènes ayant été accueillis. Ce nouveau niveau dans le système lignager est en fait une reproduction, quasiment à l’identique du lignage.
Plus récemment, à partir des années 50, à la faveur du développement des cultures de rentes, la famille nucléaire a acquis une autonomie financière et avec elle une relative autonomie politique (Lescuyer 2000 ; Takforyan 2001). Cette prise d’indépendance par rapport au lignage se retrouve dans la répartition spatiale des foyers. La sédentarité n’empêche pas les mouvements au sein du village et, bien que les quartiers lignagers existent toujours, il n’est pas rare qu’une personne quitte son quartier pour aller s’installer dans un autre.
Parallèlement à cette baisse d’influence du lignage, le village qui était à sa création une structure imposée par l’administration coloniale est peu à peu approprié par les villageois.
Il y a plusieurs raisons qui expliquent ce changement. Tout d’abord, comme on l’a déjà dit, la création de champs de cacao et de café a rendu impérative la sédentarité pour les planteurs.
Par ailleurs, dans les villages où cohabitent plusieurs lignages, les liens de mariages se sont petit à petit multipliés et ont renforcé la cohésion du groupe. Enfin, face à la perte d’unité spatiale du lignage, le village pourrait se poser comme une nouvelle unité de résidence.
Un détail illustre combien la sédentarité est devenu le mode de vie usuel. Les individus qui quittent le village pour s’installer seul dans un hameau agricole se font traiter avec mépris de Bakas (l’ethnie pygmée de la zone). Ceci montre combien les représentations ont changé.
L’acceptation de ce mode de résidence se traduit chez les villageois par l’apparition d’un sentiment d’appartenance au village assez fort.
Ainsi, la sédentarisation de ces sociétés forestières a amené deux niveaux d’appartenance, la famille nucléaire comme unité économique et politique et le village comme unité spatiale. Malgré tout, cela ne remet pas en cause l’existence des familles étendues et des lignages, ces dernières sont évoquées au gré des circonstances lors d’épisodes conflictuels. Ainsi la famille étendue se regroupe quand il y a un problème avec un autre membre du lignage, le lignage se regroupe quand il y a un problème dans le village et ainsi de suite.
Cette succincte présentation du système lignager montre combien il est évolutif et complexe. De plus cela tranche avec la vision de la loi qui voudrait ne retenir comme interlocuteur que le chef de village.

Les deux villages d’étude : Gouté et Djémiong

Localisation des villages

Les deux villages étudiés se situent dans la province de l’est à une centaine de kilomètres de Bertoua. Ils sont distants de 13 Km (voir carte ci-dessous). Djémiong est à 35 Km de Mbang où se trouve la SFID qui exploite l’UFA 10-056. Quelques traits majeurs doivent être soulignés en ce qui concerne leur localisation et le reste de la zone.
Un élément majeur distingue ces deux villages : la limite de l’UFA longe la rivière Doumé au nord de la concession forestière à 300 mètres de Gouté tandis qu’elle se situe à près de 3 km de Djémiong. Cette situation est encore davantage marquée pour d’autres villages du canton Boli Lossou, plus près de la Doumé. Bertoua Province de l’est Villages d’étude

Enclavement du canton Boli Lossou

Gouté est sur la route nationale qui mène à Batouri tandis que Djémiong est situé sur la piste entre Mbang et Dimako. Cette dernière est beaucoup plus fréquentée notamment par les grumiers, mais aussi par les bus qui transportent des passagers et par des véhicules personnels. Ceci offre à Djémiong un débouché important et continu pour les produits de l’agriculture, de la chasse, de la pêche, et de la cueillette. De son côté, la route qui passe par Gouté est très peu fréquentée. Mis à part les motos, il n’y a que les véhicules des acheteurs de produits agricoles qui circulent.
Cette situation a été considérablement améliorée par la latérisation de la route en 2005. Ces travaux ont facilité la venue des bayams salams même en saison des pluies ce qui a largement accru la possibilité de commercialisation des produits du village. Cependant, les acheteurs ambulants sont moins réguliers qu’à Djémiong et pratiquent des prix moins intéressants, car ils viennent de Batouri et non de Yaoundé comme c’est le cas de ceux qui viennent à Djémiong.
Cet enclavement du canton Boli Lossou est principalement dû à la présence de la Doumé. Cette rivière, de 30 m de large au niveau de la route entre Bimba et Djémiong gène la venue des Bayams Salams21. Actuellement, il y a un bac sur au niveau de Bimba mais la route qui y mène est très mauvaise. Pour réduire cet enclavement, les villageois du canton demandent la création d’un pont depuis des années.

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Table des matières

LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES 
INTRODUCTION 
I. VERS UNE DECENTRALISATION DE LA GESTION FORESTIERE? 
1. LE CONTEXTE DE LA REFORME FORESTIERE
a. Un contexte international tourné vers la gestion durable des forêts tropicales
b. Une filière génératrice de devises dans un pays en crise
2. OBJECTIF ET APPLICATION DES NOUVEAUX TEXTES FORESTIERS
a. Les nouvelles formes d’exploitation
b. Le domaine forestier permanent (DFP)
c. Le plan d’aménagement
d. La RFA, une redistribution controversée de la rente forestière
3. PRESENTATION DE LA PROBLEMATIQUE
II. CAS DE DEUX VILLAGES DE L’EST CAMEROUN EN PERIPHERIE D’UNE UFA
1. ENVIRONNEMENT NATUREL ET PRINCIPALES ACTIVITES ANTHROPIQUES
a. Une zone forestière rurale de l’est camerounais
b. Le système lignager des sociétés forestières de l’est-Cameroun
2. LES DEUX VILLAGES D’ETUDE : GOUTE ET DJEMIONG
a. Localisation des villages
b. Démographie des villages
c. Une augmentation significative des budgets des foyers
3. SUIVI DES ACTIVITES DE COLLECTE
a. La chasse villageoise
b. Les prélèvements de PFNL
III. IMPLICATION DE CE NOUVEAU MODE D’AMENAGEMENT FORESTIER : VERS
UN SYSTEME PLUS DURABLE ? 
1. UNE COMPETITION ACCRUE POUR L’ACCES A LA TERRE : CONSEQUENCE DE L’INTERDICTION DE
CULTIVER DANS L’UFA OU EVOLUTION DUE AU CONTEXTE GENERAL ?
a. Les modalités d’appropriation de la terre
b. « La forêt va être rare, ça c’est sûr ! »
c. Impact de l’aménagement sur l’accès à la terre
2. UNE CONSEQUENCE INDIRECTE DE L’AMENAGEMENT SUR L’APPROPRIATION DE CERTAINES RESSOURCES DE LA FORET
a. Une application des règles d’accès aux ressources qui évolue au gré des circonstances
b. Des pratiques villageoises globalement peu modifiées directement par l’aménagement
c. Une appropriation des ressources qui suit leur commercialisation
3. ETUDE DE L’IMPACT DE L’AMENAGEMENT SUR LE SYSTEME DE GESTION DANS UN CAS CONCRET :
LA PISTE PRIVEE
a. Les acteurs concernés
b. Histoire de la piste
c. Une situation économiquement avantageuse mais dévalorisée socialement
d. Attribution du foncier sur la piste
4. QUELLE EVOLUTION DES INTERACTIONS ENTRE LA POPULATION ET L’EXPLOITANT ?
a. Une implication des populations locales, pour l’instant, peu perceptible
b. Pour un rapprochement efficace des populations et de l’exploitant forestier
c. Vers une implication réelle des populations locales
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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