Nouvelles formes de l’engagement… Créations participatives au XXIe siècle

L’apparition de nouvelles propositions artistiques et en particulier, celles dites d’art participatif, se multiplie depuis une dizaine d’années. Dans son ouvrage Un Art contextuel. Création artistique en milieu urbain, en situation d’intervention, de participation, Paul Ardenne les présente comme une sous‐catégorie de l’art contextuel :

« Sous le terme d’art « contextuel », on entendra l’ensemble des formes d’expression artistique qui diffèrent de l’œuvre d’art au sens traditionnel : art d’intervention et art engagé de caractère activiste (happenings en espace publics, «manœuvre »), art investissant l’espace urbain ou le paysage (performance de rue, art paysager en situation…), esthétiques dites participatives ou actives dans le champ de l’économie, des médias ou du spectacle».

Mais qu’entend‐on au juste par « art participatif » ? Il n’existe pas une définition précise de cette pratique. On peut toutefois la caractériser comme une forme d’art au sein de laquelle la participation de sujets à l’œuvre d’art est le moteur de la création. La critique d’art Catherine Millet mentionne à propos de l’art participatif des années 70 que :

« D’une façon générale, il s’agissait d’abandonner une conception de l’artiste qui «impose » au public sa vision du monde et de permettre à ce public de s’exprimer lui‐même».

L’artiste paraît envisager une nouvelle conception du rapport qu’il nourrit avec le public. Échange, partage et coopération se veulent les mots d’ordre dans la réalisation d’un projet participatif. Ce processus de création prétend s’adresser au spectateur comme à un être « politique ». L’artiste veut alors rendre le spectateur actif et pour ce faire, il le place au cœur du dispositif. Une telle forme de pratique artistique met en question le rapport passif que le spectateur entretient habituellement avec les œuvres d’art traditionnel. Par conséquent, un nouveau statut entend désigner ce comportement participatif adopté par le public, celui de spect acteur ou d’interacteur. Ces termes peuvent être considérés comme l’avènement d’« une posture « nouvelle » liée à une forme de communication (ou de réception) interactive ». L’évolution des relations entre l’artiste, le public et l’œuvre d’art est abordée par l’artiste polonais Jan Swidzinski, initiateur de l’art contextuel. Ce dernier affirme effectivement que l’art de créer s’est modifié au contact de l’Autre :

« L’art a cessé de constituer des modèles autoritaires de création pour l’Autre. À travers le contact avec l’Autre, il nous informe sur la nécessité de développer nos propres modèles. Être artiste aujourd’hui, c’est parler aux autres et les écouter en même temps. Ne pas créer seul mais collectivement».

Créer une œuvre d’art sur un mode participatif sous‐tend que le public, qui endossait jusqu’à présent le rôle de regardeur, a le choix de s’engager ou non dans le processus. L’engagement du public aura alors une influence directe sur la relation singulière que va établir l’artiste lors de la proposition de son projet aux sujets rencontrés. Cela laisse à penser que l’artiste aspire à une implication totale du public, par la capacité à la fois créatrice et sensible mise en avant. Cependant, l’investissement des sujets agissants s’opère‐t‐il de manière consciente ou inconsciente ? L’artiste laissent‐ils ses partenaires s’exprimer et agir librement dans l’entreprise créative ou en revanche, servent‐ils uniquement ses fins personnelles de plasticien ? Selon Jean‐Marc Poinsot, la production d’une œuvre dépend de la constitution d’un « contrat iconographique » entre le public et l’artiste. Cet historien d’art contemporain ajoute que « par des projets ou des annonces les artistes s’engagent sur les idées, les caractéristiques, les composantes et autres traits d’une œuvre à réaliser ». L’artiste est ainsi censé avoir une attitude discursive avec le public afin que ce dernier se joigne au processus créatif. L’œuvre semble devenir alors dépendante d’un échange entre « explication » et « négociation » donnant lieu à un dialogue interactif dans lequel apparaît une « coresponsabilité de l’œuvre ». Cette relation discursive, semble être à la fois le mode par lequel l’œuvre est produite par le public avec et/ou pour l’artiste mais également, le mode par lequel le public construit sa compréhension de l’œuvre. Ce lien, susceptible d’être altéré à tout moment, peut‐il remettre en cause de la possibilité même de l’œuvre ? Comprendre les enjeux artistiques, pragmatiques et humains dans la réalisation d’une œuvre d’art participative au XXIe siècle, tel est le but de cette recherche à travers les œuvres Pictures of Garbage de Vik Muniz et Women Are Heroes de JR. En effet, ces deux artistes contemporains ont décidé de sortir l’art de l’institution muséale. Ils souhaitent toucher un public qui n’a pas accès à la culture. C’est pourquoi, ils désirent réaliser leur projet, l’un comme l’autre, dans des « non‐lieux » de grandes villes de pays en voie de développement, où l’art ne parvient pas à s’introduire. Ils veulent également tous deux sortir de l’anonymat des communautés éprouvées par leur condition de vie pour leur conférer une identité sociale. « C’est dans l’anonymat du non‐lieu que s’éprouve solitairement la communauté des destins humains ». Toutefois, bien qu’ils partagent un but commun, leur démarche artistique diverge sur les motivations à l’origine de leur projet respectif et sur leur apparence formelle.

Le point de départ de Vik Muniz est basé sur un aspect matériel caractérisant l’œuvre. Il envisage d’utiliser un médium qui n’est pas traditionnel, puisqu’il s’agit d’ordures, pour créer son œuvre. La recherche d’objets recyclables le conduit finalement à transformer son projet initial en projet participatif puisque son but ultime est de changer l’existence des trieurs de déchets par le biais de l’art. En revanche, le travail de JR se caractérise par l’affichage de portraits féminins gigantesques définissant l’œuvre. Il cherche à mettre en lumière les habitantes de bidonvilles africains, asiatiques, et hispano‐ américain, ignorées par les politiques en place. Il désigne ces femmes comme étant les piliers de leur communauté, et prétend personnifier les derniers liens sociaux de ces « non‐lieux » par la fragmentation des portraits féminins ainsi exposés. C’est pourquoi, l’art comme participation se voudra d’abord l’analyse des entreprises créatives de Vik Muniz et de JR. Il sera question d’examiner, par un regard croisé, comment ces deux artistes, parviennent à prendre part au monde réel et à solliciter la participation active du public dans la production de l’œuvre. Il s’agira ensuite d’étudier l’inclusion des créations participatives dans l’espace public. Pour ce faire, la notion de « limite » sera appréhendée à travers son caractère polysémique. En effet, faut‐il délimiter l’œuvre ou bien, rechercher ce qui fait obstacle à la réalisation de l’œuvre ? Enfin cette étude tentera de comprendre pourquoi Vik Muniz et JR partagent le besoin d’inscrire leurs travaux dans le temps et comment les œuvres de ces deux artistes sont perçues par le public, relevant ou non, de la participation au projet .

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Table des matières

I. CRÉATIONS PARTICIPATIVES EN REGARD CROISÉ
A. LE RÉEL INVESTI
1. Objectif « réalité »
2. L’événementiel au service de la création
B. LE SOCIAL IMPLIQUÉ
1. L’immersion de l’artiste dans la collectivité
2. La communauté au service de la création
C. L’EXPÉRIMENTATION ARTISTIQUE
1. Le protocole
2. Le souci gestionnaire
3. La surenchère sociale
II. « DÉ‐LIMITATIONS » DE L’ŒUVRE
A. CRÉATION ET ESPACE PUBLIC
1. L’œuvre in situ
2. L’œuvre dans sa temporalité
B. « DOUBLE LIMITATION » DE L’ŒUVRE
1. Œuvre « sous la menace »
2. Obstacle à la création
III. RÉCEPTION DE L’ŒUVRE
A. PERMANENCE DE L’ŒUVRE
1. La photographie au service de la trace
2. Le témoignage vidéographique
B. RÉPERCUSSION ARTISTIQUE ET SOCIALE
1. L’œuvre et sa perception esthétique
2. L’œuvre et son impact social

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