Nouvelle métrologie large bande à grande dynamique pour la mesure des flux

Rappels historiques

   Pendant la seconde guerre mondiale, de nombreux efforts ont été déployés pour comprendre les mécanismes régissant la diffusion d’une onde radar par une cible. Ceci a conduit, quelques années après la fin de ce conflit, à la première publication présentant le modèle scalaire de la diffusion lumineuse [1]. Ce modèle, développé par H. Davies, était notamment utilisé pour quantifier l’importance des échos parasites renvoyés par la surface de la mer sur un écran radar (sea clutter). Il supposait que cette surface pouvait être décrite par un modèle statistique respectant les hypothèses suivantes :
1. La moyenne quadratique σ de l’écart z = h(x, y) entre la surface de la mer et une surface plane moyenne est petite devant la longueur d’onde λ de l’onde radar,
2. La surface est parfaitement conductrice, et par conséquent, présente un coefficient de réflexion spéculaire de 100% dans le cas où elle est dépourvue de toute irrégularité,
3. La distribution des irrégularités de surface z correspond à une gaussienne centrée,
4. La fonction d’auto-corrélation de la surface irrégulière est elle aussi de nature gaussienne et caractérisée par un écart-type a.

Modèle électromagnétique de la diffusion

Introduction L’utilisation d’un modèle électromagnétique pour décrire la diffusion de la lumière par une surface rugueuse [11–16] présente de nombreux avantages :
• Il donne accès à la diffusion angulaire, aussi bien dans le plan d’incidence qu’en dehors de ce plan,
• Il prend en compte les effets de polarisation des faisceaux incidents et diffusés,
• Il permet de relier la répartition angulaire de la lumière diffusée à la topographie de la surface,
• Il peut être étendu à la description de la diffusion angulaire dans des systèmes multicouches.
Notons également que ce modèle a été étendu au cas des volumes diffusants [11, 17–19], même si la diffusion volumique est ici hors de notre propos.

Influence de la complexité des empilements

   Pour une fonction de filtrage donnée, la formule choisie lors de la synthèse de l’empilement peut présenter une complexité qui va croitre avec le niveau d’exigence spécifié sur certaines de ses performances. Celles-ci concernent notamment le niveau demandé de réjection hors bande et la pente tolérée sur la chute de transmission entre partie passante et partie bloquante. On peut illustrer cet effet on considérant un filtre bande étroite centré à 633 nm et dont la largeur de bande est de 20 nm. On présente, en Figure 2.10, 3 fonctions de filtrage qui répondent à cette définition avec un niveau de performances croissant : un Fabry-Perot simple cavité (14 couches) noté F1, un Fabry-Perot multicavités (60 couches) noté F2, et enfin, un Fabry-Perot multicavités avec ajout de filtres bloqueurs pour augmenter la largeur spectrale de la zone de réjection (110 couches). Ce dernier filtre sera noté F3. Ces fonctions de filtrage sont classiques dans les composants optiques de pointe et les réponses spéculaires des composants effectivement réalisés présentent en général un excellent accord entre la performance synthétisée et les coefficients spéculaires mesurés. Intéressons-nous maintenant à la réponse en diffusion de chacune de ces fonctions de filtrage. Pour ce faire, nous allons calculer la dépendance spectrale et angulaire des indicatrices de diffusion correspondant à ces différents filtres en supposant que ceux-ci ont été déposés sur le même substrat S1 que précédemment et que les interfaces qui les constituent sont toutes fortement corrélées. Ces indicatrices sont tracées en polarisation S (Figure 2.11) et en polarisation P (Figure 2.12). Ces quelques modélisations mettent en évidence le fait que, pour des fonctions de filtrage dites simples (typiquement moins de 40 couches), la dépendance spectrale de l’intensité diffusée suit la logique décrite dans le cas des composants classiques. La dépendance angulaire est continument décroissante avec une forme générale imposée par le spectre de rugosité du substrat. A l’inverse, lorsque la formule de l’empilement se complexifie, les indicatrices de diffusion ne sont plus angulairement monotones et ne suivent pas directement la réponse spectrale spéculaire. En conséquence, sur les structures à nombre d’interfaces élevé, la répartition des pertes par diffusion lumineuse est très complexe et présente des exaltations angulaires ou spectrales appelées lobes de diffusion. On peut voir à la Figure 2.13 un exemple de lobe angulaire de diffusion qui apparait aux grands angles à la longueur de centrage du filtre (c’est-à-dire dans sa partie passante). Ce type de remontée aux grands angles est particulièrement problématique dans le cas de composants microstructurés puisqu’il est potentiellement générateur de diaphoties (ou de crosstalks, pour utiliser la terminologie anglaise). En effet, comme illustré Figure 2.14 par une modélisation de la répartition spatiale tridimensionnelle de la lumière diffusée à différentes longueurs d’onde, les lobes de diffusion enregistrés aux grands angles sont susceptibles de venir éclairer les pixels adjacents et d’en parasiter ainsi la mesure. Ce phénomène de diaphotie peut également être spectral. En effet, si on calcule, pour chacun des trois filtres, la valeur du TS dans le demi-espace transmis comparé au coefficient de transmission spéculaire, on peut voir que dans la bande de réjection du filtre, le niveau de lumière diffusée est supérieur à celui de la lumière transmise, ce qui soulève des interrogations sur l’utilisation pratique d’un tel filtre, et ce, dès le filtre F2. A la vue du résultat de ces modélisations numériques, on comprend bien l’enjeu qui réside dans une meilleure compréhension des phénomènes de diffusion dans les filtres interférentiels complexes. Cet intérêt est particulièrement fort dans le cas des applications spatiales, car ce secteur est l’un des plus exigeants en termes de performances opérationnelles, notamment en ce qui concerne le niveau de lumière parasite toléré. Les quelques exemples que nous venons de présenter ont permis de mettre en évidence la complexité des dépendances spectrale et angulaire de ces indicatrices de diffusion. Pour pouvoir espérer à terme en maitriser la structure, il est donc nécessaire de développer une métrologie adaptée à ce type de problématique et dont on puisse garantir la précision avant de pouvoir envisager de l’utiliser pour rétroagir sur les choix de fabrication. Le développement d’un tel moyen optique de caractérisation constitue le cœur de notre travail de thèse, et c’est à la description détaillée de sa structure que sera consacré le prochain chapitre. Compte tenu de l’objectif général assigné à ce montage (enregistrement des variations de l’intensité diffusée par un filtre optique interférentiel en fonction de l’angle de diffusion et de la longueur d’onde d’éclairage), nous le désignerons désormais sous l’acronyme générique SALSA, pour Spectral and Angular Light Scattering characterization Apparatus.

Collimateurs à miroirs et fibres optiques de liaison

   Dans un montage comme le notre, l’utilisation de fibres optiques présente le double avantage de limiter les sources de lumière parasite et de simplifier la gestion des interfaces optiques entre partie fixe et partie mobile. Nous avons donc choisi d’utiliser des fibres optiques pour déporter le sous-ensemble d’éclairage et le sous-ensemble de détection. Seuls position fixe, et le collimateur de reprise (RRC), placé sur un bras tournant. Ceci permet de dégager au maximum la zone de mesure tout en l’isolant optiquement du reste du montage, mais soulève deux questions critiques qui sont le choix des fibres et celui des systèmes optiques chargés de l’injection de la lumière dans ces fibres ou de la collimation du flux lumineux en sortie de celles-ci. Le faisceau lumineux délivré par le sous-ensemble d’éclairage étant un faisceau gaussien monomode d’environ 1 mm de waist, il est nécessaire d’utiliser un premier système optique (noté ORC) pour le focaliser dans une fibre (notée FOL1) dont le diamètre de cœur doit permettre de disposer de tolérances d’alignement aisément accessibles, compatibles avec les stabilités de pointé du faisceau d’éclairage, tout en conservant à celui-ci une étendue géométrique aussi faible que possible. Cette fibre sera ensuite reliée au collimateur d’éclairage TRC évoqué plus haut et la lumière transmise, réfléchie ou diffusée par l’échantillon sera récupérée par le système optique de réception RRC au foyer duquel sera placée l’extrémité d’une seconde fibre optique (notée FOL2), dont la sortie sera raccordée à l’interface optique du sous-ensemble de détection. Les trois systèmes optiques utilisés (ORC, TRC et RRC) doivent être exempts d’aberrations géométriques et présenter un fonctionnement achromatique sur l’ensemble de la gamme spectrale d’intérêt [400 nm – 1000 nm]. Pour couvrir une plage spectrale d’une telle largeur, il est indispensable d’avoir recours à des systèmes optiques de type catoptrique (c’est-à-dire n’utilisant que des miroirs). Il est en effet difficile, sauf à se tourner vers des objectifs de microscope de coût très élevé, de trouver des systèmes optiques présentant à la fois, sur une telle plage de longueurs d’onde, une ouverture numérique comparable à celle de fibres optiques standard (soit de l’ordre de 0,22), une qualité optique satisfaisante, une transmission élevée (en pratique supérieure ou égale à 80%) et un faible chromatisme axial. Les collimateurs réflectifs que nous avons retenus sont fabriqués par la société Thorlabs et commercialisés sous la référence générique RCxxSMA-P01 et RCxxFC-P01, les initiales RC correspondant à Reflective Collimator, les initiales SMA ou FC au type de connexion à fibre utilisée et la lettre P à celle du traitement réfléchissant apposé sur les miroirs, à savoir une argenture protégée. Le mot numérique désigné par la notation xx peut prendre pour valeur 02, 04, 08 ou 12 en fonction de celle du diamètre du faisceau collimaté exprimé en millimètres et que délivre le composant lorsqu’il est utilisé avec une fibre optique d’ouverture numérique 0,13. Une photographie du collimateur à miroir de référence RC12SMA-P01 est placée pour illustration à la partie gauche de la Figure 3.10. Sur la partie droite de cette même Figure 3.10, nous avons placé un schéma de principe du fonctionnement de ce collimateur : il utilise un miroir parabolique hors d’axe dont le foyer se trouve positionné dans le plan d’accostage du connecteur à fibre employé.

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Table des matières

1 Caractérisation d’une surface par analyse de la lumière diffusée
1.1 Rappels historiques
1.2 Grandeurs photométriques
1.2.1 BSDF
1.2.2 Diffuseur Lambertien
1.2.3 TIS
1.2.4 ARS
1.3 Grandeurs géométriques
1.3.1 Caractéristiques statistiques d’une surface rugueuse
1.3.2 Spectre de rugosité
1.3.3 Bande passante
1.4 Modèle électromagnétique de la diffusion
1.4.1 Introduction
1.4.2 Champs diffusés
1.4.3 Paquets d’ondes planes associés aux champs diffusés
1.4.4 Composantes élémentaires des champs diffusés
1.4.5 Influence de l’état de polarisation de la lumière
1.4.5.1 Cas SS
1.4.5.2 Cas PP
1.4.5.3 Cas SP
1.4.5.4 Cas PS
1.4.6 Puissances diffusées, Indicatrices de diffusion
1.4.6.1 Généralités
1.4.6.2 Cas SS
1.4.6.3 Cas PP
1.4.6.4 Cas SP
1.4.6.5 Cas PS
1.4.6.6 Représentations graphiques
1.4.6.7 Cas particulier important
1.4.7 Extraction du spectre de rugosité
2 Phénomènes de diffusion dans les filtres optiques interférentiels
2.1 Problématique
2.2 Extension du modèle électromagnétique de la diffusion au cas des systèmes multicouches
2.3 Exemples d’indicatrices de diffusion
2.3.1 Substrat
2.3.2 Miroir quart d’onde
2.4 Influence de la complexité des empilements
3 SALSA : un diffusomètre spectralement et angulairement résolu
3.1 Définition des spécifications métrologiques
3.2 Pré-définition de l’instrument
3.3 Description des éléments clés de l’instrument
3.3.1 Sous-ensemble de détection
3.3.1.1 Caméra CCD scientifique faible bruit
3.3.1.2 Interface optique de détection
3.3.2 Sous-ensemble d’éclairage
3.3.2.1 Source à supercontinuum
3.3.2.2 Filtre accordable
3.3.2.3 Caractérisation du sous-ensemble d’éclairage
3.3.3 Collimateurs à miroirs et fibres optiques de liaison
3.3.3.1 Collimateur de couplage ORC et fibre de liaison FOL1
3.3.3.2 Collimateur d’émission TRC
3.3.3.3 Collimateur de réception RRC et fibre de liaison FOL2
3.4 Montage SALSA 1
3.4.1 Présentation générale
3.4.2 Présentation détaillée
3.4.2.1 Voie Référence
3.4.2.2 Jeu de densités optiques
3.4.2.3 Obturateur externe
3.4.3 Principe général de fonctionnement
3.4.3.1 Description synthétique de l’instrument
3.4.3.2 Fonctionnement de la voie Mesure
3.4.3.3 Fonctionnement de la voie Référence
3.4.3.4 Asservissement de niveau et gestion de la dynamique
3.4.3.5 Interface Homme/Machine
3.4.3.6 Choix de la cadence de numérisation
3.4.4 Qualification métrologique de l’instrument SALSA 1
3.4.4.1 Résolution angulaire
3.4.4.2 Rapport Signal à Bruit
3.4.4.3 Dynamique
3.4.4.4 Justesse
3.5 Montage SALSA 2
3.5.1 Diaphotie spectrale
3.5.2 Introduction d’un étage additionnel de filtrage
3.5.2.1 Monochromateur Shamrock
3.5.2.2 Pureté spectrale
3.5.2.3 Résultats expérimentaux
3.5.3 Description du montage SALSA 2
3.5.3.1 Sous-ensemble de détection
3.5.3.2 Acquisition et pré-traitement du signal
3.5.3.3 Traitement des données
3.5.4 Qualification métrologique de l’instrument SALSA 2
3.5.4.1 Rapport Signal à Bruit
3.5.4.2 Dynamique
3.5.4.3 Justesse et résolution spectrale
3.6 Mesures de diffusion
3.6.1 Calibration
3.6.2 Signature de l’instrument
3.6.2.1 Présentation générale
3.6.2.2 Modélisation numérique de la signature expérimentale
3.6.2.3 Prédiction d’un résultat expérimental
3.6.3 Exemples de mise en œuvre sur des composants simples
3.6.3.1 Miroir quart d’onde
3.6.3.2 Absorbeur de lumière
4 Caractérisation de filtres optiques complexes
4.1 Transmission spectrale de filtres interférentiels complexes
4.1.1 Filtre de notch
4.1.2 Filtres bord de bande
4.1.2.1 Filtre passe-bas
4.1.2.2 Filtre passe-haut THORLABS
4.1.2.3 Filtres à forte raideur de pente ou NanoEdge
4.1.3 Filtres pour l’imagerie multispectrale
4.1.4 Conclusion partielle
4.2 Diffusion spectrale et angulaire par des filtres interférentiels complexes
4.2.1 Lobes angulaires de diffusion
4.2.2 Oscillations spectrales de diffusion
4.2.3 Analyse spectralement résolue de la lumière diffuse
4.2.4 Métrologie spectralement et angulairement résolue de la lumière
diffuse
4.3 Synthèse

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