Nouveaux matériaux cellulosiques ultra-poreux et leurs carbones à partir de solvants verts

Les travaux que nous avons effectués au travers de cette thèse s’inscrivent dans un contexte économique, politique et environnemental dont nous exposons les grandes lignes. Une prise de conscience mondiale est apparue renforcée ces dernières années sur la diminution des réserves pétrolières et du problème engendré par notre dépendance aux ressources d’origine fossile. Bien que les informations divergent selon les sources, de nombreux experts s’accordent à prédire que les réserves de pétrole à un prix acceptable auront disparu d’ici une cinquantaine d’années. Notre dépendance au pétrole est d’abord énergétique. La quasi-totalité des moyens de transport et un grand nombre d’industries utilisent cette ressource énergétique. De plus, le réchauffement climatique planétaire, dont les effets deviennent perceptibles et inquiétants (fonte des glaces, sécheresse, incendies gigantesques…), sont attribués en majeure partie aux rejets de gaz à effets de serre par une très grande majorité des experts en climatologie. Ces gaz sont très largement rejetés dans l’atmosphère par la combustion de carburants issus du pétrole.

Dans l’optique de sortir de cette dépendance énergétique, et de ses effets néfastes sur l’environnement, de nombreux travaux de recherche se sont multipliés ces dernières années pour développer des sources d’énergies alternatives : l’éolien, le photovoltaïque, les biocarburants, les moyens de conversion et de stockage d’énergie (les piles à combustible, les supercondensateurs)… Parmi ces sources d’énergies alternatives, certaines font l’objet de débats passionnés : l’éolien pour la détérioration du paysage, les biocarburants dont certaines formes sont directement en compétition avec l’agriculture paysanne. Sortir du pétrole du point de vue énergétique est donc un problème très complexe et d’actualité. Si nous sommes dépendants du pétrole d’un point de vue énergétique, nous le sommes également pour la confection de très nombreux matériaux issus de polymères. Les polymères synthétiques sont tous issus du pétrole. Bien que la proportion de pétrole destinée à la fabrication de matériaux polymères soit bien inférieure à celle destinée aux  carburants, la raréfaction des ressources fossiles engendrera tôt ou tard des manques. C’est pour cela que le nombre de travaux visant à substituer les matériaux issus d’origine fossile par des matériaux issus de ressources renouvelables grandit. La biomasse est une source renouvelable de matière considérable, groupant de nombreux polymères naturels potentiellement capables de remplir cette mission de substitution. Parmi ceux-ci, la cellulose est un candidat présentant des propriétés très attractives notamment par son abondance: c’est la substance la plus répandue sur terre (sa production se chiffre à plusieurs dizaines de milliards de tonnes par an) .

La cellulose est déjà utilisée pour de nombreuses applications telles la fabrication de papier, d’éponges, de films de conservations, de tissus… Les techniques de mise en forme de la cellulose utilisées industriellement sont très bien maitrisées depuis une centaine d’années. Cependant, les procédés de dissolution (viscose) utilisés à ce jour ne sont pas du tout respectueux de l’environnement. Ils font appel à des procédés chimiques (NaOH très concentré) et rejettent du disulfure de carbone dans l’atmosphère, un produit hautement toxique. C’est pourquoi, de nombreux travaux ont vu le jour ces 10 dernières années pour chercher des solvants propres. Parmi ceux-ci, nous avons retenu une solution aqueuse NaOH faiblement concentrée ou encore une nouvelle classe de solvant : les liquides ioniques. Un nouveau matériau constitué de cellulose, l’Aérocellulose, a vu le jour il y a quelques années au Centre de Mise en Forme des Matériaux, suite aux travaux de Roxane Gavillon. Il est très léger du fait de sa grande porosité, (micro et mésoporeux), biodégradable, et il est issu d’un solvant peu polluant, NaOH 8%. La mise en forme de ce matériau est relativement aisée dont voici le procédé simplifié établit par R Gavillon:
• La dissolution : la cellulose est dissoute dans le solvant NaOH 8%
• La gélification : la solution de cellulose/NaOH8% est coulée dans un moule adapté à la forme finale souhaitée. Le système gélifie dans le temps et adopte la forme du moule.
• La régénération : le gel est démoulé dans un bain contenant un coagulant (non solvant de la cellulose). Le solvant NaOH8% est évacué de l’objet par différence de concentration. L’objet cellulosique est gonflé dans le coagulant. Le coagulant occupe les pores créés lors de la régénération.
• Le séchage supercritique : L’objet en cellulose régénérée est séché par extraction au CO2 supercritique. Ce mode de séchage permet d’évacuer le coagulant contenu dans les pores de l’objet tout en conservant la porosité. L’objet résultant est l’Aérocellulose.

Le procédé d’élaboration d’aérocellulose et d’aérocellulose pyrolysé 

La dissolution

La première étape est la dissolution de la cellulose dans un solvant. Des aérocelluloses ont été élaborés à partir du solvant NMMO par Innerlohinger [Innerlohinger 2006], du solvant NaOH 8% par Gavillon [Gavillon 2007] ou d’un solvant liquide ionique (EMIMAc) par nos soins. La méthode de dissolution est différente selon chaque solvant. Le procédé sera plus rapide si le mélange cellulose/liquide ionique est chauffé pendant la dissolution; il sera en revanche nécessaire de chauffer et de baisser la pression pour dissoudre dans la NMMO et de refroidir pour dissoudre dans NaOH8%.

La mise en forme 

L’étape suivante est la mise en forme de la cellulose. Selon la forme finale désirée, plusieurs techniques peuvent être utilisées. Pour obtenir des billes sphériques de quelques millimètres de diamètre, il est possible de laisser tomber une goutte de solution de cellulose dans le bain de régénération si les paramètres sont choisis de manière adéquate [Sescousse 2010] [Innerlohinger 2006]. Pour obtenir des billes plus petites, de 400 à 1200 μm, une technologie « Jet cutter » a été employée par Prusse [Prusse 2000]. Cette technique consiste à couper un jet continu de solution de cellulose par le moyen de roues tranchantes tournant à grande vitesse. Les éléments coupés du jet forment des micro-sphères et chutent dans le bain de régénération. Pour réaliser des objets tridimensionnels de plus grande taille, les solutions de cellulose sont coulées dans un moule. Dans le cas des solutions de cellulose dans NMMO ou dans le liquide ionique BMIMCl, les solutions dans leur moule peuvent être cristallisées à température ambiante avant d’être démoulées dans le bain de régénération. Dans le cas des solutions de cellulose/NaOH8%, les solutions dans leur moule peuvent être gélifiées, puis démoulées dans le bain de régénération. Les solutions de cellulose/EMIMAc ne gélifient pas et ne cristallisent pas. Pour garder la forme du moule dans lequel elles ont été coulées, le système entier (moule+solution) doit être plongé dans le bain de régénération. La régénération s’effectue à travers les surfaces libres (en contact avec le coagulant) du moule.

La régénération

L’étape qui vient immédiatement après la mise en forme est la régénération. Lorsque le gel de cellulose/NaOH8%/eau ou la solution liquide de cellulose est plongé dans un bain de non-solvant (ou coagulant) de la cellulose (ex : eau, acide, alcool…), il apparaît un phénomène de séparation de phase. Le solvant contenu dans la solution ou le gel diffuse vers le coagulant. Parallèlement, le coagulant diffuse vers la solution ou gel de cellulose. Le résultat après coagulation est que les chaînes de cellulose sont rassemblées localement et créent un « réseau » poreux de cellulose gonflé dans le non-solvant utilisé comme coagulant tandis que le solvant a été extrait de la solution ou du gel. Ce procédé est utilisé pour la fabrication de membranes de polymères en solution (cf§.IV.1).

Le séchage 

Deux méthodes de séchage de la cellulose régénérée permettent d’extraire le liquide non solvant contenu dans les pores sans que la structure du gel ne soit altérée: il s’agit du séchage par fluide supercritique (CO2) et du séchage par cryodessiccation. Ces méthodes permettent d’éviter l’effondrement des pores les plus étroits contrairement à un séchage par évaporation. Ces méthodes seront détaillées dans la section V. Le matériau obtenu après extraction du coagulant est l’aérocellulose.

La pyrolyse 

Enfin, la pyrolyse de l’aérocellulose permet d’obtenir un réseau poreux de carbone dont la structure sera intimement liée à son précurseur aérocellulose. Pendant la pyrolyse sous gaz neutre, une grande proportion d’atomes d’oxygène et d’hydrogène, et une faible proportion de carbone sont évacuées sous diverses formes gazeuses. Le matériau final est composé de 90 à 95% de carbone, d’environ 1% d’hydrogène et de 3 à 4% d’oxygène.

La Cellulose : Origines et propriétés 

Hormis les impuretés issues du solvant ou du coagulant qui peuvent subsister à l’état de trace, la cellulose est l’unique composant du matériau final, l’aérocellulose. La cellulose est également la matière première de ce matériau. C’est pourquoi, nous avons tenu à exposer quelques généralités sur la cellulose, de son origine et de ses propriétés physico-chimiques.

Origine et biosynthèse de la cellulose

La cellulose est le polymère naturel le plus abondant sur terre. Son rendement se chiffre à plusieurs dizaines de milliards de tonnes par ans. C’est le composant principal des végétaux (bois, coton, plantes vertes) et de certaines bactéries. Son abondance offre une ressource de matière quasiinépuisable.

La cellulose, comme l’amidon, est fabriquée naturellement dans les plantes par photosynthèse. Pour se développer, elle a besoin uniquement d’eau, de dioxyde de carbone et de la lumière du soleil.

Conformation
La chaîne cellulose est un homopolymère linéaire dont les unités AGU sont dans un même plan. Cette géométrie s’explique par la conformation moléculaire :
– Les jonctions entre les AGU s’effectuent par des liens trans (ou β) ce qui donne à la molécule une géométrie linéaire et étirée. Dans le cas où les liens seraient cis (ou α), la molécule adopterait une conformation hélicoïdale, comme l’amylose, composé de l’amidon.
– Le cycle pyranose adopte une conformation chaise car c’est la conformation la plus stable thermodynamiquement. Il existerait cependant selon Atalla [Atalla 1987], une faible proportion de conformation bateau et oblique parmi les unités glycosidiques.
– Les 3 fonctions hydroxyles (2 alcools primaires en position C2 et C3 et un alcool secondaire en position C6) sont sur le plan équatorial par rapport au plan du cycle. Cette conformation serait prédominante pour l’ensemble des cycles pyranoses d’après Michell et Higgins [Michell 1965].

Cette géométrie permet aux molécules de s’entasser très près les unes des autres formant une structure compacte et très ordonnée. Les fonctions hydroxyles des AGU favorisent les liaisons hydrogènes intra et intermoléculaires entre les alcools ou entre les alcools et les oxygènes d’autres AGU. L’ordre entre plusieurs molécules de cellulose, et donc la cristallinité peut s’agencer selon plusieurs géométries (polymorphes) que nous détaillerons plus loin. La cristallinité est l’un des facteurs limitant de la dissolution de la cellulose dans les solvants usuels.

Taille des chaines
L’unité répétitive de la cellulose est la cellobiose. Or selon différents schémas provenant de différentes sources, certains auteurs adoptent que l’unité de répétition est la molécule AGU, ce qui est vrai d’un point de vue chimique mais pas d’un point de vue conformationel. Afin de lever la confusion, il est utile de dire que le degré de polymérisation (DP) est celui du nombre de répétitions du motif élémentaire de la molécule AGU, et non de la cellobiose . La masse molaire d’un AGU (C6H10O5) est 162 g/mol. La masse moléculaire moyenne d’une chaine de cellulose est donc 162 x n. La technique la plus employée pour déterminer le DP est la détermination de la viscosité intrinsèque. La valeur du degré de polymérisation varie selon les sources de cellulose et des traitements associés pour l’extraction de celle-ci.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I-ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE II-VISCOSITE DES SOLUTIONS DE CELLULOSE DANS UN LIQUIDE IONIQUE: EMIMAC
CHAPITRE III-CINETIQUE DE REGENERATION DE LA CELLULOSE A PARTIR DE CELLULOSE/NAOH8% ET CELLULOSE/LIQUIDES IONIQUES
CHAPITRE IV-CARACTERISATION DES AEROCELLULOSES ET DES AEROCELLULOSES PYROLYSES
CHAPITRE V-APPLICATIONS DES MATERIAUX CELLULOSE REGENEREE ET AEROCELLULOSE PYROLYSE
CONCLUSION 
PERSPECTIVES
ANNEXES

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