Nature, place et fonction de l’élevage en milieu urbain

Un développement de l’élevage urbain possible grâce à une demande sociale de nature

   Afin de comprendre les spécificités de l’élevage en ville, il est impératif d’analyser le contexte dans lequel s’insère cette activité agricole. En effet, le développement d’initiatives d’agriculture dans le tissu intra-urbain n’est pas une évidence dans les pays du Nord, elle s’explique notamment par les rapports ambigus qu’entretiennent la ville et la nature. Alors que plus de 50 % de la population mondiale vit en milieu urbain, les désirs de nature des citadins n’ont jamais été aussi forts. Cette nature fantasmée, apparait dans l’imaginaire urbain, comme l’illustration de la liberté et de la beauté (in Bourdeau-Lepage, Torre 2013) en opposition avec une ville policée, polluée et minée par les tensions sociales. De plus, la prise de conscience des problèmes environnementaux actuels n’ont fait qu’exacerber ce sentiment et ont motivé la mise ne place de politiques urbaines visant à bâtir la « ville durable ». Cette reconnexion avec la nature répond à une demande sociale. En effet, au-delà de la fonction paysagère et environnementale, elle permet la création de lieux de loisir mais aussi de pratiques sportives. La nature en ville est aussi une opportunité pour créer des aménités. Elle est une source de bien-être, mais aussi d’inspirations artistiques et spirituelles, comme tendent à le montrer certaines études (Konijnendijk, et al. 2013). Ainsi, ce besoin de nature s’est toujours satisfait de multiples manières. Pour une partie de la population, majoritairement occidentale, ce désir s’est matérialisé par la création de nombreux espaces verts et la mise en place d’une gestion différenciée. Les cités jardins sont une réponse à la demande de nature. Cette traduction de « Garden city » terme introduit par Sir Ebenezer Howard dans son ouvrage To-morrow : a peaceful path to real reform, désigne une ville aux dimensions limitées construite dans un cadre rural et qui vise à offrir une alternative aux grandes villes et aux banlieues industrielles. En France, le concept de « cité-jardin » est repris par HenriSellier qui entre 1919 et 1939 était à la fois ministre et maire de Suresnes. Dans le contexte hexagonal, les cités jardins désignent des quartiers nouveaux qui sont bâtis à des fins sociales dans des communes de l’ancien département de la Seine. Sellier a pour idée de construire des villes moyennes afin de décongestionner la capitale. Ainsi dans les années 30 pas moins de 15 cités jardins sont construites offrant plus 20 000 logements. Les plus importantes se situent à Suresnes, Plessis-Robinson, Stains, Drancy et Pré-Saint-Gervais. Il s’agit de villes vertes qui favorisent la gestion différenciée de leurs espaces publics. D’autres initiatives voient aussi le jour tels les jardins partagés, ouvriers ou communautaires. Elles s’orientent vers l’agriculture et tentent de lui redonner une place dans la ville. En effet, l’agriculture urbaine n’est pas non plus un phénomène récent, elle a toujours plus ou moins existé. Les anciennes ceintures maraîchères illustrent les liens que tissait l’espace urbain avec l’agriculture (in Déalle-Facquez, 2013). Ainsi, les banlieues ont pendant longtemps servi à nourrir la capitale. Cette agriculture se caractérisait par sa spécialisation dans le maraichage et notamment les cultures de légumes, fruits, fleur, mais surtout vignes (in Poulot-Moreau, Rouyres, 2000). Ainsi dans les années 70 dans la bordure Nord-ouest de l’agglomération parisienne on pouvait compter pas moins de 4800 ha de vergers. Quant à la culture de fleurs, par exemple, elle correspond à une tradition rappelée par les toponymes de certaines banlieues telles l’Hey-les-roses ou Fontenay-auxRoses. Cependant, beaucoup d’autres productions étaient présentes : champignon, cressons ; mais aussi élevage de volailles, de vaches laitières, d’ovins, de caprins et de chevaux de course, qui permettaient à la ville un approvisionnement en produit frais. (in Phlipponeau, in Veyret, 1957). Cette polyculture des banlieues parisiennes va progressivement disparaître à partie du XXe. (in Poulot-Moreau, Rouyres, 2000). En effet, peu à peu émergent les principes d’une agriculture productiviste avec la mise en place des principes des ingénieurs agronomes. Ainsi les petites exploitations disparaissent au profit de grandes propriétés terriennes qui préfèrent la spécialisation et la monoculture. C’est ainsi le début d’une crise paysanne, sans précédent, renforcée par le développement de la concurrence avec l’amélioration des transports et notamment des chemins de fer. En effet, ils mettent en place une dissociation spatiale entre les lieux de production agricole et marchés de consommation. Le vignoble francilien va ainsi disparaitre face à la compétitivité des vins du midi. Les produits frais sont aussi très largement menacés et peu à peu le beurre breton et le lait normand s’imposent sur les tables parisiennes. La politique agricole française, va en effet, miser sur une stratégie de « spécialisation régionale », ainsi chaque région va se voir attribuer une production spécifique afin de maximiser les rendements, ce qui a court circuité une grande partie des petites productions locales (in Poulot, 2011) Cependant, les productions maraichères vont continuer à s’étendre afin de répondre aux besoins toujours plus importants du marché parisien (in Philipponeau, in Veyret, 1957). La ville va, néanmoins, s’avérer une menace pour ces banlieues agricoles. En effet, la pression foncière devient de plus en plus forte au fur à mesure que la ville s’étend et cette urbanisation entraine des transformations des sols qui deviennent incompatibles avec l’agriculture. Ainsi, les liens vivriers entre habitants et agriculteurs franciliens vont continuer à se distendre. La mise en place de la politique agricole commune dans les années 60 va achever le modèle traditionnel agricole francilien. (in Poulot, 2011) Le productivisme devient le maître mot et la céréaliculture s’impose dans toute la région. Ainsi l’association traditionnelle élevage/culture disparait ce qui provoque une baisse des troupeaux ovins et caprins. C’est une véritable révolution agricole qui donne naissance à l’agri-business. Ainsi les relations capitale-banlieue parisienne illustrent bien les rapports ambigus entre ville et nature. Depuis toujours désirée, elle a pourtant sans cesse été relocalisée loin des villes. En effet, l’étalement urbain et la transformation des milieux qu’impose la ville lui sont favorables dans le cadre de la concurrence foncière. De plus, le passage d’agriculture paysanne à l’agri-business mondial a profondément modifié les modes de production alimentaire qui demandent beaucoup d’espace et l’utilisation d’intrants chimiques incompatibles avec la ville. Pour faire face à cette nouvelle crise du monde paysan, l’Etat met en place des mesures de conservation, mais aussi de patrimonialisation de l’agriculture francilienne dans les zones urbaines dès les années 70. De petits espaces de quelques dizaines d’hectares sont ainsi aménagés avec l’aide de la SAFER d’Ile-de-France et l’Agence des espaces verts afin de mettre en œuvre la politique régionale en matière d’environnement (in Poulot, Rouyvres, 2000). Ils se situent dans la ceinture verte près des villes nouvelles à proximité desquelles il est plus facile d’organiser la préservation d’espaces agricoles, ou dans les secteurs de la petite couronne parisienne ayant des traditions maraichères. (in Poulot, Rouyvres, 2000). Le monde paysan francilien est ainsi maintenu artificiellement par les politiques agricoles. Nous pouvons ainsi parler d’une muséification du monde paysan. En effet, ces petites parcelles seraient bien incapables d’être viables économiquement, il a donc fallu penser à une diversification des activités afin qu’elle puisse arriver à un certain équilibre financier, tout en s’intégrant au tissu urbain. (in Poulot, 2011) Le cas de Périgny-sur-Yerre est un exemple intéressant de maintien d’activité agricole, mais aussi de diversification d’activité. La ville a su associer agriculture, mais aussi activités de loisir en créant un complexe agro-touristique (in, Poulot, Rouyvres, 2000). Située dans le Val-deMarne, il s’agit d’un ancien centre maraîcher inclus dans la Zone naturelle d’équilibre du plateau de la Brie créée en 1975. Le maire de la commune, avec l’accord des agriculteurs, souhaitait conserver un espace agricole. Ainsi, lors de la cessation d’activité d’une grande exploitation, la SAFER aide à la mise en place du projet de la commune en achetant 90 ha, mais aussi 6 espaces verts et chemins. De plus, Périgny-sur-Yerre obtient une subvention du ministère de l’Agriculture afin de restructurer et aménager ces terres (in, Poulot, Rouyvres, 2000). Ainsi 12 lots de 5 et 7 ha ont été créés et vendues à des maraichers au prix de 9F soir 1, 37 € le m2. Le lotissement créé doit son succès au prix raisonnable des parcelles, mais aussi à son intégration paysagère (in, Poulot, Rouyvres, 2000). Les maisons maraichères sont ainsi regroupées en hameau et un chemin piéton, bordé d’arbuste bas, circule entre les parcelles (in, Poulot, Rouyvres, 2000). La création d’un parc de 4 ha et la construction d’une Maison de l’Environnement, cofinancées par la Région et le ministère de l’Environnement, permettent d’accueillir des classes vertes et le développement d’activités touristiques. Cette mesure, qui a rencontré un grand succès, a ainsi permis le maintien d’une génération d’agriculteur. Les contraintes d’usage du sol sur ces parcelles sont très strictes mais garantissent ainsi une stabilité foncière. Ainsi, la SAFER a eu un droit de regard sur les ventes pendant 15 ans, et les propriétaires se sont engagés à ne pas vendre à des fins non agricoles. De plus, l’agriculture urbaine devient peu un peu un outil de reconquête de la biodiversité et des fonctions écologiques de la ville (in, http://agricultureurbaine-idf.fr/agriculture-urbainebiodiversite-6, 2016). En effet, la capitale continue son expansion, ce qui entraine, une baisse de la biodiversité et donc des perturbations dans le fonctionnement des écosystèmes (in, http://agricultureurbaine-idf.fr/agriculture-urbaine-biodiversite-6, 2016). Ainsi, l’agriculture urbaine est une solution afin de ramener de la nature en ville. La Région Ile-de-France s’est ainsi engagée en faveur d’une agriculture respectueuse de l’environnement, mais aussi des ressources naturelles. (in, https://www.iledefrance.fr/action-quotidienne/agir-environnement, 2016). Elle a notamment mis en place des aides afin de soutenir les agriculteurs désirant se reconvertir dans l’agriculture biologique. Ainsi, la région Ile-de-France a instauré une politique en faveur de l’agriculture biologique, avec notamment un programme agro-environnemental adopté en 2007, mais aussi un plan d’action régional (ParcBio) concerté avec les organismes de développement agricole et les principaux acteurs du biologique en Île-de-France. Les politiques régionales sont aussi très investies dans la conservation et le développement de l’agriculture périurbaine, considérée comme « irremplaçable à la sauvegarde des ceintures et des « poumons » verts aux portes des villes » (in, https://www.iledefrance.fr/actionquotidienne/agir-environnement, 2016). La région s’est engagée à une maîtrise du front urbain qui s’est matérialisée avec l’adoption du nouveau projet de schéma directeur de l’Ile-de-France en automne 2012 (in, https://www.iledefrance.fr/action-quotidienne/agir-environnement, 2016). Cette politique joue aussi un rôle crucial dans la restauration de la Trame verte et bleue, puisqu’elle doit assurer « une continuité », « une passerelle » entre les espaces naturels et les espaces agricoles (in, https://www.iledefrance.fr/action-quotidienne/agir-environnement, 2016) L’agriculture urbaine a aussi un rôle social non négligeable qui contribuerait notamment à résorber certaines tensions dans la ville. Ainsi, les espaces agricoles ne doivent pas être uniquement considérés comme « espaces verts », « poumons verts » ou des « pénétrantes vertes » (in Bredif, Pupin, 2012). Ils sont aussi des facteurs d’identité très importants pour les populations urbaines et périurbaines. Dans l’étude menée par Hervé Bredif et Vincent Pupin sur le Grand Paris et la place de l’agriculture (in Bredif, Pupin, 2012), les 600 entretiens conduits pour leur enquête, ont révélé que la plupart des habitants ou acteurs de l’urbain étaient très attachés aux espaces agricoles. Cette étude a ainsi montré que l’agriculture, pour les habitants à proximité, « [véhiculait] des qualités essentielles à leurs yeux auxquels avec le temps, ils se sont attachés » (in Bredif, Pupin, 2012) Les espaces agricoles apparaissent dans le milieu urbain comme des repères. Ils permettent de se situer géographiquement, de se reconnecter avec les éléments naturels (in Bredif, Pupin, 2012), mais aussi, selon les interlocuteurs interrogés, « de savoir qu’ils savent qui ils sont » (in Bredif, Pupin, 2012). Ainsi quand un périmètre agricole se retrouve en friche ou est abandonné cela est perçu comme une dégradation du milieu. (in Bredif, Pupin, 2012). Il est aussi important de souligner que cette identité se « construit » pour la ville, pour une amélioration du cadre de vie, mais aussi pour une reprise en mains de ces espaces abandonnés à l’avenir incertain (in Bredif, Pupin, 2012). Cette étude permet ainsi de comprendre pourquoi l’espace agricole urbain devient aussi sujet de tensions politiques. Le végétale devient un moyen pour les citadins de s’approprier la ville et la revendiquer. Certains mouvements comme Guérilla Gardenning, utilise le végétal comme outils de revendication mais aussi comme un moyen de repenser la ville et les espaces publics. Ce mouvement ne compte pas moins de 98 actions en Ile-de-France (in, http://guerilla-gardeningfrance.fr/wordpress/actions/, 2016). Ils défendent les activités d’agriculture urbaine et préparent actuellement une action à Colombe. En effet, ils avaient participé à la création, aux pieds de tours de logement social, de jardins partagés, de potagers ainsi que d’une AMAP. Cependant, le terrain étant occupé illégalement la mairie a engagé des poursuites afin de pouvoir utiliser le terrain et y construire un parking provisoire. C’est pourquoi depuis le 18 juin Guerilla Gardening milite pour la conservation de « l’agro-cité » de Colombe (in, http://guerillagardening-france.fr/wordpress/actions/, 2016). Guerilla Gardening s’inspire du mouvement new-yorkais « Green Guerilla ». Ce mouvement est né dans les années 70 alors que la ville subissait de plein fouet les conséquences de la crise économique. Des centaines d’immeubles abandonnés étaient détruits, constituant autant de friches urbaines que les habitants ont réinvesties à l’aide du végétal et de l’agriculture urbaine. La végétalisation de ces espaces est devenue un symbole de contestation des politiques urbaines, mais aussi du capitaliste, ainsi qu’un moyen de se réapproprier l’espace urbain. L’agriculture urbaine, si elle ne permet pas la production de denrée alimentaire à grande échelle, peut répondre au besoin de « mieux consommer » des citadins (in, Déalle-Facquez, 2013). En effet, on insiste à une renaissance du terroir francilien avec la revalorisation de la production locale (in, Déalle-Facquez, 2013). Manger sain et local est devenu une demande du consommateur qui aujourd’hui favorise la qualité et la traçabilité de son produit. Ainsi, on assiste à un véritable engouement pour des denrées alimentaires, comme le miel, lorsqu’elles sont estampillées « produit à Paris ». Ainsi les relations capitale-banlieue parisienne illustrent bien les rapports ambigus entre ville et nature. Depuis toujours désiré, elle a pourtant sans cesse était relocalisé loin des villes. En effet, l’étalement urbain et la transformation des milieux qu’impose la ville lui sont favorables dans le cadre de la concurrence foncière. De plus le passage d’agriculture paysanne à l’agri-business mondial a profondément modifié les modes de production alimentaire qui demande beaucoup d’espace et l’utilisation d’intrant incompatible avec la ville. Cependant, cette rupture toujours plus grande entre ville et nature n’a fait que rendre cette dernière plus désirable aux citadins qui tentent de la réintégrer dans leur quotidien. C’est pourquoi des initiatives d’élevage urbain arrivent aujourd’hui à trouver leur place dans la ville

Un phénomène qui a du mal à définir ses liens avec la ville et où l’élevage semble oublié

   L’agriculture urbaine se définit comme une activité de production et une maitrise du cycle végétal et/ou animal dans une région urbaine. L’élevage est donc compris dans cette définition. Cependant les relations entre cette activité avec la ville sont pour le moins mal définies c’est pourquoi l’agriculture urbaine est un concept dont la définition n’est pas encore formellement fixée. Pour Fleury et Donadieu, l’agriculture devient urbaine à partir du moment où cette dernière entretient des rapports fonctionnels réciproques avec la ville (in Fleury et Donadieu, 1997). Mbaye et Moustier la définissent comme « l’agriculture localisée dans la ville ou à sa périphérie dont les produits sont majoritairement destinés à la ville ou à sa périphérie et pour laquelle il existe une alternative entre usage agricole et non agricole des ressources (sol, main d’œuvre, eau.), alternatives qui ouvrent sur des concurrences, mais aussi des complémentarités entre agriculture et ville. » (In Mbay et Moustier, 1999). Enfin pour Mougeot : « l’agriculture urbaine est une activité localisée à l’intérieur (agriculture intraurbaine) ou sur les bords (agriculture périurbaine) d’une ville, cité ou métropole. Elle produit ou élève, transporte ou distribue une diversité de produits (aliments ou non-aliments), et fait un large appel aux ressources humaines et matérielles (parfois les réutilise), produits et services trouvés dans et autour de la ville. A son tour elle offre des ressources humaines et matérielles, des produits et services, principalement à l’espace urbain » (in Mougeot, 2000). Les trois synthèses de ces chercheur-es sont assez représentatives de l’ensemble des définitions données à l’agriculture urbaine. Elle est définie selon sa localisation, son marché de consommation et ses acteurs. Cela permet la mise en place de typologies complexes ou les possibilités sont multiples. Cependant ces définitions ne s’interrogent pas sur l’expression même « d’agriculture urbaine » qui apparait comme un oxymore. L’agriculture se définit comme une activité de production à grande échelle afin de nourrir la population au niveau local, national ou international alors que le terme urbain est associé au développement des villes soit un regroupement d’individus dans une entité aménagée ayant pour but de leur offrir des services (in Duchemin, 2012). De plus, l’agriculture a pris un virage productiviste et industriel au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Elle s’est mécanisée dans le cadre d’un système de transformation, mais aussi de distribution à grande échelle et de manière très hiérarchisée (in Duchemin, 2012). Elle s’est aussi totalement dissociée spatialement du milieu urbain dans le cas des pays du Nord. Quant à l’urbanisation, elle apparaît comme l’un des facteurs responsables de cette dissociation entre production alimentaire et habitat humain. Ainsi l’assemblage de ces deux termes apparait inadéquat. L’agriculture urbaine telle qu’elle est observée aujourd’hui, se développe sur de petites surfaces, des espaces en friche ou sousutilisées qui ne permettent pas, ou de façon marginale ou secondaire, en ce qui concerne les pays du nord, une activité de production alimentaire à même d’approvisionner la ville. Ce premier élément pose ainsi la question de l’intégration de l’agriculture urbaine dans la ville. En effet, elle n’apparait pas comme une activité intégrée, mais tolérée dans le tissu urbain à condition qu’elle s’implante dans des zones qui demandent « à être aménagées » et qui sont donc délaissées par la ville, Ainsi, certains préfèrent utiliser le terme horticulture urbaine ou maraichage urbain, plus en accord avec la visée de ce type d’initiative en ville destinée au jardinage plus qu’à la production alimentaire à grande échelle (in Duchemin, 2012). Cependant, ce que mettent en évidence ces termes c’est la prédominance du végétal sur l’animal. En effet, au maraichage est associé du petit élevage de type volaille ou lapin, mais cela est une activité secondaire en complément de la production végétale. Ainsi, l’élevage est bien considéré dans la définition de l’agriculture urbaine, mais n’est pas envisagé comme une activité à part entière tout au plus comme une activité de soutien au végétal. Ainsi, le débat autour de la légitimité du terme « agriculture urbaine » nous éclaire sur la place de l’élevage, mais aussi de l’animal en ville et de sa difficile intégration dans les initiatives de réintroduction la nature en milieu urbain.

L’environnement et le souci de gestion douce des parcs et espaces verts parisiens : des externalités environnementales multiples

   Dans les différents textes étudiés, la réintroduction de troupeau en ville est motivée par le souci d’une meilleure gestion de l’environnement urbain, mais aussi de son amélioration. Dans l’article d’Audrey Garric (in, Le Monde, 12/04/2013), Des moutons pour tondre en ville, vrai gain pour l’environnement ? (cf. annexes) mais aussi de Sylvie Luneau (in, https://reporterre.net/L-eco-paturage-a-la-conquete-des, 08/05/2014) L’éco-pâturage à la conquête des cœurs d’agglomérations (cf. annexes) l’objectif de ces initiatives est tout d’abord de limiter l’usage de phytosanitaires mais aussi d’engins motorisés pour l’entretien des espaces verts. Ces restrictions ont pour but de maintenir ou de favoriser la biodiversité urbaine tout en sensibilisant les usagers à la préservation de la nature « Cela consomme moins d’essence, les moutons préservent la faune et la flore et ça évite les nuisances sonores » (in Garric, 2014 ), « il y avait une certaine valorisation à faire quant à la biodiversité qu’il y a ici » , (in Garric 2014) « On ramène du poumon vert ici » (in Garric, 2014.) mais aussi d’améliorer le cadre de vie urbain. . Ainsi, l’élevage trouve sa place en ville grâce à ses externalités environnementales et plus particulièrement l’éco-pâturage « l’éco-pâturage consiste à utiliser des animaux plutôt que des engins mécaniques pour l’entretien d’espaces verts » (in Gauthier-Faure, 2013) Cependant, il semble nécessaire de faire des distinctions dans les différentes initiatives d’éco pâturage. Les prestataires de service ne sont pas tous de même nature ce qui a pour conséquence des modes gestion différents. En effet, dans de nombreux articles des entreprises d’éco-pâturage sont citées, mais il s’agit aussi parfois d’établissements publics ou d’associations qui se chargent de mettre à disposition leurs bêtes élevées au cœur du tissu urbain. Alors qu’en ville la répartition des ressources se localise à plusieurs endroits distants et diffus la transhumance et le parcours sont peu utilisés. Ce mode d’exploitation qui avec l’éco-pâturage est le plus performant et pourtant peu utilisé par les entreprises et initiatives publiques. Cela s’explique notamment par le coup de la main d’œuvre alors que ces opérations sont à la fois mises en avant pour leurs aspects écologiques et économiques. (In Darly, 2014). Ainsi on remarque que Ségolène Darly (in Darly, 2014) qui étudie l’association Clinamen, met en avant plusieurs autres externalités environnementales liées à la présence de moutons en ville. En effet, les moutons permettent une gestion douce des espaces verts de la ville de Saint-Denis grâce à la pratique de l’éco-pâturage, mais aussi le transfert de matière organique et de biodiversité avec leurs transhumances et les parcours. L’ensemble de ses activités est optimisé par les bergers et leurs connaissances de la trame verte et bleue (in Darly, 2013). La production de fumier est aussi à souligner. Cette matière fertilisante très précieuse sert de support à d’autres initiatives d’agriculture urbaine. Ainsi, près de la bergerie des Francs Moisins à Saint-Denis, le fumier  accumulé par les moutons de Clinamen a permis la reconstitution d’un sol cultivable sur environ 200 m2 de la « Parcelle 126 » (in Darly, 2013). Ainsi l’élevage n’est pas du tout présenté comme une activité de production alimentaire, mais comme un outil de gestion des espaces verts

Un mode d’élevage qui se veut nomade et traditionnel et qui souhaite s’intégrer à l’économie réelle

   L’élevage est l’activité principale de l’association. Ce sont les animaux qui leur demandent le plus de temps et de soin (cf. Annexes Entretien n°1). Cela s’explique notamment par le mode d’élevage du troupeau qui se veut « nomade » et « traditionnel » : « Nous on se rapproche d’un mode d’élevage pastoral ou traditionnel ce qui se faisait avant. Nous on est des borduriers, ceux qui se déplacer avec un troupeau comme ça et qui faisait des … qui brouter le long des routes ou qui tapait à la porte de gens pour leur demander si les bêtes pouvaient brouter sur leur terrain. C’est ça quoi. » (cf. Annexes Entretien n°1). Les bêtes sont ainsi amenées à se promener dans la ville en effectuant des parcours plus ou moins aléatoires et déterminer selon les ressources fourragères disponibles (cf. figure n°11). Les déplacements quotidiens se font à l’échelle de la parcelle, ainsi les animaux changent chaque jour de pâture. Les bêtes sont divisées en trois troupeaux un localisé dans l’ancienne chaufferie des Franc-Moisin, un autre sur la base militaire de Houilles et une troisième sur le site de l’université de Villetaneuse. Ces trois bergeries sont ainsi dispersées en région parisienne et occupent des pâtures différentes. Chacune a des fonctions différentes, mais complémentaires. La bergerie des Francs Moisin est la première installée par Clinamen. Elle est une expérience de réintroduction de moutons en ville dense. Leurs rôles et principalement pédagogiques, ainsi quand ils parcourent les espaces verts de Saint-Denis l’association désire avant tout créer de l’étonnement et des réactions auprès des habitants. La bergerie de Villetaneuse sert au désherbage des vignes et potagers mis en place sur le campus de l’université et est aussi une source de revenus pour l’association puisque les moutons sont aussi présents pour entretenir les espaces verts de la structure. Enfin, le site de Houille a servi de terrain d’expérimentation pour l’élevage de Clinamen et a permis la reproduction et l’agrandissement du troupeau de l’association. Les transhumances sont organisées par l’association sur demande des villes, qui veulent créer un évènement, pour une prestation de service ou, par exemple, quand une activité requiert un déplacement du troupeau. Les parcours sont aussi mis en place pour nourrir les troupeaux et fournir une alimentation diversifiée aux animaux. Lors de l’enquête les moutons n’avaient pas pu faire de transhumance à cause de la pluie qui aurait rendu la tonte difficile. C’est donc transporté dans deux bétaillères que les animaux de la parcelle de Villetaneuse sont arrivés rue Danielle Casanova. Les moutons ont investi la pelouse de l’esplanade menant au stade de France, situé en face de l’association Clinamen. Il s’agissait d’une pelouse haute qui a rapidement été broutée par les animaux. Ce déplacement a permis la tonte des bêtes mais aussi la création d’un évènement autour de l’animal et de la laine.

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Table des matières

Introduction
I- Etat des connaissances autours de l’élevage d’ovin et de caprin en ville
I) L’élevage urbain réappropriation dans les pays du nord et maintien dans le sud
II) L’élevage en ville, parent pauvre de l’agriculture urbaine
III) Quel état des connaissances pour les initiatives d’élevages urbains dans le Nord-Est parisien
II- Méthodologie
I) Présentation du travail de recherches bibliographiques
II) Elaboration et choix des terrains : pourquoi le nord-est parisien ?
III) Elaboration de l’entretien semi-dirigé
III- Des élevages ovins et caprins parisiens aussi nombreux que différents
A- Clinamen : l’élevage comme outil de la reconquête de la vie paysanne en ville
B- Sors de Terre : Un élevage utilisé à des fins sociales de réappropriation de la ville pour les habitants
C-La Ferme de Paris : une expérimentation d’élevage urbain et d’éco-pâturage
D- Ecomouton : De la logistique de mouton pour vendre un service d’éco-pâturage
IV-Des initiatives de natures différentes réunis autour de l’élevage d’ovins et de caprins
I) Deux troupeaux aux services de la redynamisation du territoire
II) De l’éco-pâturage à l’éco-pastoralisme urbain
III) Problèmes fonciers et localisation des initiatives : des moutons qui n’ont toujours pas gagnés leur place en vile
IV) L’animal comme outil pédagogique et créateur de lien social
Conclusion
Bibliographie

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