Musée et pouvoir symbolique. Regard géographique sur le Louvre

« Musée et pouvoir symbolique. Regard géographique sur le Louvre ». Ce titre dessine d’emblée les contours d’une recherche transdisciplinaire. Il s’agit d’un écho bourdieusien par l’expression « pouvoir symbolique » mis en parallèle avec le Musée, un objet d’étude interpellant les sciences humaines et sociales. La clé de voûte de cette recherche se situe dans la notion de symbole qui permet d’appréhender plus librement l’objet d’étude musée. Cela permet de poser des questions plus que d’y répondre, de proposer une réflexion à un moment donné sur un sujet. Ce qui est exposé aujourd’hui est à discuter demain voire à reconfigurer car les temporalités s’accélèrent et s’entrelacent. Il ne semble plus y avoir une seule vérité dictée par une norme, mais des regards plus ou moins aiguisés sur un sujet. Pendant ces trois années de thèse, les travaux présentés dans ce mémoire de thèse ont été confrontés à des points de vue différents voire antagonistes rendant l’exercice de la recherche difficile à cerner. Proposer un regard novateur et transversal sur un sujet que les géographes ont discuté durant ces vingt dernières années, mais demeurant atypique en géographie, reste un exercice de réflexion passionnant et prometteur.

Pertinence du dialogue entre terrain virtuel et réel 

Les musées sont des sujets déjà étudiés et le seront encore dans les années à venir. Des cas nationaux aux cas africains ou américains, un certain nombre de travaux développés ultérieurement témoignent de l’engouement pour les musées et les grands musées. L’originalité de ce travail réside dans la mise en relation des différentes entités du Louvre. En effet, depuis les années 2000, le Louvre est un objet d’étude multi-situé. Il s’agit d’une institution qui aujourd’hui propose et instaure une manière de penser les relations entre des territoires plus ou moins éloignés (fig. 1).

En alliant virtuel et réel, l’objectif final est certes, de discuter de la possible création d’un territoire Louvre, mais aussi de pallier les contraintes d’accès aux sites lointains. Le passage du musée du Louvre et des collectionneurs, aux Grands travaux du Président Mitterrand montrait déjà un lien fort avec la dimension politique. La multi situation du Louvre permet de le considérer dans le champ d’étude de la géographie humaine (politique, sociale et culturelle). Il s’agit de s’intéresser au musée du Louvre, symbole réputé de la culture française, au Louvre-Lens, point d’orgue d’une modification territoriale voulue par les politiques régionales et nationales, et au Louvre Abu Dhabi qui permet d’asseoir des relations diplomatiques bilatérales entre deux pays, puis (fig. 2, 3 et 4).

Les recherches sur ces Louvre foisonnent et ne peuvent qu’être inspirantes. En effet, les études spécifiques sur chaque Louvre pour tenter de quantifier l’impact dans leur région ont été utiles pour proposer un travail innovant. La mise en relation de ces différents Louvre pour avoir un regard sur ce nouveau modèle. Cependant, la jeunesse des Louvre-Lens et Louvre Abu Dhabi rend difficile l’analyse des retombées sur le long terme et ne permet pas de déterminer les conséquences directes de leur implantation. Pour cela deux aspects permettent de comprendre la manière dont a été pensé ce travail. Le premier est que le musée du Louvre est, et demeure le point de départ des analyses (tout part du musée du Louvre). Le second point se situe dans des « mondialisations » dans le sens de C. Ghorra-Gobin (2005). La dimension économique ne sera qu’au second plan, car l’intérêt de cette thèse est de comprendre la dimension symbolique et politique de cette identité Louvre. Ces terrains réels et virtuels ont permis l’étude des représentations dans cet espace impalpable et immatériel, qui se trouve être tout à fait intéressant, notamment par le biais du réseau social Twitter. Allant dans le sens inverse de l’utilisation usuelle de ce réseau social – davantage utilisé comme une arène où tous les mots sont permis sous couvert d’anonymat – le parti pris de la méthode était de constituer une base de données des photographies des Louvre, pour les analyser. Cette approche rejoint le concept de réputation et celui de travail réputationnel proposé par Stephen Zafirau, que P.-M. Chauvin définit comme « les marges de manœuvre d’un acteur social non seulement pour « contrôler » sa réputation, mais aussi pour la constituer, l’entretenir et éventuellement la développer au cours d’une carrière professionnelle ». Dès lors, en travaillant sur les concepts de représentations dans un premier temps, puis de territorialité et de réputation, cela interroge la notion de rayonnement des institutions culturelles, qui est approfondie avec un « effet miroir », en fin de thèse et l’étude d’une institution créée ex nihilo (néo-patrimoine), le musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM) à Marseille. Ce choix très ambitieux s’explique par les discours produits par les institutions elles-mêmes. Du Louvre Abu Dhabi au MuCEM, il est question de pont, donc de relier.

Néanmoins, ne s’agissant pas de faire trois monographies de ces différentes entités, l’objectif est bien de les mettre en perspective, dans un processus de recherche et surtout, une actualité politique et sociétale – étude et analyse de la presse, des photographies, et des avis TripAdvisor –, qui montre que le problème d’ordre écologique est aussi lié à l’économie du tourisme, dont le Louvre illustre le paradoxe suivant. Avec le tourisme de masse, le visiteur dira plus aisément « j’ai fait le Louvre» plutôt que « j’ai visité le Louvre ». Le verbe « faire » montre bien un esprit comptable de l’individu en quête d’expérience significative d’un territoire alors que le verbe visiter va dans le sens de s’approprier pleinement les lieux, ainsi que leur connaissance. De plus, un travail historique est nécessaire pour saisir la complexité du sujet. En effet, l’histoire contemporaine du musée du Louvre est intéressante à connaître puisqu’il s’agit d’une institution, dont le bâtiment datant du XIIIème siècle et de Philippe Auguste, ne cesse de se réinventer pour devenir à la fois un « géosymbole » dans le sens de J. Bonnemaison (1981) ou un « landmark » (Lynch, 1960). En soi, c’est un patrimoine qui s’inscrit dans des temporalités, dans le sens de F. Braudel (1949), en quête de nouvelles spatialités. Sa reconnaissance est mondiale et sa fréquentation bat tous les records, plus de 10 millions de visiteurs en 2018, sa force d’attraction est indéniable et son rayonnement évident à tel point que l’État utilise le musée du Louvre comme acteur culturel diplomatique. Initialement, lié à Paris ou à la France, depuis le début du XXIème siècle, son identité réputée et située géographiquement, se déterritorialise, sort de ses murs, laissant apparaitre une mouvance.  Alors qu’à l’époque de Clémenceau il était déjà question d’une présence du musée du Louvre en dehors du Palais pour permettre aux provinces d’avoir accès à ses collections, le musée du Louvre mettait en relation des territoires plus ou moins éloignés grâce à son implantation en dehors du bâtiment historique et par des actions portées par un Louvre invisible . La question du pouvoir symbolique employée dans le titre prend ici tout son sens, nous avons une institution renommée, symbolique et politique, qui génère une forme d’autorité, de puissance dans le paysage culturel mondial.

Tout cela explique l’approche philosophique et l’envie de réfléchir, puis de discuter de cette mise en relation de territoire à partir d’une identité réputée. Cette réflexion est possible grâce à l’étude des représentations visuelles (films, photographies Twitter, cartes mentales) et discursives (presse nationale, presse régionale, commentaires, entretiens) d’une identité connotée socialement et spatialement, et qui permet d’envisager un territoire Louvre. Cette approche présente certains biais puisque le terrain est virtuel et que derrière le virtuel, des individus ou des institutions se cachent derrière des pseudos. Les informations doivent être vérifiées pour éviter les « fausses informations ». L’enjeu de cette recherche est dans un premier temps de contextualiser et d’expliquer en quoi le Louvre, par le symbole qu’il incarne, bénéficie de représentations fortes qui induisent des appropriations de ce musée à différentes échelles et qui permettront de comprendre par la suite le processus de mouvance du Louvre vers de nouveaux horizons. Il s’agit d’un postulat fort qui demeurera présent dans cette thèse. Enfin, pour conclure cette introduction, il semblait intéressant de proposer une grille de lecture de ce travail de recherche qui, pour rappel, se veut être une réflexion. Même si ce travail s’inscrit en géographie humaine (politique, sociale et culturelle), il s’intéresse à un patrimoine national et engendre des questionnements d’ordre politiques, culturels, sociaux, puis territoriaux que permet le regard transdisciplinaire. Des analyses chronologiques seront présentées pour des raisons de logique de raisonnement, tout comme à certains endroits, une présentation type « catalogue » des actions du Louvre.

Cette approche fut choisie, de manière éclairée et voulue, pour deux raisons ; la première est de souligner le travail d’introspection et de communication que font désormais les institutions par le biais des projets scientifiques et culturels (PSC). Pour l’étude du musée du Louvre, le PSC est une source principale de données, car au-delà du retour historique qu’il propose, il y présente les enjeux pour le public, les expériences de visites et le lieu en lui-même, puis sa dimension territoriale. L’analyse du PSC a permis de comprendre les ambitions de l’institution, qui dépassent les frontières du palais parisien. Ne cherchant pas à faire des monographies précises de l’impact du musée du Louvre sur le territoire, mais essayant de comprendre les procédés qui légitiment la création d’un territoire Louvre, cette approche permet d’avoir un panel qui pourra être approfondi ultérieurement. Cependant, une contextualisation est nécessaire pour comprendre l’implantation de ces autres entités. À Lens, le Louvre-Lens doit articuler son passé industriel et son avenir culturel, et à Abu Dhabi, le Louvre Abu Dhabi se projette au cœur d’un cluster culturel par l’aménagement d’un quartier culturel sur l’île Saâdiyat, dans une région du monde en transition culturelle, et se rêvant être un pont entre l’orient et l’occident. À Paris, le musée du Louvre se trouve quant à lui au cœur de la cité et s’inscrit dans une politique urbaine alliant durabilité et patrimoine. De cette identité Louvre, ressort une marque qui, depuis 2013, incarne un savoir faire à la française, et qui se décline en apposant un qualificatif spatial ; le Louvre n’est pas à Lens ou à Abu Dhabi, le Louvre devient Lens ou Abu Dhabi (Louvre-Lens et Louvre Abu Dhabi). De plus, ils privilégient des créations ex nihilo plutôt que d’investir des murs témoins d’un passé, ce qui « allégorise » aussi l’envie, voire la nécessité de ces régions de renaître de leurs cendres, par des emplacements rarement insignifiants. En plus d’offrir de l’espace supplémentaire au musée du Louvre, ils deviennent acteurs de régénérescence urbaine (enjeux touristiques et économiques).

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Table des matières

Introduction
Partie I. Le Louvre, objet géographique
Chapitre 1. Territoires et musées
Chapitre 2. Une méthodologie pour comprendre la relation Louvre-Territoire
Conclusion de la première partie
Partie II. Louvre et Désir de lieux
Chapitre 3. Dimension politique et symbolique du Louvre
Chapitre 4. Du symbole à l’icône, une identité créatrice de désir de lieux
Conclusion de la deuxième partie
Partie III. Archipel Louvre ?
Chapitre 5. Des territoires ponctuels à un territoire Louvre.
Chapitre 6. Territoire Louvre, multi-situé ou archipel ?
Conclusion de la troisième partie
Conclusion générale
Bibliographie

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