Modélisation du comportement mécanique des aciers à effet TRIP

Etude microscopique de l’effet TRIP

TRansformation Induced Plasticity, cette expression en anglais indique que la plasticité est induite par la transformation. La martensite tient son nom de l’illustre métallurgiste allemand Adolphe MARTENS. Les termes de martensite et de transformation martensitique sont aussi bien utilisés dans les alliages ferreux que les non-ferreux. Dans les aciers à effet TRIP, cette transformation correspond à un changement de phase particulier qui se produit à l’état solide et qui est à l’origine des propriétés remarquables des matériaux dans lesquels elle se produit.
La transformation martensitique se classe dans la catégorie des transformations cristallographiques displacives [COC79]. Elle se produit sans aucun phénomène de diffusion atomique ; elle se présente comme un mouvement coopératif des atomes à des vitesses proches de la vitesse du son dans le matériau. Le changement de phase ne résulte pas d’un changement de composition chimique dans la phase martensitique, mais une interface sépare les deux phases initiale et formée [OC82].
La transformation se fait par le déplacement des atomes de leurs sites dans la phase mère vers des sites voisins qui définissent la configuration de la nouvelle phase. Pour que la transformation martensitique se produise, la vitesse de refroidissement doit être élevée ce qui ne permet pas aux atomes de se déplacer par diffusion. Il en résulte une déformation macroscopique sous la forme d’un cisaillement qui se compense par une déformation supplémentaire et la plastification de l’austénite. Cette transformation est caractérisée par un changement de volume et par un changement de forme laissant un plan invariant, et par une énergie de déformation élastique [OC75]. La structure et la morphologie de la martensite varient en fonction de la composition chimique du matériau et de la température à laquelle se produit la transformation. Dans les aciers, la martensite possède trois types de structures cristallines [Mak90] : La martensite α′ a une structure tétragonale (ou quadratique) centrée TC. Elle est observée dans les alliages binaires Fe-C et se retrouve dans les aciers TRIP industriels. Elle possède une forte énergie de fautes d’empilement.
La martensite ε a une structure hexagonale compacte HC ; La martensite tétragonale à faces centrées TFC est observée dans les alliages Fe-Pd et Fe-Pt [Mak90].

Etude macroscopique de l’effet TRIP dans les aciers

La transformation martensitique induit une déformation plastique macroscopique correspondant au phénomène de plasticité de transformation. La phase transformée en martensite accumule des contraintes qui peuvent être relaxées par une déformation plastique sous forme de glissement de dislocations ou de macles. Dans les aciers à effet TRIP, cette plasticité de transformation de l’austénite métastable se traduit par un changement soudain de la pente d’écrouissage [PC53]. La plasticité de transformation est généralement définie comme un accroissement significatif de la plasticité pendant une transformation de phase. Une déformation plastique a lieu pour une contrainte externe appliquée, telle que la contrainte équivalente est inférieure à la limite d’élasticité du matériau.
Aciers à effet TRIP :Les aciers désignés par le terme TRIP sont des aciers présentant un comportement mécanique particulier. Ils ont à la fois une résistance élevée et une haute ductilité, ce qui les rend particulièrement intéressants pour la mise en forme par déformation plastique.
En ajustant les éléments chimiques, il est possible de conserver une austénite métastable à température ambiante, c’est à dire une transformation martensitique qui progresse avec la sollicitation mécanique. Cette transformation contribue au durcissement progressif de ces aciers et elle ajoute ses effets à ceux de l’écrouissage de l’austénite [PGB+06]. La composition chimique, les paramètres d’élaboration, et plus particulièrement les traitements thermiques sont les paramètres qui règlent directement les caractéristiques physiques, chimiques et mécaniques des différentes nuances d’aciers.
Les aciers à effet TRIP sont classés dans deux catégories, en fonction de leur microstructure : Aciers à effet TRIP entièrement austénitiques, qui sont fortement alliés (Fe-Ni, AISI 304, AISI 301,…).
Aciers TRIP multiphasés, qui sont faiblement alliés et seulement partiellement austénitiques. Dans cette étude, les aciers étudiés appartiennent respectivement à ces deux catégories : aciers inoxydables de type AISI 304L, entièrement austénitique à température ambiante, et acier multiphasé TRIP 800.
Aciers Inox austénitiques :Parmi les aciers austénitiques certains sont dits inoxydables en raison de leur excellente résistance à la corrosion, en particulier celle qui est due à l’oxydation par l’air et par les acides. De nombreuses nuances d’aciers inoxydables sont développées pour des applications spéciales dans l’industrie du pétrole, de l’agro-alimentaire de l’industrie chimique et dans l’aéronautique. Le chrome, dont la proportion atteint au moins 10%, est l’élément d’addition essentiel de l’acier inoxydable .
C’est lui qui donne à l’acier inoxydable sa résistance à la corrosion et à l’oxydation. Le deuxième élément d’alliage est le nickel, c’est un élément gammagène qui stabilise l’austénite à température ambiante. Pour les produits laminés, le modèle de Pryce et Andrew propose un diagramme pour prédire la structure de l’acier en fonction de sa composition chimique.

Propriétés mécaniques d’aciers à effet TRIP

Dans la littérature, le comportement mécanique des aciers à effet TRIP est étudié par de nombreux auteurs [NOC82], [You88], [TI01], [BHF04] et [Kub04]. Les publications qui sont citées et commentées ici sont celles qui portent plus particulièrement sur les matériaux de cette étude (304  ou TRIP800). Elles comportent à la fois des courbes de comportement et des cinétiques de transformation, de préférence sous différentes sollicitations.
Tomita et Iwamoto [TI01] montrent les courbes contrainte – déformation obtenues en traction et en compression ainsi que l’évolution de la fraction de martensite formée, pour un acier austénitique de type 304 à différentes températures entre 77 K et 353 K. La forme particulière des courbes obtenues aux températures basses et moyennes (Figure 1.24-a) exprime l’existence d’un maximum du taux d’écrouissage, qui est corrélé à la transformation martensitique . Ce type de comportement est observé dans d’autres études ([You88], [NOC82]). Le comportement n’est pas symétrique entre traction et compression [YKJ06].
Le comportement en traction uniaxiale à différentes températures d’un acier entièrement austénitique AISI 304 est donné dans la thèse de Kubler [Kub04]. La transformation augmente le taux d’écrouissage dans la courbe de comportement en traction simple. Le début de la transformation se produit après une certaine déformation plastique et se traduit par une inflexion très nette de la courbe de traction.

Mise en forme des aciers à effet TRIP

Dans les études déjà citées, seules quelques unes portent sur l’étude expérimentale de l’évolution de la microstructure et du comportement sous chargement complexe des aciers à transformation de phase. Pourtant, les états de contraintes lors de la mise en forme des tôles sont généralement complexes : ils sont multiaxiaux et varient spatialement et temporellement. Il est difficile d’analyser complètement ce qui se produit lors d’un essai d’emboutissage si la géométrie de l’embouti est compliquée. C’est pourquoi, les laboratoires ont développé des essais sur des géométries de type godet et les ont équipés de divers dispositifs de mesures (cellules de force, capteurs de déplacement, thermocouples, caméras pour les mesures des champs de températures ou de déformations, etc.).

Généralités concernant le procédé d’emboutissage

L’emboutissage est l’un des procédés de formage des tôles qui permet la réalisation de pièces de formes complexes. En comparaison avec des opérations plus simples comme le pliage, le roulage  ou le profilage à froid, ce procédé est mieux adapté à la production en grande série. Il permet de fabriquer des pièces de carrosserie automobile, des appareils électroménagers, des ustensiles de cuisine et des pièces mécaniques pour diverses utilisations.
L’emboutissage représente la transformation d’une tôle plane en une pièce volumique avec une diminution d’épaisseur. La réussite de l’emboutissage nécessite un certain nombre d’impératifs: l’absence de rupture ou d’amincissement localisé excessif, l’absence de plis, un état de surface optimal de l’embouti, une consommation minimale de matière et d’énergie. De nombreux paramètres garantissent la réussite de l’opération et la qualité des pièces : la forme de l’outil, qui dépend de la complexité de la pièce, les réglages de la presse, la vitesse d’emboutissage, la lubrification, la qualité de la tôle, etc.
La forme finale des pièces embouties dépend du comportement des tôles pendant leur mise en forme. Les interactions entre la géométrie du processus, les conditions de frottement entre le flan et les outils, la loi de comportement du matériau et les phénomènes de retour élastique sont complexes. Les simulations d’emboutissage nécessitent donc une bonne connaissance des conditions expérimentales (force de serrage du serre-flan, conditions de contact entre les outils et la pièce, …) et du comportement du matériau embouti.

Cas des aciers à effet TRIP

La bibliographie sur l’emboutissage des aciers à effet TRIP (aciers inoxydables ou multiphasés) est elle aussi abondante. Cependant, ici ne seront cités que les travaux dans lesquels sont couplés des essais d’emboutissage et un développement lié à la modélisation du comportement de ces matériaux.
Déjà cités, les travaux de Jacques et al. [JFL+07] utilisent des essais de type Marciniak simplement pour élargir la panoplie d’essais mécaniques et en particulier la variété de taux de triaxialité des contraintes. Dans le même esprit, on trouve les publications de Yan et al. [YKJ06] (emboutissage avec poinçon hémisphérique), Shan et al. [SLZX08], Gallée et Pilvin [GP10]. Par contre, déjà cités également, Dan et al. [DZLL07] utilisent les essais d’emboutissage de type Marciniak (poinçon plat) pour valider leur modélisation. Ils comparent les variations radiales de la fraction de martensite et de l’épaisseur de la tôle, obtenues par simulation et mesurées expérimentalement.
Il existe aussi un certain nombre d’articles qui traitent de l’emboutissage des matériaux à effet TRIP, mais surtout du côté détermination expérimentale ou simulation des Courbes Limites de Formage [Ser06].

Techniques de mesure de champs cinématiques

L’étude des lois de comportement pour tous les types de matériaux nécessite un certain nombre de techniques expérimentales de détermination de l’état de déformation et/ou de contrainte du matériau sous sollicitations mécaniques. L’importance de l’étude du comportement des métaux sous charges complexes (comme l’emboutissage) et des hétérogénéités des déformations dans le plan et des déplacements hors plan, dans le procédé de mise en forme, conduit à utiliser des techniques de mesure de forme et de champs cinématiques en 2D et en 3D.
Les techniques de mesure de champs sont des méthodes expérimentales alternatives aux techniques dites classiques de mesures locales de déplacements, de déformations et de températures (e.g. jauges de déformation, capteurs de déplacement, thermocouple, etc.). Elles ont connu un développement important ces dernières années et ont fait l’objet de publications de synthèse ou de comparaison [PQX+09] [BBD+09]. Les techniques de mesure de champs cinématiques et thermiques sont des outils précis et non destructifs. L’absence totale de contact entre la pièce et l’instrument de mesure supprime certaines erreurs. Les évolutions incessantes de la technologie du matériel informatique et des caméras numériques modifient continuellement les conditions d’utilisation et les performances de ces techniques. Températures [Gau99], déplacements [FRCH04], déformations [SCMC86], formes ([SS98] et [GOP02]) sont les variables les plus couramment mesurées par des techniques de mesure de champs.
Le choix d’une technique de mesure dépend de plusieurs éléments : la géométrie et les dimensions de l’éprouvette, la taille de la zone d’intérêt et l’échelle d’observation, les conditions d’essai mécanique, l’utilisation et la précision souhaitée sur les quantités obtenues. Quelques définitions utilisées dans cette étude sont rappelées ci-dessous ([Tri07] et [Sur04]).
La mesure : Une valeur (variable aléatoire dont la valeur exacte n’est généralement pas connue) qui exprime la grandeur physique particulière obtenue par une méthode de mesure. Chaque valeur de mesure doit de préférence comprendre trois éléments [ISO04] : une valeur, une unité et l’incertitude sur cette valeur. On distingue trois types de mesures (résultats) obtenues par des techniques de mesure de champs; les mesures optiques directes (e.g. images de niveaux de gris), les mesures intermédiaires déduites par traitement numérique des mesures directes (e.g. champs de déplacement ou de phase), et enfin les mesures «décodées» qui sont les informations de mesure en relation avec un gradient des données intermédiaires (e.g. champs de déformations). Le seuil de détection : Le seuil de détection d’une méthode de mesure est défini par la valeur minimale théorique que doit avoir la grandeur mesurée pour que le résultat soit significativement différent de celui obtenu pour le mesurage du blanc . Ce seuil est calculé dans des conditions parfaites de mesure (pas de bruit, pas d’erreurs numériques, etc.).
La sensibilité d’une méthode : La sensibilité d’une méthode est définie par le quotient de la variation de la quantité qui doit être mesurée sur la variation de la mesure. Cette valeur est en quelque sorte le gain du système de mesure.
Incertitude de la mesure :L’incertitude de la mesure est un paramètre quantitatif qui caractérise la dispersion des valeurs attribuées à la mesure [NC97]. La dispersion des valeurs mesurées a de nombreuses sources comme : une variation incontrôlée des grandeurs influant sur la variable mesurée (intensité, contraste, déplacement de corps rigide, etc.). L’instrument de mesure mais aussi la personne effectuant la mesure peuvent introduire une certaine dispersion sur la mesure. La résolution de la mesure :La résolution de la mesure représente la plus petite fluctuation de la grandeur mesurée détectable par la mesure. Cette valeur, contrairement au seuil de détection, est une valeur pratique qui prend en compte l’ensemble de la chaîne de mesure et les bruits éventuels qui perturbent la mesure. La résolution correspond au plus petit écart entre deux valeurs de la mesure qui peut être attribué avec certitude aux phénomènes physiques qui font réagir la mesure. La résolution spatiale : Ce terme est spécifique aux méthodes de mesure de champs. La résolution spatiale correspond à la distance minimale entre deux points de mesure indépendants [Sur04]. Suivant la technique de mesure, cette définition de la résolution spatiale est plus ou moins adéquate, d’autres définitions peuvent être adoptées [Tri07].

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Table des matières

Introduction générale 
CHAPITRE 1 : Aciers à transformation de phase et mise en forme
1.1. Introduction 
1.2. Effet TRIP (TRansformation Induced Plasticity) dans les aciers
1.2.1. Etude microscopique de l’effet TRIP
1.2.2. Etude macroscopique de l’effet TRIP dans les aciers
1.2.3. Aspects thermodynamiques de la transformation martensitique
1.2.4. Cinétique de la transformation martensitique
1.2.5. Propriétés mécaniques d’aciers à effet TRIP
1.3. Mise en forme des aciers à effet TRIP
1.3.1. Généralités concernant le procédé d’emboutissage
1.3.2. Différents types d’essais standards d’emboutissage
1.3.3. Cas des aciers à effet TRIP
1.4. Techniques de mesure de champs cinématiques 
1.4.1. Généralités
1.4.2. Techniques de corrélation d’images numériques
1.4.3. Logiciel de corrélation d’images numériques Correli LMT et Correli Q4
1.4.4. Logiciel de corrélation d’images numériques Vic-2D
1.4.5. Technique de stéréocorrélation
1.5. Conclusion 
CHAPITRE 2 : Modélisation du comportement mécanique des aciers à effet TRIP
2.1. Introduction  
2.2. Différentes approches de modélisation pour la mise en forme 
2.2.1. Cinétique de transformation
2.2.2. Plasticité de transformation
2.2.3. Comportement macroscopique
2.3. Modèle semi-physique 
2.3.1. Description du modèle élasto-viscoplastique
2.3.2. Evolution de la densité de dislocations dans chaque phase
2.3.3. Cinétique de la transformation martensitique
2.3.4. Loi de comportement globale
2.4. Implémentation dans le code de calcul par éléments finis – ABAQUS 
2.5. Analyse de sensibilité des paramètres du modèle 
2.6. Conclusion 
CHAPITRE 3 : Caractéristiques expérimentales du comportement mécanique
3.1. Introduction 
3.2. Caractéristiques des aciers Inox 304L et TRIP 800 
3.3. Essais mécaniques 
3.3.1. Essais monotones
3.3.1.1. Traction uniaxiale
3.3.1.2. Traction équibiaxiale
3.3.1.3. Essai Meuwissen
3.3.2. Essais séquentiels
3.3.2.1. Traction – compression
3.3.2.2. Cisaillement – cisaillement inverse
3.3.3. Essais d’emboutissage
3.3.3.1. Emboutissage de l’acier Inox 304L
3.3.3.2. Emboutissage de l’acier TRIP 800
3.4. Conclusion 
CHAPITRE 4 : Identification des paramètres par analyse inverse
4.1. Introduction 
4.2. Techniques d’identification de lois de comportement – Revue bibliographique 
4.2.1. Généralités
4.2.2. Le problème inverse et sa résolution
4.2.2.1. Méthode de l’écart à l’équilibre
4.2.2.2. Méthode de l’erreur en relation de comportement
4.2.2.3. Méthode des champs virtuels
4.2.2.4. Méthode de recalage par éléments finis
4.3. Identification de lois de comportement pour les aciers Inox 304L, Inox 304L-Cu et TRIP800
4.3.1. Méthode inverse pour l’identification des paramètres des lois de comportement
4.3.1.1. Démarche de résolution du problème inverse
4.3.1.2. Construction de la fonction objectif
4.3.1.3. Algorithmes d’optimisation
4.3.2. Identification des paramètres à partir d’un essai homogène
4.3.2.1. Stratégie d’identification à partir d’un essai homogène
4.3.2.2. Résultats de l’identification
4.3.3. Identification des paramètres à partir d’un essai hétérogène
4.3.3.1. Stratégie de l’identification à partir d’un essai hétérogène
4.3.3.2. Résultats de l’identification à partir de champs de déformations expérimentaux
4.3.4. Validation des paramètres identifiés à partir des différents essais
4.4. Conclusion 
Conclusion générale

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