Modèles d’impédance généralisée en diffraction inverse

Les ondes électromagnétiques et acoustiques sont très largement utilisées dans de nombreux domaines pour identifier la forme et les propriétés physiques d’objets non accessibles directement. Nous pensons par exemple à l’imagerie médicale, à l’exploration du sous-sol ou encore à l’imagerie par ondes radar. Le principe général des méthodes utilisées est le suivant : on envoie une onde dans le milieu que l’on souhaite étudier, ce milieu répond à l’excitation en produisant une onde diffractée et on déduit de la mesure de ce champ diffracté des informations sur le domaine ausculté. Nous parlons alors de « problème inverse » en opposition avec le problème direct qui consiste à modéliser et à simuler numériquement le champ diffracté produit par un milieu connu sollicité par une onde incidente connue elle aussi. Lorsque la longueur d’onde de l’onde incidente est de l’ordre de la taille de l’objet inspecté, le problème inverse est souvent mal posé dans le sens où une faible erreur de mesure (sur le champ diffracté) peut engendrer une erreur importante sur la reconstruction de l’objet étudié ou de ses propriétés physiques. Par conséquent il est important de développer des méthodes de résolution qui prennent en compte cette difficulté tout en étant efficaces. Nous pouvons classer les méthodes de résolution auxquelles nous nous sommes intéressé en deux grandes catégories : les méthodes quantitatives et les méthodes qualitatives.

Les méthodes quantitatives utilisent des techniques d’optimisation pour retrouver un ensemble de paramètres x (la forme d’un objet, les paramètres physiques d’un milieu…) à partir d’une mesure y du champ diffracté par une onde plane. Ce type de méthode nécessite la connaissance a priori du modèle régissant la diffraction des ondes, c’est-à-dire la connaissance d’une application T telle que T (x) = y.

Notre idée est d’étudier le comportement et la pertinence de ces deux types de méthode dans le cas où l’objet que l’on souhaite retrouver est caractérisé par une condition au bord dite d’impédance généralisée (que l’on notera GIBC pour Generalized Impedance Boundary Condition). Ce type de condition au bord couple, par l’intermédiaire d’un opérateur surfacique local que l’on appelle opérateur d’impédance généralisée, la pression à sa dérivée normale en acoustique, ou bien les composantes tangentielles du champ électrique aux composantes tangentielles du champ magnétique en électromagnétisme. La forme la plus simple de condition d’impédance que l’on utilise a été introduite par Leontovich [70] et dans ce cas, l’opérateur d’impédance se réduit à la multiplication par une fonction, on parle alors de condition d’impédance classique ou de condition de Leontovich. L’auteur les a introduites dans le but de modéliser un matériau fortement absorbant, cette propriété se traduisant par une simple condition au bord. De nombreux travaux ont suivi cette direction et des conditions au bord plus complexes ont vu le jour permettant d’approcher des matériaux aux comportements divers (voir [55, 85]). Les couches minces, périodiques ou non, peuvent par exemple être remplacées de manière approchée par une condition d’impédance généralisée qui intervient soit comme condition de transmission (voir [5, 34, 42]) dans le cas où la couche est comprise entre deux matériaux diélectriques, soit comme condition au bord (voir [9, 47]) lorsque la couche couvre un matériau parfaitement conducteur. L’avantage d’utiliser de tels modèles approchés est que l’on transforme un problème à deux échelles (couche mince / milieu extérieur par exemple) en un problème à une seule échelle. Si l’opérateur d’impédance est local, ce qui est le cas pour les modèles approchés évoqués ci-dessus, la résolution numérique du problème de propagation des ondes devient beaucoup moins coûteuse.

En ce qui concerne le problème inverse, une condition d’impédance (classique ou généralisée) remplace avantageusement un matériau ou une configuration produisant des phénomènes à petite échelle. En effet, on diminue le nombre d’inconnues car on passe d’un modèle volumique ou complexe (couche mince, milieu fortement absorbant, surface rugueuse…) à un modèle surfacique et donc on diminue aussi le caractère mal posé du problème. De plus, la résolution du problème direct devenant abordable, on peut envisager d’utiliser des méthodes d’optimisation qui, nous le rappelons, nécessitent la résolution d’un certain nombre de problèmes directs. Le modèle d’impédance classique a fait l’objet de nombreux développements dans le cadre des problèmes inverses dès le début des années 80 (voir [2, 24, 37, 50, 51, 67, 68, 72, 86, 87] par exemple) mais les premiers travaux, à notre connaissance, utilisant des conditions au bord plus complexes datent de 2010 (voir [14]). Pourtant, ces conditions d’impédance généralisée permettent de décrire des phénomènes beaucoup plus riches du point de vue de la physique et donc de couvrir un plus grand nombre de configurations.

RÉSULTATS D’UNICITÉ ET DE STABILITÉ POUR LE PROBLÈME SCALAIRE 

Le problème inverse associé auquel nous nous intéressons consiste à retrouver les coefficients (λ, η) ainsi que la géométrie de l’objet diffractant à partir du champ lointain produit par une ou plusieurs ondes incidentes. Nous rappelons que ce type d’opérateur intervient dans la modélisation d’une couche mince (voir § 1.1.2), dans ce cas, on a λ = k 2µδ et η = ε−1 δ où δ désigne l’épaisseur de la couche et ε et µ désignent les constantes du milieu.

Avant de vouloir résoudre numériquement ce problème, il est nécessaire d’avoir une bonne compréhension théorique du problème inverse. Une des questions essentielles est la question de l’unicité. Les données dont on dispose permettent elles de déterminer de manière unique les inconnues que l’on souhaite retrouver ? Dans le cas d’une condition d’impédance classique, qui correspond à η = 0, le problème a déjà longuement été étudié et le lecteur trouvera des résultats d’unicité à partir de la donnée du champ lointain pour une onde incidente dans [37] puis pour une infinité d’ondes incidentes dans [67] par exemple. Un premier travail a déjà été réalisé dans [14] pour η 6= 0, nous allons le compléter dans plusieurs directions. Tout d’abord nous étendons leurs résultats d’unicité pour la reconstruction des impédances au cas où η est une fonction constante par morceaux et que l’on dispose du champ lointain pour une seule direction d’incidence. De plus, nous montrons que l’on peut déterminer la forme de l’objet diffractant et les fonctions d’impédance lorsque l’on connaît le champ lointain généré par toutes les directions d’incidence. En complément de cette étude d’unicité nous effectuons une analyse de stabilité pour la reconstruction des fonctions d’impédance dans le cas où l’on connaît la géométrie de l’obstacle. Cette question a elle aussi été largement traitée dans la littérature lorsque η = 0 pour l’équation de Helmholtz dans [68, 87] et pour l’équation de Laplace dans [2, 3, 30, 56, 88]. Encore une fois, l’extension à la stabilité pour le coefficient η a été abordée dans [14] mais les résultats de stabilité obtenus sont locaux. Nous montrons que l’on peut obtenir un résultat de stabilité Lipschitzienne globale lorsque la fonction η est constante par morceaux.

Enfin, nous menons une étude de stabilité de la reconstruction des fonctions d’impédance sur une géométrie approchée. Ce dernier point n’a semble-t-il jamais été abordé dans la littérature, néanmoins il est important de répondre à cette question car dans de nombreuses situations on n’a qu’une connaissance approximative de la géométrie de l’objet diffractant comme par exemple lorsqu’on l’a reconstruite à l’aide d’une méthode numérique

Non unicité pour le problème à deux coefficients

Nous venons de démontrer deux résultats d’unicité, l’un lorsque η est supposé connu, l’autre lorsque λ est supposé connu. Mais que se passe-t-il si on cherche à déterminer les deux coefficients simultanément ? C’est impossible, une onde incidente ne suffit pas à déterminer une constante complexe η et une fonction à valeur complexe λ. En effet, il est possible de construire un contre exemple, nous reproduisons ici celui présenté dans [14].

Résultat de stabilité globale à obstacle connu

Afin d’aller un peu plus loin dans la compréhension du problème inverse, nous nous intéressons ici à des questions de stabilité de la reconstruction des impédances lorsque l’on connaît la géométrie de l’objet diffractant. En d’autres termes, a-t-on une sorte de continuité de l’inversion ? Comme nous l’avons déjà évoqué dans la première section, le problème est mal posé au sens de Hadamard. Néanmoins, nous montrons dans cette section que l’on peut trouver des sous ensembles compacts K de (L∞(Γ))2 tels qu’il existe une constante CK telle que pour tous les couples (λ1, η1) et (λ2, η2) de K on a

kλ1 − λ2kL∞(Γ) + kη1 − η2kL∞(Γ) ≤ CKkT(λ1, η1, Γ) − T(λ2, η2, Γ)kL2(Sd−1).

En fait nous n’obtiendrons ce résultat que dans le cas où l’un des deux coefficients est connu, c’est-à-dire lorsque λ1 = λ2 ou bien η1 = η2. Nous obtenons cette relation en nous appuyant principalement sur des inégalités de quantification du prolongement unique obtenues à l’aide d’inégalités de Carleman que nous rappelons dans la section suivante. Nous nous appuyons aussi sur une reformulation du problème de stabilité proposée par Sincich dans [88]. Nous apportons tout de même quelques nouveautés à [88], nous montrons un résultat de stabilité pour une classe plus large de coefficients d’impédance classique mais surtout, nous utilisons une méthode un peu différente pour obtenir la stabilité et ceci nous permettra d’étendre le résultat de stabilité au coefficient d’impédance généralisée η lorsqu’il est constant par morceaux.

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Table des matières

Introduction générale
Partie I Diffraction avec conditions d’impédance généralisée
1 Le cas scalaire
1.1 Exemples de modèles de GIBC
1.1.1 Notions de géométrie différentielle
1.1.2 Conditions aux limites équivalentes pour des couches minces
1.1.3 Les milieux fortement absorbants
1.1.4 Les couches minces périodiques
1.2 Le problème direct de diffraction avec GIBC
1.2.1 Le cas d’un opérateur du type « ∆Γ »
1.2.2 Étude du cas général
1.2.3 Le champ lointain
2 Le cas des équations de Maxwell
2.1 Les modèles d’impédance généralisée pour les équations de Maxwell
2.2 Etude théorique du problème de diffraction
2.2.1 Espaces variationnels et espaces de trace pour les équations de Maxwell
2.2.2 Formulation du problème direct
2.2.3 Existence et unicité de la solution
2.3 Applications à des opérateurs de dérivation surfacique du deuxième ordre
2.3.1 Le cas de « rotΓηrotΓ + ∇ΓγdivΓ + λ »
2.3.2 Le cas de « rotΓηrotΓ + λ »
2.3.3 Le cas de « ∇ΓγdivΓ + λ »
2.4 Le champ lointain
2.5 Formules de calcul vectoriel
Partie II Méthodes d’optimisation pour le problème inverse
3 Résultats d’unicité et de stabilité pour le problème scalaire
3.1 Un problème inverse mal posé
3.2 Unicité pour une seule onde incidente
3.2.1 Unicité pour λ
3.2.2 Unicité pour η
3.2.3 Non unicité pour le problème à deux coefficients
3.3 Résultat de stabilité globale à obstacle connu
3.3.1 Quantification du prolongement unique
3.3.2 Régularité et borne uniforme sur la solution du problème direct
3.3.3 Stabilité pour λ
3.3.4 Stabilité pour η
3.3.5 Optimalité des résultats de stabilité
3.4 Stabilité pour une géométrie perturbée
3.4.1 Les problèmes direct et inverse pour un obstacle perturbé
3.4.2 Continuité du champ lointain par rapport à l’obstacle
3.4.3 Résultats de stabilité pour les impédances avec un obstacle perturbé
3.5 Unicité pour une infinité d’ondes incidentes
4 Calcul des dérivées du champ lointain dans le cas scalaire
4.1 Dérivée du champ lointain par rapport aux impédances
4.2 Dérivée du champ lointain par rapport à l’obstacle
4.2.1 Définition de la dérivée de forme
4.2.2 Calcul de la dérivée de forme du champ lointain
4.3 Dérivée de la fonction coût et état adjoint
5 Résolution numérique du problème inverse en dimension 2
5.1 Résolution numérique du problème direct
5.2 Méthode de résolution numérique du problème inverse
5.3 Reconstruction d’impédances régulières
5.3.1 Réflexion autour des données du problème
5.3.2 Influence de la non-convexité de la géométrie
5.3.3 Reconstruction simultanée des impédances
5.3.4 Reconstruction des impédances sur un obstacle perturbé
5.4 Reconstruction d’impédances constantes par morceaux
5.4.1 Régularisation H1 du gradient
5.4.2 Régularisation TV
5.5 Reconstruction simultanée des impédances et de l’obstacle
5.5.1 Reconstruction de la géométrie à impédances connues
5.5.2 Reconstruction de la géométrie et des impédances supposées constantes
5.5.3 Reconstruction de la géométrie et des fonctions d’impédance
5.6 Application à l’identification des couches minces
5.6.1 Formulation du problème inverse
5.6.2 Identification des paramètres de la couche
5.6.3 Reconstruction d’un obstacle recouvert d’une couche de diélectrique
6 Extension au cas des équations de Maxwell
6.1 Quelques notations
6.2 Un résultat d’unicité
6.2.1 Principe de réciprocité mixte et lemme de densité
6.2.2 Unicité pour une infinité d’ondes incidentes
6.3 Calcul des dérivées du champ lointain
6.3.1 Dérivation du champ lointain par rapport à la condition d’impédance
6.3.2 Continuité du champ lointain par rapport à l’obstacle
6.3.3 Dérivation du champ lointain par rapport à l’obstacle
6.4 Dérivée d’une fonctionnelle moindres carrés
6.4.1 Calcul de la dérivée de forme et état adjoint
6.4.2 Validation numérique de la dérivée de forme
6.5 Application à l’identification d’obstacles
6.5.1 Méthode de reconstruction
6.5.2 Résultats numériques
Partie III Méthodes qualitatives pour le problème scalaire
7 Méthode de factorisation pour les GIBC
7.1 Définition du problème inverse
7.2 Factorisation de l’opérateur champ lointain
7.2.1 Factorisation formelle
7.2.2 Espaces fonctionnels nécessaires à la factorisation
7.2.3 Caractérisation de l’obstacle
7.2.4 Quelques applications du théorème de factorisation
7.3 Application à la reconstruction d’obstacles
7.3.1 Procédure de reconstruction et régularisation
7.3.2 Applications numériques
8 Asymptotic analysis of the ITEP
8.1 ITEP in presence of a thin layer
8.1.1 Setting of the problem
8.1.2 Existence and discreetness of the transmission eigenvalues
8.2 Formal asymptotic development
8.2.1 Preliminary material
8.2.2 The formal asymptotic development
8.3 Convergence analysis
8.3.1 Preliminary regularity estimates
8.3.2 Convergence of the zero-th order approximation
8.3.3 Convergence of the first order approximation
8.3.4 Convergence of the second order approximation
8.4 Numerical results
8.4.1 Computation of the interior transmission eigenvalue
8.4.2 Application to inverse problems
8.5 Appendix
Conclusions

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