Mise en évidence de l’influence des événements de crue sur le compartiment sédimentaire

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Les marges continentales sous l’influence des grands fleuves

Les marges océaniques dominées par les rivières (RiOMar, McKee, 2003) sont les principales connexions entre l’environnement terrestre et l’environnement marin. Bien qu’elles ne représentent que 8% de la surface océanique mondiale, ces zones jouent un rôle majeur dans les cycles biogéochimiques mondiaux etnotamment celui du carbone (Gattuso et al., 1998; Borges et al., 2005). Moins de 5% de la matière organique transportée parles fleuves atteint les grands fonds océaniques (Meade,1996). La majeure partie de la matière se dépose donc rapidement dans les deltas et sur les plateaux continentaux adjacents, ce qui fait de ces environnements d’importantes zones de séquestration de la matière organique (McKee et al., 2004). Hedges et Keil (1995) estiment que 45% du stockage global du carbone se produit dans les sédiments deltaïques. Paradoxalement, pour des taux d’accumulation équivalents, les sédiments deltaïques présentent des efficacités de préservation du carbone organique plus faibles que les environnements non-deltaïques (McKee et al., 2004; Burdige, 2005) (Figure 1.2). La faible efficacité de préservation, dans les nvironnements deltaïques, résulte du remaniement physique des sédiments par esl courants, les marées et les tempêtes (Burdige, 2005). Ce remaniement réoxygène les sédiments et favorise un mélange avec de la matière organique d’origine marine qui catalyse l’oxydation du matériel terrestre plus réfractaire (Aller, 1994; Canfield, 1994). La matière organique terrestre qui sédimente en dehors des environnements deltaïques a subi plusieurs cycles de dégradation avant d’être exportée (Meyers, 1997). Elle est donc plus appauvrie qu’à l’embouchure des fleuves où les particules terrigènes se déposent avant d’avoir perdu l’essentiel de leur charge en matière organique terrestre (Burdige, 2005). Dans les sédiments deltaïques, 70 à 80% de la matière organique totale est d’origine continentale (Gordon et Goñi, 2003). Outre le fait que ces zones sont certainement parmi les plus actives en ce qui concerne le recyclage de la matière organique (Aller, 1998), elles sont également le siège du transfert d’un pool de carbone organique potentiellement recyclable vers le pool de carbone organique séquestré dans les sédiments sur des échelles de temps géologiques (Berner, 1989; Hedges, 1992). Il apparaît donc essentiel d’évaluer et de comprendre le devenir de la matière organique d’origine terrestre sur les marges continentales sous influence des fleuves.

Les sédiments marins dans les environnements deltaïques

Le matériel organique transporté par les fleuves est un mélange hétérogène et complexe de particules dont les caractéristiques chimiques et l’origine des sources sont différentes, comprenant du phytoplancton d’eau douce, des débris végétaux, des fragments de bois, et des sols (Goñi et Hedges, 1990; Goñi et al., 2003). La composition du matériel transporté change également avec les saisons, suivant les années (Gordon et Goñi, 2003) et le type de bassin versant. Les processus biogéochimiques qui se produisent dans les sédiments dépendent des flux particulaires, mais aussi de la composition des apports lithogéniques et biogéniques. A ces apports terrestres s’ajoute du matériel marin en quantité variable(Canuel, 2001; Waterson et Canuel, 2008). Il paraît donc important de caractériser l’origine et la qualité de la matière organique particulaire présente dans les sédiments des deltas et des plateaux continentaux adjacents.

Hétérogénéité de la matière organique terrest

La contribution des apports particulaires terrestres est prépondérante dans la composition de la  matière organique des sédiments Hedges( et al., 1997; McKee et al., 2004; Burdige, 2005). Dans les systèmes deltaïques, la majeure partie cette matière est considérée comme réfractaire (Ittekkot, 1988; Hedges et Keil, 1995; Burdige, 2005). Une fraction de la matière organique terrestre est labile, mais son importance varie de façon saisonnière. La matière organique terrestre transportée par les fleuves varie en taille et en composition, depuis les débris dérivés de plantes jusqu’aux moléculesdsorbéesa sur les limons et les argiles arrachés aux sols (Hedges et al., 1984; Prahl et al., 1994). On observe généralement dans les fleuves une corrélation entre la teneur en matière organique et la surface spécifique des particules minérales transportées. En milieu deltaïque, la relation entre le contenu organique et la surface spécifique des particules sédimentaires atteint rapidement un seuil. Il semble qu’une fois dans le milieu marin 30 à 50% de carbon e organique terrestre soient rapidement reminéralisés ou respirés (Hedges et al., 1997). Laforme sous laquelle la matière organique terrestre est exportée vers l’océan est donc un paramètre contrôlant la distribution et le devenir des molécules organiques. Dans les environnements deltaïques, la matière organique particulaire d’origine terrestre se dépose rapidement et s’accumule dans la zone suboxique des sédiments pour des périodes, qui en l’absence de remaniement, peuvent durer plusieurs dizaines à plusieurs centaines d’années (Hedges et Keil, 1995).

Composition et origine de la matière organique des sédiments deltaïques

Une des clés pour définir le devenir de la matièreorganique terrestre en milieu marin est de distinguer et de quantifier cette composante souvent petite dans des mélanges complexes. Les descripteurs globaux de la matière organique terrestre et l’application de mesures de traceurs moléculaires spécifiques permettent d’aborder cette question, notamment dans le cadre des environnements tels que les systèmes deltaïques où les gradients sont prononcés et varient dans le temps. La matière organique terrestre est essentiellement dérivée de plantes vasculaires, ce qui revient à identifier des signatures isotopiques de la composition et des composés caractéristiques des végétaux supérieurs aériens. Les plantes vasculaires terrestres contiennent des teneurs élevées en macromolécules pauvres en azote et relativement réfractaires à la dégradation microbienne. Ces plantes ont développé des adaptations physiologiques (Fry et Sherr, 1984) et des bio-macromolécules assurant la rigidité des feuilles et des tiges (Hedges et al., 1997) qui sont, parce qu’elles sont spécifiques et persistantes (lignine ou hémicellulose) dans l’environnement, utilisées comme bio-marqueurs d’origine (Prahl et al., 1994).

Dégradation de la matière organique dans les sédiments et acteurs de la dégradation

La dégradation de la matière organique dans les sédiments marins est principalement réalisée par les micro-organismes. La macrofaune contribue également à la transformation de la matière organique sédimentaire (par exemple bioturbation, nutrition), mais son rôle dans le recyclage des composés chimiques est généralementonsidéréc comme étant mineur comparé à celui des microorganismes, en particulier les bac téries (Berner, 1980). Dans les systèmes deltaïques, la matière organique (fluviatile et marine) parvient à l’interface eau-sédiment majoritairement sous forme particulaire (Figure 1.6), et ne peut donc pas être directement assimilée par les bactéries. La première étape durocessusp de dégradation correspond donc à l’hydrolyse extracellulaire des macromolécules complexes composant la matière organique. Cette hydrolyse est catalysée par des enzymes extracellulaires bactériennes (Hoppe, 1983). Les bactéries jouent donc un rôle majeur dans les cycles biogéochimiques mais leur potentiel de reminéralisation de la matière organique dépendde la disponibilité des accepteurs d’électrons présents dans l’environnement.

Un bassin versant hétérogène

Avec une longueur de 814 km, les eaux du Rhône drainent un bassin versant d’une superficie totale de 97800 km² (Figure 2.2). Ce fleuve se caractérise par un bassin d’une extrême hétérogénéité tant du point de vue climatique que géomorphologique. Cette hétérogénéité confère au fleuve un régime hydrologique complexe en raison des influences antagonistes ou conjuguées de nombreux affluents. A sa sortie du Lac Léman, le débit moyen du fleuve est de 340 m3.s-1. Avant d’atteindre Lyon, le fleuve reçoit les eaux de l’Arve et de l’Ain. L’Ain, caractérisé par un régime hydrologique de type pluvio-nival (Pont, 1997), influe essentiellement sur le débit du Rhône au printemps tandis que l’Arve dont le régime est de type nivo-glaciaire exerce généralement son influence au début de l’été. A la sortie de Lyon, la Saône dont le régime hydrologique est pluvial océanique gonfle les eaux du Rhône au printemps. Le débit du fleuve est ensuite renforcé au nord de Valence, par les eaux de l’Isère dont la composante hydrologique principale est de type nivo-glaciaire. Au sud de Valence, dans la moitié septentrionale du bassin, les régimes hydrologiques des principaux affluents sont tous caractérisés par de fortes pentes et l’influence du climat méditerranéen. Sur la rive droite, l’Eyrieux, l’Ardèche, la Cèze et le Gard qui descendent des Cévennes n’influent sur le débit du Rhône que lors de crues violentes qui se produisent généralement à la fin de l’été et en automne. Sur la rive gauche, l’influence préalpine confère à la Drôme, au Roubion et à l’Ouvèze un régime hydrologique beaucoup moins violent. Dans cette partie du bassin, la Durance se distingue par le nombre des aménagements hydroélectriques (12 barrages) et le détournement d’une partie de ses eaux pour l’irrigation des terres agricoles, ce qui atténue fortement le caractère méditerranéen de la rivière. Soixante kilomètres avant l’embouchure, le débit annuel moyen de Rhône est de 1700 m3.s-1 (Pont, 1997). Au sud d’Arles, le fleuve se divise en deux bras, le Petit Rhône et le Grand Rhône. Le Grand Rhône assure à lui seul plus de 80% des apports sédimentaires qui sont directement transférés dans le prodelta (i.e., partie immergée du delta). De manière générale, la géomorphologie du bassin a conduit à la réalisation de nombreux barrages hydroélectriques (Pont, 1997 en relève 67 au total). Le fleuve a également été aménagé pour la navigation et son eau est utilisée pour le refroidissement des centrales nucléaires du Bugey, de Saint-Alban, de Cruas, de Tricastin et de Marcoule et l’irrigation des cultures.

Le delta du Rhône, son prodelta et le plateau continental adjacent

Selon la classification descriptive basée sur la dynamique fluviale (Salomon, 2009), le delta du Rhône fait partie des deltas complexes polylobés. Il s’agit en effet d’un delta ancien soumis à des houles fortes et constantes qui contraignent les alluvions à la côte ; la dérive littorale étant relativement faible, le fleuve a eu la possibilité de construire plusieurs lobes qui marquent chacun l’héritage d’un ancien tracé principal. Le système deltaïque du Rhône comporte trois zones (Figure 2.5):
– La plaine deltaïque qui dans le cas du Rhône équivaut à la Camargue. Cette zone est le prolongement de la plaine alluviale, une étendue de terre de très faible altitude parcourue par un réseau de chenaux ramifiés qui n’est, à l’heure actuelle, plus suffisamment alimentée par les alluvions.
– Le front du delta qui est le lieu de rencontre entre les eaux douces chargées de sédiments et les eaux salées. C’est la zone de sédimentation des sédiments les plus grossiers. La sédimentation dépend de la densité de l’eau du fleuve, de la charge et de la taille des particules transportées. Dans les deltas à « dominance de houle » (Galloway, 1975), comme celui du Rhône, les sables sont remobilisés et étalés en barres parallèles à la côte qui alimentent les plages et les cordons littoraux sableux lagunaires.
– Le prodelta qui constitue la zone la plus externe et la plus profonde du delta. Il s’y dépose des sédiments plus fins que ceux des barres d’embouchure. Les alluvions, en se déposant, constituent un lobe de 40 à 50 m d’épaisseur en forme d’éventail (Rabineau et al., 2005). Le prodelta fait progressivement place aux dépôts marins du plateau continental.

Rencontre des eaux du fleuve et de la mer Méditerranée

La rencontre des eaux du fleuve et de la mer conduit à une stratification multicouche.
La couche de surface d’une épaisseur généralement inférieure à 1 m (Tesi et al., 2007) correspond au panache du fleuve dont la dilution dépend des conditions hydrodynamiques. La couche sous jacente beaucoup plus épaisse (10 m et plus) est en contact avec le fond et constitue le néphéloïde benthique qui assure le transport de matière solide vers le large (Roussiez et al., 2005). Les processus hydrodynamiques et de mélange dans le système sont caractéristiques du coin salé des estuaires de fleuves se jetant dans des mers à régime microtidal (Tesi et al., 2007). L’eau salée forme une structure en forme de cale (i.e., le coin) à proximité du fond sous la couche d’eau douce fluviatile. L’extension du coin salé dans le lit du fleuve dépend essentiellement du débit du fleuve. Les particules grossières (>5μm) transportées par le fleuve sont piégées au point de rencontre des masses d’eau par le phénomène de floculation. Les particules les plus fines présentent un comportement plus complexe et sont dispersées par le panache de dilution des eaux du fleuve (Thill et al., 2001).

Apports liquides et solides

Depuis la construction du haut barrage d’Assouan sur le Nil, le Rhône, avec un débit moyen annuel de 1700 m².s-1 (Pont, 1997) est le fleuve le plus important de l’espace méditerranéen (Alliot et al., 2003). Le fleuve délivre une moyenne interannuelle de 54 milliards de m3 d’eau douce sur la marge continentale. Cette eau est chargée de matières minérales et organiques, sous forme dissoute et particulaire. Sur la zone d’étude, les apports totaux en azote et en phosphate ont été estimés à 123 x 103 T.an-1 et à 8 x 103 T.an-1(Moutin et al., 1998) . L’apport en azote se fait essentiellement sous forme minérale (82%) alors que le phosphate est en grande partie apporté sous forme organique (69%) et plus précisément sous forme particulaire (53% du phosphate total). D’autre part, l’azote organique dissous et l’azote particulaire représentent une fraction équivalente (8 et 9%) du pool d’azote total. En ce qui concerne les flux de carbone, Sempéré et al. (2000) ont estimé que la majorité des apports en carbone se font sous forme de carbone inorganique dissous (82%). Le carbone organique dissous et le carbone particulaire représentent, quant à eux, 6 et 8% du carbone total.
Le Rhône transporte également des quantités importantes de sédiments et constitue la source sédimentaire essentielle du Golfe du Lion. Les estimations de débit solide en suspension sont comprises entre 2,2 et 6,2 x 106 T.an-1 (Pont, 1997). Il existe en fait une très forte variabilité interannuelle, puisque sur les 40 dernières années, la valeur annuelle moyenne est encadrée selon les années par des débits solides compris entre 1,4 et 16 millions de tonnes.
Les crues ont une très forte capacité de transport, puisqu’au cours de la période 1994-1995, les crues ont à elles seules assuré plus de 80% du débit solide total (Pont, 1997). Site d’étude.

Panache de dilution des eaux du Rhône

Les eaux du Rhône s’écoulent en mer sous la forme d’un panache de dilution (Figure 2.6) dont l’importance est dépendante de l’écoulement du fleuve. En revanche, la direction du panache est influencée par le vent et la circulation générale. Plusieurs études (Estournel et al., 2001; Arnoux-Chiavassa et al., 2003) ont mis en évidence une orientation préférentielle du panache vers le Sud-Ouest sous des conditions de vent stable, mais aussi de forts vents (Arnoux-Chiavassa et al., 2003).

Activité de transformation et de transfert de la matière organique particulaire

Les processus biogéochimiques à l’embouchure du Rhône et sur le plateau adjacent sont particulièrement bien documentés (Lansard et al., 2008, 2009; Cathalot et al., 2010; Pastor et al., 2011a, 2011b). Le prodelta du Rhône se caractérise dans sa partie proximale par une intense activité de minéralisation du dépôt de matière organique (Lansard et al., 2009; Cathalot et al., 2010). Le contenu en carbone organique dans les sédiments de surface est généralement de l’ordre de 2% et décroît vers le large pour atteindre moins de 0,3% sur le bord extérieur du plateau (Lansard et al., 2009). A proximité de l’embouchure, Lansard et al. (2009) estiment que 85% du carbone organique sont d’origine terrestre. Cette proportion diminue pour ne représenter plus que 25% aux stations sous influence situées hors du prodelta. Dans le prodelta, les forts taux d’accumulation entretiennent une consommation d’oxygène élevée, ce qui suggère qu’une fraction importante de la matière organique terrestre apportée par le Rhône est effectivement reminéralisée. Les mêmes auteurs ont évalué que 60% des apports de matière organique particulaire sont enfouis (52%) ou reminéralisés (8%) dans le prodelta et que les 40 % restant sont en partie reminéralisés dans la colonne d’eau et en partie exportés sur le plateau continental. Récemment, Cathalot et al. (2010) ont confirmé les valeurs de flux d’oxygène mesurés par Lansard et ses collaborateurs, et ont montré que les variations temporelles de ces flux étaient limitées. Les taux de reminéralisation benthiques demeurent relativement stables car la relaxation du système après des apports massifs de matériel lié à une crue survient rapidement. La modélisation des processus de transformation biogéochimique dans le sédiment du prodelta (Pastor et al., 2011b) suggère que les processus de reminéralisation du carbone organique sont certainement sous-estimés par les méthodes basées sur la consommation d’oxygène et les rapports stoichiométriques de Redfield. Ils suggèrent que la réactivité de la matière organique des sédiments du prodelta est certainement liée à la relative fraîcheur d’une fraction significative de la matière organique terrestre. De plus, les flux d’oxygène et la production d’ammonium (NH4 +) indiquent que la matière organique présente dans les sédiments est principalement minéralisée par voies anoxiques Site d’étude (Pastor et al., 2011b). Une grande partie des flux d’oxygène résulte de la ré-oxydation des solutés réduits produits sous l’interface plutôt que de processus de respiration aérobie (Canfield et al., 1993). Sur le plateau continental adjacent, les taux d’accumulation décroissent de façon marquée (inférieur à 1 cm.an-1) et la contribution de la minéralisation de la matière organique par voie aérobie augmente, l’oxygène pénètre plus profondément dans les sédiments du large (Pastor et al., 2011b).

Adéquation entre les campagnes d’échantillonnage et les objectifs de la thèse

La campagne océanographique Riomar-1 a été réalisée au cours d’une période pendant laquelle les débits du fleuve sont demeurés faibles et constants pendant une durée relativement longue. Les résultats de cette campagne ont donc été exploités afin de décrire les gradients d’origine et de qualité de la matière organique sédimentaire dans le prodelta et sur le plateau continental adjacent.
A l’inverse, les campagnes Chaccra Bent-1 et Bent-2 se sont déroulées à des périodes pendant lesquelles le débit du fleuve était plutôt élevé et fortement variable. La première campagne océanographique s’est déroulée au cours d’un événement de crue de type méditerranéen étendu, tandis que la seconde a été réalisée peu de temps après un épisode de crue de type Cévenol. Ces circonstances ont permis de déterminer dans quelles mesures les caractéristiques de la matière organique des sédiments du prodelta et du plateau adjacent étaient influencées par des épisodes de crues de différents types : intense et long dans un cas, intense mais court dans l’autre.
Pour répondre au troisième objectif de ma thèse qui était de mettre en place une expérience de biodégradation rendant compte de la réactivité de la matière organique des sédiments du prodelta, j’ai utilisé du matériel récolté au cours de la campagne Chaccra Bent- 3. Tout comme les campagnes Riomar-1 et Chaccra Bent 1, la campagne Chaccra-Bent-3 a été réalisée au cours de la période printanière. Le sédiment récolté à cette occasion a permis de suivre la dynamique de transformation de la matière organique d’origine continentale dans les sédiments du prodelta.

Protocole d’analyse des acides aminés enzymatiquement hydrolysables (AAD)

La figure 3.7 présente le protocole d’extraction des acides aminés disponibles (AAD) selon Mayer et al. (1995). Le sédiment lyophilisé (~200 mg) est tout d’abord empoisonné pendant une heure à température ambiante avec 1 ml d’un mélange de pentachlorophénol (0,1 mM) et d’arséniate de sodium (0,1 M). L’empoisonnement a pour objectif d’inhiber l’activité bactérienne qui risque d’interférer avec la réaction de digestion enzymatique que l’on veut pouvoir contrôler. Le pentachlorophénol agit rapidement mais perd également rapidement son potentiel d’inhibition alors que les effets de l’arséniate de sodium se mettent en place plus lentement, mais durent plus longtemps. Une hydrolyse enzymatique des protéines est ensuite réalisée en ajoutant de la protéinase-K (1 mg.ml-1). Cette enzyme protéolytique présente l’avantage d’être non-spécifique et non auto-hydrolysable. L’hydrolyse enzymatique est conduite pendant 6h à 37°C. Les extraits contiennent une grande variété de molécules aminées allant de monomères jusqu’à des protéines de haut poids moléculaire. L’échantillon est centrifugé (9458 tr.min-1, 4°C, 30 min) et le surnageant est séparé du sédiment et de la matière organique non hydrolysée. L’objectif étant de quantifier les molécules de faibles  poids moléculaires susceptibles d’être absorbées, à savoir des monomères et des oligomères,l’enzyme et les polypeptides composés de plus de 15 monomères sont précipités en ajoutant de l’acide trichloro-acétique (100%) à raison d’un volume de TCA pour 10 volumes d’extrait. Le mélange est ensuite centrifugé (9458 tr.min-1, 4°C, 30 min) pour séparer les monomères et les petits oligomères des macromolécules qui ont précipité. Le surnageant contenant les mono- et oligomères est récupéré et un aliquot de 750μl est introduit dans une ampoule à sceller en verre avec 750μl d’HCl 12N et 100 μl d’homosérine 0,5 mM. Les ampoules sont scellées sous vide et placées à l’étuve à 100°C pendant 24h. Après cette étape, l’extrait ne contient plus que des monomères d’acides aminés, les petits peptides libérés lors de l’hydrolyse enzymatique ayant été hydrolysés par l’acide. Bien que la protéinase K soit non auto-hydrolysable, des « blancs enzymes » contenant uniquement l’enzyme sont réalisés selon le même protocole afin de vérifier que l’enzyme n’a pas libéré les acides aminés la composant.

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Table des matières

1 Introduction générale
1.1 Stocks et flux de carbone organique dans la biosphère
1.2 Les marges continentales sous l’influence des grands fleuves
1.2.1 Processus biogéochimiques
1.2.2 Les grands fleuves mondiaux
1.2.3 Les deltas
1.3 Les sédiments marins dans les environnements deltaïques
1.3.1 Hétérogénéité de la matière organique terrestre
1.3.2 Composition et origine de la matière organique des sédiments deltaïques
1.3.3 Dégradation de la matière organique dans les sédiments et acteurs de la dégradation
1.4 Caractérisation de la matière organique sédimentaire
1.4.1 Les descripteurs globaux de la matière organique
1.4.2 Les bio-marqueurs
1.4.3 Les indices de dégradation et de qualité de la matière organique sédimentaire
1.5 Caractérisation du compartiment bactérien benthique
1.6 Objectifs de la thèse
2 Le Rhône, son prodelta et le plateau continental adjacent
2.1 Contexte régional
2.2 Le Rhône
2.2.1 Un bassin versant hétérogène
2.2.2 Un régime hydrologique complexe
2.3 Le delta du Rhône, son prodelta et le plateau continental adjacent
2.4 Influence du Rhône sur le littoral
2.4.1 Rencontre des eaux du fleuve et de la mer Méditerranée
2.4.2 Apports liquides et solides
2.4.3 Panache de dilution des eaux du Rhône
2.5 Activité de transformation et de transfert de la matière organique particulaire
3 Matériels et Méthodes
3.1 Stratégie d’échantillonnage
3.1.1 Description des campagnes d’échantillonnage
3.1.2 Adéquation entre les campagnes d’échantillonnage et les objectifs de la thèse
3.1.3 Descriptif des stations
3.1.4 Description de l’échantillonnage
3.2 Approches méthodologiques
3.2.1 Granulométrie
3.2.2 Pigments chlorophylliens
3.2.3 Acides aminés
3.2.4 Acides gras
3.2.5 Structure des communautés bactériennes
4 Distribution et caractéristiques de la matière organique dans les sédiments superficiels du prodelta du Rhône et du plateau adjacent
4.1 Contexte de l’étude
4.2 Approche méthodologique
4.3 Résultats
4.3.1 Débit du fleuve et conditions environnementales
4.3.2 Répartition spatiale des propriétés globales des sédiments
4.3.3 Composition en acides aminés totaux et disponibles
4.3.4 Distribution des biomarqueurs lipidiques
4.3.5 Variations des δ13C des acides gras individuels
4.4 Discussion
4.4.1 Distribution spatiale de la matière organique continentale et marine dans les dépôts superficiels
4.4.2 Etat de dégradation de la MO dans les sédiments de surface
4.4.3 Qualité nutritionnelle de la matière organique sédimentaire et implications écologiques
4.5 Conclusions
5 Influence des événements de crue sur la composition de la matière organique sédimentaire et sur la structure des communautés microbiennes
5.1 Contexte de l’étude
5.2 Approche méthodologique
5.3 Résultats
5.3.1 Caractéristiques globales du sédiment
5.3.2 Distribution des pigments chlorophylliens et de leurs produits de dégradation
5.3.3 Concentrations et composition de la fraction protéique
5.3.4 Distribution des biomarqueurs lipidiques
5.3.5 Structure des communautés bactériennes
5.3.6 Relations entre la structure des communautés bactériennes et les variables environnementales
5.4 Discussion
5.4.1 Originalité de l’approche
5.4.2 Mise en évidence de l’influence des événements de crue sur le compartiment sédimentaire
5.4.3 Comparaison de l’influence des crues sur l’intensité du recyclage et sur le compartiment bactérien
5.4.4 Influence de la qualité de la matière organique sur la structure des communautés bactériennes
5.4.5 Comparaison des caractéristiques sédimentaires des dépôts de crue
5.5 Conclusions
6 Réactivité biochimique de la matière organique dans les sédiments prodeltaïques : expérience de laboratoire
6.1 Contexte de l’étude
6.2 Approche méthodologique
6.2.1 Echantillonnage et conditionnement des sédiments
6.2.2 Dispositif expérimental d’incubation
6.2.3 Traitement des données
6.3 Résultats
6.3.1 Caractéristiques des sédiments utilisés
6.3.2 Cinétique de dégradation de la matière organique sédimentaire
6.4 Discussion
6.4.1 Etat de la matière organique sédimentaire en début d’expérience
6.4.2 Réactivité biochimique des sédiments du prodelta
6.4.3 Processus de transformation de la matière organique sédimentaire du prodelta en condition aérobie
6.5 Conclusions
7 Synthèse et perspectives
7.1 Variabiabilité spatio-temporelle de la distribution de la matière organique dans les sédiments du prodelta et du plateau continental sous influence du Rhône
7.2 Qualité et réactivité de la matière organique
7.3 Diversité et activité des communautés bactériennes benthiques
Bibliographie

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