Microphysique des systèmes précipitants et problématique de l’évaporation en Afrique de l’Ouest

Microphysique des systèmes précipitants et problématique de l’évaporation en Afrique de l’Ouest

Les régions tropicales sont une source d’énergie qui gouverne non seulement la circulation de l’atmosphère tropicale elle-même, mais influence également celle des latitudes tempérées par l’intermédiaire des cellules de grandes échelles (BEST, 1988). Les deux tiers des précipitations issues de cette dernière sont observées sur les tropiques. Une partie de l’énergie calorifique de l’atmosphère est produite par le dégagement de chaleur latente dû à la condensation. Les systèmes précipitants observés en Afrique de l’Ouest revêtent une importance capitale pour la communauté scientifique et justifient les nombreuses campagnes d’observation effectuées dans cette région. L’objectif de ce chapitre est de faire un rappel sur les éléments du climat de l’Afrique de l’Ouest mais également sur les systèmes précipitants tropicaux.

Rappels sur le climat de l’Afrique de l’Ouest

Circulation Générale 

La circulation générale atmosphérique est le processus par lequel l’équilibre général du système atmosphérique est maintenu. Des échanges énergétiques s’effectuent entre les régions tropicales, où nous avons un excédent d’énergie, et les régions des hautes et moyennes latitudes déficitaires en énergie (Figure 1.1). Ces échanges s’effectuent par des courants aériens, sous forme de chaleur sensible par advection méridienne d’air chaud et par transfert de chaleur latente associée à l’évaporation de l’eau des océans et des zones humides continentales. Les courants océaniques transportant les eaux chaudes des tropiques vers les latitudes plus élevées contribuent également aux échanges d’énergie.

La première circulation atmosphérique qui en découle est appelée circulation de Hadley. Elle est constituée de deux cellules, chacune dans un hémisphère : les cellules de Hadley Nord et Sud. La rotation de la terre, qui induit la force de Coriolis et la répartition des masses continentales et océaniques qui ont des propriétés thermiques différentes vont modifier localement la circulation de base des cellules de Hadley. Au voisinage de l’équateur météorologique, le gradient méridien de température et d’humidité a pour conséquence l’accélération des vents d’est appelés jets qui jouent un rôle particulièrement importants dans les mécanismes météorologiques d’Afrique de l’Ouest. Le Jet d’Est Africain (JEA) est un courant d’est observé dans la moyenne troposphère entre 500 hPa et 700 hPa entre les longitudes 15°E et 15°W autour de 15°N pendant l’été boréal (Figure 1.2). Le JEA est un élément important du climat sahélien. Lafore et Moncrief (1989) ont montré par le biais de simulations que l’organisation de la convection et l’apparition de lignes de grains sont favorisées par le cisaillement du vent associé à la présence du JEA dans les couches moyennes et du flux de mousson dans les basses couches. Le JEA a une intensité variable avec un maximum de 15 m/s et une forte variabilité en altitude. Il résulte du gradient de pression, conséquence du gradient méridien entre l’air sec et très chaud du Sahara et l’air humide du Golfe de Guinée, ce qui limite son influence sur Afrique de l’Ouest. Cadet et Nnoli (1987) pensent que le JEA a pour effet de transporter l’humidité au-dessus des régions sahéliennes et on note par ailleurs qu’il s’intensifie pendant les années sèches (Kanamitsu et Krisnamurti 1978). Le Jet d’Est Tropical (JET) est un fort courant en haute troposphère entre les plateaux tibétains et les côtes ouest africaines, atteignant localement 40m/s. Ce Jet est alimenté par la libération de chaleur latente au sein des systèmes convectifs associés à la mousson indienne et ouest africaine (Chen, 1982). Son origine serait liée à l’établissement de la mousson indienne et notamment aux contrastes thermiques existant en été entre les hauts plateaux du Tibet et les régions océaniques moins chaudes dans le sud-est asiatique. Il est observé en Afrique de l’Ouest entre 100 et 200 hPa autour de 10°N avec une intensité maximale de l’ordre de 20 m/s (Figure 1.2). Hulme et Tosdevin (1989) ont montré que le régime de pluie au Soudan est influencé par la variation du flux du JET. Il représente en fait la branche supérieure de la cellule de Walker sur l’Afrique (Fontaine 1989, Janicot 1990). Cette circulation est moins nette que la cellule pacifique de Walker. La branche inférieure est constituée par la composante zonale du flux de mousson et les branches ascendantes et subsidentes se situeraient vers 20°E et 20°W respectivement.

La troposphère tropicale est en même temps le siège de perturbations plus ou moins régulières, associées à des ondulations du champ de vent. Ces perturbations régulières se déplaçant d’est en ouest, sont observées en Afrique mais aussi au dessus de l’Atlantique et du Pacifique. Elles sont communément appelées ondes d’est. Burpee (1976) et Reed et al. (1977) ont déduit d’une analyse composite, 8 étapes dont chacune représente une certaine catégorie correspondant aux variations du champ de vent (figure 1.3). La catégorie 3 correspond à l’axe du thalweg mobile de l’onde à 700 hPa alors que la catégorie 7 correspond à l’axe de l’onde appelée dorsale. Deux types d’ondes sont ainsi connus : les ondes d’est de périodes 3-5 jours (Reed et al. 1977) et les ondes 6-9 jours (de Félice et al. 1990 ; Diédhiou et al. 1999) qui modulent à la fois la convection et les précipitations.

Les ondes de 3-5 jours sont actives entre Juin et Octobre et participent à la génération des cyclones sur l’Atlantique (Avila and Clark 1988). Elles transportent également les amas convectifs en Afrique de l’Ouest initiant ainsi un environnement favorable à l’apparition et au développement de lignes de grains (Chen and Ogura, 1982). Carlson (1969b) à partir d’images satellites, de radiosondages, et de cartes analysées, fut le premier à effectuer une étude détaillée des ondes d’Est Africaines sur une large zone variant de 25°W à 25°E, durant 3 mois et demi de l’année 1968. Il estime leur longueur d’onde à 2100 km et situe une zone de forte activité entre 10°W et 20°W. Il situe leur origine à l’Est de la zone d’étude et leur propagation est plus rapide au Sud qu’au Nord.

Riehl (1948), Yanai et Murakami (1970) ont identifié des ondes d’Est se propageant avec des périodes d’environ une semaine. Ces ondes de 7 jours ont été également observées par Gruber (1975) utilisant les données quotidiennes du vent à 200 hPa en région tropicale durant les étés 1970 et 1971. Viltard et de Félice (1979), en faisant une étude statistique du vent avec les données de l’expérience GATE sur des stations d’Afrique de l’Ouest, ont trouvé un pic d’énergie spectrale dans la bande de période 6-9 jours sur des stations localisées autour de 15°N (Dakar, Bamako, Ouagadougou). Cadet et Houston (1984) et Cadet et Nnoli (1987) ont utilisé les champs de vent du CEPMMT et des données d’humidité spécifique dérivant du sondage de la vapeur d’eau par le satellite TIROS/NOAA, pour calculer l’eau précipitable quotidienne et étudier l’apport de vapeur d’eau sur l’Atlantique tropical et l’Afrique de l’Ouest durant l’été 1979. L’analyse spectrale de ces quantités montre deux pics d’énergie côte à côte, celui de la bande 6-9 jours et celui de la bande 3-5 jours.

Circulation de mousson en Afrique de l’Ouest

En été boréal, la circulation générale dans les basses couches en un lieu est déterminée par sa position par rapport à la trace au sol de l’équateur météorologique ou zone de convergence intertropicale (ZCIT). En effet, la trace au sol de l’équateur météorologique, appelée également front intertropical (FIT), se déplace vers le nord en suivant le mouvement apparent du soleil avec 4 à 8 semaines de retard (Janicot et Fontaine, 1993). Si l’on se trouve au nord du FIT, nous sommes sous l’influence des alizés NW, N, NE et E issus de l’anticyclone des Açores alors qu’au Sud du FIT, nous subissons les effets de la circulation de l’anticyclone de Sainte Hélène que l’on appelle la mousson ouest africaine. La mousson africaine est donc une circulation atmosphérique d’échelle synoptique, voire globale, conséquence des contrastes thermiques et d’humidité entre des régions continentales (Sahara) et océaniques. Ces contrastes sont en interaction dans l’équilibre du système énergétique océan atmosphère-continent. Ils accentuent la migration vers le nord de l’équateur météorologique sur le fuseau. Les alizés du sud de l’équateur météorologique sont déviés sous l’influence de la force de Coriolis dans une direction sud /sud-est et alimentent l’Afrique de l’Ouest par l’humidité océanique qu’ils transportent. La migration de l’équateur météorologique vers 10°N a lieu brutalement vers la fin du mois de juin. Ce mouvement brutal de l’équateur météorologique semble être associé à une perturbation du vent zonal à 950 hPa se propageant vers l’ouest et de période de l’ordre de 30 à 40 jours (Sultan and Janicot, 2000) Le FIT (Fig.1.4) correspond à la limite entre l’Harmattan au nord (alizé du nord) et la mousson au sud (alizé du sud) (Dhonneur 1974). Il occupe sa position la plus au nord vers 25°N en juillet-août, et la plus au sud vers 5°N pendant les mois de Décembre-Février. Il est en outre repéré à l’aide des données de vent des basses couches de l’atmosphère ; sa position permet de déterminer l’épaisseur maximale de la mousson et les différents types de temps (Tab. 1.1). En général, la présence de la mousson et la description de sa direction du SE, SW à W en fonction de l’altitude sont faites suivant les niveaux de pression 925, 900, 850, 800, 700 et 600 hPa (Fig.1.4). La migration saisonnière de la mousson se heurte aux flux d’harmattan qui est un vent plus sec et plus chaud de nord-est en provenance du Sahara. Donc en été boréal, l’influence de flux de mousson dans les basses couches s’étend jusqu’à la partie nord de l’Afrique (Fig.1.5). La figure 1.5 illustre également, comme indiqué dans le paragraphe précédent le régime de vents d’est qui se met en place avec une organisation en 2 axes plus rapide : le jet d’est africain (JEA) et le jet tropical d’est (JET), au dessus du flux de mousson.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
Chapitre 1 : Microphysique des systèmes précipitants et problématique de l’évaporation en Afrique de l’Ouest
1. Rappels sur le climat de l’Afrique de l’Ouest
1.1. Circulation Générale
1.2. Circulation de mousson en Afrique de l’Ouest
2. Les Phénomènes pluvieux en Afrique de l’Ouest
2.1. L’observation infrarouge : Premier moyen d’observation satellitaire en Afrique de l’Ouest
2.2. Processus de formation des systèmes précipitants
2.2.1. L’orage ordinaire
2.2.2. L’orage supercellulaire ou supercellule
2.2.3. L’orage multicellulaire ou multi cellule
2.3. Des systèmes convectifs de Méso échelles (MCS) aux Lignes de Grain (LG)
2.4. Les Lignes de Grains Tropicales
2.4.1 Formation des Lignes de Grains (LG)
2.4.2. Cycles de vie des LG
2.4.3. Structure interne des LG
2. Les autres méthodes de suivi et d’estimation des MCS en Afrique de l’Ouest
3.1. La méthode Micro onde
3.2. Méthode combinée
4. Microphysique des processus de basses couches : Notion de coalescence et « breakup »
4.1. Phénomènes de coalescence
4.2. Phénomènes de « break up » ou éclatement
5. Problématique de l’évaporation et ses conséquences en Afrique de l’Ouest
5.1. Notions d’Evaporation et Chaleur Latente
5.2. Importance et Conséquence sur l’environnement
Chapitre 2 : Source et structure des données utilisées : La mission TRMM (Tropical Rainfall Measurement Mission) et le radar météorologique spatial « PR »
1. Généralité sur la Mission TRMM
1.1. Contexte de la mission TRMM
1.2. Description de TRMM
1.3. Le « Precipitation Radar »
2. Le Radar PR de TRMM : Caractérisation de mesure, Algorithmes et Données
2.1. Principe de mesure du radar PR de TRMM
2.2. Algorithme 2A25 pour la restitution de R à partir des données du radar PR
2.3. Améliorations et Corrections de l’Algorithme 2A25 de la version 5 à la version 6
3. Microphysique des DSD et notion d’évaporation atmosphérique
4. Outils de diagnostiques : De l’Indexe de Gradient Vertical (IVG) à l’Indexe d’Evaporation Vertical (IVE)
5. Données utilisées dans la présente étude
Chapitre 3 : Caractéristiques des profils verticaux de précipitation sur l’Afrique de l’Ouest
1. Analyses statistiques des profils verticaux de précipitations sur l’Afrique de l’Ouest
2. Climatologie des précipitations régionales obtenues avec le radar PR de TRMM
3. Variation intra-saisonnières et interannuelles des profils verticaux de précipitations sur l’Afrique de l’Ouest
3.1. Variabilité mensuelle des profils verticaux de précipitation sur l’Afrique de l’Ouest
3.2. Variabilité annuelle des profils verticaux de précipitation sur l’Afrique de l’Ouest
4. Etude régionale des profils verticaux de précipitations
5. Bilan d’eau des processus dans les basses couches de l’Atmosphère: Index d’Evaporation Verticale des précipitations
5.1. Distribution de l’Index d’Evaporation Verticale des précipitations sur l’Afrique de l’Ouest
5.2. Variation saisonnière de l’IVE sur l’Afrique de l’Ouest
6. Conclusions
Chapitre 4 : Profils verticaux de précipitation et cycle de l’eau des MCS
1. Résumé de l’article : « Comparaison de profils verticaux de précipitation de TRMM-PR avec les sorties du Modèle LMDZ.»
1.1 Introduction
1.2. Data and Methods
a. TRMM data and analysis methods
b. Model and Experiments design
1.3. Results
a. Comparison of vertical rainfall profiles
b. Comparison of Vertical Gradient seen by observations and model’s schemes
1.4. Summary and Conclusions
2. Influence du cycle de vie sur les profils de précipitation
2.1 Présentation du logiciel RDT de Météo-France : Rapid Developing Thunderstrom
2.2. Labellisation, séparation et identification des systèmes pluvieux avec TRMM-PR
2.3. Profils verticaux de précipitations suivant leur cycle de vie
3. Influence des noyaux et pixels convectifs des systèmes pluvieux sur les profils verticaux de précipitation stratiformes
4. Conclusions
Conclusion générale

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *