Méthodologie de l’imagerie fonctionnelle chez le primate non-humain

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Caractéristiques et propriétés fonctionnelles

Comme tout mécanisme biologique, la détection de la symétrie va être régit par des propriétés à la fois physiques et fonctionnelles qui seront développées dans cette section.

Rapide et automatique

Quelques fractions de seconde suffisent à détecter la symétrie. Ce processus à la fois rapide et robuste se distingue des autres mécanismes cognitifs par le fait qu’il est instantané et ne nécessite pas d’engagement de la mémoire (Tyler 1995). Comme évoqué précédemment, les informations que nous avons pu accumuler à propos d’un objet ne sont pas indispensables pour faire le lien entre les parties symétriques qui le composent ce qui laisse supposer le caractère automatique de la détection de la symétrie. D’autres arguments en faveur de cette hypothèse ont également pu être mis en évidence. Par exemple, la détection de la configuration symétrique globale d’un objet semble précéder l’encodage des éléments structuraux qui le composent. Cela a pu être révélé grâce à l’observation de motifs de balayage oculaire unilatéraux, c’est-à-dire, des fixations concentrées sur un côté de l’axe de symétrie du stimulus à la suite de sa présentation (Locher et Nodine 1973; Stratton 1906). Ce fut également le cas pour la détection locale de la symétrie dont le modèle de saillance basé sur celle-ci semble être un prédicteur puissant des fixations oculaires humaines. La symétrie peut alors être utilisée comme prédicteur de l’ordre de fixation (Kootstra, de Boer, et Schomaker 2011) et ne semble pas être dépendant d’une discrimination active (Makin, Poliakoff, et al. 2020).
Une simple et brève fixation (inférieure ou égale à 100ms) suffit au système visuel pour détecter la présence d’un motif symétrique et le rendre perceptible (Carmody, Nodine, et Locher 1977; Sharman, Gregersen, et Gheorghiu 2018). Cela suggère que la décision concernant le caractère symétrique d’un stimulus est déterminée avant même que les yeux ne scannent en détail sa structure. De plus, la présence de la symétrie peut influencer les performances de détection alors même qu’elle n’est pas requise pour une tache demandée. Par exemple, si l’on demande à des participants de juger si les contours de deux objets se faisant face sont symétriques ou 43 non, et que les contours externes étaient également symétriques, alors la détection de la symétrie était facilitée et le niveau de performance se voyait augmenté (Koning et Wagemans 2009). À travers une étude de cas d’un patient souffrant d’une héminégligence latérale (lésions au niveau de l’hémisphère droit), (Driver, Baylis, et Rafal 1992) ont observé une préservation de la perception de la symétrie chez ce patient bien qu’il n’ait pas fait preuve d’un expérience consciente de celle-ci. Il n’est donc pas nécessaire de déployer une attention particulière pour détecter la présence de motifs symétriques. À ceci s’ajoute les nombreuses études en EEG qui ont pu mettre en évidence la présence d’une composante négative automatique et soutenue, appelée SPN (Sustained Posterior Negativity) au sein des potentiels évoqués par la présentation de stimuli symétriques (pour revue (Bertamini et Makin 2014)) .
L’ensemble de ces éléments démontre que la perception de la symétrie se fait de manière pré-attentionnelle lors d’une brève présentation, bien que les processus attentionnels puissent moduler la force de sa détection (voir le partie 2 de la section « Relation avec les processus cognitifs »).

Orientation de l’axe

Nous parlerons ici d’un type de symétrie particulier : la symétrie en miroir dont l’orientation de l’axe de symétrie est l’un des facteurs majeur influençant sa détectabilité. La plupart des gens s’accordent à dire que la perception de la symétrie en miroir nécessite un moindre effort en comparaison à la symétrie par rotation ou par translation. Néanmoins, l’orientation de l’axe autour duquel va se faire la symétrie va largement moduler le temps nécessaire pour identifier sa présence. Les premiers travaux de (Mach 1890) ont permis de mettre en évidence une préférence notable pour les symétries portées par un axe verticale. Il en découlera par la suite un grand nombre d’études confirmant ce phénomène et qui ont également pu établir un certain gradient de sensibilité à la symétrie selon les différentes orientations possibles de l’axe (Barlow et Reeves 1979; Wagemans, Van Gool, et d’Ydewalle 1992; Wenderoth 1997). En effet, si l’on se place dans le repère des orientations cardinales, la détectabilité de la symétrie va se faire dans l’ordre suivant: d’abord l’axe vertical, suivi de l’axe horizontal, des axes proches de l’axe vertical puis des axes proches de l’axe horizontal et enfin les diagonales (Wenderoth 1994). On retrouve même cette préférence particulière pour l’orientation verticale chez les enfants à peine âgés de 4 mois (Pornstein et Krinsky 1985). Ainsi, le traitement de la symétrie peut être qualifié d’anisotrope par rapport à l’orientation de l’axe de symétrie (Figure 9).
De façon originale, un groupe de chercheurs s’est intéressé au rôle de la gravité dans la préférence à l’orientation verticale de l’axe de symétrie, en effectuant leur expérience au sein de la station spatiale russe MIR (Gurfinkel et al. 1995). Ils ont pu démontrer qu’au cours de cette exposition prolongée à la microgravité, la préférence des sujets pour l’axe vertical persistait, suggérant de ce fait que l’indice gravitationnel n’est pas nécessaire pour maintenir un cadre de référence vertical. En résumé, dans le cadre de la symétrie axiale, le système visuel humain possède une préférence pour l’orientation verticale de l’axe mais cela n’est pas forcément déterminée par l’architecture neuronale du système visuel (voir section suivante).

Invariance de point de vue

De nombreux travaux ont pu mettre en évidence que notre façon de percevoir des objets se fait de manière invariante, c’est-à-dire, indépendamment des variations d’image comme le changement de point de vue, de taille de projection de l’image dans la rétine ou des variations de luminance ou de couleur (Desimone 1991; Logothetis, Pauls, et Poggio 1995; Rolls 2000; 2012). Cette invariance perceptive est également appelée constance perceptive et appartient aux principes établis par les psychologues gestaltistes (Koffka 2001). Qu’en est-il pour le cas particulier de la symétrie ? La plupart des études sur la symétrie ont été réalisées de sorte que le stimulus soit présenté dans un plan frontaux-parallèle produisant de ce fait une projection rétienne symétrique, bien qu’au demeurant ce cas de figure est pour le moins rare dans notre vie de tous les jours. Ainsi, des chercheurs ont pu mettre en évidence que la manipulation du point de vue de présentation semblait affecter les performances de détection de la symétrie, soit quand le stimulus n’est pas orienté orthogonalement à l’observateur. Par la suite, deux hypothèses ont alors été émises pour tenter d’expliquer cette diminution de détection. La première repose sur l’idée que la présentation d’un stimulus en perspective ne lui permet pas d’être projeté équitablement au sein de la rétine dont l’analyse se baserait alors sur une structure dégradée (Vloed, Csathó, et van der Helm 2005). La seconde se base sur le principe que l’image en perspective nécessiterait plus d’effort et de temps pour être normalisée (rotation mentale) et perçue comme de la symétrie (Fisher, Szlyk, et Rock 1995).
Bien que ces deux hypothèses ne reposent pas sur les mêmes fondements, des chercheurs ont pu démontrer que toutes deux étaient correctes mais qu’elles dépendaient du contexte dans laquelle elles étaient employées (Makin, Rampone, et Bertamini 2015). Dans leur étude, des stimuli symétriques ou non-symétriques étaient présentés de manière orthogonal (de face) ou non-orthogonale (incliné) au sujet (voir Figure 10-A). Dans l’un des cas, l’observateur devait discriminer la présence ou non de symétrie et dans le second il devait rapporter la couleur (rose ou rouge) du stimulus présenté. Par des mesures en EEG, ils ont pu mettre en évidence que la composante SPN (la réponse postérieure négative attendue lors de la présentation de stimuli symétriques) était semblable dans les conditions de présentation de face des stimuli dans les deux taches. En revanche, cette même SPN était diminuée de moitié lorsque les stimuli étaient présentés de façon non-orthogonales lors de la discrimination de couleur alors qu’elle était maintenue dans la tâche de discrimination de régularité (Figure 10-B et 10-C). L’hypothèse de la structure rétinienne sous-tend l’idée que le SPN devrait toujours être réduit lorsque les stimuli sont inclinés. Dans le cas présent, cette hypothèse semble s’appliquer dans le cadre de la discrimination de couleur, soit quand l’attention n’était pas portée sur les propriétés de symétrie, se traduisant par diminution de l’amplitude de 50% lorsque les stimuli étaient inclinés de 50°. D’autre part l’hypothèse de normalisation serait neutre quant au moment où une telle normalisation devrait avoir lieu et donc n’impliquerait pas une telle diminution de la SPN. D’après les observations rapportées par cette étude, l’intervention d’un tel processus apparaitrait uniquement lorsqu’il est nécessaire, à savoir dans le cadre de la discrimination explicite de la symétrie. Ils ont ainsi pu conclure que la discrimination active de motifs symétriques était portée par des mécanismes de normalisation alors que la projection rétienne intervenait lorsque l’observateur portait son attention sur la couleur des images.
De façon intéressante, ils ont également pu mettre en évidence la relation entre le degré de régularité de l’image rétinienne et l’amplitude de la SPN dans la tâche de discrimination de couleur. En effet, les images présentées dans cette expérience avaient des axes de réflexion horizontaux et verticaux et l’inclinaison des stimuli se faisant sur l’axe Y, la symétrie horizontale, présente au sein des stimuli, demeurait intacte alors que la symétrie verticale était impactée de 50% par rapport à sa projection parfaite au sein de la rétine. Ils ont donc reproduit la tâche de discrimination de couleur avec cette-fois si, un seul axe de symétrie verticale. Leur prédiction en faveur d’une réduction de la SPN proche de zéro puisqu’il n’y aurait plus de projection de symétrie rétienne intacte, fut confirmée par leurs résultats. Bien qu’il faille être prudent dans l’interprétation d’une relation linéaire nette étant donné la nature indirecte du signal et le fait que l’effet dépend des groupes d’électrodes utilisés pour l’analyse, la relation entre le degré de régularité de l’image et l’amplitude du SPN dans la tâche de discrimination de couleur ouvre la porte à de nouvelles études sur le sujet.
(A) Stimuli symétriques et non-symétriques (aléatoire) en vue frontal et inclinée. (B) Réponse de la SPN indépendante de l’angle de vue présentée sous la forme d’une onde de différence (Réflexion-Aléatoire) lors des présentations orthogonales et non-orthogonale dans la tâche de discrimination de régularité. (C) Réponse dépendante du point de vue dans la tâche de discrimination de couleur avec une diminution de 50% de la SPN pour lors de la présentation de stimuli incliné.
En résumé, il existe une réponse neuronale à la symétrie invariante au point vue lorsque que l’observateur est impliqué dans une tâche active de discrimination des régularités portée par le principe de normalisation. En revanche, lorsque la symétrie est perçue de manière passive dans une tâche où sa discrimination explicite n’est pas requise, la réponse neuronale se fait de manière paramétrique à la structure restante de l’image inclinée au sein de la rétine.

Proximité, excentricité et invariance de taille

Notre système visuel est extrêmement performant pour établir des liens entre les éléments locaux qui composent une image ou un objet comme le montre la perception automatique et sans effort de la symétrie par réflexion. Néanmoins, le nombre d’éléments qui composent un motif symétrique joue un rôle sur la détectabilité de celui-ci, avec une saturation du processus de détection lorsque le nombre d’élément est augmenté dans une faible mesure, à savoir au-delà d’une vingtaine (Tapiovaara 1990). De plus, la position de ces éléments au sein de l’image n’aura pas le même poids selon qu’ils soient proches ou éloignés de l’axe de symétrie. Ainsi, la proximité et l’excentricité des éléments de composition d’un motif symétrique autour de l’axe vont jouer un rôle majeur dans la modulation de sa perception.
Dans son étude, Saarinen a étudié les différences entre la vision centrale et excentrique dans la détection de la symétrie par réflexion à l’aide de motifs constitués de petits points. Il a ainsi pu mettre en évidence que les performances de détection de la symétrie diminuaient à mesure que l’excentricité des points autour de l’axe augmentait (Saarinen 1988). Dans son modèle, la taille rétinienne des motifs de points était constante à différentes excentricités mais aussi lorsque la taille des motifs en vision excentrique était mise à l’échelle par le facteur de grossissement cortical dérivé de la fréquence des cellules ganglionnaires (mise à l’échelle M). La réduction de la détectabilité était plus importante et soudaine pour les modèles de taille constante que pour les modèles à l’échelle M, suggérant que l’encodage des informations de position en vision centrale était supérieur à celui de la vision périphérique. De même, si l’on introduit un écart entre les deux moitiés d’une image composant un motif symétrique, le temps de réaction de la détection de la symétrie s’en voit augmenté (Corballis et Roldan 1974). Néanmoins, il est possible de maintenir le même niveau de détectabilité si la mise à l’échelle est correctement réalisée, c’est à dire, si elle tient compte du fait que les champs récepteurs périphériques sont sensibles à des informations à grande échelle contrairement au champs récepteurs centraux (Tyler 1999). En revanche, les aspects de proximité de l’axe ne semblent pas répondre aux mêmes principes que l’excentricité : s’éloigner n’équivaut pas à se rapprocher.
On peut définir la proximité par le fait que les éléments qui sont plus proches les uns des autres au sein d’un stimulus peuvent être plus aisément appariés (Helm 2014b). Il a d’abord été proposé qu’une zone limitée sous forme de bande verticale autour de l’axe de symétrie permettait une bonne détection avec une taille de la région d’intégration (RI) qui serait restreinte autour de 1° de largeur (Jenkins 1982). Cette hypothèse fut précisée par la suite par Dakin et Herbert dont les stimuli utilisés dans leur expérience étaient composés d’une région centrale symétrique intégrée au sein de bruit de même fréquence spatiale (Dakin et Herbert 1998). Ils faisaient alors fluctuer la phase pour varier le degré de symétrie afin d’obtenir des seuils psychophysiques de discrimination. De plus, la taille du patch elliptique englobant le motif symétrique était modifiée le long des axes x et y (Figure 11- A) pour trouver l’étendue maximale de la région pour laquelle les informations de symétrie étaient perçues. Ils ont ainsi pu mettre en évidence que la région d’intégration était allongée le long de l’axe de symétrie avec un ratio de 2:1 et que cette taille évoluait inversement avec la fréquence spatiale des stimuli présentés (Figure 11- C). Leurs résultats ont également montré que la taille de la RI semblait s’adapter à la taille des spots de symétrie homogènes de sorte qu’ils englobent un nombre plus ou moins constant de caractéristiques. Cela sous-tend l’idée que la détection de la symétrie appartiendrait à un processus « bas niveau » étroitement lié aux contenus fréquentiels spatials du motif symétrique perçu.
Figure 11 – La région spatiale d’intégration pour la détection de symétrie. (A) (a) Suppositions sur le RI de la détection de symétrie. (b) Estimation de sa dimension la plus longue. Les sujets sont capables de supporter plus de bruit de phase (la partie croissante du graphique) à mesure que la taille du patch symétrique augmente jusqu’à ce que le patch recouvre complètement l’IR. Au-delà de ce point (indiqué par la flèche en pointillés) la capacité des sujets à résister à l’intrusion de bruit reste constante (le plateau indiqué sur le graphique). Le rayon de patch associé au début du plateau est donc une indication de la taille de l’IR. (c) Estimation affinée de l’IR en fixant la largeur ou la hauteur de la région enchâssée et en mesurant la résistance au bruit en fonction de l’autre dimension. (B) Résultats de l’expérience pour des motifs avec des fréquences spatiales de (a) 1,13 c.p.d. (cyle per degres), (b) 2,26 c.p.d. et (c) 4,52 c.p.d. La taille de patch à laquelle la résistance au bruit est maximisée dépend de la fréquence spatiale du motif. D’après (Dakin et Herbert 1998). Néanmoins, ce contenu fréquentiel spatial n’est pas le seul à affecter la détection de la symétrie, puisque dans une autre étude, Dankin et Hess ont également mis à jour le rôle de l’orientation spatiale (Dakin et Hess 1997). Ainsi, en utilisant des stimuli filtrés pour des orientations parallèles ou perpendiculaires à l’axe de symétrie, ils ont pu observer que les performances de détection de la symétrie étaient plus élevées lorsque les informations présentées perpendiculairement à l’axe de symétrie étaient préservées que lorsque qu’il s’agissait des informations parallèles. En somme, les informations présentées de manière orthogonales à l’axe de symétrie soutiennent majoritairement la détectabilité de la symétrie. De plus, la RI serait portée par une certaine flexibilité, avec des variations allant de 20 :1 à 2 :1 dans un rapport hauteur/largeur (Rainville et Kingdom 2000).
La question s’est alors posée de savoir si la taille de la RI était déterminée par la fréquence spatiale ou bien par des facteurs covariants comme le nombre et/ou la densité d’éléments présents au sein de l’image. Les données de (Rainville et Kingdom 2002) ont permis de conclure que les RI de la symétrie évoluaient avec la densité d’éléments, à savoir que cette RI couvre environ 18 de ces éléments d’information indépendamment de leurs localisations spatiales. Par conséquent, la détection de la symétrie semble invariante à la taille, intégrant la même quantité d’information à partir d’un stimuli de manière constante. Ces résultats font écho aux études portant sur l’absence d’effet de nombre pour les symétries comportant plus d’une vingtaine d’éléments (Tapiovaara 1990; Dakin et Watt 1994; Wenderoth 1996). En revanche, cet effet de nombre est présent pour les motifs symétriques inférieurs à vingt éléments. La perception de la symétrie n’étant qu’un des mécanismes possible mise en jeu lors du processus d’organisation perceptuelle, il en résulte que sa détection peut être perturbée par des structures parasites et que la mise en place de ces perturbations dépendra de leurs forces face aux autres processus perceptifs. Ainsi, plus les paires d’éléments sont nombreuses, plus la perception de la symétrie sera forte. À l’inverse, dans le cas d’un nombre faible composant un motif symétrique, les structures parasites pourront supplanter le processus de perception de la symétrie en ayant divers effets sur sa détection.
Pour conclure, la proximité des éléments autour de l’axe de symétrie joue un rôle important dans sa détection et doit être prise en compte bien qu’elle ne soit pas le seul élément à moduler sa détectabilité. Le nombre d’éléments symétriques, la fréquence spatiale ainsi que l’orientation font partie intégrante d’un percept de symétrie. De plus, les informations présentes aux extrémités (bordures) d’un motif symétrique semblent également être détectées de manière efficace et automatique (Barlow et Reeves 1979). Par conséquent, une simple comparaison des densités de points mesurées sur des zones assez grandes placées autour de l’axe de symétrie serait nécessaire pour la détection de la symétrie. Néanmoins, il demeure encore difficile de préciser quelles informations du stimulus dans cette zone d’intégration sont traitées et comment ces ensembles de comparaisons sont réalisés.

Symétrie d’axes multiples

L’ajout d’axes de symétrie au sein d’une image va clairement moduler de manière positive la détection de la symétrie (Wagemans et al. 1993). Cette modulation va se traduire par une facilitation de la détection à mesure que le nombre d’axe est augmenté mais va également renforcer certaines hypothèses concernant le traitement des axes de symétrie et de leurs orientations. Comme ont pu le montrer Palmer et Hemenway en utilisant des polygones symétriques composés d’un ou plusieurs axes de symétrie (Figure 12-A), plus le nombre d’axes de symétrie est important, plus le temps nécessaire à sa détection est réduit (Palmer et Hemenway 1978). Par exemple, les figures comportant quatre axes de symétrie étaient plus rapidement perçues que celles en possédant deux qui elles-mêmes étaient traitées plus rapidement que les figures à un seul axe (Figure 12-B). Ils ont alors confronté leurs résultats à l’hypothèse selon laquelle le traitement de la symétrie serait fait de manière séquentielle sur les différentes orientations dans un ordre biaisé évoqué précédemment (Corballis et Roldan 1974). Selon cette hypothèse, cela signifierait qu’une figure comportant deux axes de symétrie (vertical et horizontale) devrait être traitée avec la même rapidité qu’une figure avec axe simple vertical puisque la symétrie verticale est toujours détectée avant que la symétrie horizontale ne soit prise en compte. Mais leurs résultats semblent indiquer que l’ordre de sélection des axes n’est pas fixe mais au contraire variable et qu’il serait attribué à une augmentation probabiliste des chances de trouver un axe de symétrie.
En résumé, la réduction du temps de traitement serait liée au fait qu’en moyenne, la sélection d’un axe de symétrie serait réalisée plus tôt lorsqu’il existe plusieurs axes parmi lesquels choisir.
À cela s’ajouterait l’hypothèse que la symétrie multiple ferait naître des relations structurelles supplémentaires qui, de ce fait, augmenteraient la détectabilité de celle-ci (Wagemans, Van Gool, et D’ydewalle 1991; Wagemans et al. 1993). Néanmoins, le nombre d’axe de symétrie ne semble pas être le seul déterminant de cette augmentation de saillance.
Figure 12 – Effet de la symétrie multiple sur la perception de motifs symétriques. (A) Exemples de stimuli polygonaux orientés selon l’axe vertical présentant des symétries à quatre axes (première ligne), deux axes (seconde ligne) et un seul axe (troisième ligne) ou proche de motif symétrique (dernière ligne).
(B) Latences moyennes (sec) des réponses aux conditions de symétrie en fonction de l’orientation (les points noirs sont des réponses positives ; les points blancs sont des réponses négatives). D’après (Palmer et Hemenway 1978)
Puisque les symétries d’axes multiples semblent plus facilement discriminables lorsque les axes sont orthogonaux (Wagemans, Van Gool, et D’ydewalle 1991; Wagemans et al. 1993). Une étude récente a questionné l’idée selon laquelle ces figures composées majoritairement d’axes orthogonaux formeraient une structure supplémentaire sous la forme de ce qu’on appelle des rectangles de corrélation (Treder, Vloed, et Helm 2011). Malheureusement, leurs données n’ont rapporté aucunes preuves de la présence d’un rectangle de corrélation mais en revanche, elles ont montré que l’orientation relative des axes, soit l’angle entre les axes, affecte la détectabilité d’une figure à symétrie multiple.

Relation avec les processus cognitifs

Jusqu’alors, la mise à jour des propriétés fonctionnelles de la détection de la symétrie a suggéré son caractère pré-attentionnel, c’est-à-dire qu’elle serait intégrée dans l’attention et d’autres processus cognitifs supérieurs. Néanmoins, de nombreuses études ont permis d’approfondir le rôle des processus cognitifs supérieurs et révélé qu’ils imprègnent de manière globale tous les niveaux de traitement visuel cortical. Ce faisant, la symétrie n’échappe pas à cette vue générale et se retrouver mêlée à divers processus cognitifs comme la perception des objets mais aussi les mécanismes attentionnels. Ce lien avec les processus cognitifs va être développé au sein de cette section.

Le fond, la forme et l’objet

Comptant parmi les études pionnières, les travaux de Mach ont ouvert la voie quant à l’étude du rôle de la symétrie dans la perception visuelle (voir (Mach 1890)). S’en sont suivi les nombreux travaux des psychologues Gestaltistes, identifiant la symétrie comme facteur du groupement perceptuel (Kanizsa 1985; Koffka 2001; Wertheimer 1912). En utilisant des stimuli bistables dans lesquels deux régions alternées pouvait être perçues comme une figure ou un fond, Bahnsen a pu mettre en évidence que les zones de symétrie tendent à être perçues comme une figure et qu’elles prennent part à la ségrégation figure arrière-plan (figure-ground) (Bahnsen 1928). D’autres travaux (Driver, Baylis, et Rafal 1992; Marshall et Halligan 1994; Purghé, Stucchi, et Olivero 1999) ont permis de conforter ce rôle de ségrégation en présentant des stimuli avec une ambiguïté de forme et de fond dans lesquels les formes symétriques étaient alors perçues comme des figures et les formes asymétriques comme le fond. Cet effet est illustré en (Figure 13-A et 13-B). Cela tiendrait du fait que le symétrie est une propriété non-accidentelle qu’il serait alors improbable de retrouver dans les espaces de fond (Wagemans 1993; Tyler 1995).
De plus, une étude portant sur l’efficacité du traitement de la symétrie dans l’achèvement des contours a pu démontrer que les formes symétriques étaient détectées plus aisément que les formes asymétriques dans une tâche de discrimination de forme (Machilsen, Pauwels, et Wagemans 2009). Pour cela, les auteurs ont utilisé des stimuli dont la forme était définie par des sous-ensembles d’éléments Gabor positionnés selon le contour d’une forme inconnue (Figure 13- C). Du bruit été généré en variant l’alignement des éléments Gabor, de sorte que la forme devenait de moins en moins détectable à mesure que le bruit augmentait. Leurs résultats ont montré qu’à travers les différents niveaux de bruit, les formes symétriques étaient plus facilement détectables que les formes asymétriques concluant ainsi que la symétrie (miroir verticale) agit comme un signal dans la ségrégation figure-ground, soit comme un indice dans le groupement perceptif.
Figure 13 – Effet de la symétrie sur la ségrégation fond et forme et sur la formation d’un percept d’objet. (A)(B) Exemples de stimuli ambiguës présentant à la fois des motifs symétriques et non symétriques (provenant de (Driver, Baylis, et Rafal 1992; Marshall et Halligan 1994). (B) Stimulus contenant une figure formée à partir de l’alignement de patchs Gabor (provenant de (Machilsen, Pauwels, et Wagemans 2009)).
Toujours en faveur du rôle de la symétrie dans la formation de la perception d’un objet, l’étude de Treder et Meulenbroek se basant sur le phénomène d’apparition d’une structure à partir du mouvement (structure-from-motion ; Figure 14) a permis de démontrer que si les points définissant un volume sont symétriques selon un axe en miroir 2D alors de nouvelles interprétations 3D apparaissent. C’est-à-dire qu’il est possible d’observer deux surfaces disjointes composées d’éléments symétriques qui semblent soit entrer en collision puis se déplacer dans des directions opposées soit se croiser sans contact (Treder et Meulenbroek 2010). Ces résultats suggèrent à la fois l’implication directe de la symétrie dans la perception d’objet mais également l’idée que la symétrie servirait de signal pour la caractérisation d’un objet unique. D’autres arguments viennent s’ajouter à cette hypothèse et montrent que le traitement de la symétrie est affecté par le nombre d’objet et le plan dans lequel ces objets sont présentés. Il a notamment pu être établi dans des figures formées de points que la détection de la symétrie était plus importante lorsque ces points se trouvaient dans le même plan que lorsque qu’ils étaient propagés à travers deux plans de profondeurs différentes (Treder et van der Helm 2007).
Figure 14 – Interprétations perceptives du modèle de mouvement symétrique. (A) Affichage schématique du stimulus physique, consistant en un motif de points symétrique par rapport un axe verticale. Indiqué par des flèches blanches, les points symétriques se déplacent dans des directions opposées avec la même vitesse de sorte que la symétrie est préservée dans le temps. (B) Interprétations 3D classiques, un cylindre tournant dans le sens horaire ou antihoraire. (C) Nouvelles interprétations 3D, deux (ou plus) surfaces symétriques. Au niveau de l’axe vertical, les éléments symétriques se rencontrent et peuvent être perçus comme se croisant sans contact physique (surfaces de croisement) ou comme entrant en collision puis rebondissant dans la direction opposée (surfaces de collision). D’après (Treder et Meulenbroek 2010).
De la même manière, des contours symétriques sont plus facilement détectés lorsqu’ils appartiennent à un même objet que lorsqu’ils appartiennent à deux objets différents (Corballis et Roldan 1974; Bertamini, Friedenberg, et Kubovy 1997). De façon intéressante, l’effet opposé a été constaté pour les motifs de répétitions (symétrie par translation), à savoir que la détection de la répétition est plus aisée lorsqu’ils forment deux objets plutôt qu’un. La perception de la symétrie est également perturbée lorsque le codage des informations de contour est incompatible, c’est-à-dire lorsque les convexités d’un côté ne correspondent pas aux concavités de l’autre et inversement (Bertamini 2006; Bertamini et Wagemans 2013). En revanche, elle semble favorisée par des objets formés de contours convexes plutôt que concaves (Hulleman et Olivers 2007). Ainsi, la symétrie n’affecte pas seulement la façon dont nous percevons les objets puisque les objets affectent aussi la façon dont nous percevons la symétrie. Il est à noter que si ce lien de facilitation entre perception d’objet et symétrie est avéré pour la symétrie en miroir (réflexion), cela ne semble pas être le cas pour la symétrie par rotation (Bertamini, Friedenberg, et Argyle 2002).

Les processus attentionnels

L’attention joue un rôle essentiel à de multiples niveaux et peut notamment moduler les réponses du système visuel (O’Connor et al. 2002; Reynolds et Chelazzi 2004; Rothenstein et Tsotsos 2014). Bien que de nombreuses études ont permis de mettre en évidence le caractère automatique du traitement de la symétrie, nous ne pouvons pas exclure la capacité de l’attention à moduler sa détection. Certaines études ont notamment démontré que le mécanisme de groupement était bel et bien dépendant de l’attention. Une des hypothèses pourrait être que cette perception automatique de la symétrie se produit uniquement lorsqu’elle est présentée dans une zone visuelle ciblée par l’attention. Pour tester cette hypothèse, un paradigme d’inattention a été proposé dans lequel le stimulus cible (ici symétrique) était incorporé au sein d’une tâche ne requérant pas sa discrimination, c’est-à-dire sans rapport contextuel avec la tâche. Ainsi, il a pu être démontré que la ségrégation de texture ou le groupement de stimuli, selon leur clarté ou leur proximité, étaient dépendants des mécanismes attentionnels (Mack et al. 1992). Néanmoins, de fortes critiques ont été émises concernant ce type de paradigme, argumentant que le concept de cécité par inattention était en réalité confondu avec l’amnésie d’inattention, c’est-à-dire, que la participant doit tout de même avoir une expérience consciente de la figure présentée pour répondre objectivement à la tâche demandée (Pashler 1990; Wenderoth et Welsh 1998). La figure devant ainsi être stockée en mémoire, le défaut de performance pourrait être attribué à une défaillance de la mémoire ou à un manque de conscience dans l’expérience.
D’autres marqueurs psychophysiques ont pu mettre à jour le rôle éventuel de l’attention focalisée. On retrouve notamment l’influence du savoir apporté par présentation de signaux précédant l’interprétation. Des chercheurs ont ainsi pu montrer, dans une tâche de discrimination d’orientation de l’axe de symétrie, que lorsqu’un signal précisait l’orientation de l’axe précédemment à la présentation du stimulus, et si celui-ci était correcte, alors les performances de détection étaient augmentées en comparaison à l’absence de signal (Pashler 1990; Wenderoth et Welsh 1998). Inversement, si le signalement indiquait une mauvaise orientation alors le taux de détection chutait. Les attentes de l’observateur semblent également moduler les performances de discrimination d’orientation lors de la détection d’un axe vertical d’un stimulus symétrique avec un effet trompeur si au cours d’un protocole expérimental, les essais incluaient majoritairement des stimuli à symétrie oblique ou proche de l’oblique (Wenderoth et Welsh 1998a). Ceci traduit donc un déplacement volontaire de l’attention en fonction des attentes de l’observateur. On retrouve également ce contrôle volontaire de percept dans l’étude précédemment évoquée de Treder et Meulenbroek portant sur l’intégration de structure à partir du mouvement et de la symétrie lors de la perception de surface (Matthias S. Treder et Meulenbroek 2010). En effet, l’observateur peut changer volontairement ça perception selon qu’il décide d’observer une structure basée sur le regroupement par mouvement ou par symétrie. Il faut néanmoins préciser que dans le cadre particulier d’un cas clinique (évoqué précédemment page 44), les auteurs rapportent que sans avoir une expérience consciente de la symétrie, le patient semblait tout de même percevoir les éléments symétriques des stimuli formant une forme. Il reste cependant difficile d’extrapoler des conclusions dans une étude de cas unique et lésionnelle.
Dans la cadre de la neurobiologie fonctionnelle, d’autres chercheurs ont pu rapporter une influence de l’attention sur les mécanismes du traitement de la symétrie. Le caractère automatique de la perception de la symétrie a d’abord été mis à jour grâce à l’observation de la SPN équivalente dans des tâches de discrimination active de régularité versus un paradigme « oddball » (Makin et al. 2013), de discrimination de régularité versus la couleur (Makin, Rampone, et Bertamini 2015) ou encore de discrimination de régularité versus le nombre d’objet (Makin et al. 2014). Bien que la signature neuronale du traitement de la symétrie fût maintenue malgré le fait que les participants portaient leur attention sur d’autres aspects du stimulus que sa régularité, cela n’exclut pas pour autant que l’amplitude de la SPN puisse être modulée dans une certaine mesure par l’attention. Par exemple, dans une tâche où l’observateur devait porter son attention sur des mots qui étaient apposés par-dessus des stimuli symétriques, l’amplitude de la SPN était réduite par ce changement attentionnel (Rampone, Makin, et Bertamini 2014). Dans une étude récente, des chercheurs ont pu démontrer que la formation de la perception de motifs symétriques était indépendante de la tâche bien qu’elle puisse être améliorée par une discrimination de régularité active (Makin, Rampone, et al. 2020). En effet, à travers cinq paradigmes différents relevant tous d’exigences perceptives et cognitives différentes (discrimination de régularité, discrimination de couleur, congruence son et couleur, relation direction et couleur, discrimination de répartition des éléments), les auteurs ont pu observer la présence de la SPN dans chacune des tâches réalisées. Néanmoins, elle était sélectivement augmentée pendant des tâches impliquant la discrimination active des régularités présentent au sein des stimuli. De manière équivalente, les réponses du réseaux cortical du traitement de la symétrie enregistrées en IRMf sont présentes avec et sans contrôle de l’attention (Sasaki et al. 2005), bien que l’attention semble accroître les réponses de celui-ci (Keefe et al. 2018).
Il est donc difficile de conclure de manière rigoureuse sur l’impact des processus d’attention dans le traitement de la symétrie bien qu’ils ne puissent en être entièrement exclus. La perception de la symétrie demeure un processus automatique qui, dans une certaine mesure, peut être modulée par des mécanismes neurocognitifs comme l’attention. Cette thématique reste toutefois à approfondir afin de déterminer plus précisément les facteurs d’influence.

Le réseau cortical du traitement de la symétrie

Au-delà des nombreuses propriétés mises en évidence par des mesures comportementales (voir les sections précédentes), il est nécessaire de caractériser les mécanismes cérébraux impliqués pour bien comprendre le traitement de la symétrie. Pour cela, les chercheurs ont utilisé des mesures en EEG et en neuroimagerie (IRMf) afin de mettre en évidence les propriétés temporelles et spatiales des réponses neuronales à des stimuli symétriques. Ces méthodes ont permis de confirmer certains des résultats comportementaux évoqués précédemment mais aussi d’offrir une meilleure compréhension de la base neuronale qui sous-tend le traitement de la symétrie. Cette vaste investigation du réseau cortical sera abordée au sein de cette section au cours de laquelle nous discuterons tout d’abord des études en EEG (partie 1), puis des expériences en IRMf (partie 2).

Temporalité du réseaux corticales : les études EEG

Les réponses neuronales liées au traitement de la symétrie peuvent être mesurées en EEG par le biais des potentiels évoqués (Event Related Potentials ; ERP). En effet, en comparaison des réponses évoqués par une image ne possédant pas de symétrie, la présentation d’une image symétrique va générer une réponse particulière. Dans une première étude, (Norcia et al. 2002) ont observé une différence d’ERP notable au niveau du pôle occipitale dont l’amplitude était plus négative quand l’observateur se trouvait confronté à des figures symétriques. Leurs résultats montrent que cette réponse démarre après les composantes P1 et N1, soit environ 220ms après la présentation du stimulus et que cette réponse était soutenue pendant une certaine période (Figure 15-A). Peu de temps après, cette observation fut confirmée par une seconde étude (Jacobsen et Höfel 2003) et l’on qualifia cette réponse de négativité postérieure soutenue (SPN). Par la suite, bon nombre de recherches ont également observé cette SPN dans le cadre de la perception de la symétrie et ont alors utilisé cette signature neuronale pour définir différentes propriétés liées au traitement de la symétrie (pour revue (Bertamini et Makin 2014; Bertamini et al. 2018)). Bien que la latence de la SPN varie d’une étude à une autre (variations liées au paradigme et stimuli utilisés ainsi qu’aux différents filtrages passe-bande de l’EEG et aux fenêtres d’analyses choisies), elle débute classiquement autour de 250ms pour atteindre son amplitude maximale vers 300 ms. Il a même pu être démontré que la persistance de la SPN pouvait s’étendre jusqu’à environ 1sec après la présentation du stimulus alors même que celui-ci n’était plus présent dans le champs visuel de l’observateur et cela, indépendamment du paradigme utilisé (Bertamini, Rampone, Oulton, et al. 2019a).
Figure 15 – Réponse caractéristique de la présentation de stimuli symétriques. (A) Réponses moyennes observées au niveau cortex occipital (électrode Oz) chez un participant. Les lignes rouge et bleu indiquent respectivement la réponse aux mises à jour d’images aléatoires/aléatoires et la réponse aux séquences symétriques/aléatoires. Après 200 ms de la transition des motifs aléatoires aux motifs symétriques, la réponse est plus négative par rapport à celle mesurée après la transition entre les motifs aléatoires. D’après (Norcia et al. 2002) (B)(1) Cartes des différences topographiques de l’expérience. Les données montrent l’amplitude dans la condition de réflexion moins l’amplitude dans la condition aléatoire à travers la fenêtre temporelle indiquée en dessous. (2) Analyse de localisation de source effectuée à partir de l’approche LORETA. Les données du graphique de différence de la moyenne générale de droite en B-1 ont été utilisées et l’emplacement estimé des générateurs est indiqué à partir de trois sections. Figures provenant de (Makin et al. 2012).
Il a même pu être démontré que la persistance de la SPN pouvait s’étendre jusqu’à environ 1sec après la présentation du stimulus alors même que celui-ci n’était plus présent dans le champs visuel de l’observateur et cela, indépendamment du paradigme utilisé (Bertamini, Rampone, Oulton, et al. 2019b). Ainsi, la nature soutenue de la SPN ne serait pas uniquement due à la durée de présentation du stimulus mais bien à la dynamique interne du réseau de traitement de la symétrie. Grace à l’analyse de localisation des sources ERP (Figure 15-B1) et en utilisant une tomographie électromagnétique à basse résolution, Makin et ses collègues ont pu montrer que la modulation de la SPN était en grande partie attribuable à une activité latéralisée dans le cortex visuel extrastrié (Figure 15-B2) (Makin et al. 2012). En combinant les données provenant d’approches en IRMf et en EEG à haute densité, Kohler et al., ont pu confirmer que la SPN était générée par les zones visuelles extrastriées et notamment que les réponses de V3 et V4 conduisaient à des réponses dans le cortex occipital latéral (Lateral Occipital Complex ; LOC) (Kohler et al. 2016).
Par la suite, les caractéristiques fonctionnelles de ce réseau ont largement été étudiées et ont servi de support pour l’étude de diverses propriétés liées au traitement de la symétrie. Parmi ces propriétés, on retrouve en premier lieu la mise en avant du caractère automatique et pré-attentionnel du traitement de la symétrie. En effet, il n’est pas nécessaire que la symétrie soit discriminée de manière active pour générer cette signature neuronale caractéristique. Comme évoqué précédemment, que ce soit dans des tâches de discrimination de couleur, discrimination du nombre d’objet, ou dans un paradigme « oddball » l’observation de la SPN était équivalente (Makin et al. 2013; Bertamini et Makin 2014; Makin, Rampone, et Bertamini 2015). Une étude récente a également confirmé ce résultat dans un projet comparant la modulation de la SPN à travers cinq tâches distinctes (discrimination de régularité, discrimination de couleur, congruence son et couleur, relation direction et couleur, discrimination de répartition des éléments), démontrant que la formation du percept de symétrie était indépendante de la tâche et de ce fait, simultanée à la présentation de motifs symétriques (Makin, Rampone, et al. 2020). Les auteurs ont néanmoins remarqué que la discrimination explicite de la symétrie pouvait renforcer la SPN, ce qui a également était observé par des études en neuroimagerie (Sasaki et al. 2005; Keefe et al. 2018). En plus d’avoir servi de support pour l’étude du caractère automatique du traitement de la symétrie, le possible lien avec les processus attentionnels et l’invariance de point de vue (voir sections précédentes), la SPN a également contribué dans l’étude du rapport à l’objet. Certains chercheurs se sont alors interrogés sur le caractère spécifique de la SPN dans le processus de traitement de la symétrie en cherchant à déterminer s’il était possible d’enregistrer une réponse comparable à n’importe quel stimulus avec une structure reconnaissable. Ils ont pu remarquer que la SPN possédait une ressemblance particulière avec une composante tardive liée aux objets qui, tout comme la SPN, se trouvait au niveau des électrodes postérieures et commençait environ 230ms après le début du stimulus et dotée d’une certaine persistance (Gruber 2004). Ils conclurent que des processus de regroupement perceptuel, qui ne sont pas exclusifs à la perception de la symétrie, pourraient contribuer à la modulation de la SPN. Mais la SPN ne peut pas être seulement un exemple de la composante tardive plus générale puisqu’elle est présente lorsque des stimuli formés de contours fermés possédant un axe de réflexion sont comparés à des contours fermés qui n’ont pas d’axe de réflexion (Makin et al. 2014). Il faudra donc attendre que d’autres études se poursuivent pour éclaircir le lien entre ce qui est propre au traitement de la symétrie et ce qui est propre à la reconnaissance des objets.
D’autres propriétés ont pu être révélées comme facteurs d’influence de cette réponse neuronale. Tout d’abord, l’extraction de la symétrie d’une image ne reflète pas le même signal selon le type de symétrie présenté (Makin et al. 2013). Comme vous pouvez le voir (Figure 16) la SPN est présente pour tous les types de régularité mais l’onde de la SPN produite par réflexion est significativement plus négative que celle produite par rotation ou la translation. Cette propriété fut aussi observée dans une autre étude, avec une majoration de la SPN pour la symétrie en miroir (réflexion) par rapport à la translation (Makin et al. 2014). La proportion de symétrie présente dans les stimuli modulent également les réponses SPN. En effet, dans une tâche de discrimination active de régularité, le pourcentage de symétrie (pSymm) au sein du stimuli (Figure 16-E) va être un facteur limitant pour l’apparition de la SPN montrant une absence de réponse pour les stimuli contenant seulement 20% de symétrie et une augmentation qui semble linéaire à partir de 40% jusqu’à 100% (Figure 16-F et 16-G). Faisant écho à une précédente étude en neuroimagerie (Sasaki et al. 2005), les auteurs ont pu conclure que la SPN était générée à un stade intermédiaire du traitement visuel (probablement dans le LOC) où la qualité de la perception est représentée (Palumbo, Bertamini, et Makin 2015).

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Table des matières

Chapitre 1- Fondements et caractéristiques de la vision
Une brève histoire de la vision
La perception visuelle chez le primate : de la rétine au cortex visuel
1. La machinerie rétinienne
2. Le voyage de l’information lumineuse
3. Premiers pas dans le cortex visuel
4. D’abord voir, ensuite savoir : où, quoi, comment ?
La voie ventrale : une transition vers la perception
Chapitre 2 – Traitement des régularités spatiales : perception des propriétés de symétrie 
Un monde de régularité
Définition et nature de la symétrie
Études empiriques de la perception de la symétrie : mode d’emploi
Caractéristiques et propriétés fonctionnelles
1. Rapide et automatique
2. Orientation de l’axe
3. Invariance de point de vue
4. Proximité, excentricité et invariance de taille
5. Symétrie d’axes multiples
Relation avec les processus cognitifs
1. Le fond, la forme et l’objet
2. Les processus attentionnels
Le réseau cortical du traitement de la symétrie
1. Temporalité du réseaux corticales : les études EEG
2. Architecture du réseaux corticales
Chapitre 3 – Méthodologie de l’imagerie fonctionnelle chez le primate non-humain 
Introduction
De l’animalerie à l’imagerie
Bases physiques et physiologiques en IRMf
1. Imagerie par résonnance magnétique
2. Nature du signal BOLD
IRMf chez le primate non-humain
1. Introduction
2. Modèles anatomiques et fonctionnels
Traitement des données en IRMf
1. Prétraitement des données
2. Analyses par GLM
3. Analyses fréquentielles
Chapitre 4- Traitement de la symétrie chez le PNH
Introduction
Matériel et Méthodes
Résultats
1. Expérience 1
2. Expérience 2
3. Réponses de symétrie au-delà de V4 dans les ROIs basées sur un atlas
Discussion
Figures Supplémentaires
Chapitre 5 – Projet d’ouverture : la perception des visages chez le primate non-humain
Introduction générale au traitement des visages
1. Les multi-facettes du visage
2. Le réseau neuronal humain du traitement des visages
3. Perception et traitement des visages chez le PNH
Contexte et introduction de l’étude
Matériel et méthodes
Résultats préliminaires
1. Reproduction du paradigme FPS chez l’humain
2. Adaptation du paradigme FPS chez le PNH
Discussion
Figure Supplémentaire
Chapitre 6 – Discussion Générale
Résumés des résultats
Limitations et perspectives
1. Poursuivre avec la symétrie
2. Poursuivre avec les visages
Pour aller plus loin : un lien entre symétrie et visage ?
Retenir l’essentiel
Références

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