Manipulation de micro et nano objets

Manipulation de micro et nano objets

Contexte du projet

Au cours de cette thèse, nous avons développé de nouveaux outils dédiés à la manipulation spatiale et conformationelle de nano-objets et de biomolécules. Ce travail est au cœur des préoccupations des activités technologiques modernes, qui cherchent à développer de nouveaux procédés pour la réalisation de nanocomposants aux fonctions variées : électroniques, optiques, thermiques, ou biotechnologiques pour n’en citer que quelques unes. De fait, deux solutions technologiques pour réaliser ces nouveaux composants sont envisageables, l’approche ascendante ou l’approche descendante (Fig. I.1). L’approche descendante vise à miniaturiser des procédés macroscopiques pour réaliser des structures fonctionnelles de petites dimensions. Elle a connu un succès immense, en particulier via les techniques de photolithographie, qui permettent d’imprimer des motifs sur des surfaces de plusieurs centaines de cm2 avec une précision micrométrique. Ces technologies buttent sur deux inconvénients majeurs : (i) elles ne peuvent pas être réduites à l’infini, sachant que les composants électroniques actuels peuvent contenir des composants élémentaires mesurant de l’ordre de 30-40 nm ; (ii) il est difficile de combiner les procédés standard du « silicium », si performants soient-ils, à des matériaux hétérogènes, qui ouvrent la voie à une diversification des offres technologiques. Une hypothèse actuelle est que l’on atteindra d’ici une dizaine d’années (les délais sont discutés) les limites de ces méthodes de fabrication. Aussi, les scientifiques cherchent-ils à ouvrir de nouvelles voies pour affronter le challenge des nanotechnologies, et proposer une offre diversifiée en nanosystèmes. Les technologies de fabrication ascendantes visent à utiliser les nanostructures issues de la chimie, de la physique, ou de la biologie, qui sont associées à une grande variété de fonctions, pour concevoir les composants du futur. Dans cette stratégie, l’enjeu n’est pas de réaliser les unités fonctionnelles les plus petites possibles, puisqu’elles existent déjà et constituent la boite à outil du technologue. En revanche, les problèmes d’intégration des nano-objets, c’est-à-dire leur asservissement précis dans un environnement contrôlé par l’homme pour réaliser une opération déterminée, reste un challenge. Il est clair que les approches ascendantes et descendantes ne doivent pas être vues comme indépendantes, et un objectif pour le futur proche est de réussir leur mariage en utilisant la boite à outil de la microfabrication conventionnelle et de la compléter avec de nouveaux objets présentant des propriétés originales.

Micro nano robotique

Nous envisageons d’abord quelques approches de manipulation obtenues à partir du déplacement physique d’un effecteur. Ces méthodes sont proches de celles de la robotique, qui a connu un succès considérable à l’échelle macroscopique (pour s’en convaincre, il suffit de réaliser la succession d’opérations complexes réalisées pour l’assemblage d’une voiture). L’idée sous-jacente est de miniaturiser les opérations de déplacement afin de construire des édifices complexes à l’échelle du nanomètre. Cette approche, dite « cathédrale », a connu divers succès, dont nous présentons quelques résultats dans la suite.

Miniaturisation du bras de manipulation : AFM

Le microscope à force atomique (AFM) est un microscope à sonde locale qui sert avant tout à visualiser la topographie de la surface d’un échantillon. En mesurant les interactions entre la surface et une pointe de dimension nanométrique montée sur un microlevier dont la déviation est suivie avec l’optique, il est possible de déduire des informations sur les surfaces à l’échelle du dixième de nanomètre (Jalili and Laxminarayana 2004). Dans sa configuration classique, la pointe d’un AFM est reliée à un moteur de déplacement 3 axes nanométrique afin de balayer la surface à représenter, et d’agir sur celle-ci avec une boucle de rétroaction. L’AFM présente l’avantage de pouvoir être utilisé en milieu liquide, et de nombreuses recherches ont été menées pour l’adapter à la manipulation et au positionnement d’objets avec une précision de quelques nanomètres (Junno, Deppert et al. 1995). Dans la Figure I.2, nous présentons un exemple de manipulation de nanoparticules GaAs par AFM, qui permet de réaliser un motif en ligne.

Si cette approche permet de réaliser des expériences de principe tout à fait séduisantes, elle présente deux inconvénients majeurs. C’est d’abord une méthode à bas débit, puisque l’on contrôle a priori une seule pointe, qui permet de manipuler une seule particule à la fois. Notons que de nombreuses recherches sont menées pour fabriquer des systèmes à pointes multiples, en particulier pour des applications en biodétection parallélisées (Liu 2008). Dans l’hypothèse où l’on pourrait reproduire la même opération pour construire plusieurs objets en parallèle, cette approche pourrait améliorer le débit de fabrication. Cela dit, cette hypothèse n’a pas encore été démontrée. La manipulation par AFM souffre d’un second problème lié au fait que les forces d’interactions entre les particules, la pointe et la surface doivent être contrôlées finement pour réaliser les opérations de déplacement. Or, cette condition limite les choix en matière de type de particules et de surface sous-jacente. Nous présentons dans la suite une méthode de manipulation sans contact physique entre l’effecteur et la particule, ce qui permet de s’affranchir de ces problèmes d’interaction.

Manipulation en milieu liquide : les pinces optiques

Le dispositif des pinces optiques est fondé sur l’utilisation d’un faisceau de lumière focalisé, en général un faisceau laser de forte puissance (de l’ordre du Watt) dans le proche infrarouge (1064 nm). Le gradient d’intensité de lumière agit sur des particules diélectriques, confinant les particules au centre du faisceau (Grier 2003). On parle de piège optique. La position du piège peut être déplacée spatialement, en général avec des miroirs galvanométriques, pour réaliser des opérations de déplacement avec une précision de déplacement de 5 nm minimum (Svoboda and Block 1994). Enfin, l’utilisation de dispositif à modulation spatiale de la lumière (Sinclair, Jordan et al. 2004), il est possible de « multiplier » les pièges optiques dans un champ de microscope afin de paralléliser les opérations de manipulation, comme le montre la figure I.3. Cette opération peut être généralisée à des particules en polystyrène et en silice et pour des déplacements en 2D ou 3D.

Selon la réponse diélectrique de la particule, ce dispositif permet de générer des forces supérieures à 100 pN (Ghislain, Switz et al. 1994; Litvinov, Shuman et al. 2002; Rohrbach and Stelzer 2002) avec une résolution minimum de 100 aN (Gittes and Schmidt 1998; Gittes and Schmidt 1998; Pralle, Prummer et al. 1999). De fait, la réponse diélectrique dépend du volume de la particule, et donc les petites particules sont plus difficiles à piéger que les plus grosses. Pour finir, il est intéressant de noter que l’application « phare » des pinces optiques est avant en biophysique, puisqu’en attachant une molécule d’ADN à la particule piégée, il est possible de réaliser une manipulation spatiale et de simultanément mesurer la force qui lui est imposée.

Les pinces optiques constituent un outil précieux en biophysique, mais son potentiel technologique souffre de trois inconvénients : (i) cette technologie doit être mise en œuvre à travers un substrat optique en verre, alors que le matériau roi en technologie est le silicium ; (ii) la réponse optique est faible pour des objets de petite dimension, si bien qu’il n’est pas clair que cette méthode est adaptée aux nano-objets ; et (iii) la manipulation est limitée à un champ de microscope optique, ce qui constitue une petite surface de quelques centaines de µm2 à comparer aux centaines de cm2 pour les technologies classiques. Après la présentation de ces méthodes de manipulation proches de la robotique, nous nous proposons de décrire les méthodes d’assemblage de nano-objets par auto-organisation, qui se produisent spontanément via des procédés d’association moléculaires.

Mécanisme d’auto-assemblage

En matière de stratégies de synthèse, la nature offre un panorama exceptionnel de diversité et de sophistication. L’exemple des cellules est éloquent : l’assemblage de protéines, d’acides nucléiques, et de lipides conduit à la formation de cellules, qui sont des objets macroscopiques compartimentés capables de se répliquer et d’interagir avec leur environnement. La formation d’une cellule est guidée par des phénomènes d’auto-assemblage déterminés par des interactions à l’échelle moléculaire spontanée. La complexité des mécanismes d’auto-assemblage suggère qu’il est possible de développer des stratégies de fabrication d’objets complexes à partir d’événements d’interaction prédit.

L’auto-assemblage en biologie

L’auto-assemblage moléculaire est le phénomène par lequel des molécules forment par elles-mêmes des structures avec un haut degré d’organisation sans intervention externe. L’auto-assemblage intramoléculaire et intermoléculaire peut être distingué. Le premier mécanisme guide à la formation de conformation spécifique de biomolécules, alors que le second tend à former des assemblages supramoléculaires. Ces assemblages supramoléculaires peuvent être constitués de deux objets, comme dans le cas d’une liaison à forte affinité entre un antigène et un anticorps, mais aussi de multiples objets, qui s’associent dans un édifice structuré à grande échelle (on pense par exemple à une bicouche lipidique). Les mécanismes d’auto-assemblage sont initiés à partir d’éléments structuraux nanométriques, qui grandissent progressivement pour former des édifices de grande dimension. La structure finale est donc « encodée » dans la forme et les propriétés des molécules initiatrices. L’enjeu de ces sujets de recherche est donc de comprendre les mécanismes d’assemblage afin de prédire et d’orchestrer leur enchainement. Cette approche est ascendante laisse entrevoir la possibilité de créer des nanomatériaux dont toutes les unités structurelles sont contrôlées de l’échelle nanométrique jusqu’à l’échelle mésoscopique. L’auto-assemblage est a priori une stratégie de fabrication adaptée à un grand nombre de molécules, mais c’est avec l’ADN que les recherches ont été les plus fructueuses. L’auto-assemblage avec l’ADN consiste à utiliser la spécificité des interactions entre paire de bases dans la double hélice d’ADN pour fabriquer des édifices moléculaires .

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Table des matières

INTRODUCTION
Chapitre I Manipulation de micro et nano objets
1. Contexte du projet
2. Micro nano robotique
2.1 Miniaturisation du bras de manipulation : AFM
2.2 Manipulation en milieu liquide : les pinces optiques
3. Mécanisme d’auto-assemblage
3.1 L’auto-assemblage en biologie
3.2 Auto-assemblage dirigé, l’exemple de l’origami à ADN
3.3 L’ADN pour l’auto-assemblage de nanoparticules
4. Assemblage dirigé
4.1 Un outil historique : le peignage d’ADN
4.2 Assemblage capillaire : comment se forment les tâches de café ?
4.3 Contrôle du ménisque en assemblage capillaire : vers la fabrication de lignes
4.4 Les micro/nanotechnologie au service de la manipulation d’objets
4.4.1 Texturation des surfaces : vers le contrôle du placement d’objets individuels
4.4.2 La nanofluidique au service de la manipulation d’ADN
5. Motivations pour notre travail expérimental
Chapitre II Micro et Nano Fabrication pour la réalisation de structures micro- et nano-fluidiques
1. Introduction générale
2. Fabrication de moules de micro-impression
2.1 Spécifications sur la dimension des structures
2.2 Procédé de fabrication
2.3 Revêtement des surfaces
3. Procédés de fabrication de nanostructures
3.1 Lithographie électronique
3.1.1 Principe
3.1.2 Procédé
3.1.3 Résultats expérimentaux
3.1.4 Conclusions sur la lithographie électronique
3.2 Lithographie par projection
3.2.1 Principe
3.2.2 Procédé
3.2.3 Résultats expérimentaux
3.2.4 Conclusions sur la lithographie par projection
3.3 Photolithographie par contraste de phase avec le PDMS
3.3.1 Principe
3.3.2 Procédé
3.3.3 Résultats expérimentaux
3.3.4 Comparaison des trois méthodes de nanofabrication
4. Intégration des nanocanaux dans des microsystèmes fluidiques
4.1 Comparaison des matériaux pour la nanofluidique
4.2 Réalisation de nanocanaux intégrés en silicium
4.3 Dispositifs en PDMS
4.3.1 Moulage/démoulage du PDMS
4.3.2 Perçage
4.3.3 Collage
5. Manipulations fluidiques
5.1 Remplissage et Revêtement des surfaces
5.2 Actionnement des fluides dans les puces nanofluidiques
5.3 Préparation d’ADN
6. Microscopie
6.1 Spécification du dispositif optique pour le suivi de molécules uniques
6.2 Descriptif du montage optique
6.2.1 Source de lumière
6.2.2 Filtres
6.2.3 La caméra EMCCD, et la taille des pixels
Partie III Assemblage dirigé de micro et nano objets sur hydrogel structuré
1. Introduction
2. Description des hydrogels utilisés
2.1 Structure des monomères
2.2 Polymérisation
3. Fabrication et caractérisation d’hydrogels structurés
3.1 Fonctionnalisation de surface pour le greffage physique d’hydrogels
3.2 Fabrication de gel texturé
3.3 Caractérisation topographique des gels
4. Assemblage dirigé de nano-objets sur motifs linéaires
4.1 Assemblage : rôle de la taille des particules
4.2 Assemblage : rôle de la nature physique des particules
4.3 Assemblage : rôle de l’eau emprisonnée dans le gel
4.4 Détermination du rendement d’alignement
5. Etude des mécanismes d’assemblage
6. Assemblage dirigé sur des motifs complexes
7. Réalisation de structures en multicouches
7.1 Transfert des motifs par plasma oxygène
7.2 Transfert des motifs sur une autre surface par impression
7.3 Comparaison des résultats avec le PDMS
8. Applications des hydrogels pour les biotechnologies
8.1 Validation pour les biopuces
8.2 Culture cellulaire avec le copolymère acrylamide-acide acrylique
9. Conclusions et perspectives
CONCLUSION

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