MANIERE DE CONCEVOIR LA SORTIE DE LA TOXICODEPENDANCE

MANIERE DE CONCEVOIR LA SORTIE DE LA TOXICODEPENDANCE

CONCEPT D’ADDICTION

Pour comprendre cette notion d’addiction, nous sommes revenues à l’origine de ce mot. Étymologiquement, le terme « addiction » vient du mot latin « addictus », qui fait référence à un acte juridique par lequel une personne ayant des dettes était « addictée » à une autre personne soit, mise en dépendance, mise en esclavage jusqu’au règlement de sa dette. En anglais, le terme anglo-saxon du 16ème siècle « to be addict » a une connotation morale dans le sens de se vouer à une pratique, s’adonner à une mauvaise habitude. Cette notion d’addiction fait ensuite référence à la perte de contrôle, puis se dirige finalement vers une signification médicale et psychopathologique (Institut Limousin de Formation & Communication, 2011). En 1935, la notion d’addiction est vue comme la maladie de l’âme et la maladie du cerveau. Les individus de cette époque voient l’addiction comme une forme d’allergie qui rend les sujets vulnérables et impuissants devant l’alcool ou la drogue. Le traitement à cette période est l’acceptation de cette impuissance en se remettant à Dieu (Institut Limousin de Formation & Communication, 2011).

Dès 1970, Claude Olivenstein, psychiatre français, cité par Institut Limousin de Formation & Communication, 2011), propose un modèle bio-psycho-social de l’addiction. Il décrit la nature de l’addiction comme étant la rencontre d’un produit, d’une personnalité et d’un moment socioculturel. Pour la première fois, une approche donne un rôle important au contexte socioculturel. Ce changement de perspective a modifié la manière de penser l’addiction et n’a plus été remis en question depuis. Ce phénomène d’addiction est donc en corrélation avec les évolutions de notre temps moderne et les coutumes de nos sociétés. Nous savons que le concept d’addiction a été appréhendé à partir de différents points de vue tels que la vision neurobiologique, la vision psychanalytique, la vision psychologique, la vision sociologique. En effet, les recherches sur les addictions sont partagées entre les spécialistes des mécanismes de la maladie addictive et les spécialistes qui analysent le sens de ces conduites. Nous comprenons que ces différents modèles ne sont donc pas singuliers, mais peuvent être complémentaires. Nous n’avons certes pas effectué une recherche détaillée pour chacune de ces approches, mais il nous semblait tout de même important d’effectuer une brève description de chacune d’entre elles afin de mieux comprendre la complexité de l’addiction.

CONCEPT DE TOXICOMANIE

Le terme « toxicomanie » porte en lui-même sa définition. Il s’agit d’une relation entre une conduite maniaque3 et un produit toxique4, assimilée dans un rapport de destruction du sujet. Philippe Kong (2011), psychanalyste français, met en avant le terme « toxicomanie » avec les deux axes apparents qui sont la manie et le rôle de la substance toxique. Il explique que la manie s’éteint lorsque le toxicomane a sa substance entre les mains. Il rajoute que la manie est cet instant où l’individu se retrouve face à une angoisse de la disparition de la substance toxique. Ce qui est déterminant à travers cette rencontre entre le produit et le sujet, c’est surtout ce que véhicule l’objet pour la personne qui le consomme. Philippe Kong (2011) explique que « le toxique sert au toxicomane à rendre possible une rencontre réelle, une rencontre du sujet avec son réel » (Kong, 2011, p. 94). Le désir fondamental du sujet qui se tourne vers les substances est d’atteindre un état de jouissance.

En parallèle, Philippe Lekeuche (2006), professeur de psychologie clinique à l’Université de Louvain, distingue la notion de « toxicomanie » à celle de « dépendance ». Il met en avant que si « dans toute toxicomanie, il y a de la dépendance, toute dépendance n’est pas toxicomaniaque » (Lekeuche, 2006, p. 286). Il souligne que tout être humain est dépendant de beaucoup d’éléments tels que les besoins vitaux : manger, boire, dormir. Pour lui « la dépendance fait partie de notre condition humaine et c’est un mythe de rêver à une espèce d’autonomie absolue » (Leukeuche, 2006, p. 286). Il distingue cependant les dépendances dites « normales » à celles dites « pathologiques ». La distinction se fait lorsque ces dépendances « détruisent toute liberté et conduisent à un véritable esclavage mettant en danger la vie physique et psychique de celui qui y est enchainé » (Lekeuche, 2006, p. 286).

Selon ce professeur de psychologie clinique, Philippe Lekeuche (2006), dans la toxicomanie essentielle, la spécificité de la fonction maternelle serait défectueuse. Il explique qu’à travers le lien primordial à l’enfant, la fonction maternelle « n’a pas su l’aider à construire une pareexcitation de telle sorte que le petit enfant se trouve débordé par l’urgence de ses besoins pulsionnels » (Lekeuche, 2006, p. 299). Voici un résumé de la théorie de Lekeuche, qui distingue « toxicomanie essentielle » à « toxicomanie symptomatique » : « Dans la « toxicomanie essentielle », qu’il faut distinguer des « toxicomanies symptomatiques » s’inscrivant dans des structures psychotique, névrotique ou perverse, la base existentielle du sujet sur laquelle repose sa thymie (« humeur » ou Stimmung) est trouée. Une brèche profonde et archaïque s’est produite dans le lien primordial au maternel de telle sorte que le corps n’a pas su trouver sa clôture. La fonction de la drogue est de colmater cette brèche et de servir de prothèse. Ces sujets, très semblables sur certains points aux psychotiques, relèvent cependant d’une organisation pulsionnelle plutôt psychopathique. » (Lekeuche, 2006, p. 301)

TOXICOMANIE : UN PHENOMENE MULTIDIMENSIONNEL

Nous l’avons compris, il n’est pas possible de réduire la toxicomanie à une causalité simple. Sylvie Angel (2003), psychiatre et thérapeute familiale ainsi que Pierre Angel (2003), professeur de psychopathologie à l’Université de Paris et psychiatre, définissent la toxicomanie de cette manière : « Lorsque l’on parle de toxicomanie, et non pas, vaguement d’usage de drogues (licites ou illicites), on ne fait pas seulement qu’évoquer la dépendance à une substance chimique, mais surtout le fait que cette dépendance soit devenue le centre – à la fois le but et le moyen de toute l’existence psychique et sociale du sujet. Tel est le comportement proprement addictif. » (Angel & Angel, 2003, p.22) Des recherches confirment que la toxicomanie est un phénomène multidimensionnel, dont Angel S. et Angel P. (2003) en décrivent trois dimensions principales : pharmacologique, sociologique et psychopathologique en mettant en avant les trois facteurs suivants : 1. Les propriétés pharmacodynamiques de la substance en cause, en tenant compte de la quantité consommée, la fréquence de son usage et le mode de consommation ; 2. La nature du milieu socioculturel au sens large et du milieu familial en particulier, généralement présent dans les milieux marginaux, dont les parents présentent certaines caractéristiques telles que trouble de la personnalité, consommations excessives de drogue-alcool ou relations parents-enfants dysfonctionnelles ; 3. Les caractéristiques personnelles et les antécédents du sujet, avec l’histoire personnelle de la personne qui a eu généralement un passé douloureux entre abandons, ruptures, attachements excessifs, échecs scolaires à répétition.

RELATION ENTRE LE TOXICOMANE ET LE PRODUIT

Joyce McDougall (2004), psychanalyste, rappelle que malgré cette visée première de l’idée que l’individu est esclave de son objet, elle souligne qu’une personne addicte cherche avant tout la quête de plaisir et non pas le désir de se faire du mal : « […] l’objet d’addiction est investi de qualités bénéfiques, voire d’amour : objet de plaisir à saisir à tout moment pour atténuer des états affectifs autrement vécus comme intolérables. En tant que tel, cet objet est perçu, du moins dans un premier temps, comme bon; à l’extrême, comme ce qui donne sens à la vie.» (Mc Dougall, 2004, p. 511-512) Mc Dougall (2004) explique que la conduite addictive est poussée par : « Un besoin de se débarrasser aussi rapidement que possible des sentiments d’angoisse, de colère, de culpabilité ou de tristesse qui font souffrir, voire des sentiments en apparence agréables ou excitants mais qui sont vécus inconsciemment comme défendus ou dangereux.» (Mc Dougall, 2004, p. 514)

La relation que le toxicomane entretient avec le produit est une métaphore avec les relations qu’il a avec le monde, ses amis, sa famille. Nous comprenons alors que la dépendance est une problématique du lien, que ce soit envers les personnes qui l’entourent, envers la société et envers la liberté recherchée (Angel & Angel, 2003). En ce sens, le sevrage n’est pas juste un arrêt de consommation du produit, mais destructeur des liens que le toxicodépendant a avec le produit, mais aussi avec ses proches ainsi qu’avec la société (Angel & Angel, 2003). Même durant ces périodes d’abstinence, généralement la personne ne démontre pas une volonté d’amélioration dans ses relations ni avec le produit ni avec sa famille. Ceci veut dire qu’un arrêt occasionnel de consommation du produit toxique ne représente pas une évolution positive. À travers le sevrage, les rechutes font partie du processus et c’est ce qui sera significatif dans l’histoire individuelle du toxicomane. Un patient alcoolique a bien imagé le sens de la rechute qui touche également les personnes toxicodépendantes..

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

1. INTRODUCTION
1.1. CONTEXTE
1.2. QUESTION DE DEPART
1.3. QUESTION DE RECHERCHE
1.4. OBJECTIFS DE RECHERCHE
1.5. STRUCTURE DU TRAVAIL
2. CADRE THEORIQUE
2.1. TOXICOMANIE
2.1.1. CONCEPT DE DEPENDANCE
2.1.2. CONCEPT D’ADDICTION
2.1.3. CONCEPT DE TOXICOMANIE
2.1.4. MANIERE DE CONCEVOIR LA SORTIE DE LA TOXICODEPENDANCE
2.1.5. TOXICOMANIE : UN PHENOMENE MULTIDIMENSIONNEL
2.1.6. RELATION ENTRE LE TOXICOMANE ET LE PRODUIT
2.1.7. REPRESENTATIONS SOCIALES DES SUBSTANCES PSYCHOTROPES
2.2. LA PARENTALITE
2.2.1. DEFINITION DE LA FAMILLE
2.2.2. HISTOIRE DE LA FAMILLE
2.2.3. DEFINITION DE LA PARENTALITE
2.2.4. MODELE DE BELSKY – DETERMINANTS DE LA PARENTALITE
2.2.4.1 Observations du modèle de Belsky
2.2.5. LA PARENTALITE SELON HOUZEL
2.2.6. PARENTALITE ET CADRE LEGAL DE LA PROTECTION DE L’ENFANT
2.2.7. SOUTIEN A LA PARENTALITE
2.2.8. PRESTATIONS SOCIO-EDUCATIVES
2.3. PARENTALITE ET TOXICODEPENDANCE
2.3.1. ROLE DU VECU FAMILIAL EN LIEN AVEC LA TOXICODEPENDANCE
2.3.2. CARACTERISTIQUES LIEES A LA MATERNITE POUR UNE FEMME TOXICODEPENDANTE
2.3.3. LES DIFFICULTES QUE RENCONTRENT LES MERES TOXICODEPENDANTES
2.3.4. CONSEQUENCES DE LA CONSOMMATION DE LA MERE TOXICODEPENDANTE SUR LES ENFANTS
2.3.5. L’ATTACHEMENT PARENT-ENFANT
2.4. ACCOMPAGNEMENT DU PROFESSIONNEL
2.4.1. DEFINITION DU TRAVAILLEUR SOCIAL
2.4.1.1. L’éducateur social
2.4.1.2. L’assistant social
2.4.2. DEFINITION DE L’ACCOMPAGNEMENT
2.4.3. AXES D’INTERVENTIONS
2.4.3.1. Approche systémique
2.4.3.2. Approche centrée sur la personne
2.4.3.3. Axe d’intervention centré sur la mère toxicodépendantes
2.4.3.4. Axe d’intervention centré sur les besoins de l’enfant
2.4.3.5. Axe d’intervention centré sur l’accompagnement familial
3. METHODOLOGIE
3.1. LE TERRAIN DE RECHERCHE
3.2. L’ECHANTILLON
3.3. TRAITEMENT DES DONNEES
3.3.1. PRISE DE CONTACT AVEC L’ECHANTILLON DEFINI
3.3.2. CHOIX DE L’OUTIL
3.3.3. CONSTRUCTION DE LA GRILLE D’ENTRETIEN
3.3.4. L’ETHIQUE DE NOTRE RECHERCHE
3.3.5. DEROULEMENT DES ENTRETIENS
3.3.6. OBSERVATIONS DES ENTRETIENS
4. ANALYSE DES DONNEES
4.1. INTRODUCTION
4.2. PROFIL DES PROFESSIONNELS
4.2.1. INFORMATIONS GENERALES
4.2.1.1. Formations
4.2.1.2. Missions des travailleurs sociaux
A. Contexte de travail
B. Aide contrainte
C. Orientation : éducateurs sociaux et assistants sociaux
D. Travail en réseau
E. Intervention familiale
4.2.2. PROFIL DES MERES TOXICODEPENDANTES ACCOMPAGNEES
4.2.2.1. Age
4.2.2.2. Histoire de vie et situation des mères toxicodépendantes
A. Situation relationnelle avec le père de l’enfant et/ou avec le partenaire de la mère toxicodépendante
B. Participation sociale
C. Situation financière
4.2.2.3. Vulnérabilités et difficultés des mères toxicodépendantes
A. Jugements de la société
B. La fragilité psychique des mères toxicodépendantes
C. Difficultés relationnelles
D. Devenir mère, une source d’angoisse
E. La crainte de dévoiler la vérité aux professionnels
F. La difficulté à se construire en tant que femme
G. L’évolution des enfants et la culpabilité des mères toxicodépendantes
4.2.2.4. Ressources des mères toxicodépendantes
A. Prise de conscience du rôle de mère
B. Acceptation des limites des mères toxicodépendantes
C. Entourage des mères toxicodépendantes
4.2.3. ACCOMPAGNEMENT DU TRAVAILLEUR SOCIAL
4.2.3.1. Accompagnement du professionnel et ses enjeux
A. Les différents outils d’intervention des travailleurs sociaux
B. Collaboration avec la mère et/ou avec ses partenaires
4.2.3.2. Modalités d’intervention
A. Cadre de l’accompagnement
B. Ajustements de l’intervention des professionnels
C. Regard des professionnels sur la possibilité d’être mère et toxicodépendante
D. Travail sur le lien mère-enfant
E. Bénéfices de l’accompagnement
4.2.3.3. Difficultés rencontrées par les travailleurs sociaux
A. Difficultés et déni des mères face à la banalisation de leur consommation
B. Enjeux de la relation entre mères toxicodépendantes et professionnels
C. Attentes des mères toxicodépendantes et besoins de l’enfant
D. Limites ou opportunités dues au cadre institutionnel
5. VERIFICATION DES HYPOTHESES ET SYNTHESE
5.1. HYPOTHESE I
HES-SO//VALAIS BACHELOR OF ARTS IN TRAVAIL SOCIAL
5.2. HYPOTHESES II
5.3. HYPOTHESE III
5.4. HYPOTHESE IV
6. PARTIE CONCLUSIVE
6.1. CHOIX DE LA THEMATIQUE
6.2. MOTIVATIONS ET INTERETS PROFESSIONNELS
6.3. REFLEXIONS
6.4. OUVERTURE
6.5. LIMITES DE LA RECHERCHE ET PERSPECTIVES
6.6. BILANS DU PROCESSUS D’APPRENTISSAGE
6.6.1. BILAN METHODOLOGIQUE
6.6.2. BILAN PROFESSIONNEL
6.6.3. BILAN PERSONNEL
7. ANNEXES
7.1. PLANNING TRAVAIL DE BACHELOR
7.2. LETTRE POUR LA DIRECT
7.3. DOCUMENT POUR LES TRAVAILLEURS SOCIAUX
7.4. ACCORD DE CONFIDENTIALITE
7.5. GRILLE D’ENTRETIEN
7.6. TABLEAU RECAPITULATIF
7.7. ARTICLES DE LA CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DE L’ENFANT
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES
ARTICLES
DOCUMENTS
SITES INTERNET
TEXTES DE LOI
ILLUSTRATIONS

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *