Lumières sur l’éducation

Le temps de l’enfance

L’enfance est avant tout une période de la vie mais le temps de l’enfance ne se conceptualise pas si aisément. Par quoi se caractérise-t-il précisément ? Qu’est-ce qui permet de dire qu’à tel moment l’enfant est devenu adulte ? Est-ce à sa majorité ou encore une fois « l’âge de raison » atteint ? Mais cet « âge de raison » est-il lui-même déterminable ? Et ce temps de l’enfance, est-il homogène ou bien peut-on y déceler des degrés distincts ? Si au XVIIIème siècle l’enfance est singularisée, elle s’inscrit cependant dans un temps continu, allant de la naissance à la mort. Elle marque ainsi le début d’une histoire, invitant à penser parfois de manière conjointe l’histoire personnelle d’un homme et celle collective de l’humanité. L’étude de l’enfant devient alors une autre manière de penser la nature humaine.

La naissance

De fait, la naissance apparaît comme le « degré zéro » où se jouent, non seulement la question du propre de l’homme mais aussi celle de sa destinée individuelle. Dans la mesure où les philosophes des Lumières assignent pour tâche principale à l’éducation de faire de l’enfant un homme raisonnable et bon, la question qui se pose est celle de savoir si ces deux caractéristiques, intelligence et bonté, sont présentes chez le nouveau né et ceci de manière égale ou pas.
C’est en effet sur l’égale aptitude des hommes à l’esprit que les dissensions sont les plus marquées. Car si l’accord est unanime sur le caractère raisonnable de l’homme, deux camps s’opposent comme le montre de manière exemplaire le cas d’Helvétius et de Diderot. Pour le premier en effet, si « on naît avec toute son âme et non avec tout son esprit » , c’est parce que ce dernier, à la différence de la faculté de sentir déjà présente à la naissance, est le fruit de l’éducation reçue. L’esprit n’est tout d’abord présent que sous la forme d’une aptitude égale chez tous les hommes : « tous (…) en ont également en puissance, c’est-à-dire, une aptitude à en avoir » . Et celle-ci est non seulement égale mais aussi « juste »chez tous : chaque homme naît « avec l’esprit juste »dans le sens où l’esprit, étant la capacité de comparer nos sensations entre elles, « il n’est d’autre sorte d’esprit que celui qui compare, et compare juste » . De ce fait, si « L’homme naît ignorant : il ne naît point sot, et ce n’est pas même sans peine qu’il le devient. Pour être tel et parvenir à éteindre en soi jusqu’aux lumières naturelles, il faut de l’art et de la méthode. » . La seule condition à tout ceci pour Helvétius est qu’ils s’agissent d’hommes « communément bien organisés ».
Dans sa Réfutation, Diderot s’attache tout particulièrement à contredire cette position en faisant dépendre étroitement l’esprit de l’organisation, le « psychique » de l’organique : « une des plus fortes inconséquences de cet auteur [Helvétius], c’est d’avoir placé la différence de l’homme et de la brute dans la diversité de l’organisation, et d’exclure cette cause lorsqu’il s’agit d’expliquer la différence d’un homme à un homme » . Et il accentue même son opposition, affirmant que « L’homme naît toujours ignorant ; très souvent sot ; et quand il ne l’est pas, rien de plus aisé que de le rendre tel, ni malheureusement de plus conforme à l’expérience. » . Il réfute également la notion de justesse qu’Helvétius accorde naturellement à l’esprit : « Tous les hommes sont nés sans esprit ; ils ne l’ont ni faux ni juste ; c’est l’expérience des choses de la vie qui les dispose à la justesse ou à la fausseté. » . Ce qui distingue ces deux auteurs c’est le degré d’indétermination dans lequel se trouve l’homme à sa naissance et qui dépend de leur conception du rapport entre « physique » et « moral » . Chez Helvétius, le « système de l’homme » se réduit à un seul principe, la sensibilité physique, dont toutes les autres facultés procèdent : le « moral » se trouve donc réduit au « physique ». Or, celui-ci étant relativement homogène chez les hommes communément bien organisés, les légères différences sensitives qu’il peut y avoir entre individus, n’influent en rien sur l’esprit . Et comme à la naissance, l’enfant n’a encore rien senti, il naît entièrement indéterminé : « Au moment où l’enfant se détache des flancs de la mère et s’ouvrent les portes de la vie, il y entre sans idées, sans passions. » . A l’inverse, Diderot accentue la séparation du « physique » et du « moral » et refuse cette totale indétermination : « [L’enfant naît] sans idées, il est vrai, mais avec une disposition propre à en concevoir, à en comparer, et en retenir certaines avec plus de goût et de facilité que d’autres. Sans passions exercées, je l’ignore, ; sans passions prêtes à se développer, je le nie ; avec une pente égale à toutes sortes de passions, je le nie encore ; avec une pente à toutes sortes de passions, je crois que je pourrais le nier. ».
Comme on peut le constater, cette question s’étend aussi bien au cas de l’esprit qu’à celui des passions qui touche, lui, à la seconde question, celle d’une bonté originelle ou non de l’homme. Et ici, c’est plutôt Helvétius qui s’oppose à Rousseau. En effet ce dernier, bien que concevant l’homme indéterminé quant à l’esprit , soutient que l’homme naît naturellement bon : « Posons pour maxime incontestable que les premiers mouvements de la nature sont toujours droits : il n’y a point de perversité originelle dans le coeur humain ; il ne s’y trouve pas un seul vice dont on ne puisse dire comment et par où il y est entré. ». A l’inverse, Helvétius soutient – explicitement contre Rousseau – que l’expérience est loin de prouver cette assertion et refuse d’attribuer à la nature tout caractéristique morale : « Qui la consulte [l’expérience], apprend que (…) né sans humanité, l’enfant a tous les vices de l’homme (…) dans l’homme, la bonté et l’humanité ne peuvent être l’ouvrage de la nature, mais uniquement celui de l’éducation ».
Précisons toutefois qu’à d’autres endroits, Helvétius est plus nuancé et soutient moins la thèse d’une perversité naturelle que celle d’une indétermination morale de l’homme : « Les hommes apportent donc en naissant, ou nulle disposition, ou des dispositions à tous les vices et les vertus contraires. » . Rousseau, lui-même, avec le concept ambivalent de la perfectibilité humaine , est proche d’Helvétius : la naissance est en effet « un point (…) duquel nous partons tous également » , ni bon ni méchant mais tous également animés de cette unique passion naturelle, l’amour de soi, et susceptible de perfection ou de dépravation . Cependant, ce qui importe ici est moins d’analyser en détail ces concepts et les positions souvent nuancées de ces auteurs que de souligner ceci, à savoir que cette confrontation met en lumière deux visions opposées du rapport entre nature et culture. En effet, alors qu’Helvétius, en minimisant le rôle de la nature pour souligner que les hommes sont « nesont donc quele produit de leur éducation » ,démontre une confiance dans le pouvoir de la culture sur la nature, Rousseau, lui, se méfie plutôt de ce pouvoir conçu plutôt comme une contrainte que comme un accompagnement . Si pour Helvétius, « l’homme au berceau n’est rien » car il acquiert tout à partir de sa sensibilité physique, même l’humanité , pour Rousseau, l’homme naît avec une bonté innée, un sentiment naturel d’humanité mais le perd lorsqu’une mauvaise éducation le dénature. Et celle-ci tient avant tout dans le non-respect du temps de l’enfance, ce qui nous amène maintenant à la question des « âges ».

Les différents « âges » et la fin de l’enfance

L’une des principales questions en matière d’éducation est celle de savoir à quel âge les enfants peuvent et doivent commencer à s’instruire.
Traditionnellement, il est accordé que l’enfant y est apte à partir de sept ans lorsqu’il atteint ce fameux « âge de raison ». Helvétius et Diderot semblent tousles deux souscrivent à cette coutume qu’ils mentionnent sans s’y attarder comme si elle allait de soi.

La possibilité de l’éducation

« La nature a son efficacité, mais l’éducation, plus efficace encore en triomphe » affirme Erasme dans son traité De l’éducation des enfants. Sans aucun doute, cette confiance est toujours aussi forte au XVIII ème . Néanmoins, un débat a lieu quand au degré de pouvoir accordé à la pédagogie : comment entendre ce « triomphe » ? Est-il possible de former l’homme en faisant fi de toutes déterminations naturelles ? Cette question, les philosophes des Lumières se la posent car elle a pour enjeux celles de la liberté et de l’égalité des hommes.

Le débat entre l’inné et l’acquis

Dans la mesure où l’étude de l’enfant touche à celle de la nature humaine, il est logique de constater que l’éducation se trouve au coeur d’un débat traditionnel en philosophie mais qui prend de l’ampleur au XVIIIème , celui sur le rapport entre l’inné et l’acquis. De fait, si toutes les facultés humaines sont innées, l’éducation est-elle nécessaire ? Ce problème peut être reformulé d’une autre manière : le « physique » détermine-t-il le « moral » au point de rendre l’action pédagogique inefficace ?

Les « organes » de l’esprit

Héritiers de l’empirisme lockéen, les philosophes des Lumières insistent tout particulièrement sur l’étroit rapport entre les sens et l’esprit dans le développement des facultés mais tous, en revanche, n’acceptent pas le réductionnisme radical du second aux premiers. Partisan de celui-ci, Helvétius fait dépendre entièrement l’esprit de la mémoire et la mémoire de la sensation : de même que l’esprit est « presque en entier l’effet de [la mémoire] », de même « [la mémoire] est un effet de la faculté de sentir »et par conséquent « si l’âme n’est pas l’esprit, l’esprit est l’effet de l’âme ou de la faculté de sentir » . Et cette mémoire, ajoute-t-il, étant la faculté d’un organe physique, on peut en conclure que « dans l’homme tout est sentir » . Pour Helvétius, « Toutes les opérations de l’esprit se réduisent à l’observation des ressemblances et des différences, des convenances et des disconvenances que les divers objets ont entr’eux et avec nous » : or, l’attention ou intérêt qui pousse l’esprit à faire ces comparaisons, n’est pas un principe spirituel mais physique causé par la sensibilité . C’est donc uniquement « la douleur et le plaisir physique [qui] est le principe ignoré de toutes les actions des hommes »  ; « dans tous les cas, jugerest sentir » et « toutes les opérations de l’esprit se réduisent à de pures sensations » . Dans l’optique sensualiste de Condillac, la génération des facultés humaines pensée de manière génétique réduit aussi l’esprit à la sensation : « il n’a fallu que rendre l’homme sensible au plaisir et à la douleur, pour faire naître en lui des idées, des désirs, des habitudes et des talents de toute espèce » . C’est ce principe sensible qui produit l’attention ou l’intérêt à comparer et juger par le biais de la mémoire et le développement de l’esprit ne consiste que dans une modification continue de la sensation .La sensation et la mémoire – qui n’est que « la sensation transformée »- présentent respectivement deux types d’impression – présente ou actuelle – et exercent deux formes d’attention rendant dès lors possible de comparer deux ou plusieurs idées et donc de juger : ainsi, « la sensation devient successivement attention, comparaison, jugement »ou bien « La sensation après avoir été attention, comparaison, jugement, devient donc encore la réflexion même. »

Tempérament et caractère

De même que l’intellectualité humaine, l’humanité – au sens de bonté – est aussi en jeu dans le débat sur le déterminisme. Eternellement posée, la question de la bonté ou de la perversité de l’homme soulève des désaccords lorsque les philosophes des Lumières se demandent si l’enfant porte en lui une inclination déterminante à la vertu ou au vice. Hérités d’une longue tradition déjà présente dans l’antiquité , les concepts de tempérament et de caractère sont amplement débattus au XVIIIème lorsqu’il s’agit d’éducation. Ils renvoient respectivement à une dimension physiologique et psychologique, toutes deux étroitement corrélées.
Dans l’Antiquité, la théorie des « humeurs » correspond à une série de corrélations entre les quatre qualités élémentaires dont le mélange variable dans le corps détermine un « tempérament » physiologique et son corrélat un « caractère » psychologique . Au XVIII ème , le point de discorde consiste dans le fait de savoir si le caractère est quelque chose d’inné ou d’acquis. H e lv é tiu s e t Rousseau, partisans de l’acquisition, font de l’enfant un être moralement indéterminé : ce dernier naît en effet sans passion or le caractère étant l’effet d’une ou plusieurs passions dominantes, l’enfant naît donc sans caractère.
L’auteur du traité De l’hommeest en effet très critique vis-à-vis de la théorie des humeurs : y voir la cause de l’inégalité des esprits revient selon lui à affirmer que « l’esprit est l’effet d’une cause inconnue ou d’une qualité occulte, à laquelle [on] donne le nom de tempérament ou d’organisation » . Or l’expérience prouve…

Les formateurs de l’enfant

Jusqu’ici nous nous sommes appliqués à observer l’enfant. Tournons-nous maintenant vers l’adulte, le maître, celui qui, appliquant la méthode, fait de l’éducation un « art ». Quel est-il ou qui sont-ils, ceux qui prennent en charge la formation de l’enfant, ce pouvoir de l’homme sur l’homme si déterminant pour l’avenir de toute société ? Quelles qualités et compétences doivent-ils avoir ? Car il ne suffit pas d’avoir trouvé la méthode si celui qui l’applique est défaillant.

Les sens

Du fait des influences empiristes et sensualistes qui irriguent le XVIIIème siècle, les éducateurs ne sont pas uniquement humains : c’est en effet par les sens que les enfants reçoivent d’abord leurs tous premiers savoirs. Pour Helvétius, cette éducation « sensible » commencent alors même que le nourrisson est encore dans le ventre de sa mère : « C’est l’instant même où l’enfant reçoit le mouvement et la vie qu’il reçoit ses premières instructions. C’est quelquefois dans les flancs où il est conçu qu’il apprend à connaître l’état de maladie et de santé » . Toute forme d’apprentissage peut donc être conçue comme faisant partie de l’éducation qui possède donc un sens très général chez ce philosophe. Et dans la mesure où le principe unique de l’homme est la sensibilité physique, il considère logiquement les sens externes comme« les cinq portes par où les idées vont jusqu’à l’âme » et les sensations ou plutôt les objets qui les causent comme « les vrais instituteurs de l’enfance » : c’est par eux que l’enfant acquiert ses premières idées. Rousseau considère également comme pertinent le thème de la nature institutrice qui fait partie des trois grands éducateurs avec les hommes et les choses. Cette première éducation est entièrement indépendante des hommes et consiste dans « le développement interne de nos facultés et de nos organes ». Avec elle se forment des « dispositions primitives »nous portant à rechercher ou à fuir ce qui nous est agréable ou désagréable.
Avec ce premier enseignement venu des sens se construit une première forme de raisonnement dont la nature est source de dissensions entre les philosophes. Alors que certains y voient déjà le développement de la raison, d’autres y reconnaissent une forme de raisonnement mais non-rationnelle. Nous l’avons vu, Condillac rejette l’idée d’un « âge de raison », préjugé selon lui qu’il veut récuser en « prouv[ant] que les enfants sont capables de raisonner » – font usage de leur raison – dès le plus jeune âge. Ainsi, non seulement toutes nos connaissances nous viennent des sens mais « nous n’avons de bonne heure l’usage de nos sens, que parce que nous avons raisonné de bonne heure » . La raison n’est pas une faculté que l’usage des sens prépare, c’est un processus dynamique allant de la sensation au jugement : ce qui conduit trop souvent à distinguer radicalement la sensation de la raison c’est, d’après Condillac, la confusion entre l’objet du raisonnement et le raisonnement lui-même. Seul le premier diffère entre l’enfant et l’adulte tandis que le second est toujours le même quelque soit l’âge : « Newton qui développait le système du monde, ne raisonnait donc pas autrement que Newton, qui apprenait à toucher, à voir, à parler : il ne raisonnait pas autrement que Newton, qui développait ses propres sensations. Tous deux observaient ; tous deux comparaient, tous deux jugeaient, touts deux tiraient des conséquences. L’âge a seulement changé l’objet des études : mais le raisonnement, de la part de l’esprit, a toujours été la même opération. ».
Le raisonnement est le même parce que, pour l’auteur du Cours d’étude, les facultés de l’entendement sont identiques entre l’enfant et l’adulte, seulement le second les a plus exercées que le premier . Dès qu’il naît, l’enfant sent, observe, acquiert des idées, les compare et communique ses sentiments sous l’effet du « besoin » : du moment qu’il y a un « donc », l’enfant raisonne et ce même avant de parler . Il suit la même méthode de raisonnement que tous les hommes suivent pour accéder à toutes sortes de notions, même les plus abstraites : non seulement, « les enfants sont capables de raisonner », mais« les notions les plus abstraites sont à leur portée » à partir du moment où « on leur en montre la génération ».

Education collective ou individuelle

Ce problème nous amène à examiner la question débattue au XVIIIème siècle du meilleur type d’éducation, individuelle (privée) ou collective (publique). Traditionnellement, la seconde est plutôt dévalorisée par rapport à la première : critiquée notamment pour la discipline « inhumaine » qui y est appliquée , son instruction essentiellement livresque, son incapacité de s’adapter aux besoins propres de chaque enfant , son aspect élitiste et la difficulté d’enseigner la morale dans un environnement si proche de la société. Cette dernière critique est notamment développée par Locke pour qui l’éducation domestique a l’avantage de préserver l’enfant du monde le plus longtemps possible : dans la mesure où l’instruction est privilégiée sur l’enseignement moral dans les collège, il vaut donc mieux « garder son fils à la maison, pour préserver son innocence et sa modestie, comme des vertus qui se se rapprochent davantage de celles d’un homme utile et capable, et qui y préparent mieux »que l’apprentissage des langues ancienne.

La relation gouvernant – gouverné

Quelque soit le choix de l’éducation, individuelle ou collective, il faut que se noue une relation pédagogique de qualité où le maître, attentif à l’enfant qui lui fait face, fasse preuve avant tout d’humanité.

Se faire enfant

Les philosophes des Lumières, nous l’avons vu, insistent sur l’importance de connaître la nature enfantine or ce savoir a un grand enjeu pratique en ce qu’il permet d’appliquer l’une des maximes éducatives la plus consensuelle : se mettre à la place de l’enfant. Chez Erasme, cette règle sert avant tout à la bonne entente du maître et de l’élève dans le but de rendre l’éducation agréable : « puisque, d’après le proverbe ancien, le semblable aime le semblable, il faut que, d’une certaine manière, le précepteur redevienne enfant pour être aimé de l’enfant ».
Il en va de l’amour de l’enfant pour l’étude que le maître doit réussir à faire naître « du premier coup » chez son jeune élève : « rien n’est plus néfaste qu’un précepteur dont le caractère amène les enfants à haïr les études avant d’être en mesure de comprendre pourquoi il faut les aimer »266 . Cette incitation est très novatrice à l’époque de l’humaniste : jusqu’au XVIIème siècle environ, tout travail – dont celui de l’écolier – est considéré comme pénible et « rendre l’étude aimable »- pour reprendre une expression de Rollin – est l’un des mots d’ordre de la pédagogie des Lumières ainsi que le souligne Josiane Morel. Diderot évoque également cette transformation qu’il a lui-même vécue alors qu’il était précepteur des enfants du financier Randon : dans une lettre à ce-dernier, il écrit « Je fais de vos enfants des hommes, mais chaque jour je deviens un enfant avec eux ».
Dans une autre lettre à Mlle Voland, il explique que se mettre à la place de l’enfant ne signifie pas s’abaisser, s’infantiliser mais au contraire prendre conscience que tout, à cet âge, a valeur d’apprentissage : « Il faut en général se faire petit pour encourager peu à peu les petits à se faire grands. On peut leur dire d’aussi bonnes choses sur une poupée, sur une croix de paille, sur un chiffon que sur les affaire les plus importantes. En les accoutumant à être bons dans des riens, ils sont tout prêts à être bons dans des cas importants. Mais est-ce qu’il y a des riens pour eux ? ».
Chez Condillac, cette méthode doit permettre au maître de s’adapter au rythme d’apprentissage de l’enfant. Nous l’avons vu, l’auteur du Cours d’étude considère que l’enfant et l’adulte disposent des mêmes facultés, la différence consistant uniquement dans le fait que le second les a plus exercées que le premier. Tous les deux usent de la même méthode inductive pour acquérir de nouvelles connaissances et le maître doit donc seulement refaire avec l’enfant le parcours qu’il a lui-même suivi et non transmettre son savoir directement sous la forme de règles et de concepts que l’enfant ne peut comprendre sans avoir fait les observations qui y mènent : pour ce faire, « il faut [que le maître] oublie tous les systèmes, et que, paroissant les ignorer autant que son élève, il commence avec lui, et aille avec lui d’observation en observation, comme s’ils faisaient ensemble les mêmes découvertes ».

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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : QU’EST-CE QUE L’ENFANT ?
I] LA NATURE ENFANTINE
A)CONNAISSANCE ET REPRÉSENTATION
1.CONNAÎTRE AVANT D’ÉDUQUER
2.ENFANT, EDUCATION :FIGURES DE STYLE
B)LE TEMPS DE L’ENFANCE
1.LA NAISSANCE
2.LES DIFFÉRENTS «ÂGES »
II] LA POSSIBILITÉ DE L’ÉDUCATION
A)LE DÉBAT ENTRE L’INNÉE ET L’ACQUIS
1.LES «ORGANES »DE L’ESPRIT
2.TEMPÉRAMENT ET CARACTÈRE
B)LE POUVOIR DE L’ÉDUCATION
1.PERFECTIBILITÉ ET DÉTERMINISME
2.INSTINCTS «ÉDUCATIFS »
3.LE CAS PARTICULIER DU GÉNIE
DEUXIÈME PARTIE : L’ÉDUCATION,UNE QUESTION DE MÉTHODE ?
I] DE L’ENFANT À L’ÉLÈVE
A)LES FORMATEURS
1.LES SENS
2.LES HOMMES
3.EDUCATION COLLECTIVE OU INDIVIDUELLE
B)LA RELATION GOUVERNANT -GOUVERNÉ
1.SE FAIRE ENFANT
2.AUTORITÉ ET OBÉISSANCE
II] DES SAVOIRS ET DE L’APPRENTISSAGE
A)LE CORPS,LA VOLONTÉ ET L’ESPRIT
1.ENDURCIR LE CORPS POUR FORGER LA VOLONTÉ
2.FORMER L’ESPRIT PAR LE CORPS
3.EXERCER L’ESPRIT COMME LE CORPS
B)« EDUCATION »ET « INSTRUCTION »
1.SCIENCE OU CONSCIENCE ?
2.EDUCATION ET HABITUDE
3.LES SAVOIRS :ORDRE ET MÉTHODE D’APPRENTISSAGE
III] LA RUSE DE L’ÉDUCATION
A)APPRENDRE EN JOUANT
1.PARESSE ET PLAISIR
2. UTILE ET AGRÉABLE
B)ANIMER LES PASSIONS
1.RÉCOMPENSER ET PUNIR
2.L’EMULATION
C)CULTIVER L’IGNORANCE
1.PRÉSERVER L’INNOCENCE
2. EXPÉRIMENTER LE HASARD
CONCLUSION
TABLE DES MATIÈRES
BIBLIOGRAPHIE

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