L’importance du débat scientifique dans l’enseignement de lathéorie de l’évolution

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La notion d’obstacle épistémologique

Commençons par définir simplement ce que nous voulons dire par « obstacle épistémologique », un obstacle est un objet se mettant au travers du chemin, dans notre cas cet obstacle vient s’interposer entre le scientifique et son désir de connaitre. A cela s’ajoute l’épistémologie, qui définit la connaissance. Si nous traduisons mot pour mot, c’est une connaissance qui vient faire barrage dans l’apprentissage, dans la recherche de connaissance scientifique. Si cet obstacle n’est pas identifié, si le scientifique n’arrive pas à être objectif, alors il ne pourra pas accéder au savoir qu’il convoite. «Rappelons une évidence : celui qui tient une croyance (dont il ignore qu’elle est) fausse éprouve alors à l’égard de cette croyance exactement la même force de conviction, la même forme de confiance qui nous lie chacun à ce que nous savons être vrai. Dès lors, la ferveur de notre adhésion, l’intensité de nos certitudes ne disent rien sur la véracité de notre opinion. » (Durand & Jackal, 2018, p.19) Il est difficile de renier les savoir sur lesquels notre esprit scientifique a été formé, et pourtant il y a une nécessité de « réformer » son esprit afin de pouvoir dépasser l’obstacle nous empêchant d’atteindre le savoir.
T.S Kuhn (1983) a proposé une approche « cyclique » de l’évolution de la pensée scientifique pouvant être relié aux obstacles épistémologiques proposés par G.Bachelard. « La notion d’obstacle épistémologique peut être étudiée dans le développement historique de la pensée scientifique et dans la pratique de l’éducation. » (Bachelard, 2000)
Bachelard nous invite ici à trouver un ancrage dans l’histoire des sciences afin de parvenir à comprendre la pensée scientifique. La science n’a pas toujours été ce qu’elle est actuellement, elle sera différente dans le futur. L’étude du développement de la pensée scientifique, des différents « paradigmes » comme l’a défini T.S Kuhn (1983), qui se sont succédés, permet de voir la construction du savoir scientifique actuel ainsi que toutes les difficultés ayant entravées l’avancée des sciences. Même si certains paradigmes perdurent, ils ne font pas l’unanimité dans la communauté scientifique.

Les obstacles d’apprentissages de la théorie de l’évolution

Je vais vous proposer ici une réflexion, avec appui de texte issu de recherche, sur ce qui peut causer un obstacle dans l’apprentissage de l’élève. Pour cela, il faut que le pédagogue réussisse à observer et interpréter les obstacles rencontrés par ses élèves afin de réussir à mettre en place des situations d’apprentissages adaptées, dans l’objectif de permettre aux élèves d’accéder à un savoir dans des conditions optimales. Cela sous-entend que le seul problème rencontré par l’élève, lors de l’apprentissage de « nouvelles » notions, est l’ensemble de ses représentations initiales. Ces représentations initiales sont décrites dans un article en didactique par M.Fabre et C.Orange comme étant un ensemble de connaissances dont l’élève dispose déjà mais ne suffisant pas pour répondre aux problèmes posés dans le cadre de la classe de sciences. M.Fabre et C.Orange proposent des pistes de travail afin d’accompagner les élèves et leur permettre de dépasser leurs préconceptions afin de construire un savoir scientifique. Mais lorsque nous observons le triangle de J.Houssaye nous pouvons identifier plusieurs points pouvant être à l’origine d’obstacle d’apprentissage pour l’élève.

Le professeur de SVT : vecteur d’obstacle pour l’élève

Comme l’ont expliqué les didacticiens M.Fabre et C.Orange (1997), l’élève possède déjà une relation avec le savoir ne correspondant pas aux attendus des programmes ou à la réalité scientifique. Le rôle que possède le professeur prend son sens d’accompagnant dans la construction du savoir pour l’élève. L’enseignant de SVT doit respecter trois caractéristiques des savoirs scientifiques :
« – Les savoirs scientifiques sont des compétences.
– Les savoirs scientifiques sont raisonnés.
– Les savoirs scientifiques sont partagés et soumis à la critique.
Un savoir scientifique n’est pas la simple description d’une réalité. »
Il faut donc créer des situations d’apprentissages permettant aux élèves de comprendre l’importance des caractéristiques des savoirs scientifiques. Ainsi, il faut permettre l’émergence de compétences. Le professeur de SVT peut se référer au Bulletin Officiel dans lequel ces compétences sont exigées. Dans le cadre de l’apprentissage de la théorie de l’évolution nous pouvons permettre à l’élève, à travers une situation d’apprentissage, de développer sa capacité d’analyse critique de documents ainsi que son argumentation (écrite et orale). L’enseignant doit faire en sorte de construire des séances où l’élève peut proposer un fil conducteur de réflexion argumenté par les documents à disposition et permettant de répondre à un problème de départ. Les éléments scientifiques ne sont pas simples à comprendre, il faut donc réussir à construire des séances permettant à l’élève de se poser des questions sur ses savoirs déjà acquis, il ne doit pas accéder à la réponse directement mais construire un raisonnement menant à une problématique qui n’existait pas précédemment. Ce n’est qu’à ce moment que l’élève pourra accéder à un savoir scientifique raisonné.
Enfin comme pour toute recherche scientifique, il faut communiquer ses résultats, que la recherche ait aboutie à des résultats concluants ou non. L’enseignant peut donc permettre aux élèves de présenter leurs résultats afin que la communauté (classe) puisse en discuter. « Un savoir scientifique n’est pas une simple connaissance privée, aussi pertinente soit-elle (mais qui pourrait alors en juger ?). Il doit être soumis à la discussion publique et pouvoir être remis en question » (Fabre & Orange, 1997) C’est lors de la discussion que nous pourrons observer d’une part si les élèves ont acquis certaines compétences mais aussi s’il existe différentes interprétations des mêmes résultats.
Cette discussion peut être définit comme un débat, en effet les élèves vont pouvoir argumenter leurs interprétations et les confronter à celle de leurs camarades. De ces échanges, certains élèves changeront de point de vue car ils ne possèdent pas des arguments suffisants pour démentir leurs camarades.
Dans le cadre de l’apprentissage de la théorie de l’évolution, il faut donc une situation d’apprentissage permettant de répondre à ces critères, mais durant le débat l’enseignant reste le garant du savoir scientifique. Il devra donc, dans tous les cas, réaliser un bilan du débat afin de le compléter et/ou de le corriger. Il faut donc que l’enseignant réalise qu’il ne discute pas avec une assemblée ayant déjà des connaissances sur le sujet mais qu’il enseigne une théorie compliquée, à des élèves qui découvrent la complexité de cette théorie. Il doit donc argumenter l’origine de la répartition des allèles dans des populations, la place du hasard, de la sélection et même l’existence d’une parenté entre les espèces. Il ne doit pas faire une simple liste ou un enchainement d’exemples. Il ne faut pas adopter « la pédagogie de la monstration » (C.Fortin) qui est très souvent faite par manque d’appui scientifique, ou lorsque nous abordons un sujet semblant trop abstrait pour notre public. Le risque dans l’apprentissage de la théorie de l’évolution est donc, pour l’enseignant, de ne pas mettre en avant les faits scientifiques et de simplement faire un listing d’arguments sans pour autant les démontrer. Cela ne respecte donc pas les trois caractéristiques car on ne développe aucune compétence et ne faisons appel à aucun raisonnement.
Cependant, la zone d’ombre laissée ne peut qu’être soumise à la critique correspondant à l’ensemble des représentations initiales des élèves.
L’enseignant possède donc un rôle majeur dans l’apprentissage par le biais de l’élaboration d’une séance adaptée à la construction d’une problématique par les élèves mais aussi par une réalisation de bilan non pas monstratif, comme il pourrait le faire avec un de ses pairs mais en argumentant un maximum et en variant les exemples. Cependant, comme dit dans le premier point il faut prendre en compte les représentations initiales des élèves, or dans une classe il existe un panel de représentations initiales aussi larges que la diversité d’élèves. Cela nécessite donc de se pencher sur cette relation que l’élève possède déjà avec la théorie de l’évolution. Je vais donc approfondir mes recherches sur cette relation élève-savoir dans le prochain axe.

L’élève possédant un savoir erroné ou incomplet

La relation entre l’élève et le savoir n’a pas uniquement lieu dans le cadre scolaire, ce dernier est confronté dans la vie de tous les jours à une quantité d’informations importantes. Lesquels pouvant être filtrées par l’esprit critique développé par l’élève dans le cadre de son apprentissage. Pourtant, certaines informations persistent malgré le fait qu’elles soient erronées ou incomplètes. La théorie de l’évolution n’échappe pas à cette règle, cette confrontation avec le savoir disposé par l’enseignant est très bien décrite dans le cadre d’un échange sur le forum de l’académie de Toulouse (2010) par C.Fortin décrivant deux sources à l’origine de la négation de la théorie de l’évolution par l’élève : « D’une part afin de défendre des idées créationnistes en discréditant l’enseignement de la théorie afin de déstabiliser l’enseignant.
D’autre part l’élève montre une incompréhension du mot « théorie » et par le biais de la négation, l’élève montre à l’enseignant qu’il trouve cet enseignement infondé. »
Cela montre qu’il existe deux catégories distinctes d’élèves, d’une part les élèves ne prenant pas en compte les données scientifiques et cherchant des arguments, des preuves du manque de rigueur de cette théorie et d’autre part des élèves n’ayant pas le bagage scientifique pour rendre compte de la complexité de cette théorie mais qui en cherche une explication qui leur est rationnelle.
Ces catégories de représentations initiales réalisées par C.Fortin nous permettent aussi de pouvoir connaitre le cadre culturel dans lequel l’élève baigne.
Les élèves peuvent donc être exposé en extérieur à des savoirs erronés, c’est le cas si le cadre culturel possède des aspects religieux, ainsi l’évolution peut être acceptée dans le meilleur des cas, mais les mécanismes évolutifs ne sont pas la sélection naturelle ou la dérive génétique mais le pouvoir divin. C’est aussi le cas si l’élève est exposé au faux sens du mot théorie, dans les émissions de divertissements par exemple, une théorie ne possède plus le poids d’une réalité scientifique mais celui d’une simple supposition.
D’autres élèves peuvent être placés face à des savoirs incomplets, même si le concept de théorie de l’évolution est accepté par ces élèves, ils ne possèdent pour autant pas la connaissance de l’intégralité des mécanismes évolutifs, au contraire, ils ont tendance à penser que seul la mutation entre en jeu dans l’évolution des espèces. Cela peut être lié à la source cognitive à partir de laquelle ils ont construit leurs savoirs, ainsi certains textes, certaines émissions, certains documentaires, ne relatent pas la totalité des faits scientifiques ou réalisent des raccourcis par soucis de ne pas être compris par l’auditoire.
« Un monde où des créatures gigantesques se livrent une guerre impitoyable pour régner sur notre planète.
– L’évolution est réduite à la lutte pour la survie… » (Lecointre, Fortin, Guillot, & Louarn, 2009 p.19)
Dans les deux cas, nous nous confrontons à des représentations initiales que nous devons prendre en compte afin de réaliser nos séances. Ainsi, ces deux groupes représentent une base de travail pour l’enseignant afin de leurs permettre d’adhérer, de comprendre la théorie de l’évolution. Pour cela je m’appuie sur les travaux de C.Fortin (2010) qui développe les différents profils de représentations d’élèves que nous pouvons rencontrer ainsi que les critères des obstacles qui les caractérisent.
De plus, ces travaux nous permettent de définir de manière encore plus précise les groupes cités précisément et donc de les subdiviser, elle nous propose donc cinq catégories.

La théorie de l’évolution demande une grande objectivité scientifique

Le premier obstacle cognitif dans la théorie de l’évolution provient de son nom et de sa relation avec la culture populaire. Les mots « théorie » et « évolution » sont l’objet de multiples interprétations.
Théorie peut donc être « une connaissance purement spéculative » (Larousse, 2017) ou d’après les travaux de T.S.Kuhn définissant le paradigme auquel nous pouvons voir transparaitre une définition de la théorie comme étant « les découvertes scientifiques universellement reconnues qui, pour un temps, fournissent à une communauté de chercheurs des problèmes types et des solutions. »(1983, p.11).
En parallèle, le mot évolution montrant une « amélioration de certain caractère » là où nous souhaitons transmettre « un ensemble des changements subis au cours des temps géologiques ayant eu pour résultat l’apparition de formes nouvelles ». (Larousse, s. d.)
La quantité d’informations à mobiliser lors de l’étude de la théorie de l’évolution est très importante, il faut connaitre l’ADN, les chromosomes, les allèles pour la partie génétique de la théorie. A cela s’ajoute les notions que nous devons construire durant cette séquence, la sélection naturelle et la dérive génétique, l’étude de caractère en commun, de caractère à l’état ancestral et dérivé. Si toutes ces notions ne sont pas correctement abordées et maitrisées par les élèves, cela peut ajouter de la difficulté.
« L’ancêtre des lapins est un lapin, celui des chiens un chien, celui des chats un chat, etc. » (C. Fortin).
Il y a ici une façon de penser directement liées à la société. En effet, la pensée populationnelle est très peu utilisée au quotidien, ainsi les élèves doivent dépasser ces « évidences ». Dans le cadre de la théorie de l’évolution, les élèves doivent comprendre que nous étudions la variation de fréquence des allèles au sein d’une population. Les modifications peuvent être mineures et imperceptibles d’une génération à l’autre mais l’accumulation de ces modifications sur plusieurs générations mène à la diversité des espèces. Ce sont ces faits qui sont à l’origine d’un des obstacles. Il faut trouver un moyen de faire prendre conscience de l’incohérence de l’approche essentialiste de l’espèce face à une approche scientifique du concept d’évolution.
La théorie de l’évolution prend place, comme dit précédemment, sur plusieurs générations, elle est étudiée dans le cadre de temps géologique. Cela dépasse largement les capacités de perception de nos élèves. « De mémoire de rose, il n’y a qu’un jardinier au monde. » (Fontenelle, 1998) Cette citation montre la difficulté à laquelle est confrontée l’apprenant face à un sujet qui dépasse ses capacités de compréhension, comme pour la citation précédente, cela montre une impossibilité de coexistence entre le « bon sens » et la rigueur scientifique. L’intuition devient un obstacle lors de l’apprentissage des notions de la théorie de l’évolution. « de fait, face à la force de nos impressions, de nos intuitions, de nos convictions, et de ce que nous appelons bon sens, que vaut la parole à peine compréhensible d’un expert ? » (Durand & Jackal, 2018, p.18-19) Cela fait référence à la difficulté d’adhésion à laquelle nous pouvons nous confronter lorsqu’un savoir n’est pas en adéquation avec notre vécu. Les points de repère pris dans le vécu de l’apprenant ne vérifie pas le nouveau savoir, il faut donc renier tout ou partie de son passé afin de comprendre et d’apprendre.
« L’évolution biologique est contre intuitive d’abord parce qu’elle constitue un fait d’une ampleur et d’une portée hors de nos sens, et sur des durées inconcevables pour nous. » (Lecointre et al., 2009, p.11) Elle montre aussi le manque d’objectivité dont fait preuve l’Homme, en effet la rose « pense » d’un point de vue d’une rose. Dans notre cas, nous nous heurtons à un fort anthropocentrisme qui bloque la perception de la théorie de l’évolution. Il est compliqué pour l’apprenant de traiter le sujet de l’évolution en y incluant l’Homme, il y a un refus d’apparenter l’Homme aux autres espèces, de les mettre « au même niveau ».
La quantité de notions traitées dans le cadre de la théorie de l’évolution est importante, elle fait appel à beaucoup de connaissances, de compétences mise en place dans le cadre des sciences. Certaines de ces compétences ne sont pas acquises par la totalité des élèves. Rappelons que nous sommes face à une classe composée d’une hétérogénéité d’individus, ayant chacun sa culture, sa réflexion. Nous pouvons donc chercher comment il est possible de renforcer les individus du groupe classe en travaillant avec cette entité qu’est la classe.
Je vous propose donc de travailler deux pratiques visant à comprendre et s’approprier la théorie de l’évolution. D’un côté, un travail autour de l’histoire des sciences, l’enseignant se doit donc d’étudier, d’approfondir l’épistémologie des sciences afin d’avoir connaissance des obstacles et des leviers ayant menés à la théorie actuelle dans le but de construire une séance qui soit adaptée à la classe et aux représentations initiales de chacun. D’un autre côté, un travail autour du socioconstructivisme, permettant une sorte d’entraide entre les élèves, leurs permettant d’avancer tous et ainsi de gommer les inégalités de connaissances autour du sujet de la théorie de l’évolution.

Les outils permettant de dépasser ces obstacles

Les pistes de réflexions que j’ai choisi d’investir dans le cadre du mémoire pour travailler sur les difficultés de l’enseignement de la théorie de l’évolution sont :
– Comment l’enseignant peut-il s’appuyer sur l’histoire des sciences afin de réaliser des séquences prenant en compte les représentations initiales des élèves ?
– Au vu de l’hétérogénéité des représentations initiales des élèves, en quoi le débat scientifique entre élèves permet-il de transformer celles-ci ?
Les deux questions ne seront pas traitées de manière équitable. En effet, je me suis centré sur la seconde question. Pour cela, j’ai mis en place un dispositif adapté.

L’apport de l’histoire des sciences dans le dépassement des représentations initiales

La science n’est pas gravée dans le marbre, elle évolue. Nous pouvons nous demander quel est l’utilité d’étudier l’histoire des sciences. Pourquoi serait-il utile d’étudier des notions obsolètes ? Cette étude n’a pas pour but de retenir un savoir qui a été valable dans le passé. Elle sert à mettre en place des bases mais aussi à montrer des limites que possède certains courants de pensée. La mise en évidence de ces limites peut avoir comme effet de lever les obstacles que les élèves ont. Nous devons alors réaliser une étude non exhaustive de l’histoire des sciences, surtout pour montrer les différents fils conducteurs mais aussi les obstacles ayant existé au cours de l’histoire. « Comprendre la théorie de l’évolution, c’est aussi comprendre ses fondements historiques. » (Lecointre et al., 2009 p.33)

L’apport du débat scientifique dans le dépassement des représentations initiales

J’en ai brièvement parlé précédemment, le dispositif consiste à intégrer le débat en classe dans l’objectif de réussir à dépasser les représentations initiales de l’élève.
F.Orange décrit la mise en activité sur un débat comme étant « le concept de construction d’espace-problème, issu de la psychologie cognitive »
J’ai aussi exprimé auparavant l’importance de la place de la discussion, de la transmission des données dans le cadre des sciences. Cela sous-tend la possibilité de réaliser une critique des propos plus ou moins argumentée que peuvent avoir les élèves (ou même l’enseignant dans le cadre d’une situation d’accroche). Cette capacité d’argumentation, en plus d’être une compétence à développer d’après le Bulletin Officiel, fait aussi partie des moyens d’outrepasser les représentations initiales des élèves.
La confrontation entre les différentes interprétations d’un même corpus documentaire doit avoir comme effet une remise en question de tous les parties, les élèves sont, à ce moment-là, capables de trouver le manque de cohérence des interprétations de leurs camarades mais aussi de prendre conscience de leur propre manque de rigueur dans l’exploitation des résultats. « Il faut une conscience du non rigoureux pour parvenir à la pleine conscience de la rigueur » (Peterfalvi, 1997)
Dans le cadre de mon activité de débat scientifique, j’ai décidé de mettre en place une séance permettant la libre émergence des représentations initiales des élèves. Pour cela, j’ai au préalable réalisé une double étude de documents (voir Etude de documents avant le débat et Etude de document après le débat), une première, incomplète, présentant un exemple de sélection naturelle dans lequel la force évolutive (la pression environnementale) n’apparait pas. Cela a pour but de laisser l’élève proposer un mécanisme qu’il connait, permettant d’expliquer les changements de fréquence d’un phénotype à deux périodes différentes. A cette étape, il est réalisé un relevé des données et il y a possibilité de démarrer un débat entrainant la confrontation des interprétations des élèves et donc une remise en question pour certains élèves de la qualité de leurs données. Cette mise en activité à deux bénéfices dans le cadre de cet enseignement. D’une part, cela permet aux élèves de dépasser leurs représentations initiales et d’autre part, cela permet de diminuer l’hétérogénéité des points de vue à la fin du débat.
Suite à cet échange, les élèves disposent d’une seconde activité dans laquelle la force évolutive est explicitée, cela permet donc encore de remettre en cause par des faits scientifiques les représentations des élèves. A la suite de cette étude de documents, un échange avec le professeur est réalisé afin de découvrir les dernières limites que peuvent avoir les élèves.
Cette séance me permet de voir par le biais de relevés plusieurs caractéristiques que je souhaite étudier.
– A quelle catégorie de représentation initiale chacun de mes élèves fait partie ? Quelle est la tendance de la classe ?
– Y a-t-il un changement de représentation par une remise en question durant le débat ?
– L’étude de documents en deux parties permet-elle de visualiser les incohérences du raisonnement d’une partie à l’autre ?
– Les élèves se sont ils approriés un des mécanisme de la théorie de l’évolution ?
En ce qui concerne le dernier point, j’ai réalisé une évaluation (Etude de documents 3) permettant de mettre en application les capacités développées dans la séance mais aussi me permettant d’évaluer la réussite de mon dispositif.

L’analyse de la séance sur la théorie de l’évolution

Dans les classes de seconde où j’enseigne, j’ai pu observer que les cinq catégories proposées par C.Fortin ne sont pas représentées. Je n’ai pu, dans les différents points de récupérations de données, qu’observer des points de vues Lamarckiens ou Pseudo-évolutionniste. En effet, pour la majorité des élèves les caractères sont présents pour la survie de l’individu, ces caractères proviennent donc d’une transformation afin de répondre à un besoin. En plus de cela, nous retrouvons une forte tendance au finalisme plus complexe à dépasser, sûrement à cause du manque de recul sur ces mécanismes.
Je vais donc, au travers de l’analyse des résultats des différentes étapes de ma séance, montrer d’une part l’évolution de la réflexion des élèves autour de la théorie de l’évolution tout en démontrant l’apport du débat dans la construction du savoir.
Dans un premier temps nous allons réaliser une évaluation diagnostique des classes étudiées à l’aide du premier dispositif de récupération de représentation initiale.
Puis, en retranscrivant les débats ayant eu lieu en classe, nous chercherons à comprendre l’apport réel que peut avoir le dispositif mis en place au coeur de la séance.
Enfin, au travers d’une évaluation finale, nous chercherons à vérifier si le débat a permis un changement dans la réflexion autour de la théorie de l’évolution.

Etude des représentations initiales des élèves

Je vous présente dans cette partie le dispositif mis en place afin de récolter les représentations initiales des élèves ainsi que les résultats obtenus.
Cet ensemble de documents ne permet pas à lui seul de déterminer le mécanisme réel permettant la répartition des phénotypes dans la population. Il est donc idéal pour permettre aux élèves de proposer des mécanismes maladroits et correspondants à des représentations initiales. L’objectif est ici de permettre une interrogation afin d’initier une discussion autour d’un ensemble d’hypothèses pouvant ou non être confirmées par le bagage culturel des élèves.
Consigne donnée aux élèves : Comment évolue la fréquence des différentes formes de phalènes entre 1830 et 1950 ? Proposez une hypothèse expliquant cette variation.
J’ai ici un premier relevé me permettant de connaitre les représentations initiales des élèves. Je les ai donc classées et cela m’a permis de dresser l’histogramme de la figure 4. Elles se répartissent en 4 catégories non semblables à celles proposées par C.Fortin. En effet, les représentations de type créationniste ou faisant intervenir une « puissance supérieure » ne sont pas présentent dans les copies récupérées. Comme dis précédemment, les élèves sont principalement dans les catégories Pseudo-évolutionniste Lamarckien et Darwinien.
J’ai donc choisi de classer les représentations des élèves de la manière suivante :
Les modifications liées à la pollution : Les phalènes deviennent noirs à cause des dépôts sur leurs ailes. Dans ce cas-là, l’environnement entre en jeu mais ne permet en aucun cas d’expliquer une modification de la répartition des allèles dans la population entre les deux périodes.
Une aptitude au camouflage : Les élèves montre ici un point de vue Lamarckien, il propose qu’afin de mieux survivre, les phalènes changent de couleur et transmettent cette nouvelle couleur à leurs descendances. C’est donc le besoin qui créait le caractère comme l’a énoncé Jean Baptiste de Lamarck.
Possibilité de migration : Les élèves ayant proposé cette hypothèse montre une non continuité, il n’existe pas de lien entre les deux phénotypes. Ils proposent donc que ces phalènes proviennent d’un autre pays comme mécanisme d’apparition d’un nouveau phénotype.
Sélection naturelle : Même si partielle, les élèves ne proposent pas de mécanisme expliquant l’apparition d’un nouveau caractère mais ils démontrent cependant que ce caractère possède des avantages dans la survie en fonction du milieu dans lequel ils sont.

Analyse des productions posttests

Afin de vérifier si les élèves ont bien compris et se sont appropriés la théorie de l’évolution, j’ai réalisé une évaluation dans laquelle ils ont étudié la variation d’un phénotype au sein d’une population de punaise de savonnier élégant.
Cette évaluation permet donc d’observer non pas si l’élève a compris l’exemple étudié mais s’il a réussi à s’approprier la notion de sélection naturelle. Pour l’ensemble des élèves, l’exemple des punaises a été relié à la sélection naturelle pour autant aucun n’a réussi à exprimer de manière exacte le moteur à l’origine de la variation de la taille des rostres chez les punaises.
Les résultats obtenus (figure 6) ne me permettent pas de bien évaluer mon dispositif. Il semblerait que le cas des punaises est beaucoup trop compliqué pour les élèves par rapport à l’exemple étudié en classe des phalènes du bouleau.
Nous pouvons nous focaliser sur certaines copies intéressantes afin de voir ce qui a été compris par les élèves.
Dans les copies présentent dans les annexes 7 et 8, les élèves proposent l’existence d’une force évolutive responsable de la modification du phénotype des populations cependant cette modification a un but. Ce finalisme omniprésent dans les copies montre que les élèves n’ont pas le recul permettant de comprendre que c’est un ensemble de paramètres qui influe sur des populations. Pour autant, certains ont bien appréhendé cette notion d’action environnementale qui façonne les populations.
Dans les annexes 9 et 10 nous percevons cette nuance. Ces élèves ont réussi à s’approprier la théorie de l’évolution sur du long terme. Pour eux, le dispositif mis en place a été totalement profitable.
Enfin, certains élèves n’ont pas réussi à percevoir le lien entre l’exemple vu en classe et celui de l’évaluation. Cela ne permet pas de dire que ces élèves n’ont pas compris la sélection naturelle mais il semble que le cas étudié lors de l’évaluation était trop compliqué à rattacher à celui vu en classe. Même si les deux sujets d’études concernent des insectes, ce n’est pas pour autant les mêmes pressions environnementales qui sont étudiées. Cette limite mise à jour par les élèves me permet de voir qu’il aurait fallu multiplier les exemples afin de rendre familier cette notion de force évolutive liée à la pression environnementale.
Ce qu’il faut retenir de ce dispositif est que dans l’ensemble, la vision du sujet par les classes a évolué. Même si ils n’ont pas tous acquis les notions concernant la théorie de l’évolution ils ont réussi à dépasser leurs représentations initiales.

Les limites de mon projet

Dans cette dernière partie de mon mémoire, je vais réaliser une analyse critique du projet que j’ai réalisé avec mes classes. Pour cela, je souhaite examiner ce projet en quatre parties. Premièrement, je vais expliquer en quoi ma progression a-t-elle posée problème ; deuxièmement, comment le corpus documentaire aurait-il pu être plus efficace et troisièmement, les difficultés rencontrées lors de la réalisation des phases de débat et pour terminer comment aurais-je pu réaliser une évaluation plus adaptée à mon projet.

La place dans la progression

Le projet autour de la sélection naturelle a pris place à la suite de l’étude de la dérive génétique. Cependant, nous n’avions pas encore fait l’étude de la molécule d’ADN, des gènes et des allèles. Cette quantité d’informations non traitée est essentielle pour comprendre les phénomènes de sélection naturelle et de dérive génétique. J’ai donc réalisé les rappels lors de la séance autour de la dérive génétique mais cela me semble insuffisant pour réellement appréhender l’impact des forces évolutives.

Le choix des documents

Les documents de la première partie ne permettant pas de cerner la totalité du sujet ont causé un obstacle pour certains élèves. Ils ont proposé une hypothèse sans aucun appui autre que leurs représentations initiales sur le sujet. Les documents de la seconde partie n’ayant pas permis de réfuter leurs hypothèses, ces quelques élèves n’ont pas pu balayer leurs représentations initiales comme je l’avais prévu initialement.
L’étude des phalènes du bouleau est assez simple pour les élèves, elle ne fait intervenir que deux facteurs externes (pollution et prédation) mais cette simplicité n’est pas représentative de la réalité d’une part à cause du manque de « nuance » mais aussi par l’aspect trop binaire de l’exemple. Il serait donc préférable, afin de réellement comprendre la sélection naturelle, de prendre plus d’exemple ayant des complexités variables.

La réalisation du débat

La phase de débat entre les élèves a relevé plusieurs points de difficultés liées à l’interaction entre les élèves. Certains élèves ont l’habitude d’intervenir durant les séances de SVT, ces élèves ont tendances à demander beaucoup d’attention empêchant souvent les autres d’intervenir.
Dans le cadre de la classe, les élèves ont pour règle de devoir argumenter chacune des réponses, cependant le reflexe n’est pas toujours présent et certains élèves n’étant pas d’accord avec leurs camarades se contentent de dire « non » sans pour autant argumenter. Cela brise la dynamique du débat en créant un moment de latence.

L’évaluation de mon projet

Comme je l’ai dit précédemment, l’étude de l’exemple des phalènes du bouleau est simple et ne permet pas forcément de comprendre la complexité de la sélection naturelle. L’étude de document proposée dans le cadre de l’évaluation n’étant pourtant pas plus compliquée du point de vue du nombre de variable entrant en jeu (Relation prédateur/proie et modification de l’environnement) que celle vue en classe. Les élèves ont pourtant une difficulté pour exprimer le mécanisme de sélection naturelle lorsque le caractère étudié n’évolue pas de manière binaire (blanc ou noir) mais de manière progressive (taille du rostre des punaises).
J’ai choisi une méthode rédactionnelle dans le cadre du rendu de mes élèves afin de leurs laisser une liberté d’expression et surtout afin de pouvoir observer les détails pouvant faire obstacles aux élèves. Cette méthode d’évaluation possède un défaut, il est compliqué à évaluer dans le cadre de recensement de données contrairement à un QCM permettant de rapidement récupérer ces résultats.

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Table des matières

Introduction 
1. La théorie de l’évolution 
1.1. Les notions abordées en classe
1.2. Les obstacles à l’apprentissage
1.3. Les outils permettant de dépasser ces obstacles
2. Étude de cas 
2.1. Dispositif du corpus de donnée
2.2. L’analyse de la séance sur la théorie de l’évolution
2.3. Analyse des productions posttests
2.4. Les limites de mon projet
3. Conclusion 
Références Bibliographiques

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