L’implantation des réseaux: enjeux, pouvoirs et conflits

L’aménagement du territoire et la construction d’infrastructures urbaines constituent les principaux motifs de la mise sur pied d’une corporation municipale et représentent les données importantes de l’implantation des industries. L’urbanisation du Québec au début du XXe siècle s’accompagne d’une évolution des lois encadrant le pouvoir municipal. Le Code municipal et la Loi sur les cités et les villes sont reformulés et l’on crée le ministère des Affaires municipales en 1918. Les municipalités ayant obtenu le statut de ville doivent se soumettre à la Loi sur les cités et les villes, contrairement au reste du territoire qui s’administre selon le Code municipal. La législation provinciale vise précisément à favoriser la création d’ensembles urbains et la formation de corps administratifs pouvant organiser le territoire. La municipalité de Drurnmondville met à profit ses droits et sa capacité à mettre sur pied des réseaux publics pour soutenir son désir d’industrialisation. Par ailleurs, les entreprises de réseaux déploient et perfectionnent leurs installations dans la région permettant l’essor de la grande industrie. Toutefois, l’implantation d’infrastructures entre 1900 et 1932 à Drurnmondville soulève des enjeux impliquant tous les paliers du pouvoir politique, les acteurs du développement économique et les propriétaires fonciers. Leurs intérêts parfois contradictoires provoquent des conflits de natures diverses dont plusieurs trouvent leur dénouement par l’entremise de la justice.

Nous commencerons par analyser les pouvoirs et les actions de la municipalité en ce qui concerne la construction d’infrastructures urbaines. Ainsi, nous constaterons qu’elles se développent de façons inégales sur le territoire, les aires ouvrières accusant un retard. Par la suite, nous soulignerons le rôle fondamental que jouent les réseaux électrique et ferroviaire dans l’industrialisation et démontrerons pourquoi ils font l’objet de maints débats et négociations. Finalement, nous étudierons les conflits reliés aux réseaux en milieu urbain. L’étude des litiges portés devant les cours de justice dévoile et relate des conflits lors de la construction de réseaux, lors d’expropriations et lors du partage des responsabilités financières.

LES POUVOIRS DE LA VILLE ET LES INFRASTRUCTURES URBAINES 

C’est en 1888 que le village de Drurnrnondville obtient le statut de ville par le regroupement d’agglomérations urbaines environnantes soit les terres aux alentours du moulin Vassal, une partie des cantons de Wendover et de Simpson et une partie de la municipalité de Grantham . Les pouvoirs de taxation et d’emprunt de la corporation municipale permettent l’organisation du territoire et la distribution de services publics. Les sources de revenus sont diverses: la propriété foncière, les immeubles, le coût annuel des loyers et les fonds de commerce. De plus, la ville émet des licences pour certains emplois, commerces et pour les chiens . Les locataires contribuent aussi à la fiscalité de la ville, puisqu’ils doivent débourser cinq sous par piastre du loyer annuel ou un minimum d’un dollar par année . L’acte constituant Drummondville en corporation mentionne également la possibilité de taxer les hommes de 21 ans et plus qui sont demeurés plus de six mois dans la ville sans avoir été ni propriétaire, ni apprenti, ni domestique  .

Le pourcentage des valeurs immobilières à taxer est fixé par le Conseil municipal et le rôle d’évaluation définit les valeurs de chaque propriété. Lors de sa création, la municipalité limite le pouvoir de taxation à 0,015 $ par piastre (1,50 $ par 100 $) sur la valeur totale des lots et des immeubles possédés. Cette proportion sera augmentée des deux tiers à la fin de la période à l’étude puisque la taxe foncière sera de 2,30 $ par 100 $ d’évaluation en 1932 . La hausse significative du taux de taxation foncière témoigne de l’augmentation des responsabilités de la ville et de sa volonté interventionniste. La municipalité utilise même les tribunaux pour défendre ce droit contre des citadins récalcitrants. Un dossier judiciaire datant de 1930 oppose la Corporation municipale à un marchand, Ismaël Bouchard, dont les taxes demeurent impayées depuis trois ans . Il est condamné à payer 1 064,44 $.

Mettant en application les lois provinciales en vigueur, la Corporation municipale s’approprie des équipements déjà existants . En réclamant le droit d’exploiter le potentiel énergétique de la rivière Saint-François, par exemple, la ville achète en 1896 une petite centrale privée et son réseau de distribution approvisionnant quelques immeubles. En ce qui concerne la municipalisation de ressources hydrauliques, Drummondville fait figure de pionnière au Québec . Elle contrôle la production et la distribution d’électricité sur son territoire pendant la première moitié de notre période d’étude. Néanmoins, le rendement désole les industriels, parce que, malgré les efforts de la municipalité, l’approvisionnement stable et continu en électricité est impossible. Le relatif isolement du réseau et la désuétude du barrage qui ne permet pas un contrôle efficace du débit de la rivière provoquent de nombreuses pannes qu’on ne peut pallier par l’acheminement d’électricité d’une source alternative. Les entreprises doivent suppléer à ces déficiences par leurs propres moyens. En outre, l’entretien et les coûts de réparation, suite aux dommages causés par de puissantes crues des eaux et par un incendie en 1912, plongent la compagnie municipale dans un gouffre financier. Alors que l’entreprise est assurée pour 12000 $, l’incendie cause des pertes estimées à 50000 $ . Ces déboires financiers font pencher l’opinion publique des drummondvillois en faveur d’une privatisation. C’est ce qui se produit en 1914, lorsque la compagnie passe aux mains de la Southern Canada Power. Ce projet ambitieux qu’est celui de contrôler la production et le transport de l’électricité sur le territoire témoigne du dynamisme des décideurs de la ville et de leur volonté de prendre en charge les éléments clés de l’industrialisation.

La construction d’infrastructures urbaines va également servir la promotion industrielle pratiquée par la municipalité. Depuis les mesures protectionnistes du gouvernement fédéral de 1879, l’installation d’entreprises étrangères sous forme de franchises marque le début des campagnes de séduction des villes . Les concessions foncières, l’exemption de taxe, l’endossement d’emprunt et l’octroi de bonus constituent des stratégies de la part de nombreuses municipalités pour attirer les grandes industries . Les décideurs de Drummondville vont aussi promettre et construire d’importantes infrastructures pour garantir plus de commodités. À titre d’exemple, un vote du Conseil municipal accorde à la ville le droit de dépenser plus de 100 000 $ pour les besoins de la Canadian Celanese, immense complexe industriel qui s’implante en 1926. L’argent sert alors à accommoder l’entreprise en matière d’aqueducs et d’égouts . Il y aura dépassement de coûts, en partie à cause de difficultés d’exécution reliées à la nature du terrain, et il en coûtera au moins 107000 $. Orummondville rivalise avec d’autres villes afin de devenir l’hôte de l’usine et ce type d’arrangement plaide en sa faveur.

Par contre, la construction des réseaux de services publics dans les aires résidentielles ouvrières est plus problématique. En effet, on remarque un certain retard en ce domaine dans les villages en formation en dehors de limites administratives de la ville où les ressources financières disponibles sont aussi faibles que le taux de taxation. La carte 1 permet d’observer l’étalement urbain entre 1921 et 1930 et les limites de la ville en 1921 à l’aide du réseau routier tiré des plans d’assurance incendie de la ville. Deux regroupements d’habitations existent déjà en dehors de la municipalité au début des années 1920, il s’agit de Saint-Joseph-de Grantham et Saint-Simon.

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Table des matières

INTRODUCTION 
Bilan de la production scientifique
L’histoire urbaine
L’industrie et ses effets sur l’urbanisation
Le capital foncier et les réseaux urbains
Le rôle du pouvoir municipal
L’histoire de la famille et du logement ouvrier
La famille et l’industrialisation
Le logement ouvrier et le marché immobilier
Les questions de recherche
Sources
Méthodologie
Collecte des données
L’analyse des données
Plan de l’étude
CHAPITRE 1- L’IMPLANTATION DES RÉSEAUX: ENJEUX, POUVOIRS ET
CONFLITS
1.1 Les pouvoirs de la ville et les infrastructures urbaines
1.2. Deux réseaux à la base de l’essor industriel
1.3. Litiges en justice au sujet des réseaux publics et privés
1.3.1 Conflits lors de la construction des réseaux
1.3.2. Expropriation et servitude
1.3.3. Conflits concernant les responsabilités et la taxation des réseaux publics … 43
Conclusion
CHAPITRE 2 – LA PROPRIÉTÉ ET LE LOGEMENT LOCATIF PLANIFIÉ 48
2.1. La Corporation municipale
2.1.1. La Corporation municipale et l’élite propriétaire
2.1.2. Le bâti résidentiel et la règlementation municipale
2.1.3. Organisation du logement par la Corporation municipale
2.2. La grande industrie
2.2.1. Les propriétés de l’industrie
2.2.2. Organisation du logement par la grande entreprise
2.3. Les grands investisseurs immobiliers
2.3.1. Les logements possédés par les investisseurs locaux
2.3.1.1. Les industriels locaux et le logement locatif
2.3.1.2. Les commerçants locaux investissant dans le logement
Conclusion
CHAPITRE 3 – LES NON-PROPRIÉTAIRES ET LE LOGEMENT OUVRIER
3.1. L’industrialisation à l’origine de nouveaux comportements résidentiels
3.1.1. Le salariat et le travail des fils et filles
3.1.2. La mobilité et la faible diversité d’emploi
3.2. Les pratiques résidentielles en milieu populaire
3.2.1. Le déclin de la propriété résidentielle
3.2.2. L’argent du loyer et l’entassement des ménages d’ouvriers locataires
3.2.3. Les pensionnaires
3.2.4. L’aide aux sans-domiciles
Conclusion
CONCLUSION 

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