Limnologie physique : meromicticite et brassage saisonnier

Limnologie physique : méromicticité et brassage saisonnier 

Le Lac Pavin est le seul lac méromictique français. Il est situé au sud de la chaîne des puys en Auvergne, et appartient au groupe des plus jeunes volcans de France métropolitaine – ca 6700 ans BP. Sa localisation précise se trouve sur la commune de Besse et Saint Anastaise. Du point de vue physique, la méromicticité du lac a de fortes implications sur le mélange turbulent et la propagation des ondes internes dans la colonne d’eau. Le Lac Pavin a été étudié depuis une trentaine d’années par des chimistes, puis par des biologistes s’intéressant aux propriétés particulières liées à sa méromicticité ainsi que par quelques physiciens suisses. Néanmoins, une approche couplant les trois aspects physique, chimie et biologie n’avait pas été mise en place jusqu’à maintenant. C’est l’objectif du programme METANOX (ANRECCO)  dans lequel mon travail de thèse s’est inséré. Le programme METANOX proposeune étude simultanée des paramètres physiques, chimiques et biologiques dans la colonne d’eau et de leurs influences respectives pour le fonctionnement de l’écosystème lacustre.

La méromicticité 

Le terme de méromicticité qualifie l’absence de brassage saisonnier jusqu’au fond d’un plan d’eau ; les eaux du fond ne sont donc pas mélangées avec les eaux de surface pendant plus d’un cycle annuel. La méromicticité n’est pas la situation la plus fréquente pour les lacs naturels car il faut des conditions particulières à l’établissement de telles conditions. La plupart des lacs en période estivale sont stratifiés en épilimnion (ou couche de mélange) et hypolimnion. Entre ces deux couches, une région de fort gradient de densité entre les eaux de surface plus chaudes et les eaux de l’hypolimnion plus froides est appelée métalimnion. La région du métalimnion correspond à la zone où se situe la thermocline. Lorsque la température de l’épilimnion diminue jusqu’à atteindre la température de maximum de densité de l’eau douce, le lac se mélange, le plus souvent sur toute sa hauteur.

Dans de nombreux plans d’eau, en liaison le plus souvent avec les produits de reminéralisation de la matière organique, la densité des eaux du fond est plus élevée que la densité des eaux à mi-profondeur dans l’hypolimnion. Si la densité augmente suffisamment fortement, la stabilité des couches profondes est augmentée. Cette barrière de densité s’oppose à la recirculation profonde liée au mélange saisonnier. L’absence de brassage saisonnier complet crée les conditions de méromicticité [Findenegg, 1933, 1935]. Les lacs méromictiques sont composés d’un compartiment inférieur, ou monimolimnion, constitué des eaux profondes non soumises au brassage saisonnier, et d’un compartiment supérieur qui est mélangé, ou mixolimnion .

Dans cette situation, le transfert de matière entre le mixolimnion et le monimolimnion au travers de la chémocline est très réduit, ce qui a pour conséquence que le monimolimnion acquiert progressivement des caractéristiques très différentes du mixolimnion. On trouve souvent une forte concentration d’organismes et une forte turbidité dans cette zone de transition. La méromicticité a des conséquences importantes sur la composition biogéochimique des eaux. Le monimolimnion est alors caractérisé par :
– Une forte anoxie
– L’accumulation de produits de reminéralisation microbienne
– L’accumulation d’H2S.

Du point de vue de la dynamique, la stratification permanente a un impact décisif sur la redistribution des substances dissoutes, comme les nutriments ou l’oxygène et cette propriété forme le lit de la biocénose particulière au fond du lac. En conditions anoxiques, le nitrate et le sulfate peuvent être utilisés comme sources d’oxygène pour l’oxydation microbienne des matériaux organiques. Des substances peuvent être produites sous forme réduite dans cette zone, qui n’auraient pas été stables dans le mixolimnion, en conditions oxiques. De plus, le monimolimnion est constamment soumis à la pression hydrostatique du mixolimnion et ainsi des gaz d’origine biogéniques ou géologiques, comme le CO2, l’H2S, le CH4, peuvent s’accumuler dans des proportions importantes. Ce stockage d’une grande quantité de gaz peut entraîner des risques majeurs pour la population avoisinante en cas de dégazage. En 1986, 1700 personnes sont mortes aux environs du lac Nyos (Cameroun) à cause du dégazage d’un nuage de CO2 [Kling et al., 1987]. Depuis, un dispositif de dégazage permanent a été mis en place pour éviter qu’une telle catastrophe ne se reproduise. Toutefois, dans le cas du Lac Pavin, la pression partielle en gaz dissous est largement inférieure à la pression hydrostatique, ce qui élimine jusqu’à présent les risques de dégazage en l’absence de déclenchement par des circonstances exceptionnelles. L’apparition de la méromicticité peut être liée à plusieurs facteurs. Le premier d’entre eux est la morphométrie du lac conjuguant une grande profondeur du lac pour une faible surface. L’exposition au vent est donc faible. La classification de Hutchinson (1957) range les lacs méromictiques en 3 classes.

– Les lacs méromictiques ectogéniques où l’apport d’eau est extérieur et superficiel. Une arrivée d’eau moins saline à proximité de la surface entraîne l’apparition d’une phase moins saline en surface et d’une phase plus saline en profondeur.
– Les lacs méromictiques crénogéniques sont ceux dont l’origine de la méromicticité est une source fortement chargée en substances dissoutes qui délivre de l’eau au fond du lac. L’entretien de la méromicticité se fait alors par la constance du débit de cet apport d’eau. Des exemples de ce type de lac sont le lac Kivu (Rwanda, Congo) [Halbwachs et al., 2004], le lac Nyos (Cameroun) [Schmid et al., 2004].
– Les lacs méromictiques biogéniques sont des plans d’eau dont la méromicticité est due aux réactions biogéochimiques se produisant au fond du lac et dans les sédiments. Le plus souvent, la biogénicité est plutôt une condition d’entretien de la méromicticité qu’une cause d’apparition de cette propriété.

Un certain nombre de lacs de mine sont devenus méromictiques après la fin de l’exploitation minière en raison de leurs pentes abruptes, de leur relativement grande profondeur et de leur exposition à des entrées d’eau fortement minéralisées. Ils ont fait l’objet de publications récentes ayant enrichi l’étude de la méromicticité comme Boehrer et Stevens (2005), Fisher (2002), Stevens et Lawrence (1998), Stevens et al. (2005). La méromicticité concerne une part importante des plus grands lacs sur terre stratifiés de manière permanente à cause de leur très grande profondeur. Ces lacs sont aussi parmi les lacs les plus étendus, et ont donc une grande importance écologique, comme par exemple la mer Caspienne, la mer Noire, le lac Baïkal, le lac Tanganyika. La mer Morte a également connu une longue période de méromicticité jusqu’en 1979, date à laquelle la méromicticité a été détruite.

Présentation du site d’étude 

Un lac méromictique 

Le Lac Pavin (voir Photo 1) est le seul lac méromictique permanent de France. Il est situé par 45° 29,74 N et 2°53,28 E, dans la chaîne des volcans d’Auvergne à une altitude de 1197 m au dessus du niveau de la mer. C’est un lac de cratère, aussi appelé « maar ». Les dernières éruptions remontent entre 3000 et 6000 ans selon les estimations. L’âge admis pour le volcan par la plupart des experts est de 6700 ans BP. De forme circulaire, avec un diamètre de 750 m et une aire de 0.44 km2 , sa profondeur atteint 92 m. Ses pentes sont très abruptes jusqu’à 80 m de profondeur et délimitent un plateau en dessous de 80 m représentant 0.13 km2 , soit environ un tiers de l’aire en surface. Le coefficient de « creux » égal au rapport entre sa profondeur maximale sur la racine carrée de son aire vaut 0.138 [Delebecque, 1898], ce qui le place juste au dessus des caractéristiques morphométriques conduisant à la méromicticité [Dussart, 1966]. Ses pentes sont très abruptes : elles forment un angle en moyenne égal à 30 degrés avec l’horizontale. Le lac est relativement abrité du vent par les bords du cratère, d’environ 50 mètres de haut qui forment une protection réduisant l’étendue de la surface soumise au vent. Les 60 premiers mètres de la colonne d’eau constituent le mixolimnion et les 32 derniers le monimolimnion. Le temps de résidence est d’environ 10 ans pour le mixolimnion et d’une durée de 100 à 300 ans pour le monimolimnion, qui est complètement anoxique [Aeschbach-Hertig, 2002]. En hiver, le lac est gelé sur une épaisseur variable allant jusqu’à plusieurs dizaines de centimètres. La durée de la prise en glace est variable selon la rudesse de l’hiver. Le mixolimnion est affecté par le mélange hivernal, sans que la profondeur du mélange soit entièrement connue. Aeschbach-Hertig et al. (2002) ont avancé une profondeur de mélange de 30-40 m alors qu’une étude plus récente conclut que l’intégralité du mixolimnion est mélangée en hiver [Assayag et al., à paraître].

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Table des matières

INTRODUCTION
I. LIMNOLOGIE PHYSIQUE : MEROMICTICITE ET BRASSAGE SAISONNIER
II. TRANSPORT ET MELANGE TURBULENT : ELEMENTS POUR L’ANALYSE DU FONCTIONNEMENT PHYSIQUE DU LAC PAVIN
III. LA MESURE DE TURBULENCE EN MILIEU NATUREL STRATIFIE
IV. TURBULENCE ET ONDES INTERNES DANS LE LAC PAVIN
V. INFLUENCE DES ONDES DE ROSSBY SUR LA CONCENTRATION EN CHLOROPHYLLE DE SURFACE AU LARGE DU PEROU
CONCLUSION
ANNEXE 1 LE BRASSAGE SAISONNIER DANS LE LAC PAVIN AU COURS DE L’HIVER 2006-2007.
ANNEXE 2 MESURE DE VELOCITE PAR ADCP
TABLE DES FIGURES
TABLE DES TABLEAUX
TABLE DES PHOTOS
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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