L’illustration comme béquille pour l’imagination du jeune lecteur 

La nécessité d’établir une signification profonde liant l’enfant et l’œuvre

Lorsque l’on lit Bruno Bettelheim, il nous apprend que les enfants, bien qu’ayant parfois peur de l’histoire que nous leur lisons, semblent particulièrement l’apprécier au point de demander à ce qu’on la leur raconte plusieurs jours de suite. L’explication de ce phénomène selon l’auteur, vient du fait que les enfants se reconnaissent à travers ces contes. Leur vie d’enfant, vue à travers le regard d’un adulte, nous semble bien éloignée de ces récits de vengeance et de brutalité, pourtant le jeune enfant vit des situations en beaucoup de points semblables aux aventures de ces histoires. Il expérimente au travers de son existence de nombreuses frustrations, souvent incontrôlables, qu’il ne parvient pas encore à dominer et qui s’emparent alors totalement de lui. On peut penser à un jeune enfant qui crie et pleure de toutes ses forces lorsqu’il est laissé à une nourrice ou encore lors de sa première année d’école. Cette réaction souvent perçue comme un caprice par les parents peut, du point de vue de l’enfant, très bien se rapprocher du début de l’histoire d’Hansel et Gretel dans laquelle les parents décident d’abandonner leurs enfants au milieu de la forêt. En effet, lorsque le jeune enfant est laissé pour la première fois à l’école par ses parents, il peut se sentir abandonné et l’exprimera par ses larmes. Il ressent alors de la colère et de la frustration envers ses parents et redoute la « classe et ses camarades » qui lui sont inconnus et qui lui paraissent hostiles, telle la forêt d’Hansel et Gretel.
La reconnaissance des situations décrites dans les histoires ne fait certes pas de celles-ci un élément suffisant au développement psychologique de l’enfant, elle montre seulement que celui-ci se sent concerné par le récit et qu’il imprime en lui des émotions fortes. C’est là un point important selon B. Bettelheim, car l’auteur critique justement une grande partie de la littérature jeunesse de son époque, qui n’utilise pas la peur et se contente d’histoires amusantes et instructives. Selon l’auteur elles ont une « substance si pauvre qu’elles n’ont guère de signification profonde pour lui ». Malheureusement, B. Bettelheim ne précise pas le titre des livres auxquels il pense, cependant, nous pouvons trouver actuellement une quantité d’albums jeunesses correspondant à ses critères comme Le gros navet ou BêêEtes !
Ces deux exemples sont destinés à amuser l’enfant, mais ce dernier s’identifiera difficilement au(x) héros. Or, ceci est un des points les plus importants, en effet, pour que l’enfant utilise les histoires qui lui sont racontées pour évoluer, il est nécessaire qu’il se sente concerné, par les mêmes problèmes et les mêmes angoisses que les héros qui lui sont présentés, il ne s’agit aucunement d’amoindrir ses peurs mais de les reconnaître et d’affirmer leur importance.

Un outil de compréhension interne pour l’enfant

La peur omniprésente dans les contes, sous forme de créatures monstrueuses, de dragons, ou bien simplement de personnes au caractère effroyable, capables de tuer, de menacer directement la vie du héros, va permettre à l’enfant, grâce à la victoire du personnage principal, de prendre confiance en lui. Dans ces histoires, le héros parvient toujours, par un moyen ou un autre, à se sortir des situations les plus difficiles et sans espoir, de plus, il y arrive presque constamment en se reposant sur ses capacités propres, grâce à une évolution personnelle. L’enfant qui s’assimile déjà au personnage au début de l’histoire, est ainsi informé par l’exemple qu’il lui est possible de faire face à toutes sortes de situation, et que baisser les bras n’est pas une solution. De ce fait, à force de lire différentes histoires de ce type, il développe petit à petit sa confiance en lui, et apprend que, malgré les aléas de la vie, il disposera toujours de capacités personnelles qui lui permettront de venir à bout de ses difficultés.

La peur comme adversaire à la portée de l’enfant

La peur joue un rôle d’opposant qui, même s’il parait démesurément fort et impossible à vaincre, sera défait par la raison, le courage ou toutes autres ressources internes du personnage principal. L’enfant apprendra alors qu’il est lui aussi capable de se transformer et d’évoluer pour affronter ses propres peurs et qu’il dispose en lui-même de toutes les ressources nécessaires à la victoire. L’intérêt de la peur est alors clairement démontré, toutefois, il ne faut pas se dire que n’importe quel récit, quel que soit le niveau de peur qu’il inflige au lecteur, du moment qu’il finit bien, sera un récit à même d’être proposé à un enfant.
En effet, pour que le conte fonctionne et permette à l’enfant de se construire, il faut que celui-ci obéisse à des règles spécifiques qui vont rendre la peur utile, sans être traumatisante.
La première objection lorsque l’on évoque l’idée de confronter l’enfant à des récits lui faisant réellement peur et mettant en scène des passages cruels et violents, est la volonté de le préserver des « côtés sombres de l’homme » que l’on pense éloigner de l’enfant. On ne veut pas mettre à sa disposition des exemples de brutalité de peur d’encourager la violence chez l’enfant. Or c’est là une grossière erreur, selon le point de vue de Bruno Bettelheim, elle témoignerait d’une méconnaissance de la psychologie enfantine. En effet, les pulsions et les envies de violence et de brutalité n’apparaissent pas à l’âge adulte ou à l’adolescence, elles font partie intégrante de l’enfant depuis ses tout premiers pas. Les colères manifestées par l’enfant à l’égard d’un camarade qui lui aurait pris un jouet, ou les envies de punition qu’il peut avoir vis-à-vis de ses propres parents lorsqu’il juge que ceux-ci ont mal agi avec lui témoignent de la présence de pulsions à l’intérieur de la psyché de l’enfant. En effet, l’enfant doit « régler les problèmes psychologiques de la croissance (c’est-à-dire surmonter les déceptions narcissiques, les dilemmes Œdipiens, les rivalités fraternelles).»

Apprendre à objectiver ses pulsions

Alors que celui-ci ne sait pas comment faire face à ces envies, il est particulièrement pertinent de le confronter à des récits où cette violence peut être peinte, et mise en scène, afin de voir qu’il peut exister un exutoire à celles-ci. Lorsque l’enfant prend conscience que ses envies ne sont pas monstrueuses, mais qu’elles existent et qu’elles peuvent être dominées et maîtrisées, il aura tendance à avoir plus confiance en lui et à ne plus se voir comme un monstre. En effet, sans pouvoir confronter ses pensées à un matériel imaginaire, l’enfant aura tendance à se croire anormal dans la mesure où il existera un fossé entre ce que ses parents lui expliquent être bien, et ce qu’il ressent parfois. Ces pensées, bien qu’inconscientes, risquent de bloquer l’enfant dans sa construction psychique si elles ne sont pas extériorisées par le biais du jeu ou de l’histoire. En mettant ses pulsions entre les mains de personnages, il pourra ainsi leur donner un moyen d’expression à travers ses jeux et ses représentations imaginaires.
Le priver de toute chance d’extérioriser les pulsions qui l’animent apparaît alors bien plus dangereux que d’encadrer ses lectures avec des récits où une certaine violence et une certaine cruauté peuvent être exprimées.
L’intérêt principal du conte de fées selon l’auteur est de donner un cadre de représentation à l’enfant pour y mettre en scène ses pulsions, en proposant des personnages à mi-chemin entre le monde réel et celui de l’imaginaire. En effet, les protagonistes de ces récits ont toujours une représentation symbolique, la méchante marâtre de Blanche-Neige représente la mère de l’enfant, mais si celle-ci apparaissait directement dans le récit, cela le traumatiserait davantage. Incapable d’être rationnel, l’enfant aurait du mal à envisager qu’il puisse ressentir des sentiments contradictoires envers sa propre mère : de la haine lorsqu’elle n’agit pas selon ses désirs, et de l’amour la plupart du temps. Le conte lui donne alors une figure différente pour que chaque sentiment puisse s’exprimer librement, la défunte mère cristallise les sentiments bienveillants à l’égard de sa mère, la méchante reine donne quant à elle une figure détestable sur qui l’enfant peut transférer ses pulsions les plus méchantes.
Pour qu’ils lui soient utiles, les récits proposés à l’enfant ne doivent pas l’embrouiller davantage, les personnages doivent être simples, voire simplistes, et ne traduire qu’une idée ou qu’un symbole, afin d’être à la portée de l’enfant. En revanche, bien que l’enfant ne soit pas encore rationnel dès son plus jeune âge, il peut saisir, sans les comprendre, les données inconscientes disséminées dans un récit. Il saura alors utiliser les figures qui apparaissent dans l’histoire pour construire ses propres représentations en accentuant tels ou tels points suivant ce qui l’aura le plus marqué. Une même histoire va ainsi être perçue de manières différentes chez plusieurs enfants. Il convient alors de présenter un large éventail d’histoires à l’enfant et d’observer ses réactions afin de savoir lesquelles ont le plus d’intérêt pour lui et de favoriser son développement psychique.
L’importance de confronter les enfants à la peur apparaîtrait d’autant plus grande aujourd’hui, puisque les albums aux récits terrifiants sont « adoucis » par une réécriture soit disant plus adaptée, du point de vu de l’adulte, aux enfants et des illustrations qui ne sont pas effrayantes. La peur devient donc minoritaire et cela est un mal, selon B. Bettelheim, qui pourrait nuire à leur développement psychologique. Il serait donc essentiel que les enfants puissent avoir accès aux contes traditionnels d’origines afin de leur donner la confiance en eux nécessaire et les pousser à explorer le monde qui les entoure, sûrs qu’ils disposeront des ressources nécessaires pour faire face aux difficultés qui se présenteront à eux.

L’illustration et l’enfant

Lorsque l’on évoque la littérature de jeunesse, et en particulier celle destinée aux enfants des cycles un et deux, il est impossible de ne pas faire référence à l’illustration. En effet, les ouvrages qui sont accessibles à cette classe d’âge sont en grande majorité des albums, c’est-à-dire que l’illustration y tient une place prépondérante. Il nous apparaît alors indispensable d’étudier de quelle manière elles interagissent avec leur public, et d’analyser si elles ne détournent pas l’enfant des buts d’évolution psychologique dont nous avons parlé plus tôt.
Bruno Bettelheim, dans sa Psychanalyse des contes de fées considère que les livres destinés à la jeunesse doivent tout autant intéresser l’enfant que l’éduquer, il s’oppose fermement à la présence d’illustrations dans la littérature enfantine. Selon l’auteur : « les illustrations sont distrayantes; elles n’apportent rien à l’enfant. (…) elles détournent l’enfant du processus éducatif, au lieu de le renforcer, et cela parce qu’elles empêchent l’enfant d’expérimenter l’histoire à sa façon . » L’enfant serait alors empêché de construire ses propres significations à partir de l’histoire, les images, créées par quelqu’un d’autre, se substituent à lui-même dans l’acte créateur, au travers duquel il devrait manipuler les représentations qu’il se fait du récit et des personnages pour reconstruire l’histoire et y prendre la place qu’il s’attribue. Pour lui, chacun doit se représenter les mots et les situations décrites dans les histoires d’une manière qui lui est propre. Chaque lecteur se sert alors de son imagination et de ses expériences personnelles pour interpréter le récit. Bruno Bettelheim précise que l’importance de ces visions personnelles est qu’elles portent en elles des significations profondes. Ainsi une « image préfabriquée du monstre peut nous laisser totalement froids, parce qu’elle n’a rien d’important à nous dire ; ou bien elle peut nous faire peur, sans évoquer en nous, au delà de notre angoisse, une profonde signification . » Lorsque l’on sait la place que tiennent les impressions que la littérature dégage sur l’enfant pour l’auteur, on comprend pourquoi il juge les illustrations sans intérêts pour le développement de l’individu.

La peur dans les illustrations du corpus

Analyse de l’illustration

Avant d’analyser les illustrations de notre corpus, nous devons nous renseigner des différentes techniques d’analyse des illustrations afin de saisir les manières dont les auteurs et artistes dressent leurs représentations et mettre en évidence les effets qu’ils produisent face à leur public respectif. Le but consiste à nous donner les outils nécessaires qui nous permettront de comprendre et d’interpréter les illustrations qui créent un sentiment de terreur et d’angoisse.

Les techniques d’analyse

La sémiotique de l’image

Avant de parler des techniques d’analyse, il nous faut aborder la sémiologie de l’image comprendre les différents éléments qui constituent une illustration : la définition de certains termes spécifiques est nécessaire.
La sémiologie, comme on la connaît actuellement, est née au début du XXème siècle avec Peirce et Saussure qui étudiaient les différents signes au sein de la communication et donc du langage. Contrairement à Saussure qui a repris le terme « sémiologie » utilisé en médecine, correspondant à la science des signes, Peirce a inventé le terme « sémiotique » pour désigner l’étude des signes et de leur signification. « L’Association Internationale de Sémiotique » a préféré le terme de « sémiotique », aussi l’emploierons-nous.
Martine Joly définit le sémiologue comme « celui qui voit du sens là où les autres voient des choses ». Elle sous-entend que la compréhension d’une illustration n’est pas innée, mais l’objet d’un travail de la part de l’observateur. Ce point de vue date de l’Antiquité : dès le IIIème siècle, Philostrate écrit un ouvrage destiné à apprendre aux gens à interpréter puis à juger une image. La difficulté de l’interprétation d’une illustration est due à la polysémie, c’est-à-dire aux multiples significations qu’une image véhicule. Pour aider à la compréhension, l’image est souvent accompagnée d’un texte. Celui-ci guide le spectateur et lui permet de choisir parmi les différents sens, ceux qui conviennent. L’étude du contexte de l’oeuvre peut également fournir des éléments favorisant sa bonne interprétation.
Finalement, pour pouvoir réaliser une analyse d’illustration, Martine Joly propose d’avoir des objectifs précis qui doivent « servir un projet » et c’est ce dernier qui donnera la méthodologie à suivre. M. Joly aborde la méthode inventée par Roland Barthes qui a pour objectif de rechercher des signes dans l’image (recherche d’un signifiant relié à un signifié).
Dans son article , R. Barthes considère qu’il y a deux choses à regarder attentivement : le message linguistique, c’est-à-dire le texte présent dans l’image, et le message iconographique qui comprend l’étude des signes iconiques, pour pouvoir saisir le message global de l’illustration.

Le message linguistique

Le message linguistique correspond à tout langage verbal écrit. R. Barthes analyse plus particulièrement une image publicitaire car elle a une signification « intentionnelle ».
Pour lui, c’est une image plus facile à analyser qu’une autre puisqu’elle a pour fonction de faire acheter le consommateur : elle est très claire et rapidement compréhensible. Le produit dont elle fait l’éloge contient des signifiés qui forment au final des signes pleins, c’est-à-dire une association de signifiés et de signifiants. Ces deux termes étant souvent utilisés, il nous semble essentiel de les définir. Le signifié désigne le concept, c’est-à-dire la représentation mentale d’une chose, il peut être formé par des « objets réels » ; dans la publicité étudiée par R. Barthes, cela correspondrait par exemple à la tomate réelle (cf. Annexe 1). Le signifiant est le même objet photographié, dessiné, reproduit : c’est le moyen par lequel on désigne la chose. Dans notre exemple, ce serait la photographie de la tomate. Signifiés et signifiants ont donc une relation étroite. R. Barthes nous fait remarquer qu’aujourd’hui toutes les images contiennent des messages linguistiques. Ces derniers aident à identifier les signes pour l’interprétation. Ce message littéral peut avoir deux principales fonctions : celle d’ancrage et celle de relais. La fonction d’ancrage est une « forme d’interaction image/texte dans lequel celui-ci vient indiquer le bon niveau de lecture de l’image ». R. Barthes précise que « le texte dirige le lecteur entre les signifiés de l’image […], il le téléguide vers un sens choisi à Joly Martine, Introduction à l’analyse de l’image, Paris, Armand Colin, 2005, p. 40.
l’avance ». Ainsi, la fonction d’ancrage exerce un « contrôle » sur le spectateur. Cette fonction est la plus fréquente du message littéral et restreint la polysémie de l’illustration.
La fonction de relais est plus rare pour l’image fixe. Cependant, selon R. Barthes, nous pouvons la rencontrer : elle consiste à exprimer ce que l’image peut difficilement montrer, c’est une forme de complémentarité entre le texte et l’image. En effet, l’image fixe et unique a des difficultés à raconter une histoire, alors que plusieurs images fixes le peuvent. Comme le dit M. Joly, « les mots vont compléter l’image » et ainsi renseigner le lecteur sur le sens et l’éventuelle action qui se déroule au sein de l’illustration. Cela permet d’exprimer de relations causales et temporelles qui ne pourraient l’être sans cette complémentarité. Ces images sont des signes iconiques qui peuvent accompagner et compléter le texte. Intéressons nous désormais à l’étude des messages iconographiques.

Le message iconographique

Une illustration est un signe iconique, composée de différents signes pleins (union d’un signifié à un signifiant) : c’est un message visuel destiné à communiquer. L’image est également un outil d’expression. Il est donc logique de la « considérer comme un langage » à part entière qui délivre un message. Martine Joly pense que pour mieux comprendre un message visuel il est indispensable de se demander pour qui il a été créé.
Dans son article, R. Barthes parle de deux types d’images : littérale et symbolique. Il définit l’image littérale comme étant « dénotée » c’est-à-dire que la signification du signe est évidente (par exemple, la tomate dans le cadre d’une publicité Panzani) et l’image symbolique comme étant « connotée » : cela signifie que le signe est implicite, sous-entendu (par exemple la référence à l’Italie). Il faut donc prendre en compte ces deux interprétations de l’image pour nous aider dans l’analyse. R. Barthes affirme qu’il existe un lien entre l’identité du spectateur et la façon dont il interprète l’illustration. En effet, il insiste plusieurs fois, dans son écrit, sur l’interprétation correcte des images. Il estime qu’il faut avoir suffisamment de culture, de connaissance et de savoir pour comprendre au mieux une illustration quelle qu’elle soit. Les variations de lecture dépendent donc des savoirs investis dans l’image. En effet, d’après M. Joly, chacun interprète en fonction de ce qu’il connaît.
L’acte de la description démontre qu’il y a interprétation personnelle et collective. Cette « description est capitale (avant toute analyse) car elle constitue le transcodage des perceptions visuelles en langage verbal » et permet la reconnaissance et la perception d’éléments. C’est pourquoi, une illustration est indéfiniment descriptible selon le spectateur.
Verbaliser ce que l’on perçoit, seul ou à plusieurs, démontre que nous ne voyons pas tous la même chose, et permet aussi de créer une interprétation collective. Cette interprétation se dit « collective » quand la plupart des gens voient et pensent de la même manière. Une image est donc un « texte visuel » : il n’y a pas un seul mot qui soit son équivalent, mais un ensemble de mots, une description. Ces propos mettent à jour la participation active du spectateur dans son désir de comprendre l’illustration.
Une bonne analyse doit combiner, comme l’écrit M. Joly, les signes linguistiques et iconiques mais aussi les signes plastiques.

Les signes plastiques

Les signes plastiques d’une image correspondent à sa substance, à sa matière. Ils sont « solidaires du signe iconique » mais n’en dépendent pas. D’après M. Joly, il existe quatre niveaux à observer : le premier est la couleur avec ses valeurs et ses tonalités, le second correspond à la forme, le troisième concerne la spatialité incluant la composition interne de la représentation, la position par rapport au cadre, l’orientation et le loin/près. Enfin, le dernier niveau consiste à relever la texture avec les oppositions du grain et du lisse, de l’épais et du mince.
La « couleur est culturelle », ce qui signifie que l’interprétation des couleurs n’est pas universelle mais dépend exclusivement du spectateur. Il n’existe donc pas une grille d’analyse des couleurs prédéfinie. Cependant, nous attribuons universellement à certaines couleurs de la chaleur et à d’autres de la froideur. Nous pourrons nous appuyer sur l’étude des couleurs de Kandinsky.

La texture des illustrations au service de la peur

Grâce à l’étude de trois autres albums, nous allons nous intéresser à la texture des illustrations qui créent un climat terrifiant. Nous analyserons Max et les Maximonstres, Mangée, mangée et Le Petit Chaperon Rouge. Max et les Maximonstres : Max est un petit garçon déguisé en loup qui fait plein de bêtises. Pour le punir, sa mère l’envoie au lit sans dîner. Contrarié, Max s’imagine partir sur un bateau pendant un an et un jour pour aller au pays des Maximonstres. Ce sont des monstres gigantesques et terrifiants avec de gros yeux jaunes, ils se soumettent au jeune enfant qui devient alors leur roi. Max leur ordonne d’organiser une fête. Le temps passe, le garçon se sent seul et a très faim ; il décide de rentrer chez lui. Dans sa chambre, son dîner l’attend.
Ce qui frappe à première vue dans cet album et peut inquiéter le lecteur, ce sont les maximonstres (cf. Annexe 3, phot. 2). En effet, ce sont des sortes de chimères ayant des parties du corps constituées de mélanges d’animaux et même de parties humaines (les pieds, le nez, les cheveux). Par exemple, un monstre est un mélange d’aigle, avec un corps constitué d’écailles ou de plumes, difficiles à identifier, ses pattes possèdent des griffes. Un autre a une tête de taureau, un corps recouvert de poils et des pieds humains. Leur constitution hétérogène provoque l’inquiétude du lecteur qui se trouve dépourvu de repères, ne pouvant pas identifier clairement les animaux utilisés pour créer les corps. Toutes les illustrations de l’album sont des dessins constitués de multiples traits dans tous les sens qui forment une sorte de quadrillage qui pourrait symboliser l’emprisonnement de Max dans son imagination, et/ou dans sa chambre. Ces barreaux pourraient paraître oppressants mais permettent, en fait, une certaine dynamique de l’image. Les quadrillages sur toutes les illustrations pourraient également faire penser à des sortes d’ombres inquiétantes. Les détails sont très présents, nous distinguons, par exemple, les nervures des feuilles, les poils des monstres, leurs dents acérées, leurs plumes et leurs écailles (cf. Annexe 3, phot. 6). Ces précisions donnent un net aspect des chimères qui semblent réelles et rendent le lecteur mal à l’aise, inquiet voire terrifié par ces étranges créatures. Leurs yeux jaunes ne sont pas faits pour rassurer le lecteur, au contraire, ces derniers créent une atmosphère non sécurisante. Les couleurs dominantes sont le vert, le gris, le noir et le marron : elles donnent aux regards des maximonstres une forte intensité dans ces décors peu éclairés. En effet, les couleurs plutôt sombres et pastelles, symbolisant la nuit, contrastent avec les yeux jaunes des créatures et génèrent la sensation de peur. Leurs yeux brillent dans la nuit. Cet effet est accentué avec le contraste des pupilles noires au centre de leur iris jaune.

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Table des matières
INTRODUCTION 
I – LA PEUR, L’ILLUSTRATION ET L’ENFANT 
A. LA PLACE DE LA PEUR DANS LE DEVELOPPEMENT PSYCHIQUE DE L’ENFANT
1) LA NECESSAIRE CONFRONTATION DE L’ENFANT A SES PEURS
a. Faire face à la fin de la période paradisiaque
b. La nécessité d’établir une signification profonde liant l’enfant et l’œuvre
2) UN OUTIL DE COMPREHENSION INTERNE POUR L’ENFANT
a. La peur comme adversaire à la portée de l’enfant
b. Apprendre à objectiver ses pulsions
B. L’ILLUSTRATION ET L’ENFANT
1) L’ILLUSTRATION COMME OUTIL DE COMPREHENSION POUR LE JEUNE LECTEUR
2) L’ILLUSTRATION COMME BEQUILLE POUR L’IMAGINATION DU JEUNE LECTEUR
II – LA PEUR DANS LES ILLUSTRATIONS DU CORPUS 
A. ANALYSE DE L’ILLUSTRATION
1) LES TECHNIQUES D’ANALYSE
a. La sémiotique de l’image
b. Le message linguistique
c. Le message iconographique
d. Les signes plastiques
2) L’ILLUSTRATION AU SERVICE DE LA NARRATION
a. Durée et mouvement dans l’image fixe
b. Le rapport du texte et de l’image
3) LA GRILLE D’ANALYSE
B. ANALYSE DES ILLUSTRATIONS DU CORPUS
1) LA PEUR ENGENDREE PAR LE CADRAGE
2) LA TEXTURE DES ILLUSTRATIONS AU SERVICE DE LA PEUR
III – EXPLOITATION PEDAGOGIQUE 
A. EXPLOITATION EN CLASSE
1) SEANCE SUR MAX ET LES MAXIMONSTRES
2) SEANCE SUR MANGEE, MANGEE
3) SEANCE SUR LOUP NOIR
4) SEANCE SUR LES LOUPS
5) SEANCE D’OBSERVATION DES PRODUCTIONS D’ELEVES
B. ANALYSE DES RESULTATS
1) ANALYSE DES RESULTATS OBTENUS AVEC LES ELEVES
2) PROPOSITION D’UNE NOUVELLE SEQUENCE
3) CE QUI POURRAIT ETRE TRAITE EN CYCLE 1
CONCLUSION 
BIBLIOGRAPHIE 
ANNEXES

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