Psychopathologie à la suite d’un TCC

Psychopathologie à la suite d’un TCC

La victime d’un TCC peut également développer certaines psychopathologies (McAllister, 2008) alors qu’elle tente de s’adapter aux différents déficits cognitifs (Ponsford, Draper, & Schônberger, 2008). Bryant, O’Donnell, Creamer, McFarlane, Clark, & Silove (2010) ont évalué à environ un tiers les victimes de TCC qui présentent un problème de santé mentale. En effet, il est fréquent qu’une victime de TCC présente un trouble de l’axe I (selon le DSM-IV) (Sajad, Iraj, Heshmatollah, & Shahrokh, 2012). Les troubles de l’axe I les plus souvent diagnostiqués suivant un TCC seraient la dépression et l’anxiété (Evered, Ruff, Baldo, & Isomura, 2003; Truelle, & al., 2005). D’autres auteurs (Pielmaier, Walder, Rebetez, & Maercker, 2010; Norman, Trim, Goldsmith, Dimsdale, Hoyt, Norman, & al., 2011) indiquent également que l’état de stress post-traumatique ainsi que la dépression majeure sont des conséquences liées au trauma suivant le TCC. Il importe toutefois de mentionner que la dépression n’apparait généralement pas immédiatement après le TCC, mais au moment où la victime prend conscience de ses déficits (Turner, Fleming, Cornwell, Worrall, Ownaworth, Haines, Kendall, & Chenoweth, 2007). Également, des troubles obsessionnels-compulsifs ont été notés par Berthier, Kulisevsky, Gironell, & Lopez (2001), souvent en comorbidité avec d’autres troubles tels que l’anxiété; ces déficits découleraient d’une dysfonction des circuits fronto-sous-corticaux. D’autres troubles sont également rapportés après le TCC, notamment un trouble de la personnalité (axe II du DSM-IV). Dans leur étude auprès de 100 adultes ayant été victimes d’un TCC, Hibbard, Bogdany, Uyssal, Kepler, Silver, Gordon, et al. (2000) ont observé que la majorité d’entre eux avait développé un trouble psychopathologique; les plus fréquents étant les troubles de la personnalité obsessive-compulsive, histrionique, narcissique, évitante, paranoïaque, antisociale, et, en tête de liste, la personnalité état limite. Par ailleurs, dans une étude auprès de 30 000 Canadiens victimes de TCC, il a été noté que 36 % d’entre eux étaient hospitalisés à nouveau dans les trois ans post-TCC. Ceux qui présentent un problème de santé mentale sont plus souvent réadmis que ceux qui n’en présentent pas (Saverino, Swaine, Jaglal, Lewko, Vernich, Voth, & al., 2016).
Certaines études ont révélé un lien entre la présence de psychopathologie telle que la dépression ou l’anxiété et la présence de déficits cognitifs, notamment exécutif. Par exemple, Soble, Spanierman, & Fitzgerald Smith (2013), dans une étude auprès de vétérans, ont trouvé que la présence d’une psychopathologie à la suite d’un TCC peut contribuer aux plaintes cognitives subjectives. Dans le même ordre d’idées, Massey, Meares, Batchelor, & Bryant (2015) ont observé une forte association entre la présence d’un stress post-traumatique et une diminution de la capacité d’attention soutenue et sélective suivant un TCC modéré. Finalement, Rapoport, McCullagh, Shammi, et Feinstein (2005) ont constaté un lien entre la présence de dépression majeure suite à un TCC léger à modéré et des résultats significativement plus faibles à des mesures de mémoire de travail, de vitesse de traitement de l’information, de mémoire verbale et de fonctions exécutives.

Psychopathologie et détresse psychologique hors TCC

Par ailleurs, certaines recherches ont rapporté une relation négative entre la présence de psychopathologies et le fonctionnement cognitif chez des participants n’ayant pas été victimes de TCC, suggérant une influence de symptômes psychopathologiques sur certaines manifestations cognitives exécutives ou non-exécutives, et ce, indépendamment de toute atteinte cérébrale. Croisile, Simon, Astier, Beaumont, et Mollion (2009) ont pu observer que les participants aux prises avec un trouble d’anxiété généralisé (TAG) avaient des scores significativement plus faibles au test de cinq mots (5WT), une mesure mnésique, que ceux sans TAG. De plus, dans leur revue de la documentation scientifique pertinente, Fossati, Ergus, & Allilaire (2002) ont fait valoir que des déficits exécutifs dans les tâches d’inhibition, de planification et de résolution de problèmes et dans celles nécessitant la mise en jeu d’une flexibilité spontanée ou réactive aux changements de l’environnement sont présents chez les personnes présentant un état dépressif. Ces auteurs soutiennent que ces patients dépressifs pourraient être plus réactifs à la perception des échecs et aux rétroactions négatives, ce qui pourrait provoquer une dégradation des performances lorsque les tâches demandent plusieurs essais successifs. La présence de troubles cognitifs exécutifs chez des patients déprimés a aussi été avancée (Polosan, Lemogne, Jardri & Fossati, 2016). Il est donc concevable que les déficits cognitifs, notamment exécutifs, déjà présents chez des victimes de TCC puissent être accentués ou persister dans le temps en raison de la présence de psychopathologies. Dans une étude prospective réalisée chez des patients en soins intensifs, Duggan, Wangs, Wilson, Dittus, Wesley Ely, et Jackson (2017) ont aussi noté une relation entre des déficits cognitifs exécutifs et le développement de symptômes dépressifs.
Dans un autre ordre d’idées, une étude de Shields, Moons, Tewell et Yolinas (2016) a tenté d’isoler l’effet de l’anxiété sur le fonctionnement cognitif exécutif, principalement la flexibilité, telle qu’estimée à l’aide d’une tâche de traçage de pistes et d’une tâche de classification de cartes de type Wisconsin. Ces auteurs ont montré que l’anxiété, mais non pas la colère, se répercute sur le fonctionnement cognitif exécutif, principalement sur la flexibilité, telle qu’estimée par le score de persévérations du test de Wisconsin.
Selon Oathes, Patenaude, Schatzberg, et Etkin, (2015), il est par ailleurs difficile de savoir si, ou encore à quel point, l’anxiété et la dépression relèvent de processus neurobiologiques similaires ou divergents en fonction de l’étiologie soit traumatique, développementale ou situationnelle, de même que le niveau d’influence mutuelle entre ces divers facteurs étiologiques. Ainsi, il serait pertinent, comme proposition dans le cadre cet essai, d’utiliser une mesure générale d’expression de la psychopathologie telle que la détresse psychologique afin de vérifier l’existence possible d’un effet global de cette détresse sur le fonctionnement cognitif exécutif de la victime de TCC. En effet, Stordal, Mykletun, Asbjornsen, Egeland, Landro, Roness, et al. (2005), dans une étude auprès de 43 et 47 patients atteints de dépression majeure et de schizophrénie, ont statué sur l’importance d’inclure une mesure du niveau général d’expression de la psychopathologie, assimilable à une estimation de la détresse psychologique.

Détresse psychologique générale chez la victime de TCC

Certains auteurs ont démontré un lien entre la présence de détresse psychologique et le fonctionnement cognitif exécutif chez des personnes victimes de TCC (Skell, & al., 2000). La détresse psychologique se manifeste par une humeur dépressive ou anxieuse (Kessler, Andrews, Colpe, Hiripi, Mroczek, Normand, & al., 2002). Aussi, elle peut être décrite comme un état subjectif désagréable et parfois pénible, qui ne réfère pas nécessairement à une psychopathologie spécifique (Marchand, 2004), mais qui renvoie à un ensemble de symptômes essentiellement dépressifs, anxieux ou les deux à la fois (Kessler, & al., 2002). Au surplus, on retrouve parfois de l’agressivité, ainsi que des altérations cognitives, des changements d’humeur et des plaintes psychosomatiques (Dorenhend, Shrout, Egri, & Mendelsohn, 1980). Selon le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (American Psychiatric Association, 2015), la détresse psychologique représente une « gamme de symptômes et d’expériences de la vie intérieure d’une personne qui sont communément considérés comme inquiétant, déroutant ou sortant de l’ordinaire ».
La présence de tels symptômes pointent vers l’importance d’interventions précoces et adaptées afin de prévenir le développement de problèmes de santé mentale et ainsi faciliter la récupération (Bryant, & al., 2010). De fait, les victimes de TCC auraient également un risque de suicide plus élevé, ce qui est indicateur de détresse psychologique parfois sévère (Richard, 2015). Cela témoigne de l’importance de comprendre la dynamique entre la présence de détresse psychologique et celle de déficits cognitifs exécutifs suivant un TCC, ce pour réduire le risque de tentative suicidaire impulsive.
En résumé, les évidences suggèrent que le TCC induit des conséquences cognitives et psychopathologiques. De plus, la détresse psychologique d’intensité variable qui en découle aurait aussi un effet sur le fonctionnement cognitif exécutif au-delà, ou en plus,de la blessure neurologique en elle-même. Cet effet additif de la détresse psychologique peut accroitre les difficultés d’adaptation dans une boucle bidirectionnelle d’accroissement de la réaction de détresse et de la dysfonction cognitive exécutive.

Objectif de la recherche

La présente étude vise à évaluer la relation entre un élément perturbateur additionnel du TCC, soit la détresse psychologique, et le fonctionnement cognitif exécutif auprès des personnes victimes d’un TCC. Cela pourrait conduire à une meilleure connaissance de ce facteur d’influence de nature psychologique sur les conséquences cognitives qui peuvent se manifester auprès des personnes victimes de TCC. Il serait aussi possible de considérer de meilleures pistes de prise en charge des impacts psychologiques auprès des victimes, et ultimement, mener à une meilleure autonomie (ex. maintien à domicile) et à une réduction des coûts inhérents à la prise en charge.
De manière plus spécifique, l’objectif est de vérifier la relation entre la présence de détresse psychologique élevée et le fonctionnement cognitif exécutif suivant un traumatisme cranio-cérébral modéré à sévère. La recension des écrits permet de formuler la question de recherche principale suivante : Les victimes de TCC modéré à sévère aux prises avec un niveau élevé de détresse psychologique présentent-elles un fonctionnement cognitif exécutif inférieur à celles ne rapportant pas ou peu de détresse psychologique? Une question de recherche secondaire, permet de vérifier si un l’effet d’apprentissage généralement observé se manifeste pour tous les tests de fonctionnement cognitif exécutif selon la détresse psychologique observée. Les concepts à l’étude concernent la détresse psychologique et le fonctionnement cognitif exécutif.

Méthodologie

Participants

Dans le cadre de la présente étude, le sous-ensemble de données soumis aux analyses statistiques est tiré d’une collecte de données précédente qui a permis la constitution d’une base de données afin de vérifier la relation entre la détresse psychologique d’un proche aidant et le fonctionnement cognitif exécutif de personnes victimes d’un traumatisme cranio-cérébral (TCC). Ce protocole de recherche a été soumis au comité d’éthique de la recherche de l’Université du Québec à Chicoutimi et une certification éthique a été accordée (voir appendice). L’anonymat et la confidentialité des participants à l’étude sont totalement respectés dans le contexte des nouvelles analyses découlant de cette étude. Effectivement, le sous-ensemble des données pertinentes, qui ont été préalablement anonymisées, a été soumis aux analyses statistiques. Le consentement libre et éclairé des participants soit les personnes victimes d’un traumatisme cranio-cérébral elles-mêmes ou le tuteur légal (le cas échéant), de même que le consentement de l’aidant naturel, ont été obtenus avant le début de la cueillette des données. L’étude d’origine a permis de formuler une base qui inclut des données concernant les proches aidants. Cependant, pour cet essai, seules les données provenant des personnes victimes d’un traumatisme cranio-cérébral ont été analysées.

Description de la sélection des participants et critères d’inclusion et de retrait

La présente étude porte sur un échantillon résultant du recrutement initial de 15 participants victimes de TCC. De ce nombre, 2 ne répondaient pas aux critères, ce qui permet de considérer un échantillon de 13 participants. Tous les participants présentaient un diagnostic de TCC d’intensité modérée ou sévère. Les critères d’inclusion étaient : 1) avoir reçu un diagnostic de TCC modéré ou sévère; 2) être âgé de 18 ans ou plus; 3) avoir été suivi au Centre de réadaptation en déficience physique (CRDP) et être retourné au domicile; 4) présenter un seuil minimal d’acuité visuelle pour la passation des tests (20/70), ce qui correspond à une vision normale (Institut canadien d’information sur la santé, 2012), et 5) avoir un fonctionnement cognitif global suffisant pour permettre une participation efficace au protocole. Le seul critère d’exclusion logistique était un temps de transport trop considérable au regard des trois moments de déplacement distincts pour la passation des tests psychométriques prévus au protocole. Ces critères d’inclusion et d’exclusion ont été vérifiés avant l’administration des tests lors de la première entrevue et, pour la distance, lors du premier appel téléphonique placé auprès des participants potentiels. À cet égard, deux participants ont été retirés de l’étude originale; l’un en raison de l’éloignement du domicile et l’autre en raison de l’incapacité à soutenir une attention suffisante durant les rencontres de cueillette des données. En somme, les analyses ont porté sur un échantillon total de 13 participants soit 8 hommes et 5 femmes âgés de 23 à 65 ans.

Mode de recrutement

Les participants ont été recrutés par le biais de l’Association Renaissance des personnes traumatisées crâniennes (ARPTC) du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Après avoir accepté d’aider au recrutement, l’ARPTC a fait parvenir un feuillet de renseignement sur le projet de recherche à tous leurs membres. Les personnes intéressées par une participation ont pu l’indiquer sur une boîte vocale confidentielle accessible par le responsable et directeur d’essai tiré de cette étude, M. Claude Dubé et les étudiants responsables de la cueillette des données, soit M. Benoît Harvey et Mme Stéphanie Larouche. Ce dernier a ensuite communiqué par téléphone avec les participants potentiels afin de les informer précisément sur l’objectif et le déroulement de l’étude, répondre aux questions le cas échéant, vérifier le critère d’exclusion selon la distance et décider d’une date pour une première rencontre. La participation était donc sur une base volontaire. La méthode d’échantillonnage de l’étude est de type non probabiliste et l’étude est de type corrélationnel.
Instruments de mesure
Dans cette section, les différents instruments d’évaluation du fonctionnement cognitif exécutif seront décrits. Des renseignements sociodémographiques essentiels tels que l’âge, le sexe, le niveau de scolarité ou le travail et le statut social des 13 participants avec TCC ont été obtenus au moyen d’un questionnaire sociodémographique. Ensuite, le questionnaire « Situation et informations sur la personne ayant subi un TCC » a permis de recueillir des informations sur la sévérité du TCC, la durée du coma, les services reçus depuis l’accident, les changements observés aux plans cognitif, émotif et comportemental depuis le TCC ainsi que les difficultés résiduelles de la victime du TCC.
Évaluation du fonctionnement cognitif exécutif. Avant de débuter l’administration des épreuves standardisées d’évaluation cognitive, le responsable de la recherche s’assurait de l’acuité visuelle binoculaire du participant. Pour ce faire, le Rosenbaum Pocket Vision Screener (RPVS) a été utilisé. L’acuité minimale devait être de 20/70 afin que le participant puisse participer à la recherche (Lakmache, 1994). Le temps requis afin de compléter ce test de vision est de cinq minutes. La constatation d’une vision adéquate minimale pour tous les participants permet la poursuite de l’évaluation du fonctionnement cognitif exécutif à l’aide des instruments suivants.
Le test de fluence verbale. Le test de fluence verbale (Controlled Oral Word Association test, COWA) a été utilisé afin d’évaluer l’habileté du participant à amorcer et à maintenir la production d’une série de mots selon certaines contraintes verbales précises (Henry & Crawford, 2004). Le COWA requiert notamment que le participant produise le plus de noms communs possible, débutant par une lettre prédéterminée, en une minute (Strauss, Sherman, & Spreen, 2006). Cette tâche permet de mesurer la fluence verbale dite littérale. La performance à ce type de tâche est traditionnellement associée au fonctionnement cognitif exécutif (Baldo, Schwartz, Wilkins, & Dronkers, 2006; Brickman, & al. (2005). Selon les critères donnés (mots débutant par les lettres « F », « A », « S »), le participant doit rechercher activement et de manière soutenue les mots requis, tout en inhibant les mots qui ne sont pas pertinents (Ergis & Gierski, 2004), en supprimant par exemple les interférences pouvant être associées (Ross, Calhoun, Cox, Wenner, Kono, & Pleasant, 2007). Plus précisément, cette tâche demande une recherche soutenue, contrôlée et stratégique en mémoire lexicale (Lecompte, De Bleeker, Janssen, Vandendriesschie, Hulselmans, De Hert, & al., 2006). Le nombre total de mots correctement évoqués est comptabilisé pour chaque lettre par période de 60 secondes, ce qui représente une mesure reconnue de l’habileté cognitive sollicitée, soit la stabilité et la fluence de la recherche verbale contrôlée en mémoire lexicale. Le nombre de mots correctement évoqués par période de 15 secondes peut également être comptabilisé tout comme le nombre et le type d’erreurs produites. Le coefficient de consistance interne (0,83) est élevé (Tombaug, Kozak, & Rees., 1999). Aussi, la fidélité test-retest est acceptable (entre 0,70 et 0,80) (Strauss, & al., 2006). Le temps requis afin de compléter ce test est de 10 minutes. Wilson, Watson, Baddeley, Emslie, et Evans (2000) ont observé un accroissement de la performance pour la même lettre chez des patients victimes de traumatisme cranio-cérébral lors d’administrations successives de ce test, ce qui peut indiquer un effet d’apprentissage.
Le test de traçage de pistes. Le test de traçage de pistes (Trail Making Test, TMT) a été administré afin d’évaluer la flexibilité cognitive (ou mentale), c’est-à-dire la capacité d’alterner d’une tâche à une autre (ou d’une séquence d’items à une autre) dans une même période temporelle sans erreur ou de passer d’une activité cognitive à une autre faisant ainsi appel au contrôle (Lecompte, & al., 2006) et à la flexibilité cognitive. Ce type de tâche permet également de constater l’efficacité de la perception visuelle, la capacité de séquençage de séries d’items, le partage et la sélectivité efficace de l’attention (flexibilité) ainsi que la vitesse motrice (Spreen & Strauss, 1998). Ce test, en trois parties (A, B et C), nécessite de tracer une ligne continue reliant, selon l’ordre de l’alphabet, des lettres réparties aléatoirement sur une feuille lettre standard (ce qui correspond à la partie C du test), de relier des nombres répartis aléatoirement sur une feuille lettre standard selon l’ordre numérique (ce qui correspond à la partie A du test) ou de relier en alternance une lettre et un chiffre toujours selon l’ordre alphabétique ou numérique, et selon certaines autres consignes précises (ce qui correspond à la partie B du test). Pour chacune des trois parties, le temps d’exécution en secondes requis pour accomplir la tâche de même que le nombre et le type d’erreurs produites sont notés. Le temps d’exécution en secondes à la partie B du test permet plus précisément de mesurer l’efficience de la flexibilité cognitive qui relève du fonctionnement cognitif exécutif (Kortte, Horner, & Windham, 2002). Les différences entre les temps d’exécution requis aux différentes parties peuvent également être calculées. Le coefficient de fidélité est de 0,79 pour la partie A et de 0,89 pour la partie B (Dikmen, Heaton, Grant, & Temkin, 1999). Le temps nécessaire afin de compléter ce test est de 15 minutes. Un effet d’apprentissage est observé pour les parties A et B sur une courte période de temps, mais tend à disparaitre après un certain nombre d’administrations (Strauss, & al., 2006).
Le test de Stroop. Le test de Stroop a été administrée afin de mesurer la capacité à inhiber ou à supprimer la mise en route d’un processus cognitif automatisé (Strauss, & al., 2006), ce qui représente une estimation de la capacité de résistance à la mise en marche d’une tâche d’interférence par inhibition. Il s’agit d’une mesure de la capacité d’inhibition active d’une réponse considérée comme automatisée (lecture) qui induit une interférence dans le processus de dénomination d’une couleur (Lecompte, & al., 2006). Ce test demande au participant de lire ou de nommer des couleurs présentées sous trois formes différentes, c’est-à-dire, pour la première planche (1), de lire le nom d’une couleur écrite à l’encre noire sur une page blanche « exemple : ROUGE » ; pour la seconde planche (2) de nommer la couleur d’une série de X imprimées à l’encre colorée sur une page blanche « exemple : XXXX » et pour la troisième planche (3) de nommer la couleur de l’encre d’impression du nom d’une couleur toujours différente de l’encre d’impression sur une page blanche « exemple : ROUGE » ce qui représente une mesure de la capacité de résistance à l’effet d’interférence dit de Stroop (Golden & Freshwater, 2002). En ce qui concerne la cotation, le nombre de noms de couleurs lus, de couleurs nommées et de noms de couleurs d’encre différents nommés durant une période de 45 secondes est comptabilisé. Le nombre total de dénominations correctes de la couleur de l’encre des stimulations de la troisième planche représente une mesure de l’effet de résistance à l’interférence attribuable à l’effet Stroop. Un ajustement pour l’âge est effectué selon une table prescrite. Un score estimé à la troisième planche est aussi calculé selon la performance à la première planche (nombre de mots) et la seconde planche (nombre de couleurs) qui se fait selon la formule suivante : (mots X couleurs) / (mots + couleurs). Par la suite, un score dit d’interférence est calculé (c.-à-d., la différence entre le nombre d’éléments de la troisième planche réellement nommés moins le score estimé à la troisième planche tel que calculé selon la méthode décrite plus haut). Plus le nombre d’éléments dénommés à la troisième planche (avec interférence) se distingue négativement du score estimé (ou sans interférence) moins la résistance à l’interférence est efficiente. Une différence de 0 entre les deux mesures suggère un effet d’interférence nul, mais qui s’accroit selon la valeur négative de la différence. L’ensemble de ces scores bruts peut finalement être ajusté selon l’âge et transformé en score t selon les tables requises. Le score t d’interférence représente une mesure plus juste de la résistance à l’effet d’interférence de Stroop. Les coefficients de fidélité du test sont de 0,86 (noms de couleurs, planche 1), 0,82 (couleurs, planche 2) et 0,73 (noms de couleurs et encre incompatible, planche 3) (Golden, 1978; cité dans Strauss, & al. 2006). La fidélité test-retest a été estimée respectivement à 0,83 (planche 1), 0,74 (planche 2) et 0,67 (planche 3) (Strauss, & al., 2006). Le temps requis afin de compléter ce test est de 15 minutes. Un accroissement de la performance est observé pour une seconde administration pour les trois parties, ce qui peut démontrer un effet d’apprentissage (Strauss, & al., 2006).
Le test de la Tour de Londres. Le test de la Tour de Londres (Tower Of London test, TOL) a été administré afin d’évaluer la capacité de planification et de résolution de problèmes. Cette tâche est réputée estimer à la fois les capacités de planification, de résolution de problèmes et de fonctionnement de la mémoire de travail (Baker, Rogers, Owen, Frith, Dolan, Frackowik, & Robbins, 1996; Debelak, Egle, Köstering, & Kaller, 2016; Köstering, Nitschke, Schumacher, Weiller, & Kaller, 2015; Shallice, 1982). Afin de résoudre les problèmes de la Tour de Londres, un participant doit déplacer des boules sur un boulier muni de trois pieux. Les boules sont placées sur une position de départ fixe, la même pour chaque problème, et une position variable finale des boules est présentée. Le participant doit alors déplacer les boules afin de passer de la configuration de départ à la position finale en utilisant le moins de déplacements possible. Cette tâche demande au participant de planifier et de se représenter diverses possibilités conduisant à la solution, de déterminer le nombre d’étapes requises et de comparer les différentes solutions afin d’isoler la plus efficace (Lecompte, & al., 2006). Dans la présente étude, la méthode d’administration de la Tour de Londres en 12 problèmes de Krikorian, Bartok, et Gay (1994) a été utilisée. Plus précisément, le test demande aux participants de déplacer trois boules colorées et placées sur un boulier comprenant trois pieux de différentes longueurs. Un plus long pouvant empiler trois boules, un moins long pouvant empiler deux boules et un plus court ne pouvant recevoir qu’une seule boule. La tâche consiste à déplacer les boules d’une configuration de départ vers une configuration d’arrivée selon des règles précises et selon un nombre prédéterminé de déplacements (Krikorian, & al., 1994). Trois essais sont accordés afin de réussir chacun des 12 problèmes. Il n’y a pas de limite de temps. La cotation du test tient compte du nombre de déplacements de boules effectués pour chacun des trois essais d’un problème, du temps de planification pour chacun des essais, du temps total pour la réalisation complète d’un essai, du nombre de problèmes réussis au premier essai, du nombre total d’essais administrés et du nombre total de déplacements. Le nombre de problèmes réussis au premier essai peut correspondre à la meilleure mesure de l’habileté cognitive consistant en la capacité de planification relevant du fonctionnement cognitif exécutif (Shallice, 1982). Le coefficient de consistance interne du test est estimé à 0,25, ce qui est faible (Humes, Welsh, Retzlaff, & Cookson, 1997). Donc, cela pourrait indiquer que d’autres fonctions cognitives pourraient influencer la réalisation du test. Un coefficient minimal de 0,70 serait recommandé afin d’observer des changements entre les temps de mesure. À cet effet, une étude récente de Köstering, et al. (2016) ont rapporté un coefficient de 0,74 pour la version de Freiburg (TOL-F), montrant ainsi une fidélité test-retest adéquate. Le temps requis afin de compléter ce test est de 35 minutes.
Ensemble, ces instruments permettent de couvrir certaines habiletés cognitives relevant traditionnellement du fonctionnement cognitif exécutif. Ces fonctions sont impliquées dans le contrôle cognitif permettant une articulation des actions ou pensées dirigées vers un but. En regard de certains modèles, les fonctions exécutives permettent de s’adapter à des situations nouvelles (Guillery-Girard, Quinette, Piolino, Desgranges, & Eustache, 2008). En effet, plusieurs modèles tentent de décrire et d’opérationnaliser les fonctions exécutives. Parmi les plus populaires, on retrouve le système attentionnel superviseur (SAS) de Norman et Shallice (1980), le modèle de Baddeley (1986) ainsi que les modèles de Barkley (1997) et de Brown (2006). Il n’en demeure pas moins qu’il est difficile d’opérationnaliser ce concept puisqu’il existe plusieurs définitions de ce que sont les fonctions exécutives. Il est toutefois possible de constater qu’un point commun aux différentes définitions se retrouve dans le concept de contrôle cognitif (et comportemental) permettant de trouver un équilibre entre le maintien et la modification de réponses en fonctions des exigences de l’environnement (Lecompte, & al., 2006; Diamond, 2013). Considérant le contexte théorique de cette étude, le modèle de Barkley (1997) a toutefois été retenu puisqu’il regroupe efficacement l’ensemble des fonctions exécutives pouvant être estimées à l’aide des instruments utilisés, ce qui inclut la fluence verbale, l’inhibition de réponses prépotentes ou en déroulement, la mémoire de travail lors de tâches impliquant la capacité de planification et la flexibilité cognitive. Ce modèle du fonctionnement cognitif exécutif peut être ainsi décrit. L’inhibition comportementale comprend trois processus en interaction soit 1) l’inhibition de la réponse habituelle face à un événement donné qui permet de bloquer le comportement exécuté, 2) l’arrêt de la réponse en cours de réalisation après la détection du caractère inapproprié d’une action et 3) le contrôle des interférences qui assure le maintien du traitement prioritaire d’un stimulus en excluant l’intrusion de stimuli non pertinents. En bref, l’inhibition comportementale est une opération cognitive qui permet de retenir l’exécution d’un comportement adéquat ou non à une situation en permettant et en introduisant un certain délai. Un moins bon fonctionnement de l’inhibition comportementale aurait des répercussions sur l’activation adéquate des quatre fonctions exécutives suivantes : la mémoire de travail verbal, la mémoire de travail non-verbal, l’autorégulation des motivations et des affects et la capacité à planifier et organiser l’activité motrice de façon adaptée aux exigences de l’environnement.
Évaluation de la détresse psychologique. L’inventaire de symptômes psychologiques en auto-questionnaire (Symptom CheckList-90-R, SCL-90-R) a pour but d’estimer la présence et l’intensité relative de la sévérité de certains symptômes psychopathologiques (Derogatis, 1994). La présente étude utilise l’instrument validé en français par Fortin et Coutu-Wakulczyk (1985) dont le temps de passation est évalué à environ 15 minutes. Le SCL-90-R, qui comprend 90 items, est un instrument papier-crayon autorapporté d’estimation de la symptomatologie psychopathologique présente chez les personnes durant la période des sept derniers jours. Chaque item renvoie à l’intensité d’un comportement représentatif d’un symptôme. Le participant doit répondre aux items du questionnaire en indiquant, sur une échelle de type Likert à cinq niveaux allant de « pas du tout » à « extrêmement », l’intensité avec laquelle l’item est subjectivement vécu. Par la suite, le questionnaire est coté et interprété selon neuf dimensions symptomatologiques psychopathologiques soit : 1) la somatisation, 2) l’obsession-compulsion, 3) la sensibilité interpersonnelle (correspond à une mesure de confiance en soi lors des relations sociales), 4) la dépression, 5) l’anxiété, 6) l’hostilité, 7) l’anxiété phobique (correspond globalement à l’agoraphobie), 8) l’idéation paranoïde et 9) le psychotisme (peut correspondre à une mesure du sentiment d’aliénation). On retrouve également 3 indices globaux de détresse. En premier lieu, il y a lieu de considérer le « Global Severity Index (GSI) » ou l’indice global de sévérité (IGS). Il représente la cote d’intensité symptomatique moyenne pour l’ensemble des 90 items, soit les neuf dimensions et les items additionnels. Cet indice peut être conçu comme un score général de détresse psychologique et sera utilisé comme variable opérationnelle de ce concept puisqu’il représente un bon indicateur de la profondeur de la détresse. En second lieu, le total des symptômes positifs (Positive Symptom Total, PST) est obtenu par le simple dénombrement des items dont la cote d’intensité est différente de zéro, sans égard à l’intensité en elle-même. Il peut être interprété comme un indicateur de l’étendue des symptômes rapportés par le participant. En dernier lieu, l’indice de détresse des symptômes positifs (Positive Symptom Distress Index, PSDI) est obtenu en divisant le score total d’intensité des items, dont la cote d’intensité est différente de zéro, par le nombre d’items dont la cote d’intensité est différente de zéro (Gosselin & Bergeron, 1993). Les scores bruts des différentes échelles sont transformés en scores t en utilisant les normes tirées d’une population dite « non clinique » du manuel de test de la version originale. Le SCL-90-R présente des qualités psychométriques satisfaisantes (Gosselin & Bergeron, 1993). Plus précisément, en ce qui concerne la fidélité de l’instrument dans sa version française, le coefficient de consistance interne obtenu selon le calcul de l’alpha de Cronbach pour l’ensemble des items est élevé (0,96). De plus, selon Derogatis (1994), il n’y aurait pas d’effet de pratique ou d’apprentissage qui pourrait biaiser les résultats lors d’administrations répétées.

Déroulement de la procédure expérimentale lors des rencontres

Tout d’abord, le responsable de l’expérimentation a procédé à une évaluation descriptive de la situation du participant ayant subi un TCC à l’aide du questionnaire sociodémographique. Il a ensuite évalué, à trois reprises (une mesure de base et deux mesures de comparaison à six et douze semaines) le fonctionnement cognitif exécutif du participant ayant subi un TCC, ce qui comprend des capacités telles que la fluence verbale, la flexibilité cognitive, l’inhibition ainsi que la planification et l’organisation. La procédure s’est poursuivie avec l’évaluation de la détresse psychologique du participant avec traumatisme cranio-cérébral à chacun des trois temps de mesure prévu. Avec les trois temps de mesure, il devient possible de vérifier s’il y a des covariations dans le fonctionnement cognitif exécutif en fonction de la détresse psychologique qui peut, elle aussi, varier dans le temps et cela indépendamment de la détresse induite par la situation neuropsychopathologique de la personne victime de TCC. Lors de la première rencontre, le responsable de l’expérimentation ont présenté et expliqué le protocole de recherche et répondu aux questions, le cas échéant. Le consentement libre et éclairé a été sollicité et obtenu auprès de la victime de TCC (ou le représentant légal de celui-ci) afin de poursuivre la procédure expérimentale. Par la suite, le chercheur demandait au participant de remplir le questionnaire « Situation et informations sur la personne ayant subi un TCC ». Le fonctionnement cognitif exécutif du participant avec TCC a ensuite été évalué une première fois suivant une estimation de l’acuité visuelle binoculaire. Tous les participants de l’échantillon ont présenté une vision normale et ont ainsi répondu à ce critère d’inclusion. Par la suite, les chercheurs ont procédé à l’administration du COWA, du TMT, du test de Stroop et de la TOL. Également, la détresse psychologique du participant avec traumatisme cranio-cérébral été évaluée à l’aide du SCL-90-R. Ce questionnaire a été rempli individuellement, cependant une aide pouvait être apportée en cas de difficulté à la lecture. Lors de la seconde et troisième rencontre, les mêmes tests selon la même procédure ont été passés. Un cadre d’évaluation adéquat dont un environnement propice à l’évaluation neuropsychologique, un éclairage suffisant et une réduction des stimuli potentiellement dérangeants étaient prévus. En résumé, chaque participant a été rencontré à trois reprises. La première rencontre était d’environ deux heures et les deux rencontres subséquentes étaient d’environ une heure. Ces dernières étaient réalisées à six semaines d’intervalle sur une période de 12 semaines. Les rencontres se déroulaient dans les locaux d’évaluation à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) ou au domicile des participants selon leur préférence et les conditions d’évaluation expérimentale. Les mesures ont été prises par le responsable de l’expérimentation qui était présent dans la pièce durant toute la rencontre. Les procédures d’administration et de cotation ont été respectées pour chacun des tests tel que décrit dans les manuels appropriés.

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Table des matières

Introduction
Contexte théorique
Définition du traumatisme cranio-cérébral (TCC)
Données épidémiologiques
Étiologie des TCC
Les conséquences neurophysiologiques
Les dommages primaires et secondaires
Les complications tardives
Les critères diagnostiques généraux
Les catégories de sévérité
Le TCC léger
Le TCC modéré
Le TCC grave (ou sévère)
Les conséquences suivant un TCC
Les atteintes motrices
Les atteintes sensitives
Les atteintes cognitives
Les atteintes thymiques et sur la personnalité
Les impacts sur la sphère psychosociale
Les phases d’interventions et la récupération suivant le TCC
La récupération cognitive générale suivant le TCC
Le fonctionnement cognitif exécutif à la suite d’un TCC
Psychopathologie à la suite d’un TCC
Psychopathologie et détresse psychologique hors TCC
Détresse psychologique générale chez la victime de TCC
Objectif de la recherche
Méthodologie 
Participants 
Description de la sélection des participants et critères d’inclusion et de retrait
Mode de recrutement
Instruments de mesure
Évaluation du fonctionnement cognitif exécutif
Le test de fluence verbale
Le test de traçage de pistes
Le test de Stroop
Le test de la Tour de Londres
Évaluation de la détresse psychologique
Déroulement de la procédure expérimentale lors des rencontres
Analyses statistiques utilisées
Résultats
Profil général des participants
Caractéristiques sociodémographiques
Caractéristiques cognitives
Détermination des groupes selon l’intensité de la détresse psychologique
Analyses exploratoires concernant l’effet d’apprentissage
Le test de fluence verbale
Le test de traçage de pistes
Le test de Stroop : Nombre total de couleurs correctes
Le test de Stroop : Le score d’interférence
Le test de la Tour de Londres
Lien entre la détresse psychologique et le fonctionnement cognitif exécutif
Le test de fluence verbale
Le test de traçage de pistes
Le test de Stroop : Nombre total de couleurs correctes
Le test de Stroop : Le score d’interférence
Le test de la Tour de Londres
Synthèse des observations
Retour sur les analyses exploratoires concernant l’effet d’apprentissage
Retour sur la question de recherche
Discussion
Exposé de la problématique et de la question de recherche
Relation entre la détresse psychologique et l’effet d’apprentissage
Relation entre la détresse psychologique et les fonctions exécutives
Limites et avantages de l’étude
Suggestions d’études ultérieures
Conclusion 
Références

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