L’identité culturelle au Québec pendant la décennie 1990

L’identité culturelle

La problématique de l’identité se veut aujourd’hui l’un des thèmes de recherche dominants tant en psychologie, en théorie littéraire, en philosophie qu’en politique. Mais qu’est-ce que l’identité culturelle? Bien que cette question puisse paraître simple à première vue, il en est tout autrement étant donné les diverses acceptions attribuées au concept et les nombreux domaines qui la prennent comme objet d’étude. Afin de bien saisir la notion, un premier détour d’ordre définitionnel s’impose. Ainsi, nous devons préalablement définir l’ identité culturelle en son sens le plus large pour en arriver à une compréhension la plus juste possible de celle qui particularisait la province québécoise dans les années 1990. Au préalable, il faut préciser que, souvent, les auteurs26 ne différencient pas l’identité culturelle de l’ identité collective. Louis-Jacques Dorais offre une synthèse fort illustrative des nombreuses dénominations associées au concept d’ identité: Les études anthropologiques, sociologiques, historiques, géographiques ou politiques de l’identité traitent généralement des aspects collectifs de la construction identitaire.

C’est pourquoi les spécialistes des sciences sociales peuvent parler d’identité sociale, politique, culturelle, ethnique, nationale, etc. ou, pour compliquer un peu les choses, d’identité socioculturelle, ethnoculturelle, sociolinguistique, ethno-nationale, etc. Cependant, trois types d’identité collective – et il faut se rappeler que ces types n’existent que dans le cerveau des scientifiques, ils ne sont rien de plus que des outils épistémologiques visant à mieux faire comprendre les processus sociaux – reviennent plus fréquemment sous la plume des spécialistes identité culturelle, identité ethnique et identité nationale27. Pour notre part, nous avons préféré les termes d’ identité collective et culturelle, lesquels sèmblent être le plus souvent utilisés en tant que synonymes et qui, nous le croyons, n’ insinuent aucune position politique comme ce pourrait être le cas, par exemple, avec l’appellation identité nationale. Malgré qu’ il existe autant de dénominations que de domaines étudiés, il n’en reste pas moins que certains concepts sont récurrents d’une définition à l’autre. En effet, nous verrons dans la section suivante que le concept de mémoire collective, celui d’imaginaire de la modernité ainsi que celui d’altérité semblent faire l’unanimité chez les chercheurs de l’identité culturelle.

Le concept d’identité culturelle

D’entrée de jeu, l’identité culturelle se forme lorsqu’un groupe partage nombre de caractéristiques communes. Ces caractéristiques communes, Hervé Collet les divise en deux groupes principaux. Il y a d’abord les produits culturels qui comprennent les caractéristiques les plus visibles de l’ identité culturelle tels que la mode, l’habitat, l’architecture, les rythmes de vie, les productions artistiques, industrielles et agricoles, les fêtes et les cérémonies. Puis on trouve le pacte culturel qui touche à la structure intellectuelle, affective et symbolique d’une société. Celui-ci n’est souvent perceptible que de l’ intérieur et nécessite une longue expérience de la part de l’observateur étranger. On y compte notamment les croyances religieuses, la vision du monde et les attitudes morales28• Sans être exhaustive, l’énumération des composantes de l’identité culturelle donne une vue . d’ensemble de l’étendue de la notion ainsi que de la complexité de ce pacte culturel. De ce fait, certains chercheurs ont misé davantage sur cet aspect culturel de l’ identité collective pour mieux la défInir.

C’est le cas de Charles Taylor qui la défInit comme suit: Si l’identité [personnelle] constitue un horizon moral permettant de se situer dans l’ordre de ce qui a de l’importance, il est à prévoir que les gens vont se défInir en partie par des allégeances morales et universelles (on est catholique, communiste, libéral et ainsi de suite). Mais il est tout aussi normal qu’ils s’alignent en fonction de leurs appartenances historiques. Une communauté historique offre, en effet, de par sa culture et son mode de vie, un horizon à l’intérieur duquel certaines choses auront de l’importance et d’autres moins29• La défInition de Taylor comporte deux points importants: l’identité d’un peuple se défInit par des allégeances morales et universelles et en fonction de leurs appartenances historiques. Les allégeances sont des valeurs dont la portée peut être universelle, – on pense ici au« respect de lajustice », à « l’accomplissement de soi », « l’engagement dans la foi » – et, plus important pour nous, Taylor y adjoint à« la valorisation des différentes cultures ». C’est en ce sens que les valeurs dites universelles tendent à se spécifIer selon les communautés. Par exemple, la promotion de la musique francophone en Amérique du Nord n’a de valeur que si l’on croit à l’importance, pour une personne, d’affIrmer la culture à travers laquelle son humanité a pris forme30•

Mais un groupe ne peut pas s’ identifier qu’à des allégeances universelles qru pourraient être celles de tout le monde, encore doit-il se démarquer des autres en s’identifiant à un groupe historique. L’identité collective se construit donc à partir de 1 ‘histoire de cette collectivité: des évènements marquants tels les guerres, les conquêtes, les grands débats politiques, etc. Or, il ne s’agit pas tant des évènements historiques que des souvenirs et des empreintes que ceux-ci ont laissées dans le groupe qui construisent l’identité culturelle. Ainsi, l’appartenance historique dont fait mention Taylor recoupe le concept de mémoire collective; c’est cette dernière qui donne un sens aux héritages du passé ou aux lieux historiques d’une communauté. Ce concept s’avère incontournable dans l’appréhension de l’ identité d’un groupe. Il semble que ce soit le sociologue Maurice Halbwachs qui fut le premier à s’ intéresser au concept de la mémoire collective dans Les cadres sociaux de la mémoire3l • Il Y défend que la mémoire collective se construit d’abord à partir de souvenirs partagés par l’ensemble d’un groupe, ces souvenirs étant souvent en lien avec des évènements marquants ayant laissé une trace profonde, non seulement parce qu’ils ont modifié les institutions par exemple, mais surtout parce que la tradition subsiste.

Plus près de nous, Jocelyn Létourneau la définit comme suit: La mémoire collective, c’est un ensemble flou, instable mais relativement organisé de schèmes téléologiques,. de clichés, d’images, de configurations d’idées, de stéréotypes, d’objets symboliques, de représentations partielles, de préconstruits culturels, de fragments d’énoncés, de personnages réifiés et de situations contextuelles idéalisées, à travers lesquels le présent, le passé et le futur sont non seulement déchiffrés, malS également assimilés et anticipés32 . Cette défInition rattache le concept de la mémoire collective à la question de l’avenir, comme c’est le cas pour de nombreux théoriciens33 . En effet, la réévaluation des symboles de la mémoire collective proposerait une sorte de solution, une alternative aux défIs (problèmes, obstacles) liés à la modernité, soit pour les transformer, soit pour les abdiquer dans le but d’appréhen<ier l’avenir de façon plus harmonieuse. Et puisque l’ identité et la mémoire collective sont intrinsèquement liées, le concept d’avenir est également un des éléments-clés à la construction d’une identité collective.

Contexte économique

Le contexte économique est sans conteste un élément influent lorsqu »il s’ agit d’ identité. En effet, la situation économique joue un rôle primordial en ce qui concerne l’image que les Québécois ont d’eux-mêmes, image qui se reflète parfois dans l’expression populaire qu’est la chanson. Le début de cette nouvelle décennie s’amorce sur un ton houleux quant à l’économie du Québec. De fait, l’année 1990 est synonyme de récession qui se perpétuera jusqu’en 1992. La pauvreté s’ accroît également pendant toute la décennie et près d’un quart de la population vit sous le seuil de la pauvreté en 1998. On compte alors sur le libreéchange et sur la mondialisation pour sortir le Québec de cette impasse. L’ accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) entre en vigueur le 1 er janvier 1994, celui-ci consiste en une zone de libre-échange entre les États-Unis, le Canada et le Mexique. Les frontières abolies, les Québécois s’ouvrent davantage sur les autres cultures nord-américaines. Le Québec rejoint donc la mondialisation issue du système capitaliste qui déferle sur toute la planète.

La phase d’accélération qui sévit lors des années 1990 est caractérisée, entre autres, par l’arrivée des nouvelles technologies, des nouvelles politiques internationales, des politiques publiques et des institutions favorisant l’intégration ainsi que la libéralisation des marchés43 . Ces éléments conjugués auront pour effet de faciliter le commerce avec les autres pays et de stimuler, éventuellement, l’économie du Québec. Toujours dans le but de stimuler l’économie, le Québec augmentera considérablement le nombre d’immigrants durant la décennie 1990. En comparaison, durant la décennie 1980, on compte environ 220000 immigrants venus s’ installer au Québec. Cependant, durant les années 1990, la province accueille plus de 350000 immigrants44 . Cette radicale augmentation entraînera des répercussions positives quant au développement économique de la province, mais engendrera aussi des impacts négatifs au niveau politique. Bien entendu, la notion d’ altérité prend alors tout son sens en cette période de profond changement concernant l’immigration. Ceci aura, nous le croyons, une incidence majeure quant à l’identité culturelle des Québécois qui se répercutera notamment dans la chanson produite durant cette période.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1. Chapitre 1 : L’identité culturelle
1.1. Le concept d’identité culturelle
1.2. L’identité culturelle au Québec pendant la décennie 1990
1.2.1. Le contexte économique
1.2.2. Le contexte politique
1.2.3. Le contexte socioculturel
2. Chapitre 2 : La chanson, vecteur de l’identité culturelle
2.1. Panorama de la chanson québécoise
2.2. L’altérité au Québec
2.2.1. L’ altérité américaine
2.2.2. L’ altérité amérindienne
3. Chapitre 3: Richard Desjardins entre mémoire collective et expression de la modernité
3.1. Portrait de l’ artiste:
3.2. La mémoire collective et le discours religieux
3.3. Les formes de l’altérité
3.3 .1. L’ altérité américaine
3.3.2. L’altérité amérindienne
3.4. L’imaginaire de la modernité
3.4.1. L’ironie et la critique sociale
3.4.2. L’ironie dans « Le bon gars »
Conclusion
Bibliographie

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *