L’hospitalisation de la personne âgée

L’hospitalisation de la personne âgée

Définition de la personne âgée

Dans la littérature, les seuils retenus pour définir les populations de personnes âgées
varient selon les auteurs et les époques. L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) retient l’âge de 65 ans et plus. D’un point de vue sociologique, la définition de la personne âgée est corrélée à l’âge de cessation d’activité professionnelle, soit aux alentours de 55-60 ans. De plus, l’augmentation de l’espérance de vie, du niveau de revenu, et l’état de santé des jeunes retraités rendent moins pertinent le seuil de 65 ans initialement utilisé (2). En effet, c’est autour de l’âge de 75 ans que la santé se dégrade durablement et que des vulnérabilités plus ou moins importantes apparaissent ; une baisse d’intensité de la vie sociale, et des processus de retrait commencent à s’observer (2). Par ailleurs, le rapport « Vivre ensemble plus longtemps » de 2010 du Centre d’Analyse Stratégique, encourage la réalisation de travaux statistiques et universitaires plus conformes aux réalités actuelles en prenant comme seuil l’âge de 75 ans .

Une part importante de l’activité hospitalière 

La prise en charge de ces patients âgés constitue une part importante de l’activité hospitalière. En 2010, les plus de 65 ans représentaient 17,1 % de la population française mais ont représenté plus de 40 % des prises en charge hospitalières (4). Parmi les personnes âgées de 65 ans et plus, le tiers de la population a été hospitalisé au moins une fois en 2017 (31 % des femmes et 36 % des hommes). Parmi la population âgée de 80 ans et plus, deux personnes sur cinq ont été hospitalisées en France en 2017 (37 % de la population des femmes et 44 % de la population masculine). Un patient hospitalisé sur huit est âgé de 80 ans et plus (5). De plus, les patients âgés sont sujets à être hospitalisés plus fréquemment que le reste de la population. En effet, le nombre annuel d’hospitalisation par patient est de 1,8 pour les personnes de 75 ans et plus contre une moyenne de 1,5. De même, la durée moyenne de séjour croît avec l’âge. Elle passe d’environ 2 jours/an chez les 65-74 ans à plus de 4 jours/an chez les 75 ans et plus, puis 6 jours/an chez les 85 ans et plus (6). Cela s’explique par la survenue fréquente de polypathologies, et, pour les plus âgées d’entre elles, de l’existence d’une fragilité physique, psychique ou socio-économique et d’un risque de perte d’autonomie et de dépendance .

Le SAU, porte d’entrée de l’hôpital

« De l’extérieur, l’hôpital apparaît comme une forteresse, un bastion de techniques et de savoir, qui ne peut être forcé que par son pont-levis : les Urgences » . Écrite en 1989, cette affirmation reste malheureusement toujours d’actualité. Les personnes âgées représentent une part importante des patients consultant chaque année au SAU (Service d’Accueil des Urgences) en France. En effet, 14 % des passages au SAU concernent la personne âgée de plus de 75 ans (7). Parmi eux, 44 % sont âgés de 85 ans ou plus (8). De plus, l’admission au SAU, définie elle même comme une hospitalisation non programmée, constitue la porte d’entrée principale de l’hôpital pour les sujets âgés. Parmi les patients de plus de 75 ans admis aux urgences, 56 % d’entre eux sont hospitalisés dans un service conventionnel tandis que 38 % retournent à leur domicile et 5 % dans leur EHPAD (Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes) (7). Ce mode d’entrée par le biais du SAU n’est pas anodin et constitue un facteur de risque pour les sujets âgés. En effet, l’organisation des soins au SAU ne prend pas suffisamment en compte les besoins des personnes âgées fragiles et expose à une durée de passage plus longue que celle des patients plus jeunes. 23 % des personnes de plus de 75 ans passent plus de 8 heures au SAU contre 10 % des 15-74 ans (9). Un passage prolongé au SAU supérieur à 10 heures augmente le risque de syndrome confusionnel secondaire de plus de deux fois. Les sujets âgés sont à risque élevé d’événements indésirables lors de l’entrée au SAU comme la non-reconduction de prescription .

Les effets délétères de l’hospitalisation

On sait que les risques liés à l’hospitalisation d’un sujet âgé sont non négligeables. En effet, chaque hospitalisation risque de dégrader l’état de la personne âgée et d’exposer la personne âgée à une perte d’autonomie majeure liée à l’hospitalisation.

Cette dépendance liée à l’hospitalisation est définie par une perte fonctionnelle aux activités de base de la vie quotidienne entre l’entrée et la sortie d’hospitalisation. Son incidence chez les personnes âgées hospitalisées de 70 ans et plus, en termes de marche et de toilette, est de l’ordre de 30 à 60 % et augmente jusqu’à 50 % chez les sujets âgés de 85 ans et plus (8). Après deux semaines d’hospitalisation, on estime à 46 % la croissance du risque de dépendance (4). De plus, lorsque l’hospitalisation s’avère nécessaire, le séjour hospitalier peut être source de rupture dans le parcours de vie et de soins de la personne âgée et contribuer à un risque accru de dépendance au-delà de la pathologie qui a conduit à l’hospitalisation (4). En effet, un des facteurs de cette perte d’autonomie est la dépendance iatrogène liée à l’hospitalisation. Cette dernière est définie comme la conséquence de processus de soins et d’environnement hospitalier ne répondant pas aux besoins spécifiques de la personne âgée. On estime sa prévalence à 12 % et elle est évitable dans 80 % des cas (10). Après une sortie d’hospitalisation, seuls 50 % des patients récupèrent leur état fonctionnel de base, 33 % dans les 6 mois après leur sortie et 14 % à 1 an (10). De plus, cette perte d’autonomie deviendra souvent le déclencheur d’un déclin fonctionnel, progressif et irréversible, associé à une mortalité accrue, ainsi qu’à une augmentation des taux de réhospitalisation et d’institutionnalisation (4). Un système répétitif risque alors de s’installer ; l’hospitalisation engendre un déclin fonctionnel, qui entraîne à son tour une réhospitalisation et ainsi de suite (11). On note que 60 % des décès des personnes âgées sont survenus lors d’une hospitalisation.

La réhospitalisation précoce

Définition 

La réhospitalisation précoce est définie comme une hospitalisation non programmée survenant dans les 30 jours suivant la sortie d’hospitalisation. Parmi les réhospitalisations précoces, on distingue les réhospitalisations évitables c’est-à-dire que la situation aurait pu être contrôlée par d’autres moyens en soins primaires, ainsi que grâce à des recommandations inscrites dans le courrier de sortie de l’hospitalisation précédente (12). C’est un indicateur largement utilisé à l’échelle nationale, comme internationale, pour mesurer la qualité des soins. Aux Etats-Unis, avec la loi PPACCA (Patient Protection and Affordable Care Act), certains établissements peuvent même subir des pénalités financières quand le taux de réhospitalisation à 30 jours est élevé .

Une période de suivi de 30 à 90 jours

Le consensus dans la littérature porte sur une période de suivi de 30 jours. Ce choix est renforcé par un autre indicateur, la mortalité à 30 jours, utilisé pour évaluer la qualité des soins des patients hospitalisés (14). Ceci étant, bien que les réhospitalisations les plus précoces (entre 3 et 7 jours) semblent liées à la qualité des soins au cours du séjour d’hospitalisation index (infection nosocomiale, prise en charge inadaptée, etc.), les réhospitalisations survenant au-delà de la première semaine suivant la sortie d’hospitalisation seraient le reflet de l’organisation du système de soins et notamment entre acteurs de ville et hôpital au niveau d’un territoire. L’indicateur de réhospitalisation à 30 jours a été conçu afin d’apprécier la coordination entre les acteurs du système de soins lors de la transition hôpital-ville et atteste donc davantage de la performance du système de santé que celle des établissements de santé (15). La HAS (Haute Autorité de Santé) préconise même d’étendre la période de suivi post-hospitalisation à 90 jours afin de tenir compte du rôle des soins ambulatoires et d’évaluer des interventions de plus longue durée (12). En effet, un grand nombre de réhospitalisations des sujets âgés fragiles et des personnes atteintes d’insuffisance cardiaque surviennent plusieurs mois après la sortie et dépendent principalement de décisions prises par les professionnels de santé ambulatoires .

Application à la personne âgée 

En 2013, la HAS établit des recommandations pour réduire le risque de réhospitalisation évitable. Elle s’appuie sur l’étude Laniece réalisée dans 9 hôpitaux français observant un taux de réhospitalisation non programmée à 30 jours des patients de plus de 75 ans à 14% (5). La proportion de réhospitalisations évitables a été estimée à 23 % de la totalité des réadmissions (17). Ces patients âgés faisant l’objet de réhospitalisation précoce ont une mortalité 6 fois plus élevée que les autres (26 % contre 3,9 %) au cours des 3 mois qui suivent la première hospitalisation, et 1,7 fois plus élevée à 2 ans .

L’une des actions pour diminuer le risque de réhospitalisation précoce est le repérage de ces patients âgés fragiles et ce dès le SAU.

L’importance de la transition hôpital-domicile

Définition

L’organisation de la transition hôpital-domicile désigne toutes les interventions qui ont pour objectif, pendant et après une hospitalisation, d’éviter la rupture de continuité des soins et de réduire la survenue d’événements de santé défavorables, incluant les réhospitalisations évitables (12). Elle ne permet pas en règle générale d’améliorer la survie des patients mais peut réduire leur risque d’institutionnalisation et de déclin fonctionnel. Plusieurs études, nord-américaines pour la plupart, montrent avec un bon niveau de preuve que l’amélioration de la transition entre l’hôpital et le domicile réduit le risque de réhospitalisation précoce des personnes âgées et atteintes de pluripathologies. La réduction du taux de réadmissions à 30 jours varie entre 18 et 50 % selon les études et les comorbidités. Cette réduction peut être observée jusqu’à 6 à 12 mois. Le recours au SAU peut être réduit dans les mêmes proportions et dans certaines études la durée de séjour est réduite d’environ 10 % .

Repérage des patients à risque de réhospitalisation précoce

Définition de la fragilité 

En 2011, la Société Française de Gériatrie et de Gérontologie (SFGG) a défini la notion de fragilité de la personne âgée. Elle est « un syndrome clinique, conséquence d’une diminution des capacités physiologiques de réserve qui altère les mécanismes d’adaptation au stress. Son expression clinique est modulée par les comorbidités et des facteurs psychologiques, sociaux, économiques et comportementaux. Le syndrome de fragilité constitue un marqueur de risque de mortalité et d’événements péjoratifs, notamment d’incapacités, de chutes, d’hospitalisation et d’entrée en institution. L’âge est un déterminant majeur de fragilité mais n’explique pas à lui seul ce syndrome. La prise en charge des déterminants de la fragilité peut réduire ou retarder ses conséquences. Ainsi, la fragilité s’inscrirait dans un processus potentiellement réversible ».

Il existe plusieurs modèles théoriques de fragilité qui ne s’excluent pas les uns des autres mais qui dépendent de l’approche considérée. Aujourd’hui deux principaux concepts font consensus :

Le modèle de Fried (19). Il comprend cinq critères :
● Une perte de poids involontaire (-4,5 kg en 1 an)
● Une sensation subjective d’asthénie
● Une sédentarité (calculée en kilocalories perdues/semaine : moins de 388 kcal pour l’homme 270 pour la femme)
● Une vitesse de marche diminuée (inférieure à 1m/s sur test effectué sur quatre mètres)
● Une faiblesse musculaire (mesurée par un dynamomètre, dans les 20 % inférieurs pour le sexe et l’IMC).

La présence d’un ou deux critères définit l’état pré-fragile, alors que trois symptômes et plus, correspondent à la fragilité. Ce modèle présente l’avantage d’être simple à utiliser. Il reste cependant discuté car ne prend pas en compte les dimensions cognitives et psychologiques. Le modèle de Rockwood et coll. ou fragilité par accumulation des déficits assimile la fragilité à une somme de déficiences, physique, nutritionnelle, cognitive et sensorielle. Il s’agit d’une « fragilité multi-domaine » intégrant : cognition, humeur, motivation, motricité, équilibre, capacités pour les activités de la vie quotidienne, nutrition, condition sociale et comorbidités (20). Pour cette école canadienne, définir la fragilité d’un individu revient donc à faire la somme de toutes ses atteintes fonctionnelles, et cela à l’aide d’un outil complet en 70 items (21). Ce modèle présente donc l’inconvénient d’être difficile d’utilisation courante. Néanmoins, le procédé le plus factuel permettant une mesure de la fragilité est bien l’EGS (Evaluation Gériatrique Standardisée). Elle se définit comme un “processus interdisciplinaire multidimensionnel visant à déterminer les capacités médicales, psychosociales et fonctionnelles d’une personne âgée fragile/vulnérable dans le but de développer un plan coordonné et intégré pour son traitement et son suivi à long terme” (22). Bien que la réalisation d’une EGS par des infirmiers au SAU peut réduire les risques de déclin fonctionnel et d’institutionnalisation, elle ne réduit pas le risque de réadmission à 30 jours et ne réduit le recours ultérieur aux urgences que dans 2 études sur 8, d’après une revue systématique de la littérature de l’auteur Graf en 2011 .

Par ailleurs, la réalisation de l’EGS reste compliquée en routine dans un service d’urgence. Il existe des scores plus courts et plus facilement réalisables au SAU pour prédire le risque d’évènements indésirables et de réadmission du sujet âgé.

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Table des matières

I – Introduction
1.1 Le vieillissement de la population
1.2 L’hospitalisation de la personne âgée
1.2.1 Définition de la personne âgée
1.2.2 Une part importante de l’activité hospitalière
1.2.3 Le SAU, porte d’entrée de l’hôpital
1.2.4 Les effets délétères de l’hospitalisation
1.3 La réhospitalisation précoce
1.3.1 Définition
1.3.2 Une période de suivi de 30 à 90 jours
1.3.3 Application à la personne âgée
1.4 L’importance de la transition hôpital-domicile
1.4.1 Définition
1.4.2 Repérage des patients à risque de réhospitalisation précoce
1.4.3 Renforcer la place du médecin généraliste
1.5 Intérêt de l’étude
II. Matériels et Méthodes
2.1 Méthode quantitative
2.1.1 Description de l’étude
2.1.2 Population étudiée
2.1.3 Processus
2.1.4 Analyse statistique
2.1.5 Cadre réglementaire
2.2 Méthode qualitative
2.2.1 Choix de la méthode
2.2.2 Inclusion
2.2.3 Réalisation du canevas d’entretien
2.2.4 L’organisation des entretiens
2.2.5 Transcription et analyse des données
III. Résultats
3.1 Résultats de l’étude quantitative
3.1.1. Inclusion
3.1.2. Description de la population étudiée
3.1.3. Analyse univariée
3.1.4. Analyse bivariée
3.1.5. Performance du test
3.1.5.1. Calcul de la sensibilité et spécificité
3.1.5.2. Construction de la courbe ROC
3.1.5.3. Choix du seuil optimal du test
3.1.5.4. Calcul des paramètres du test en prenant le seuil à 5
3.1.5.5. Calcul de la Valeur Prédictive Positive (VPP) et Valeur Prédictive Négative (VPN)
3.2 Résultats de l’étude qualitative
3.2.1 Description de la population
3.2.2 Analyse des résultats
3.2.3 Représentations par les médecins généralistes relatives au patient âgé à risque de réhospitalisation précoce
3.2.4 Repérage des patients âgés à risque de réhospitalisation précoce par les médecins généralistes
3.2.5 Prise en charge de la personne âgée à risque de réhospitalisation précoce par le médecin généraliste
3.2.6 Une médecine de ville insuffisante
3.2.7. Le fossé entre la médecine de ville et l’hôpital
3.2.8 Nécessité d’être informé précocement pour un suivi efficace
3.2.9 Place de l’informatique discutée
IV – Discussion
4.1 Résultats de l’étude quantitative
4.1.1 La grille TAGRAVPA
4.1.2 Les autres scores de la littérature
4.1.3 Les résultats secondaires
4.2 Résultats de l’étude qualitative
4.2.1 Représentations par le médecin généraliste du patient âgé à risque de réhospitalisation précoce
4.2.2 Importance d’un repérage subjectif
4.2.3 Intérêt d’une VAD (Visite À Domicile) discutée
4.2.4 Une collaboration pluriprofessionnelle nécessaire
4.2.5 Une communication ville-hôpital insuffisante impactant sur la continuité des soins
4.3 Les forces et faiblesses de notre étude
4.4 Perspectives
V – Conclusion

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