L’histoire du soin

 L’histoire du soin

Le soin depuis l’origine de l’humanité a longuement évolué et prend désormais des formes multiples selon les cultures. Du « prendre soin » (care) au « faire des soins » (cure) en passant par les préparations officinales et les rites funéraires, cette partie parcourt les pratiques soignantes d’ici et d’ailleurs au travers des époques. Nous comprendrons ainsi davantage la trame lointaine des enjeux actuels du soin du point de vue du genre, en particulier en psychomotricité.

Le soin dans notre société française

Les spécificités de l’histoire de notre société française, comme ses racines judéochrétiennes, ont été des facteurs importants dans l’évolution des pratiques soignantes. Le soin a notamment été influencé par la perception sociale du genre et des caractéristiques différemment attribuées aux hommes et aux femmes.

A l’origine de l’humanité
Dès l’apparition de la vie, le soin était nécessaire afin que la vie puisse perdurer. La survie de l’espèce humaine en milieu hostile dépend alors de divers nécessités : s’alimenter, se protéger des intempéries, défendre le territoire et préserver les ressources locales. « L’organisation de ces tâches donne lieu à la division sexuelle du travail qui, en se précisant, marquera de façon si déterminante selon les cultures et les époques la place de l’homme et de la femme » (Collière, 1982, p 24). Déjà à cette époque, les activités des femmes se voulaient le reflet de leur calme et leur humilité dans la cultivation des terres, tandis que les hommes devaient faire preuves de la force et de l’intelligence que nous leur attribuions pour se confronter aux animaux à la chasse. D’un côté, les femmes se sont vues attribuer le rôle d’assurer le maintien et la continuité de la vie. A l’époque, le « prendre soin » était associé à la femme féconde et à l’expérience de l’accouchement. « Aux femmes reviennent tous les soins qui se tissent autour de tout ce qui croît et qui se développe, et ceci jusqu’à la mort » (Collière, 1982, p 29). Seule la matrone, femme devenue mère, pouvait exercer les soins et transmettre son savoir générationnel. Cette première figure de la soignante pratiquait la toilette des nouveau-nés comme des morts, les soins au corps (toucher, massage) ainsi que les préparations alimentaires et officinales liés à leurs connaissances des plantes. « La reconnaissance de la valeur sociale des pratiques de soins par les femmes se fonde sur la renommée de leur expérience […] vécue dans leur propre corps » (Collière, 1982, p 44). Sans accès à l’écriture, la lecture ou l’enseignement, ces savoirs matronaux, liés aux soins de la mère envers son enfant, étaient enseignés empiriquement à l’oral et par observations.

De l’autre côté, le rôle que se sont appropriés les hommes était de lutter contre la mort en protégeant le groupe de toute menace. Ils éloignaient les bêtes sauvages de leur territoire qu’ils étendaient à mesure de l’épuisement des ressources de la terre. Lors de la défense de leur habitat, les blessés étaient uniquement soignés par des hommes, utilisant la force (déplacement d’articulation, maîtrise physique des délirants) et évoluant progressivement aux professions de rebouteux puis, bien plus tard de kinésithérapeutes et de psychiatres. Un parallèle est également émis entre les outils tranchants de défense, la connaissance du corps animal dans la chasse ainsi que du corps humain blessés en guerre, et la profession de chirurgien, ses instruments techniques précis et son savoir anatomique. Ce processus évoluant entre les pratiques attribuées aux hommes et aux femmes correspond parfaitement au schéma Genèse de la pratique des soins élaborés par les femmes et les hommes explicité par F. Collière dans son livre (Collière, 1982, p 32-33).

L’invention de l’écriture et l’émergence des premières religions vont permettre, par la suite, d’élever les hommes à une nouvelle classe sociale, le clergé. Ce dernier détient le pouvoir par l’écriture sacrée et la loi. En effet, ce sont les membres du clergé qui inculquent la dichotomie entre le bien et le mal que les nouvelles professions du droit et de la médecine vont devoir respecter. Ainsi, dans la littérature occidentale, les premières pratiques antiques évoquées sont rattachées non pas à la matrone mais à un savoir médical détenu par les hommes et à la figure de la femme soignante consacrée. Ce modèle de la première pratique des soins par les femmes « laisse croire qu’avant le christianisme, les femmes n’avaient aucune activité soignante » (Collière, 1982, p 37).

Du Moyen-Âge à la fin du XIXe siècle
« Outre le fait que les pratiques de soins n’ont pas été impunément le fait de l’activité des hommes, ou de celle des femmes, il semble important de prendre en compte le rôle prédominant joué par les Pères de l’Eglise. » (Collière, 1982, p 30). Le début du Moyen-Âge est témoin de l’avènement du christianisme dont la doctrine proscrit le corps devenu impur et donne la suprématie à l’esprit. La chair, notamment le ventre et bas ventre, rapporte au péché de chair qui est puni et associe la femme à cette impureté et cette tentation. La sacralisation du vœu de chasteté va alors modifier la symbolique de la relation au corps sexué et ainsi transforme la conception de l’ensemble des pratiques de soins. Les femmes, détentrices des connaissances des soins du corps et des vertus des plantes, deviennent la cible de la répression de l’Eglise qui les suspecte d’être l’incarnation de Satan. L’Eglise « s’approprie le pouvoir de discerner ce qui est bon ou mauvais pour l’âme et pour le corps » (Collière, 1982, p 51) et réorganise les pratiques des soins. La femme ne peut alors plus être soignante à moins d’entrer dans les Ordres. La figure de la femme soignante passe de la matrone, mère fécondée en son bas ventre, à la religieuse vierge qui a rejeté la chair. Elle consacre sa vie à la prière et aux soins s’occupant ainsi des corps souffrants des miséreux, à l’image de celui du christ à sa crucifixion. Le soin est fait par charité chrétienne et n’a alors aucune valeur économique. Les soignantes devaient elles-mêmes rester humbles et faire preuve de charité afin d’accéder au salut de l’âme, au détriment d’un salaire. Au cours du XIIIe siècle, l’entrée des Écoles de Médecine est interdite aux femmes laissant la religion comme seul biais à la fonction de soignante. Celles exerçant la médecine païenne par des remèdes de plantes thérapeutiques dans les villages paysans étaient désignées comme des sorcières servant le diable, chassées ensuite pendant près de quatre siècles (du XIVe au XVIIe). Peu à peu, les religieuses, modèles de référence de la femme soignante, vont mettre de côté les soins corporels pour se consacrer aux soins spirituels et à l’intendance de l’église. « C’est l’avènement de la médicalisation et la promulgation de lois anticléricales qui annoncent le recul de l’identification de la pratique de soins à la femme consacrée » (Collière, 1982, p 63). Les soins seront confiés à des personnels laïcs. Ainsi, dès le XXe siècle, la fonction de soignante va être associé à une nouvelle image, celle de la femmeinfirmière, auxiliaire du médecin.

De la fin du XIXe siècle aux années 60
Dès le début du XIXe siècle, de multiples facteurs vont influencer la pratique des soins en France : l’industrialisation de masse provoquant l’émancipation du travail chez les femmes, les progrès scientifiques, ou encore la laïcisation de la société grâce à la IIIe République.

A la désacralisation de la fonction soignante, la profession d’infirmière fait son apparition. Reprenant le rôle qu’assuraient les religieuses avant elles, elles pratiquent le soin sur les bases des valeurs morales et religieuses. Ce service de «prendre soin » va progressivement changer avec le développement de la médecine. A la suite des découvertes de Pasteur, les soins vont se perfectionner progressivement par l’utilisation de « technologies de plus en plus complexe pour diagnostiquer, puis pour traiter les maladies » (Collière, 1982, p 76). Les médecins n’ont alors d’autre choix que de confier certaines pratiques de soins à leur personnel paramédical. L’auxiliaire médicale et les premières écoles d’infirmières apparaissent alors grâce au docteur Bourneville.

La psychomotricité dans ce contexte historique 

La psychomotricité est une profession qui inclut autant le « prendre soin » que le «faire des soins » ce qui, dans ce contexte historique du soin, peut la mettre en porteà-faux. En effet, la psychomotricité s’inscrit dans une approche globale de la personne en travaillant avec le « corps sujet » en relation. Elle revendique un travail en contact avec le corps des patient⸱es. Elle veille à ne pas tomber dans des techniques automatisées ou instrumentalisées qui mettent les thérapeutes à distance du malade.

Le « prendre soin » est, à l’origine, l’ensemble des pratiques visant à stimuler les forces vitales qui étaient dévolues aux femmes d’abord à cause de leur fécondité puis par charité chrétienne. Tandis que le « faire des soins », par le biais de traitement qui sont les armes pour combattre la maladie, était associé aux hommes. Cette dichotomie a longtemps influencé la répartition des hommes et des femmes dans les professions de santé et a été à la base du tandem médecin-infirmière, deux professions très genrées parfois encore aujourd’hui. Pourtant les professions de la santé semblent avoir besoin, aujourd’hui, d’un juste équilibre entre “prendre soin” et “faire des soins” afin que les patient⸱es ne soient plus objets mais acteurs du soin. Les changements idéologiques de notre société, en partie sur l’égalité des sexes et la question du genre, que j’aborderais plus loin, et les évolutions du droit de la santé permettent de remettre en cause ces archétypes historiques de ce qu’est le soin et de qui soigne. Les réflexions actuelles sur la parité, les droits égalitaires entre hommes et femmes ainsi que les questions relatives aux genres viennent bouleverser ces idéaux stéréotypés très ancrés.

La loi Kouchner de 2002 soutient la façon de penser les soins et la personne soignée en psychomotricité. Ces patient⸱es sont acteurs du soin et possèdent de nombreux droits. Cette loi de 2002 met aussi en place la démocratie sanitaire, c’est-à-dire, l’entente de la volonté du malade sur ses propres soins et la recherche obligatoire de son consentement libre et éclairé. Le corps n’est ainsi plus objet de manipulation médicale mais corps sujet de décision de la personne auquel il appartient.

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Table des matières

Introduction
Partie 1 : Partie théorique
I- L’histoire du soin
A) Le soin dans notre société française
1) A l’origine de l’humanité
2) Du Moyen-Âge à la fin du XIXe siècle
3) De la fin du XIXe siècle aux années 60
4) La psychomotricité dans ce contexte historique
B) Et dans les autres cultures ?
II- Fondements et actualité de la psychomotricité
A) Héritage de J. de Ajuriaguerra et G. Soubiran
B) Giselle Soubiran et Julian de Ajuriaguerra, une rencontre fructueuse
C) La psychomotricité aujourd’hui, entre care » et cure
1) Etat des lieux de la psychomotricité aujourd’hui
2) Lien entre cure et care en psychomotricité
III- La question du genre et de la morale dans le soin
A) Sociologie du corps et construction sociale du genre
B) L’éthique du « care », les valeurs morales du soin
1) Qu’est-ce que l’éthique du care ?
2) Influence dans les métiers de soin, exemple des puériculteurs
C) Le cadre thérapeutique
1) Fonctions thérapeutiques bisexuées
2) Adaptation et malléabilité des thérapeutes
IV- La faible représentation des hommes dans le domaine de la petite enfance
A) Dans le cadre familial
1) Fonctions parentales et interactions parents-enfant
2) Interactions précoces père-bébé
3) Une société en évolution sur la place du père, exemple des pères célibataires
B) La disparité dans les établissements de soin précoce
Partie 2 : Partie clinique
I- Contexte du petit Jean, entre besoin de contenance et de limite
A) Cadre du stage en CAMSP
B) Parcours de vie et de soin de Jean
1) Anamnèse
2) Profil psychomoteur
C) Intervention de la psychomotricienne auprès de Jean
1) Problématique du défaut de contenance
2) Engagement de la psychomotricienne en séance auprès de Jean
II- Fonctions thérapeutique dans la problématique d’interaction de Kéba
A) Cadre du stage en libéral
B) Parcours de vie et de soin de Kéba
C) Relation thérapeutique dans le besoin d’autonomie
Partie 3 : Discussion
I- Questionnement sur mon ressenti de la disparité en Psychomotricité
A) La parité dans mon histoire personnelle
B) La disparité en études de psychomotricité
1) Mes premières impressions en début de cursus
2) Importance accordée à la mixité en pratique
3) Les ressentis des étudiants masculins
II- Une disparité différente dans les services adultes
III- Trouver ses fonctions thérapeutiques en stage
A) Entre contrainte et plaisir
B) La question du toucher en stage
C) La recherche de mon autorité
IV- La relation thérapeutique : une rencontre entre deux personnes avant tout
Conclusion

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