L’etat chez spinoza

L’ETAT CHEZ SPINOZA 

LA NECESSITE DU PASSAGE DE L’ETAT DE NATURE A L’ETAT SOCIAL

Comme nous l’avons dit dans l’introduction, Spinoza accorde une importance capitale à l’Etat, car il est convaincu que c’est seulement en son sein qu’il peut réaliser l’objectif qu’il s’est fixé dans son Traité pour la réforme de l’entendement : la recherche de la vérité. En effet, dans ce traité Spinoza montre que la plupart des hommes poursuivent les honneurs, les richesses ou les plaisirs qu’ils considèrent comme le souverain bien. Alors que pour lui ces biens ne sont pas de vrais biens car ils sont éphémères, ils périssent vite. Le vrai bien, le bien souverain, qui ne meurt pas est la vérité. Mais pour pouvoir se consacrer à la recherche du souverain bien, il faut d’abord se départir des autres passions que sont la recherche des plaisirs, des richesses ou des honneurs. C’est à partir de là seulement qu’on pourra, ayant réussi à se débarrasser des autres passions, avoir une liberté entière de l’âme et ainsi se consacrer à la recherche de la vérité qui est le bien suprême. Il ne jouit des autres biens que dans la mesure qui suffit pour conserver la vie et la santé. Or il ne suffit pas de s’être aménagé une liberté intérieure. Le but qu’il s’est fixé ne concerne que lui, c’est son jugement, son opinion. Autrement dit, c’est sa vie intérieure. Et celle-ci est étroitement liée à la vie extérieure, c’est-à-dire aux comportements des autres individus au sein desquels il vit ou encore, et c’est la même chose, sa vie intérieure est étroitement liée à l’Etat dans lequel il vit. Aussi, Spinoza ne pouvait-il pas réfléchir sur sa vie, faire ses choix, et tracer ses lignes de conduites et se fixer des buts sans tenir compte de la société dont il est membre. C’est pourquoi, il dut porter sa réflexion sur l’Etat. Et ce, pour connaître l’Etat le meilleur, c’est-à-dire celui au sein duquel chacun pourra vivre une véritable vie humaine ; « celle qui se définit, non pas uniquement par la circulation du sang et par

les autres fonctions qui sont communes à tous les animaux, mais par la raison surtout, par la vertu et la véritable vie de l’esprit ».

Mais pour bien montrer le pourquoi de l’Etat, Spinoza commence d’abord par nous faire part de la vie que devraient mener les hommes hors de l’Etat c’est-à-dire la vie à l’état de nature où prévaut le droit de nature.

LE DROIT DE NATURE

« Par droit et institution de la nature, nous dit Spinoza, je n’entends autre chose que les règles de la nature de chaque individu, règles suivant lesquelles nous concevons chaque être comme déterminé à exister et à se comporter d’une certaine manière ». Selon Spinoza, tous les êtres, vivants ou non vivants, ne peuvent exister et se comporter que de la manière dont ils ont été déterminés par la nature. Celle-ci est la cause ultime du comportement de tous les individus qui ne sont que ses éléments. Par exemple, le poisson nage parce qu’il est déterminé par la nature à nager. Aussi, l’homme, de même que tous les autres êtres de la nature, n’a-t-il pas sur ses propres actions un pouvoir absolu. Il ne tire pas de lui-même sa détermination, mais la tire de la nature. « Or, pour Spinoza, la nature considérée absolument a un droit souverain sur tout ce qui est en son pouvoir, c’est-à-dire que le droit de la nature s’étend aussi loin que s’étend sa puissance car la puissance de la nature et la puissance même de Dieu qui a sur toute chose un droit souverain ».

Si la puissance de la nature n’est rien d’autre que la puissance de l’ensemble des individus qui composent la nature, il est donc clair que chaque individu a un droit souverain sur tout ce qui est en son pouvoir. La nature est constituée de plusieurs individus et la puissance de chacun de ces individus réunis constitue la puissance totale de la nature. Autrement dit, la puissance totale de la nature est partagée entre les différents individus qui la composent. Si donc la nature a un droit souverain sur toutes choses, cela veut dire que chaque individu, en tant que élément qui participe de la nature, a un droit souverain sur toute chose qui est en son pouvoir. Nous pouvons alors dire que dans l’état de nature le droit équivaut à la puissance. Cela signifie que tout ce qu’un individu désire, il peut le réaliser au nom d’un droit naturel souverain. Si, par exemple, un individu fort désire un objet possédé par un autre individu plus faible, il a le droit de le lui subtiliser par la force. Si un homme hait un autre et qu’il peut le tuer, il a le droit de le faire par un droit naturel souverain. Par ailleurs, il est clair que « la loi suprême de la nature est que chaque chose s’efforce de persévérer dans son état autant qu’il est en elle, et cela sans tenir aucun compte d’aucune autre chose ».  Il suit de là que chaque individu a un droit souverain de persévérer dans son état, c’est-à-dire d’exister et de se comporter comme il est déterminé à le faire. Les hommes, comme tous les autres individus de la nature, désirent persévérer dans leur état autant qu’il se peut et ils en ont tous le plein droit. Si les sages ont le droit de vivre selon les lois et les injonctions de la saine raison, les moins sages ont également le droit de vivre sous l’impulsion de la politique. Et le droit naturel n’interdit à personne de vivre ni sous le commandement de la raison ni sous le commandement de l’Appétit. Nous pouvons donc dire à Spinoza que le droit de nature de chaque individu se définit non par la saine raison, mais par le désir et la puissance. Cela veut dire que chaque individu désire vivre comme il est déterminé par la nature à le faire. Et pour cela, il a le droit naturel d’user ou même d’abuser tout ce qui est en son pouvoir.

De ce que nous venons de dire, nous pouvons tirer trois points essentiels dans la théorie de l’état de nature de Spinoza. Premièrement, chaque individu qui participe de la nature a une certaine puissance qu’il tient de la nature même, et que son droit s’étend jusqu’où s’étend sa puissance. Deuxièmement, chaque individu désire persévérer dans son état autant qu’il se peut. Troisièmement, chacun peut combler son désir, peut se conduire soit sous les injonctions de la saine Raison soit sous l’impulsion de l’Appétit. Tout ce qu’un individu considère lui être utile, que ce soit sous la conduite de la raison ou par la violence de ses passions, il lui est loisible de l’appéter en vertu d’un droit de nature souverain et de s’en saisir par quelle voie que ce soit ; par la force, par la ruse, par les prières et enfin par le moyen qui lui paraîtra le plus facile ; conséquemment aussi de tenir pour ennemi celui qui veut l’empêcher de se satisfaire. Il est clair que dans un tel état la vie humaine telle que définie par Spinoza est quasi impossible. Comment peut-on vivre en sécurité et cultiver sa raison dans un état où rien n’est interdit sinon ce que personne ne désire et ne peut faire ? Comment une véritable vie humaine est-il possible dis-je, dans un milieu où les conflits, les haines, les colères, l’aversion ne sont pas prohibés. Si tout ce que l’Appétit commande peutêtre satisfaite au même titre que ce que la raison commande ? Dans cet état tous les individus n’étant pas encore capable de réflexion, ils ne peuvent manquer de s’attacher à ce qu’ils voient, et à ce qu’ils sentent, ils convoitent les biens matériels, or les convoitant par l’effet d’une loi qui a la même nécessité pour tous, tous ils les convoitent de sorte que ces biens, ne pouvant être posséder par tous à la fois, une rivalité s’établit et la force qu’ils ont pour se conserver eux même ils l’appliquent à se détruire les uns les autres. « Haine, colère, et par suite vengeance, crainte, voilà les passions auxquelles les hommes sont en proie par une inévitable conséquence de leur nature, l’effet de ces passions est non seulement de troubler l’âme de ceux qui sont atteints, mais encore de compromettre la sécurité de ceux-là même qui ne cherchent qu’à cultiver leur raison».  Les hommes étant ennemis les uns les autres, sont redoutables les uns les autres d’autant plus redoutables qu’ils ont plus de puissance étant plus habiles et plus rusés que les autres êtres. Il faut donc pouvoir être en garde contre les hommes, mais cela est impossible à l’individu isolé qui est paralysé par le sommeil tous les jours, souvent par la maladie ou bien par la souffrance morale et enfin par la vieillesse. Par conséquent, nous dit Brunschwick, s’il est vrai que dans l’état de nature tout être possède dans son intégrité le droit de faire tout ce dont il a le pouvoir, il est vrai aussi que la force de chacun se heurtant à l’hostilité de tous, il ne subsiste rien en réalité de ce prétendu droit universel ; car si chacun a le droit de faire tout ce qu’il désire, tout le monde est donc en danger. Ce qui fait que dans l’état de nature, l’homme, quel qu’il soit, sage ou ignorant ne peut être qu’esclave ; il a toujours mille dangers à craindre et la peur est une abdication de soi. C’est ce qui fait dire à  Spinoza : « comme à l’état de nature chacun est son propre maître aussi longtemps qu’il peut se garder de façon à ne pas subir l’oppression d’un autre, et que seul, on s’efforce en vain de se garder de tous aussi longtemps que le droit naturel humain est déterminé par la puissance de chacun, ce droit sera en réalité inexistant ou du moins n’aura qu’une existence théorique puisqu’on a aucun moyen assuré de le conserver. » Par ailleurs, il est clair qu’il n’y a personne qui ne souhaite être à l’abri de la crainte perpétuelle et que le plus grand désir de tout individu est de vivre en sécurité tout en exerçant son droit naturel.

Le droit qu’a un individu à l’état de nature n’est qu’illusion car le droit naturel de l’individu est un bien qui, pour ne pas s’anéantir doit être protégé. Si on n’a aucun moyen assuré de le conserver on le perd certainement. Le droit naturel de l’individu est, en effet, un bien particulier dans la mesure où il lui permet de faire tout ce qu’il désire et qui est en son pouvoir. Si l’individu est assez fort pour soumettre tous ses semblables à sa volonté, rien ne l’interdit de le faire..Il a le droit souverain de tuer qui il veut, de réduire en esclave qui il veut, il a le droit de subtiliser aux autres individus tout ce qu’ils possèdent Mais personne ne peut être assez fort pour être toujours plus fort que tous les autres individus. Quelle que force ou intelligence que puisse avoir un individu à l’état de nature, il trouvera toujours un autre individu aussi fort ou plus fort que lui. Ce qui fait que personne n’aura la latitude de faire tout ce qui est en son pouvoir. Puisque sa puissance, ou encore et c’est la même chose, son droit et sa volonté se heurtera à la puissance et à la volonté d’un autre individu. C’est pourquoi le droit l’individu possède à l’état est nul puisqu’il n’a aucun moyen assuré de le conserver de nature. Si personne n’a aucun moyen assuré de conserver son droit c’est-à-dire sa puissance, il s’en suivra de deux choses l’une : soit personne n’aura la possibilité d’agir, ce qui est impossible, soit chacun voudra agir comme il veut, ce qui entraînera un conflit général, Une guerre de tous contre tous. Or il est certain qu’aucune de ces situations ne permet une véritable vie humaine. Qui aurait, dans cette situation caractérisée par la crainte universelle, la haine et la colère, le loisir et l’esprit tranquille pour cultiver sa raison ?

Il serait même extrêmement difficile pour les plus faibles d’assurer un seul instant la satisfaction de leurs besoins naturels tel manger, boire, dormir etc. Et même les plus forts ne seront jamais assez forts pour pouvoir toujours user de leur puissance.

A l’état de nature, donc l’homme n’est pas le seul loup de l’homme. Car dés l’instant que tous les individus appliquent toutes leurs forces, leurs énergie et leurs intelligence à la guerre de tous contre tous, d’autres ennemis telles que la faim, la douleur la maladie etc. Tout cela montre, selon Spinoza, l’impossibilité de mener une véritable vie humaine à l’état de nature.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : L’ETAT CHEZ SPINOZA
CHAPITRE I : LA NECESSITE DU PASSAGE DE L’ETAT DE NATURE A L’ETAT SOCIAL
CHAPITRE II : LES CONDITIONS DE CONSERVATION DE L’ETAT
CHAPITRE III : L’ETAT : AUTORITE SUPREME
DEUXIEME PARTIE : LA LIBERTE DE PENSEE CHEZ SPINOZA
CHAPITRE I : L’INVINCIBLE INDEPENDANCE DE LA PENSEE
CHAPITRE II : LA LIBERTE DE PENSEE N’EST PAS UN DANGER POUR L’ETAT
CHAPITRE III : LIBERTE DE PENSEE ET RESPONSABILITE
CONCLUSION

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