La « professionnalisation » des formations universitaires

Les universités de l’ «économie du savoir»

Évolution de l’approche institutionnelle

Si elles ont fortement imprégné le développement de l’approche institutionnelle, les idées maîtresses de ces travaux fondateurs présentaient d’importantes lacunes qui ont entrainé des critiques de l’approche. Ainsi, depuis son émergence à la fin des années 1970, et face aux critiques qui l’ont accompagnée, l’approche institutionnelle a beaucoup évolué, passant de son adolescence à une certaine maturité, comme l’a souligné, de manière imagée, l’un de ses plus intéressés observateurs (Scott, 1987, 2008a). En fait, Scott (2008a et b) distingue sept tendances fortes concernant l’évolution de cette approche. Ces tendances sont sommairement présentées dans les sous-sections qui suivent.

Une conceptualisation plus serrée

Scott (2008a) rappelle le caractère historique de l’intérêt pour les institutions, les premières conceptualisations, datant du début du 19e siècle, étant plutôt centrées sur la manière dont les coutumes et l’histoire contraignent les choix et cimentent l’ordre social. De leur côté, les travaux plus récents mettent davantage en valeur l’importance des systèmes symboliques qui guideraient le comportement. À cet effet, l’auteur rappelle que sont apparues dans les écrits scientifiques des distinctions entre « ancien » et « nouvel » ou « néo » institutionnalisme, distinctions que l’auteur juge non fécondes. Pour Scott, l’essentiel dans l’approche institutionnelle, qu’elle soit ancienne ou nouvelle, c’est sa préoccupation pour la stabilité sociale. Ainsi, l’approche institutionnelle porte une attention particulière aux processus de reproduction sociale. À cet effet, Scott souligne que DiMaggio et Powell (1983) ont été parmi les premiers à dégager ces processus qui, selon leur typologie, peuvent être « coercitifs », « normatifs » et « mimétiques ». L’auteur mentionne qu’à travers ses propres travaux (1995; 2005), il a raffiné cette typologie en dégageant les trois « ingrédients » qui sous tendent l’ordre institutionnel : les éléments « régulateurs », « normatifs » et « culturels cognitifs ». Les premiers reposent sur l’établissement de règles, le contrôle et les sanctions. Les seconds reposent plutôt sur les prescriptions, évaluations et obligations. Finalement, les derniers reposent sur les conceptions partagées qui forment la réalité sociale et les cadres à travers lesquels cette réalité est construite. Ces éléments distincts génèrent, selon Scott, des ordres institutionnels variés qui diffèrent au plan des motivations, des logiques d’action, des mécanismes et des indicateurs utilisés. Ainsi, il y a une grande différence entre le fait de se soumettre pour éviter une punition, parce que l’on se sent moralement obligé de le faire, ou parce que l’on ne peut concevoir d’autres manières d’agir. Pour Scott, les institutions sont faites de différentes combinaisons de ces éléments institutionnels, qui varient entre eux et dans le temps. Dans cette perspective, le travail de l’« institutionnaliste » consiste à dégager (1) quels sont les éléments institutionnels qui sont en jeu dans un contexte donné et (2) la mesure dans laquelle ces différents éléments se renforcent ou se nuisent les uns les autres. Scott fait également remarquer que les éléments institutionnels opèrent à plusieurs échelles, allant des petits systèmes interpersonnels aux grands ensembles transnationaux. Ainsi, peu importe l’échelle, les organisations sont traversées par plusieurs éléments institutionnels (règles, normes, significations), certains étant forgés par une interaction continuelle et d’autres étant empruntés à l’environnement. L’approche institutionnelle a donc cherché à montrer comment ces différentes structures et processus institutionnels moulent les organisations, les « populations » organisationnelles et les « champs » organisationnels. Ce faisant, elle a mis en lumière le fait que, bien que « symboliques », les éléments institutionnels sont fort importants puisqu’ils fournissent les schémas cognitifs, les guides normatifs et les règles qui viennent à la fois contraindre et dynamiser le comportement social. Émergeant des interactions, ces règles, normes et significations sont à la fois préservées et modifiées par le comportement des acteurs sociaux.

D’une perspective déterministe vers une perspective interactive

Scott (2008a) rappelle aussi que les premières discussions ayant porté sur les environnements institutionnels, dont les travaux fondateurs de Meyer et Rowan (1977), présentaient ces derniers comme des contextes qui imposent des exigences ou qui contraignent les organisations. On s’y préoccupait surtout des « effets institutionnels », ce qui sous-tendait, selon l’auteur, une perspective top-down et donc déterministe. Selon cette perspective, les organisations qui opéraient dans un contexte donné devaient, si elles voulaient réussir, se conformer aux diktats de leur environnement institutionnel. Dans ces premiers travaux, il était tenu pour acquis que les environnements institutionnels étaient uniformes et imposaient des exigences homogènes à des organisations passives. Scott insiste cependant sur le fait que cette vision s’est rapidement transformée et raffinée. Ainsi, ces pressions « homogénéisantes » ont d’abord été reconnues comme étant plus fortes au sein de « champs organisationnels » ou de « secteurs » délimités. Proposé par
DiMaggio et Powell (1983), et emprunté aux travaux de Bourdieu (1971), le concept de « champ organisationnel » met l’emphase sur les éléments de relations et de réseau. De son côté, le concept de « secteur », proposé par Meyer et Scott (1983), a plutôt été emprunté au champ de l’analyse des politiques publiques, où a été notée la tendance vers la « sectorialisation », avec des politiques, programmes et agences se limitant de plus en plus à des domaines fonctionnels spécialisés. Scott rappelle également que les institutionnalistes ont rapidement constaté que plusieurs de ces champs étaient fragmentés et conflictuels, et qu’ils contenaient des exigences et des prescriptions qui entraient en compétition les unes avec les autres. Nombre d’études subséquentes ont, selon l’auteur, démontré que cette situation augmentait la complexité administrative, accroissait le « découplage » entre les structures et les activités des organisations, minait la stabilité de ces dernières, produisait des structures hybrides et minait la légitimité organisationnelle. Bref, si les travaux fondateurs ont permis de mettre en lumière l’influence de l’environnement institutionnel sur les organisations, les formulations initiales en surévaluaient l’unité, la cohérence et l’indépendance. Après une décennie de travaux, des corrections et raffinements ont été apportés, qui ont mis en lumière la variété, la complexité et, dans certains cas, les conflits et l’ambiguïté présents dans ces systèmes prescriptifs. Ces développements ont permis, selon Scott, de reconnaître la possibilité, pour les acteurs, individuels et organisationnels, de faire preuve d’agence et ce faisant, de procéder à certains choix stratégiques. Scott mentionne que c’est DiMaggio (1988), dans un essai portant sur l’intérêt et l’agence dans l’approche institutionnelle, qui a poussé dans cette direction. Dans cet essai, DiMaggio a incité les chercheurs institutionnalistes à s’intéresser davantage au processus d’institutionnalisation, qui est, selon l’auteur, un produit des efforts politiques d’acteurs cherchant à en arriver à leurs fins. Dans cette perspective « agentielle », le succès d’un projet d’institutionnalisation dépend du pouvoir relatif des acteurs qui soutiennent, s’opposent ou cherchent à influencer celui-ci.
Scott rappelle également que cette notion d’ « agence » au sein d’un contexte institutionnel a été renforcée par les travaux d’Oliver (1991), qui a combiné l’approche institutionnelle et l’approche de la dépendance des ressources afin de développer une typologie de réponses « stratégiques » que les acteurs organisationnels peuvent mettre en œuvre face aux pressions institutionnelles. Ainsi, bien que la conformité aux pressions puisse être la réponse la plus commune des organisations, Oliver a recensé dans sa typologie l’existence de plusieurs autres réponses, dont le compromis, l’évitement, le défi et la manipulation. L’auteure a également dégagé les conditions dans lesquelles ces stratégies avaient plus de chances d’émerger. Pour Scott, bien que les travaux d’Oliver aient été critiqués (voir, notamment, Goodrick et Salancik, 1996), ces derniers ont permis d’ouvrir l’approche institutionnelle, en faisant de la place pour une action plus intentionnelle et, ce faisant, ont rendu l’approche plus intéressante auprès des spécialistes et chercheurs en management.

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE 1 PROBLÉMATIQUE
Introduction
1. Les universités de l’ «économie du savoir»
2. La « professionnalisation » des formations universitaires
2.1 Qu’est-ce que la « professionnalisation » des formations universitaires?
2.2 Quels sont les indices de cette « professionnalisation »?
2.3 Critiques de la professionnalisation des formations universitaires
3. Les formations professionnelles universitaires
3.1 Qu’est-ce qu’une formation professionnelle universitaire (FPU)?
3.2 Quelles sont les caractéristiques des FPU?
3.3 Les formations professionnelles universitaires et leur « environnement »
4. Comment les FPU réagissent-elles aux pressions multiples?
5. Mieux comprendre les relations entre les FPU et leur environnement
6. Un cas éclairant, la formation des directions d’établissement scolaire au Québec
6.1 Une formation en restructuration à l’échelle internationale
6.2 Le cas « québécois »
7. Pertinence scientifique et sociale du problème
CHAPITRE 2 CADRE THÉORIQUE
Introduction
1. Les organisations et leur « environnement »
1.1 Quelques approches dites à « système ouvert »
1.2 Les approches dites à « système ouvert » et l’étude des organisations éducatives
2. L’approche « institutionnelle »
2.1 Origines de l’approche institutionnelle et idées fondatrices
2.2 Évolution de l’approche institutionnelle
2.3 L’approche institutionnelle en éducation
2.4 Quelques constats
3. Concepts « institutionnels » d’intérêt pour la thèse
3.1 Les pressions « institutionnelles »
.2 L’agence, les stratégies et tactiques
3.3 Études similaires en enseignement supérieur
3.4 Quelques constats
4. Objectifs spécifiques de recherche
CHAPITRE 3 MÉTHODOLOGIE
Introduction
1. L’étude de cas, stratégie de recherche privilégiée
1.1 Définitions de l’étude de cas
1.2 Utilisation de l’étude de cas
1.3 Différents types d’études de cas
2. Design de l’étude de cas
2.1 Choix des sous-unités d’analyse
2.2 Choix de la période temporelle
3. Collecte des données
3.1 Les corpus documentaires
3.2 Les entrevues semi-dirigées
4. Analyse des données
4.1 À l’échelle des unités…
4.2 À l’échelle du champ…
4.3 Outils d’analyse
CHAPITRE 4 RÉSULTATS POUR L’UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL
Introduction
1. Première phase (1988-1989 à 1994-1995): Un quasi statu quo dans la formation
1.1 Une restructuration facultaire imprégnée d’une logique d’académisation
1.2 Stabilité dans les archétypes de formation
1.3 Des outils qui évoluent peu
1.4 Un entrepreneuriat conservateur
1.5 Des pressions essentiellement internes, une stratégie d’acquiescement
Conclusion de la phase 1
2. Deuxième phase (1995-1996 à 1998-1999): Une transition pragmatique
2.1 De nouveaux archétypes de formation
2.2 Des développements à contrecourant de la logique d’académisation
2.3 De nouveaux archétypes, mais peu de nouveaux « outils »
2.4 Une prise de conscience et le développement d’un entrepreneuriat institutionnel réactif et pragmatique
2.5 Une stratégie de compromis : équilibrer, pacifier
Conclusion de la phase 2
3. Troisième phase (1999-2000 à 2008-2009) : Une professionnalisation accrue de la formation
3.1 Des archétypes de formation démultipliés
3.2 De nouveaux « outils » de formation
3.3 Un entrepreneuriat de transformation
3.4 Tension entre une logique de « professionnalisation » accrue et la crainte d’une « normalisation » clientéliste
3.5 Des stratégies variées en réponse à des pressions externes de plus en plus fortes187 Conclusion « phase 3 »
Conclusion
CHAPITRE 5 RÉSULTATS POUR L’UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE
Introduction
1. Première phase (1988-1989 à 1993-1994): Achever l’universitarisation de la formation
1.1 L’émergence d’un continuum de formation de 2e cycle
1.2 Des outils en transformation
1.3 Un entrepreneuriat « missionnaire »
1.4 Une tension entre les logiques de professionnalisation et d’académisation
1.5 Des pressions normatives et d’efficacité
Conclusion de la phase 1
2. Deuxième phase (1994-1995 à 2000-2001): Consolider dans la continuité, en diversifiant, spécialisant
2.1 Flexibilité et diversité dans un continuum intégré
2.2 Quelques ajustements dans les outils
2.3 Un entrepreneuriat pragmatique de consolidation
2.4 Diminution des tensions professionnalisation-académisation
2.5 Encore une fois, des pressions normatives et d’efficacité
Conclusion de la phase 2
3. Troisième phase (2001-2002 à 2008-2009) : Une perspective professionnalisante renouvelée
3.1 Le diplôme de 2e cycle, cœur de la formation des DES
2 3.2 Une stabilité de surface…
3.3 Un entrepreneuriat de renouvellement
3.4 Une logique de professionnalisation assumée
3.5 Des pressions normatives toujours présentes et des pressions de concurrence de plus en plus fortes
Conclusion de la phase 3
Conclusion
CHAPITRE 6 REGARD CROISÉ SUR LES RÉSULTATS ET DISCUSSION
Introduction
1. Dans un champ qui se structure
1.1 Une intention de structurer le champ de la formation des DES
1.2 Une intervention structurante, l’obligation de formation
1.3 Un référentiel de compétences pour la formation
2. …des unités qui tendent vers un isomorphisme croissant
2.1 Vers une logique de professionnalisation
2.2 Vers un continuum de formation professionnelle
2.3 Des outils qui s’ajustent
3. …en équilibrant des pressions multiples
3.1 Des pressions institutionnelles intraorganisationnelles et externes à équilibrer
3.2 Des pressions de compétition de plus en plus fortes
4. …grâce au travail d’entrepreneurs institutionnels
4.1 L’entrepreneuriat aux marges, l’entrepreneuriat au centre
4.2 Des entrepreneurs qui laissent leur marque
4.3 De l’importance des espaces d’autonomie, du développement d’orientations collectives
5. … stimulées ou contraintes par leurs choix historiques
5.1 Universitariser un modèle de formation continue
5.2 Accentuer le caractère professionnel d’une formation aux traits académisants .. 367 Conclusion
CONCLUSION GÉNÉRALE
Retour sur les différentes composantes de la thèse
Forces et limites
Contribution à différents champs d’études
Pistes de recherches futures
Le champ, le champ, toujours le champ
Et ailleurs dans la formation des DES?
Et dans les autres FPU?
Pluralisme institutionnel, travail institutionnel et leadership
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE 1 ÉLÉMENTS RELATIFS À LA CUEILLETTE ET À L’ANALYSE DES DONNÉES
Annexe 1A Documents de renseignement et formulaires de consentement
Annexe 1B Corpus documentaire de l’UdeM
Annexe 1C Corpus documentaire de l’UdeS
Annexe 1D Corpus documentaire des organisations du champ
Annexe 1E Protocoles d’entrevue
ANNEXE 2 TABLEAUX RELATIFS À L’ÉVOLUTION DES OUTILS, UdeM
Annexe 2A Évolution des objectifs
Annexe 2B Évolution des conditions d’admission
Annexe 2C Évolution de la structure et des activités des programmes
ANNEXE 3 TABLEAUX RELATIFS À L’ÉVOLUTION DES OUTILS, UdeS

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