LES TROIS COMPOSANTES DE LA DOULEUR SELON MELZAC

« Une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite dans ces termes ». Telle est la définition de la douleur proposée par l’IASP (International Association for the Study of Pain). La douleur est une expérience individuelle multifactorielle, mettant en jeu différentes composantes: sensori-discriminative, émotionnelle, comportementale et cognitive. La prévalence des douleurs chroniques, en France est estimée entre 15 et 30% dans la population, ce qui en fait un motif fréquent de consultation en médecine générale. Les douleurs chroniques représentent un réel problème de santé publique, aussi bien sur le plan individuel que collectif avec un impact socio-économique important. Au centre de la chaine de soin, et acteurs de premier recours dans la prise en charge de la douleur, les médecins généralistes sont confrontés au quotidien aux difficultés rencontrées dans la prise en charge de ces pathologies chroniques douloureuses. Face à une instrumentalisation de la médecine de plus en plus présente, ainsi que des patients et soignants désireux de recourir à une approche plus globale centrée sur la personne, on assiste ces dernières années à l’essor des thérapies non conventionnelles dans les pays développés. Bien qu’utilisée pour traiter la douleur depuis des siècles, c’est seulement depuis deux décennies que les chercheurs ont commencé à identifier les effets spécifiques de l’hypnoanalgésie sur l’activité cérébrale.

LA DOULEUR

DEFINITION 

La douleur est une expérience subjective complexe, qui repose sur des bases neurophysiologiques et neuropsychologiques. On distingue :

La nociception :
Elle correspond à une fonction biologique qui est un mécanisme d’alarme dont le rôle est de détecter des stimulations internes (viscérales) ou externes (cutanées), dont l’intensité menace l’intégrité physique de l’individu. Ce phénomène est purement physiologique car l’information n’est pas traitée par les centres supérieurs.

La douleur :
D’après l’International Association For The Study Of Pain, (IASP), la douleur est définie comme « une expression sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion réelle ou potentielle des tissus, ou décrite en terme d’une telle lésion ». (1) Cette définition affirme une dimension sensorielle indissociable d’une dimension affective, émotionnelle, psychologique. La douleur est donc toujours subjective. On parle de douleur chronique quand la douleur est supérieure à 3 ou 6 mois. Ce n’est alors plus un symptôme mais un syndrome, plurifactoriel et complexe, associant des manifestations physiques, mais aussi psychiques, comportementales et sociales. La HAS (Haute Autorité de Santé), définie la douleur chronique, ou syndrome douloureux chronique comme un syndrome multidimensionnel, lorsque la douleur exprimée, (quel que soit sa topographie et son intensité), persiste ou est récurrente au-delà de ce qui est habituel pour la cause initiale présumée, répond insuffisamment au traitement, ou entraîne une détérioration significative et progressive des capacités fonctionnelles et relationnelles du patient.

La douleur chronique peut être accompagnée de :
-Manifestations psychopathologiques,
-D’une demande insistante du patient à un recours à des médicaments ou à des procédures médicales souvent invasives, alors qu’il déclare leur inefficacité à soulager.
-D’une difficulté du patient à s’adapter à la situation.

Pour MORASZ, la douleur n’est que la face émergente de ce qui fait mal à la personne soignée. Trop souvent perçue comme un processus physiologique réclamant avant tout l’antalgie, la douleur est à intégrer dans la globalité du sujet. (3) Ces différents exemples de définitions de la douleur, convergent vers un point identique : la douleur n’est pas une expérience sensorielle isolée, mais intègre également les composantes affective et émotionnelle. L’interaction entre ces deux dernières dimensions de la douleur permet, en partie, d’expliquer comment l’Hypnose peut moduler ou agir sur l’expérience douloureuse d’un sujet.

Epidémiologie et impact socio-économique

Les 5 types de douleurs chroniques les plus fréquentes en consultation de ville sont (4) (5) :
•Les lombalgies et les lombo-radiculalgies. Leur prévalence est estimée à 26,9% dans la population générale française (PGF). Elles représentent un motif fréquent (20% des consultations) de recours à une structure spécialisée de prise en charge de la douleur chronique.

•Les céphalées chroniques quotidiennes : Elles sont définies par la présence d’une céphalée plus de 15 jours par mois depuis plus de 3 mois. Leur prévalence est estimée à 3% dans la PGF. Elles représentent une consommation de produits de santé estimés à 2 milliards d’euros par an. La prévalence des migraines chez l’adulte est estimée entre 17 et 21%, dans la PGF.

•Les douleurs neuropathiques chroniques : Leur prévalence est estimée à 7% dans la PGF (la fibromyalgie à 2,2%), dont 50% sont des douleurs neuropathiques post-chirurgicales : 19% post saphénectomie, 16% post arthroscopie, 12% post cure de hernie inguinale.

Elle représente 17% des motifs de consultations dans un centre anti douleur.

•Les douleurs arthrosiques et musculo-squelettiques : La prévalence de l’arthrose est de 17% dans la PGF.

Impact sur le plan individuel

Selon une étude française publiée dans la revue PAIN en 2006 ; 30% de la population générale souffre de douleurs chroniques, dont 20% de douleurs importantes justifiant une prise en charge médicale adaptée. Les patients douloureux chroniques souffrent en moyenne depuis 5-7 ans, et 72% de manière permanente. (6) La douleur chronique présente un retentissement important sur le plan personnel, professionnel et social du patient :
– elle est une source de handicap et d’altération majeure de la qualité de vie ; en effet 2 patients sur 3 sont directement handicapés par la douleur dans leurs activités physiques quotidiennes, leur sommeil, et loisirs.
-2/3 des patients se sentent anxieux et/ou déprimés.
-40% des patients ont subi une répercussion directe au travail : En effet, 15% pensent que la douleur influe sur la perte de leur emploi, 13% pensent qu’elle est à l’origine d’un changement de responsabilité professionnelle et 12% d’un changement complet d’activité.

Impact sur le plan collectif

La douleur chronique représente également un coût économique important pour la société : Selon l’étude ECONEP :
– Le patient douloureux chronique a recours chaque année à environ 10 consultations chez le médecin généraliste et 4 consultations chez le spécialiste. 45% d’entre eux, sont concernés par des arrêts de travail dont la durée cumulée moyenne dépasse 4 mois par an. Les arrêts de travail sont 5 fois plus fréquents que dans la population générale.
-D’autre part, le coût moyen annuel par patient de prise en charge de la douleur correspond à un budget de 7000 euros pour les hospitalisations, 580 euros pour les traitements médicamenteux, 5180 euros pour les traitements non médicamenteux, et 950 euros pour les examens complémentaires.

La douleur chronique engendre un nombre important de soins, d’absentéisme et d’arrêts de travail aboutissant à l’invalidité, avec une répercussion majeure sur le plan médico-socio-économique, elle reste donc une priorité de santé publique. Les pouvoirs publics se penchent sur ce problème de santé publique, et ce depuis 1998 :
– Avec la mise en place d’un premier plan d’action contre la douleur dont les objectifs étaient de mettre en place des structures pluridisciplinaires pour évaluer, traiter la douleur et former les professionnels de santé à la prise en charge de ces patients douloureux chroniques.
-Mise en place d’un deuxième plan d’action contre la douleur, 2002-2005, avec la création du CNRD en 2003 (Centre National de Ressource et de lutte contre la Douleur). (8)
-Un troisième plan d’action (2006-2010) de prise en charge de la douleur, dont un des objectifs était une meilleure utilisation des traitements et structuration des filières de soins. Actuellement, on dénombre 252 structures hospitalières de prise en charge de la douleur. Chaque année ces structures spécialisées prennent en charge 300000 patients, pour une durée minimum de soins de 2 ans. Ce qui reste un nombre insuffisant par rapport à l’ensemble des patients atteints de douleurs chroniques. (9)
-La prise en charge de la douleur a été inscrite dans la loi du 4 Mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Elle a été consacrée comme priorité dans la loi du 13 Aout 2004. Cette priorisation est d’autant plus nécessaire, face au vieillissement de la population et de la plus grande exposition de celle-ci à tout type de douleur, ainsi qu’à la difficulté, malgré trois plans d’action douleur, de prendre en charge efficacement les douleurs chroniques.
-C’est pourquoi le Haut Conseil de la Santé Publique a proposé un programme national douleur 2013-2017.Ce programme a été élaboré pour répondre aux enjeux de la stratégie nationale de santé, relatif au système de santé autour du patient, il accorde une place primordiale au parcours de soins, en mobilisant tous les partenaires impliqués (personnels de santé, patients, structures douleurs chroniques, et ARS).

RAPPELS PHYSIOPATHOLOGIQUES DE LA DOULEUR

Les voies de la Douleur

Il existe deux grandes voies de transmissions des informations somesthésiques :

Le système lemniscal :
Il correspond aux sensibilités épicritiques et proprioceptives, dont la transmission se fait depuis les récepteurs cutanés via les fibres myélinisées sensitives Alfa et Béta, de gros calibres vers les racines postérieures puis les cordons postérieurs de la moelle.

Le système extralemniscal :
Il correspond aux sensibilités protopatiques, nociceptives et thermiques, dont la transmission est assurée par des fibres myélinisées Alpha et gamma de petits calibres et les fibres C, amyéliniques. Ces deux types de fibres expliquent la sensation de « double douleur » :
-La première ressentie comme une piqure, apparait rapidement (fibres A et Gamma)
-La seconde, plus tardive évocatrice d’une brulure (fibres C).

● Les fibres Alpha et Gamma, font relais au niveau de la corne postérieure de la moelle et donnent naissance aux faisceaux néo-spinothalamique et paléospinothalamique, qui déçussent et remontent dans le cordon antérolatéral de la moelle. La projection sur ces neurones via les afférences nociceptives viscérales et cutanées explique les douleurs projetées.

● Le faisceau néo-spinothalamique (fibres A et G) rejoint le noyau ventro postérolatéral du thalamus puis le cortex somatosensoriel.

● Le faisceau paléo-spinothalamique (fibres C), se projette dans le thalamus médian, avec un relais vers le cortex frontal et les structures limbiques.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE I
I – LA DOULEUR
1. DEFINITION
1.1 La nociception
1.2 La douleur
1.3 Epidémiologie et impact socio-économique
1.3.1 Impact sur le plan individuel
1.3.2 Impact sur le plan collectif
2. RAPPELS PHYSIOPATHOLOGIQUES
2.1 Les voies de la douleur
2.1.1 Le système lemniscale
2.1.2 Le système extra-lemniscale
2.2 Les mécanismes de contrôle de la douleur
2.2.1 Contrôle ascendant de la douleur : la théorie du «gate control»
2.2.2 Le contrôle inhibiteur descendant
2.2.3 Le contrôle inhibiteur diffus induit par la nociception
2.3 Les médiateurs chimiques de la nociception
2.3.1 Au niveau périphérique
2.3.2 Au niveau de la corne dorsale de la moelle
2.3.3 Au niveau supra spinal
3. CLASSIFICATION DE LA DOULEUR
3.1 Douleur par excès de nociception
3.2 Douleur neuropathique
3.3 Douleur mixte
3.4 Le syndrome douloureux régional complexe
3.5 Douleur psychogène
3.6 Douleur idiopathique
4. LES TROIS COMPOSANTES DE LA DOULEUR SELON MELZAC
4.1 Composante sensori-discriminative
4.2 Composante affectivo-émotionnelle et comportementale
4.3 Composante cognitive
5. INTERROGATOIRE ET EXAMEN CLINIQUE D’UN PATIENT DOULOUREUX
II – L’HYPNOSE MEDICALE
1. HISTORIQUE DE L’HYPNOSE
1.1 Une pratique antique
1.2 Le magnétisme animal
1.2.1 Frantz Anton Mesmer
1.2.2 De Puysegur
1.3 L’avènement de l’hypnotism
1.3.1 L’abbé De Faria
1.3.2 James Braid
1.3.3 Jean-Martin Charcot
1.4 Sur la voie de la découverte et de la neurophysiologie de l’inconscient, dissociation et suggestions
1.4.1 Pierre Janet
1.4.2 Sigmund Freud
1.4.3 Hyppolite Bernheim
1.5 L’hypnose contemporaine en France
1.5.1 Léon Chertok
1.5.2 Didier Michaux
1.5.3 Jean Godin
1.5.4 François Roustang
1.6 L’évolution de l’hypnose aux U.S.A
1.6.1 L’hypnose expérimentale
1.6.2 L’hypnose praticienne
2. DEFINITION
2.1 Etat de conscience naturel
2.2 Ensemble de pratiques différentes
2.2.1 L’hypnoanalgésie
2.2.2 L’hypnosédation
2.2.3 L’hypnothérapie
2.3 Deux modes d’utilisation de l’hypnose
2.3.1 Direct ou formel
2.3.2 Indirect ou informel
2.4 Les états de conscience et l’attention
2.4.1 La conscience critique
2.4.2 La conscience hypnotique
2.4.3 La transe spontanée négative
2.4.4 La transe spontanée positive
3. DEROULEMENT D’UNE SEANCE
3.1 Première phase : l’induction
3.1.1 L’absorption
3.1.2 La confusion
3.1.3 La dissociation
3.1.4 Les différents types d’induction
3.1.4.1 Induction rapide
3.1.4.2 Induction progressive
3.2 Deuxième phase : L’approfondissement de la transe
3.2.1 Activation de recherche inconsciente
3.2.2 Mise en place de processus inconscients
3.2.2.1 Exemples de processus idéodynamiques
3.2.2.2 Les suggestions
3.3 Troisième phase : Phase de travail thérapeutique
3.3.1 Les suggestions
3.3.2 Les signes physiques de transe
3.4 Quatrième phase : La réassociation
4. LA COMMUNICATION EN HYPNOSE
4.1 L’école de Palo Alto
4.2 Deux modes de communication
4.2.1 Communication Digitale
4.2.1.1 Le langage verbal
4.2.2 Communication Analogique
4.2.2.1 Le langage para verbal
4.2.2.2 Le langage non verbal
5. NEUROPHYSIOLOGIE DE L’HYPNOSE
5.1 L’Electroencéphalogramme. (EEG)
5.1.1 Les ondes alphas
5.1.2 Les ondes thêtas
5.1.3 Les ondes betas
5.1.4 Les ondes à 40 HTZ
5.2 L’imagerie cérébrale
5.2.1 La Tomographie par émission de positions
5.2.2 L’IRM fonctionnelle
5.3 Sur le plan physiologique
6. MESURE DE L’HYPNOSE
7. PROCEDURE ET RECHERCHE EN HYPNOSE
III – UTILISATION DE L’HYPNOSE DANS LA DOULEUR CHRONIQUE
1. COMPOSANTE PSYCHOLOGIUE : LA SUGGESTIBILITE
1.1 Les suggestions d’analgésie : efficacité ou simple simulation ?
1.2 Les suggestions d’analgésie : effet placebo ?
2. NEUROPHYSIOLOGIE
2.1 Le système opioïde endogène
2.2 La modification du réflexe de flexion (RIII)
2.3 La modification du seuil de tolérance à la douleur
3. APPORT DE L’IMAGERIE
4. LES DIFFERENTES TECHNIQUES UTILISEES
4.1 Les suggestions de dissociation
4.2 Les suggestions centrées sur l’analgésie
4.3 Les suggestions axées autour de la réinterprétation de la douleur
5. CHAMPS D’APPLICATION DE L’HYPNOSE DANS LA DOULEUR CHRONIQUE
6. LES CONTRES INDICTIONS A L’HYPNOSE
7. DEVELOPPEMENT DE L’HYPNOSE A L’HOPITAL
PARTIE II. ETUDE SUR LA FREQUENCE DU RECOURS A L’HYPNOSE DANS LA PRISE EN CHARGE DES DOULEURS CHRONIQUES EN MEDECINE GENERALE
I – CADRE DE L’ETUDE
II – MATERIELS ET METHODE
1. Type d’étude
2. Questionnaire
3. Recrutement des médecins
3.1 Critères d’inclusion
3.2 Critères de non inclusion
3.3 Période de recrutement
3.4 Réalisation de l’étude
4. Recueil des données
5. Analyse des données
III – RESULTATS
1. Données sociodémographiques et professionnelles des médecins généralistes
1.1 Genre
1.2 Age
1.3 Lieux d’exercice professionnel
1.4 Formations complémentaires
2.Approche de la prise en charge des douleurs chroniques en médecine de ville
2.1 Pathologies chroniques rencontrées
2.2 Facteurs liés à l’échec de prise en charge thérapeutique
2.3 Intervenants dans le parcours de soin
2.4 Comorbidités associées
3. Fréquence du recours à l’hypnose dans la prise en charge des douleurs
chroniques en Médecine Générale : objectif principal
4. Connaissances des médecins généralistes sur l’hypnose médicale
5. Place de l’hypnose dans le parcours de soin
6. Facteurs limitants le recours à l’hypnose en médecine générale
7. Profils des médecins adresseurs à l’hypnose
7.1 En fonction du genre
7.2 En fonction de l’âge
7.3 En fonction du lieu d’exercice professionnel
7.4 En fonction des formations complémentaires
7.5 En fonction de leur expérience personnelle de l’hypnose
7.6 En fonction de leurs connaissances sur l’hypnose
7.7 En fonction de la patientèle
7.8 En fonction du parcours de soin
IV – DISCUSSION
1. Méthode
1.1 L’échantillonnage
1.2 Le questionnaire
1.3 Représentativité de l’échantillon
2. Résultats
2.1 Approche de la douleur chronique en médecine de ville
2.2 Fréquence du recours à l’hypnose
2.3 Connaissance des médecins généralistes sur l’hypnose médicale
2.4 Place de l’hypnose dans le parcours de soin
2.5 Facteurs limitants le recours à l’hypnose
2.6 Profils des médecins adresseurs à l’hypnose
3. Limites de l’étude
– CONCLUSION
– BIBLIOGRAPHIE

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *