Les approches théoriques de l’apprentissage

Les situations de crise à l’hôpital : état actuel des débats

Ce travail de recherche se focalise sur les situations de crise dans les établissements de santé. Je définis une situation de crise dans un établissement de santé comme une situation extrême du fait de son intensité et de sa nature. Elle correspond à une situation exceptionnelle qui vient perturber le fonctionnement habituel et abouti à une situation instable, impliquant la mise en place de mesures immédiates.
Pour Regouby (2007), une crise à l’hôpital est une situation d’accélération d’un évènement qui déborde les capacités habituelles de l’organisation. Elle menace les priorités et les missions de cette organisation. Il la définit comme un état paroxystique, issu de la rupture d’un état d’équilibre précédent. Elle résulte soit d’un évènement catastrophique, soit du dysfonctionnement d’une ou plusieurs organisations.
Une situation de crise, peut constituer un mécanisme d’adaptation qui va permettre à l’organisation d’évoluer. Toutefois, face à cela,les réactions spontanées consistent, le plus souvent, à vouloir contrer cette énergie nouvelle pour s’en protéger. On ne se donne pas toujours les moyens d’identifier et de prendre en compte les signes précurseurs. On recherche ce qui peut renforcer les croyances, sur lesquelles nous nous sommes construits. Pour faire face aux difficultés que nous rencontrons, nous avons tendance à vouloir les éliminer pour revenir à l’état antérieur, que nous connaissons mieux et qui nous rassure.
La canicule de l’été 2003 a représentée une situation de crise majeure en France par sa résonance sur le tissu social. Le constat, suite à cet évènement est que les périodes de vacances présentent des vulnérabilités importantes, qu’il n’y avait pas de force de réflexion rapide, qu’il fallait quarante-huit heures au Ministère de la Santé pour rédiger un communiqué à la population.
Le drame du sang contaminé a également constitué une rupture à bien des égards. L’interdiction tardive des produits non chauffés et les dimensions judiciaire, médiatique, politique ont fait oublier l’essentiel. La mort de centaines de personnes hémophiles mais aussi le fait que, de 1981 à 1985, trois millions de personnes ont été potentiellement exposées à la contamination lors d’une transfusion, destinée à les sauver.
Parmi les crises hospitalières majeures, nous pouvons citer aussi le cas de la Clinique du Sport, où une seule contamination a déclenché le rappel de milliers de personnes potentiellement exposées à la contamination. Enfin, les actes de violence à l’encontre du personnel soignant peuvent choquer le monde hospitalier. Par exemple, l’assassinat de deux infirmières à Pau, en décembre 2004, a marqué les hôpitaux psychiatriques.
Afin de préparer au mieux les établissements de santé français à faire face à un environnement de menaces sanitaires de plus en plus importantes, l’État a renforcé, ces 15 dernières années, son dispositif règlementaire, avec un corpus de lois extrêmement vaste et complexe, notamment en rendant obligatoire l’existence d’un plan blanc pour tous les établissements de santé, publics et privés.
La Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins (DHOS), quant à elle, a diffusé un guide sur l’élaboration du plan blanc . Ce plan souhaite intégrer, au sein de l’hôpital, une véritable culture de la gestion du risque et des crises et ainsi permettre aux acteurs de la santé d’acquérir des réflexes spécifiques.
Si l’on peut constater, avec l’avalanche de réglementation ces dernières années, que la mobilisation technique et les moyens de prévention mis en œuvre sont considérables, une véritable révolution des esprits et des comportements reste à faire. Afin de maîtriser au mieux ces situations exceptionnelles et d’assurer la continuité de l’activité, il est nécessaire de préparer les professionnels à y faire face. Le retour d’expérience des crises passées, l’analyse de l’environnement, l’anticipation sont autant d’atouts capables de faciliter une meilleure gestion des ressources et une issue moins traumatisante pour la population et le personnel soignant, lors de la survenue potentielle d’une nouvelle situation de crise.
La gestion des émotions individuelles et collectives deviendra peut-être de plus en plus déterminante, dans la gestion des situations decrise à l’hôpital. Nos systèmes cognitifs et émotionnels travaillent simultanément en parallèle. Mais la dépendance du premier sur le second est aujourd’hui avérée.
Dans un monde dominé par la raison, l’efficacité etla performance nous a appris à réprimer nos émotions. Dans l’urgence, pour ne pas laisser dépasser la moindre faille émotionnelle, nous privilégions le plus souvent des comportements de fuite, de lutte ou de repli face aux situations qui nous perturbent. L’émotion perturbe alors le jugement. La tendance naturelle est de chercher à retrouver nos habitudes comportementales qui, même inconfortables, nous sécurisent.
Ainsi, la gestion des émotions est encore largement sous-estimée dans les établissements de santé.
Pour McQueen (2000), elle est pourtant au cœur du travail même des professionnels de santé. Il convient de se préparer à apprivoiser les émotions individuelles et collectives. Dès l’apparition des premiers signaux, une méthode pourrait consister, à se mettre en position d’auto-observation au lieu de prendre l’événement de face. Cette prise de recul a un effet immédiat : elle ralentit le métabolisme et modifie le comportement.
Gérer son émotion et celle des autres, demande une prise de conscience des mécanismes fondamentaux de l’émotion, un apprentissage et un entraînement permanent. L’avantage de ces connaissances émotionnelles constitue un élément de développement aussi utile professionnellement que personnellement (McQueen, 2000).

Les approches théoriques de l’apprentissage

Les approches théoriques ou théories de l’apprentissage ne présentent pas, spécifiquement, une vision de l’apprentissage en situation de crise. Néanmoins, elles nous fournissent le cadre théorique et conceptuel qui nous permet de mieux comprendre les processus d’apprentissage en général. Ce qui nous amènera, par la suite, à intégrer ces processus dans le contexte particulier des situations de crise à l’hôpital, que je me propose d’analyser.
Un grand nombre d’auteurs ont contribué à la formation du corpus théorique que nous appelons aujourd’hui les théories de l’apprentissage. Je propose, dans ce chapitre, une analyse des idées proposées par les principaux auteurs.Parmi la grande diversité des approches, une catégorisation semble nécessaire, étant donné queles auteurs partagent fréquemment des références ou bases de réflexion communes.
Kingsley et Gary (1957) proposent de regrouper les différents auteurs en deux grandes catégories : (1) les auteurs qui travaillent sur le stimulus-réaction et (2) les théories du champ. Taba (1962) adhère à cette catégorisation mais la nomme différemment : (1) les théories de l’associativisme et du behaviorisme et (2) les théories organiques, du champ et le gestaltisme. Mcdonald (1964) fait une catégorisation plus large en regroupant les diverses approches en6 grandes catégories : (1) la recapitalisation ; (2) le conditionalisme ; (3) le pragmatisme ; (4) le gestaltisme et la théorie du champ ; (5) la psychologie dynamique ; (6) le fonctionnalisme. Hilgard et Bower (1966) avancent une catégorisation encore plus large en classant les différents auteurs en 11 courants : (1) le conditionnement classique de Pavlov ; (2) le connectionisme de Thorndyke ; (3) le conditionnement contigu de Guthrie ; (4) le conditionnement opérant de Skinner ; (5) la théorie du comportement systématique de Hull ; (6) l’apprentissage sémiotique de Tolman ; le gestaltisme ; (8) la psychodynamique de Freud ; (9) le fonctionnalisme ; (10) la théorie de l’apprentissage mathématique et (11) les modèles de traitement de l’information.
Reese et Overton (1970) reviennentsur un regroupement plus restreint considérant seulement deux grandes typologies de modèles (1) les modèles mécaniques et (2) les modèles organiques. Gage (1972), pour sa part, distingue 3 grandes familles dethéories : (1) les théories du conditionnement ; (2) les théories du modelage et (3) les théories cognitives.
Pour Knowles (1990) on devrait classer les principaux travaux théoriques en deux grands types mais dans une optique différente : (1) les théoriciens puristes, c’est-à-dire, les travaux des auteurs qui ont tendance à être dogmatistes et argumentatifs et (2) les travaux des interprètes, c’est-à-dire, ceux des auteurs qui cherchent à réconcilier les idées.
J’ai fait le choix de classer les principaux travaux théoriques en5 grandes catégories : (1) les approches centrées sur les conditionnements ; (2) les approches centrées sur l’analyse des processus d’apprentissage ; (3) les approches centrées sur la personne ; (4) les approches centrées sur le fonctionnement des groupes et (5) les approches fondées sur les sciences de l’information. Ce chapitre présente une revue de l’ensemble de ces travaux.

Les approches centrées sur les conditionnements

L’approche behavioriste ou comportementale

Pavlov (1902) est le premier auteur à analyser le phénomène du conditionnement. Ildécouvre qu’un signal sonore ou lumineux, dans un premier temps, associé à la nourriture puis, dans un deuxième temps, envoyé seul, provoque le même effet de salivation et de désir de manger que la seule présentation de cette nourriture. C’est sa découvertela plus connue qui fut à la base de nombreuses études sur les différents types de conditionnement. En partant des expériences de Pavlov, il a été possible de montrer l’importance de la répétition, dela punition et de la récompense en pédagogie. Watson (1913), s’inspirant des travaux de Pavlov, crée ainsi le courant behavioriste ou comportemental avec son article « Psychology as the Behaviorist Views it».
C’est toutefois Thorndyke (1928) qui le premier a effectué des travaux appliqués sur l’apprentissage comportemental. Sa « loi de l’effet » résume l’essentiel de sa pensée : « les comportements qui se fixent, sont les comportements qui permettent de réussir ce que l’on souhaite, et qui sont associés à une reconnaissance de réussite par les autres ». Pour Thorndyke (1928), la solidité de l’apprentissage dépend de la durée et de la fréquence de la satisfaction, que la réponse procure. Il a ainsi été le premier à en tirer les conclusions pour le domaine de la pédagogie et de l’éducation.
Il formule aussi ce qu’il a été convenu d’appeler la technique « des essais etdes erreurs », qui sera reprise dans la méthode pédagogique de la découverte. Il met ses cobayes dans des situations où ils doivent résoudre par eux-mêmes des problèmes, et trouver le comportement adapté à la solution. Il découvre que la bonne réponse trouvée une fois, va se fixer peu à peu et se perfectionner par des séries d’échecs et de réussites. La bonne réponse, se précise en éliminant les erreurs commises par hasard. Il n’y a pas de punition, comme dans Pavlov, mais simplement la satisfaction de réussir et l’inconvénient de ne pas trouver la solution. Thorndyke (1928) a ainsi mis en évidence l’importance de la pédagogie de l’erreur.
Skinner (1968) à la différence de Thorndyke, affirme que l’erreur est nocive d’un point de vue pédagogique car l’erreur risque de sefixer. Il faut éviter l’erreur en programmant la réussite. Skinner (1968) n’est pas pour une pédagogie de la découverte, mais pour une pédagogie programmée. Cet
auteur avance donc l’idée d’apprentissage sans erreurs. Ce n’est pas plus le stimulus déclencheur du comportement qui retient l’attention mais les conséquences qui encouragent ou découragent sa reproduction. L’apprentissage n’est plus conçu comme une réponse directe du stimulus, mais bien comme la stabilisation de cette réponse. Son approchese veut positive. Pour lui, le comportement et l’environnement sont explorés et décomposés en parties : modules, items. Ces comportements peuvent subir des modifications grâce à de nouveaux stimuli. Les comportements seront dès lors différents. Skinner (1968) affirme que tous les comportements prévus doivent être envisagés par l’enseignant afin qu’il puisse prévoir les stimuli à produire pour obtenir des réponses correspondant aux attentes.
Au final, pour les auteurs de l’école behavioriste, enseigner c’est créer des nouveaux conditionnements en utilisant les conditions existantes, ce qui est particulièrement vrai quand il s’agit de former des adultes. Plus nous avançons en âge, plus nos conditionnements se multiplient,
souvent de manière contradictoire selon les circonstances. Et le formateur en formation d’adultes va travailler sur des conditionnements variés. Il va conforter certaines façons de penser et d’agir, mais il va aussi les remettre en cause et en apporter de nouvelles. Une formation réussie se termine par l’assurance pour les apprenants de repartir avec les moyens de mieux travailler, et avoir des comportements plus efficaces. Ils ont besoin de repartir avec des confirmations, des améliorations ou des changements vis-à-vis de leurs anciennes façons de travailler. Leur système de conditionnement a bougé.

L’apport des neurosciences

Les découvertes sur le fonctionnement du cerveau, des années 50 et 60 ont apporté une contribution significative aux théories behavioristes de l’apprentissage. Puisque chaque formateur, chaque formé communique avec les autres grâce à son système nerveux. Tout message pédagogique, toute acquisition, tout apprentissage, passe obligatoirement par le système nerveux c’est-à-dire le cerveau.
Ainsi, il est important de connaitre ce que les neurosciences peuvent apporter, par une meilleure connaissance du fonctionnement du cerveau.
Ces découvertes ont apportés les preuves de l’asymétrie de la spécialisation des deux hémisphères, gauche et droit, en découvrant que parmi les deux centres de fonctionnement du langage, nous parlons avec l’hémisphère gauche. Ces connaissance sont été à l’origine de la survalorisation de l’hémisphère gauche, considéré jusqu’aux expériences de Sperry (1961) comme l’hémisphère dominant.
Depuis les expériences de Sperry (1961), qui a pu travailler sur des cerveaux dédoublés, les rôles respectifs des deux hémisphères sont mieux connus. Les deux hémisphères sont complémentaires et ont besoin l’un de l’autre pour travailler efficacement. Chacun des hémisphères présente des spécificités qui permettent la prise en charge de tâches privilégiées. Le cerveau dit reptilien est « coiffé » d’une structure qui renforce son action, et commande surtout nos émotions : le cerveau Limbique. Celui-ci est à l’origine des comportements dictés par les affects, tels que le blocage et les motivations. Un nouveau cerveau le néocortex ou cortical est venu coiffer les structures anciennes. Il est capable de refouler les instincts et les pulsions mais il est instable, fragile, en un mot, imprévisible. Il peut créerl’ordre ou le désordre.
Le cerveau humain serait donc composé de trois couches successives,d’âges très différents dans l’histoire de l’évolution, la plus ancienne étant profondément enfouie sous les deux autres. Ces trois cerveaux sont en communication permanente, mais ils disposent d’une certaine indépendance.
Chacun commande des conditions spécifiques. Leur collaboration n’est pas toujours parfaite et leur coordination manque parfois d’efficacité et de cohérence.
Le cerveau « est notre machine à apprendre », il traite les informations données par l’environnement et nous dicte une réponse appropriée. Il dépense beaucoup d’énergie pour traiter toute information nouvelle, car il lui faut alors s’adapter et trouver la bonne réponse. Il dépense une si grande quantité pour faire face à la nouveauté qu’il serait en surchauffe s’il lui fallait réinventer sans cesse. C’est pourquoi l’être vivant se construit d’automatismes, qui permettent au cortex de se préserver pour gérer l’imprévisible. L’acte automatique est plus rapide, moins fatigant et plus efficace qu’un acte qui demande à être repensé à chaque fois.

L’approche de la dissonance cognitive de Léon Festinger

Festinger (1957) a tiré sa théorie de la dissonance cognitive de l’observation participante sur des petits groupes. Il appelle élément cognitif tout ce qui peut devenir objet de connaissance chez l’individu : comportements, opinions,croyances sanctions et sensations de douleur. Il a montré que lorsque les faits sont en désaccord avec les croyances, il y a dissonance. A ce moment là, les personnes rétablissent alors la consonance en renforçant les croyances par des échanges avec les autres membres du groupe.
Cet auteur considère que la dissonance cognitive,constitue pour l’individu un état difficile à supporter. C’est pourquoi il cherche à réduire cette dissonance. Cette théorie énonce que les chocs entre deux cognitions, sont la force motrice de toute les modifications de nos opinions et de nos jugements. Nous cherchons à atténuer ces conflits par peur de devoir modifier nos croyances.
La dissonance cognitive, peut être une source de changement et d’amélioration en formation. Les croyances, sont les cognitions consonantes qui conditionnent les attitudes. Les attitudes vont conditionner des comportements, qui si tout se passe bien, maintiennent les cognitions consonantes et les croyances qui à leur tour renforcent les attitudes.
Si cela ne se passe pas bien, ily a dissonance cognitive malaise, doute. Soit la personne va se persuader que ce n’est pas l’excès de rapidité qui est la cause, mais de la mauvaise volonté ou tout autre incident. Elle rétablira sa consonance cognitive, soit elle remettra en cause ses croyances grâce à la dissonance cognitive et changera d’attitude et de comportements par conséquent.
Cette pratique pédagogique, est basée sur la notion d’obstacles rencontrés pendant l’apprentissage.
Obstacles que l’enseignant pose afin que l’apprenant progresse étape par étape. En fait, ce modèle sous-tend que l’intelligence d’une personne n’évolue que par résolution de crises conflictuelles successives. Ce modèle s’intéresse donc à l’efficacité de l’obstacle dans l’apprentissage.
Les comportements, opinions et croyances du sujet social, sont des éléments cognitifs, c’est-à-dire, des objets de connaissance qui lui permettent d’établir un lien avec laréalité. Connaître les opinons de l’individu, sur le sujet traité aide à mieux enseigner. Une formation est naturellement un lieu où les consonances cognitives peuvent être remises en cause. Un formateur qui tient compte de ces phénomènes est plus efficace.
Le formateur au cours d’une simulation peut créer des dissonances cognitives chez l’apprenant pour l’aider à changer. Le formateur peut aussi utiliser les dissonances cognitives dans le groupe pour aider les participants à découvrir de nouveaux points de vue, et de nouveaux comportements à développer. Mais la dissonance cognitive peut être mal vécue par le sujet social. Le formateur doitalors en tenir compte et utiliser les échanges de groupe pour traiter des dissonances et ne pas les laisser croître.

L’approche des représentations cognitives de Serge Moscovici

L’une des notions les plus importantes pour la pédagogie, que la psychologie cognitive a mise en relief est le rôle décisif des représentations cognitives dans le processus d’apprentissage. Moscovici (1976) a montré comment chacun réinterprète les informations qui lui sont données en fonction de ses propres représentations.
Il existe 2 mécanismes qui expliquent la réinterprétation des informations dans l’opinion : (1) l’objectivation : les informations qui circulent vont faire l’objet d’untri en fonction des critères et des valeurs culturelles des individus. Elles sont détachées du champ scientifique auquel elles appartiennent. L’individu se les approprie à sa manière afin de les maîtriser et ; (2) l’ancrage : les individus intègrent les élémentscomposants une information dans ce qu’ils connaissent déjà pour pouvoir l’interpréter.
Pour comprendre ces éléments nouveaux, il faut faire les liens en les classant dans le familier. Ainsi les individus éliminent de leur cadre, ce qui n’y entre pas et créent des catégories délimitées afin de se protéger de cet extérieur nouveau donc menaçant. On simplifie, et on fait en sorte que l’information ne soit pas menaçante pour soi-même. La représentation est ainsi la grille de lecture que chacun pose sur son travail, son environnement pour tenter de le comprendre et de s’y adapter et donner ainsi un sens et une signification aux actions qu’il entreprend.
Le rôle du formateur consiste à inviter l’individu à amorcer un processus de changement, à laisser de coté ses anciennes représentations pour en adopter des nouvelles qui soient mieux adaptées. Pour ce faire il fera émerger les représentations actuelles de l’individu et choisira la meilleure stratégie pédagogique, pour transmettre ces informations qui entreront le plus souvent en conflit avec les idées qu’il possède déjà.
Si le formateur s’est donné les moyens de bien ancrer la nouvelle information transmise dans le présent, dans l’expérience de l’apprenant et dansson projet, il aura avec lui toutes les chances d’adopter une nouvelle représentation, une nouvelle idée,qui lui permettra de réaliser son projet d’apprentissage. Le formateur est très attentif aux représentations mentalesque l’individu peut se faire des enseignements proposés. Chaque personne enformation, par son expérience passée, se fait une idée des choses. Enseigner c’est passer d’une représentation à une autre.
Il est très utile de repérer les systèmes de représentations des adultes en formation et savoir si le contexte, la pédagogie, ou le contenu de la formation, risquent de remettre en cause ces représentations et donc de développer des résistances. Il est possible de faire adopter aux sujets sociaux de nouvelles représentations, en partant de leur expérience actuelle et d’ancrer la formation en lien avec leur projet personnel.

L’approche de l’apprenance de Philippe Carré

Dans son ouvrage : « L’apprenance : vers un nouveau rapport au savoir », Carré (2005) questionne le rapport des personnes au savoir, et invite à réformer la formation. Il propose de tester un schème conceptuel : l’« apprenance », définie comme un « ensemble de dispositions favorables à l’acte d’apprendre dans toutes les situations, qu’elles soient formelles ou non, expérientielles ou didactiques, autodirigées ou dirigées, intentionnelles ou fortuites » (Carré, 2005).
Penser apprenance, c’est penser autrement. Là où Carl Rogers définissait la notion de « client », on peut maintenant s’orienter vers une notion d’« apprenant ». On peut penser « acte d’apprendre » avant de penser « action de formation », ce qui engendre un renouvellement de la place du sujet social, de la conception des environnements, du rôle du management.
Les adultes se forment, avec ou sans aide. Ce qui implique de comprendre la motivation chez l’apprenant et les pratiques d’autoformation (Carré et al., 1997). Il s’agit de mobiliser les ressources puis les capabilités du sujet : « pouvoir d’être et defaire ». L’émergence des capabilités nécessite des facteurs de conversion individuels, sociaux et organisationnels (Fernagu Oudet, 2013). On s’oriente alors vers une « écologie de l’apprenance » (Carré, 2005). A ce sujet on peut constater le développement de nouvelles formes d’autoformation numérique, utilisés à l’école, au travail et dans la formation.
Les apprentissages informels occupent aujourd’hui une place prépondérante dans la formation tout au long de la vie, dans le cadre professionnel, l’économie sociale et l’espace de vie. Les besoins en compétences apparaissent comme une nécessité pour la formation des adultes. Un écart se creuse entre le niveau de qualification professionnelle attendu et le monde dela formation. Dans ce nouveau contexte, apparaissent les apprentissages dits « informels », générateurs de compétences. Carré et Muller (2009) parlent « d’iceberg des apprentissages dits informels ».
Avec les moyens numériques actuels favorisant l’accès au savoir, on évolue vers plus d’autonomie et un travail collaboratif. La question de ces apprentissages buissonniers apparaît comme « un continent inexploré, aux contours encore flous car prochede notions apparentéscomme l’apprentissage expérientiel, quotidien, en situation de travail, voire de l’autoformation » (Cristol et Muller, 2013).
Pour Pain (1990), il y a trois caractéristiques de l’apprentissage dit « informel » : (1) il est fondé sur l’expérience, (2) situé dans un contexte précis, et (3) basé sur des situations authentiques. Selon Carré et Charbonnier (2003), les apprentissages professionnels informels sont définis comme « tout phénomène d’acquisition et/ou de modification durable de savoirs (déclaratifs, procéduraux ou comportementaux) produits en dehors des périodesexplicitement consacrées par le sujet aux actions de formation institués, et susceptibles d’être investis dans l’activité professionnelle ». L’origine de ces apprentissages informels se trouve majoritairement dans « les dimensions relationnelles du travail et dans la confrontation aux aléas rationnels (initiation, panne, incident) ».
Muller (in Carré, 2013) propose trois types d’apprentissages professionnels informels : (1) volontaires et conscients : on parlera alors d’apprentissages intentionnels ; (2) involontaires et conscients : il s’agira alors d’apprentissages incidents ; (3) involontaires et inconscients : on les nommera apprentissages implicites. L’apprenant transforme de façon durable ses connaissances, habiletés ou attitudes à l’occasion d’expériences réalisées en dehors de tout environnement de formation. Ces apprentissages pourront prendre une forme intentionnelle, incidente ou implicite.
Différentes recherches mettent en valeur l’importance des apprentissages informels. Ces apprentissages sont difficilement quantifiables et peu évalués dans le milieu du travail. En France, plusieurs recherches à partir d’une méthodologie dite des « journaux de bord », montre la prépondérance des apprentissages informels. L’importance des situations d’intégration, de mobilité, de dysfonctionnement et entre autre d’autoformation a ainsi été mise en évidence.
Quatre modes spécifiques d’apprentissage ont émergé : (1) un mode « autodidactique » puisant son contenu dans les ressources matérielles, (2) un mode« relationnel » privilégiant les contacts humains pour apprendre, (3) un mode « expérientiel » centré sur laréflexivité lors d’expériences dans le travail, et (4) un mode « conventionnel », minoritaire : stages, conférences, cours (Carré, Portelli et Putot, 1994).
La dernière étude qualitative de Muller (in Carré, 2013), basée sur la méthode des journaux de bord en établissement de santé, montre que cette autoformation, spécifique à la culture hospitalière, est mobilisée en situation sociale avec une forte composante relationnelle. Les infirmières développent un savoir d’action qui se construit entre pairs dans une communauté de pratiques.
Ces interactions liées à un environnement en évolution permanente participent par le biais des compétences émergentes à la professionnalisation (Le Boterf, 2010). Les savoirs à mobiliser évoluent rapidement, le professionnel de santé se trouve engagée dans un processus d’autoformation.
Cet apprentissage autorégulé renforce le sentiment d’efficacité personnelle et favorise les apprentissages à venir.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION : PROBLEMATIQUE ET QUESTIONEMENT
I. CADRE CONCEPTUEL
1. Le concept de crise
2. Les situations de crise à l’hôpital : état actuel des débats
3. Les approches théoriques de l’apprentissage
3.1. Les approches centrées sur les conditionnements
3.2. Les approches centrées sur l’analyse des processus d’apprentissage
3.3. Les approches centrées sur la personne
3.4. Les approches centrées sur le fonctionnement des groupes
3.5. Les approches fondées sur les sciences de l’information
II. ENQUETE DE TERRAIN
4. Démarche méthodologique et contexte de l’étude
4.1. Méthodologie
4.2. Caractéristiques de la population étudiée
5. Recueil de données
5.1. Cartographie des situations de crise recensées
5.1.1. Macro situations de crises
5.1.2. Micro situations de crises
5.2. Analyse des entretiens
5.2.1. Emergence de l’apprenance
5.2.2. Emergence des apprentissages émotionnels
5.2.3. Emergence d’une démarche auto-réflexive
6. Discussion et mise en perspective des observations sur le terrain
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *