Les procédures de soins invasives

Les procédures de soins invasives

INCIDENCE

La prévalence des BMR aux antibiotiques ne cesse d’augmenter ces dernières années et constitue un phénomène alarmant. Les BMR, de par la variété et la gravité des infections qu’elles provoquent posent un problème de santé à l’échelle mondiale. En dehors de la réduction de l’arsenal thérapeutique actuellement disponible, elles entraînent une augmentation de la morbidité, de la mortalité et des coûts d’hospitalisation ; d’où la nécessité de la surveillance épidémiologique périodique et de la mise en place des mesures prophylactiques sérieuses notamment dans les services à haut risque [2]. L’incidence moyenne de 8% retrouvée dans notre étude est inférieure à celle retrouvée au service de réanimation de l’hôpital militaire Mohamed V de Rabat qui est de 29,30% [2]. La diffusion des infections à BMR et leur prévalence sont très variables selon les pays, mais aussi au niveau régional et local [7].

Au niveau international, une étude effectuée à l’échelle des pays européens afin de comparer les données bactériologiques obtenues dans des services de soins intensifs en France, en Belgique, en Espagne, au Portugal et en Suède a clairement démontré que c’est en Suède que la fréquence d’isolement des bactéries à Gram négatif en réanimation est la plus faible, en Espagne et au Portugal qu’elle est la plus élevée, selon un gradient nord–sud dont il existe bien d’autres exemples. La France se trouve, géographiquement et bactériologiquement, dans une situation intermédiaire. Parmi ces bactéries à Gram négatif, le pourcentage de souches de sensibilité diminuée aux antibiotiques suit à peu près le même gradient nord–sud. Selon les données de 2004 rapportées par l’European Antimicrobial Resistance Surveillance System (EARS) chargé de la surveillance des résistances aux antibiotiques dans les pays européens, la résistance aux ATB suit un gradient Nord-Sud ; les taux de résistances les plus élevés étant observés dans les pays méditerranéens [7]. Aux États-Unis, environ 70 % de ces infections nosocomiales sont résistantes à au moins un antibiotique [7].

L’épidémiologie des résistances peut se révéler très différente d’une région à une autre à l’intérieur d’un même pays. Ceci a été très bien démontré dans une étude comparant Lima à Caracas. Il s’agit ici d’hôpitaux dans leur ensemble et non de services de réanimation. À Lima, 46 % des souches de E.coli isolées des urines étaient résistantes à l’association l’ampicilline/sulbactam, contre seulement 10% à Caracas. À l’inverse, 3 % des souches de Lima étaient résistantes à l’amikacine contre 9 % à Caracas. Pour P. aeruginosa , 100 % des 33 souches de Lima étaient résistantes à la carbénicilline, contre 35 % des 80 souches à Caracas (p < 0,0001). Les différences sont également très importantes pour la ciprofloxacine et la gentamicine [7]. A l’échelle hospitalière, le taux de résistance est beaucoup plus élevé dans les unités de réanimation où les patients les plus vulnérables sont regroupés et où l’utilisation des antibiotiques est plus élevée que dans les autres services [7]. Selon l’espèce bactérienne considérée, plusieurs études ont constaté que SARM, EBBLSE, A.baumanii et P.aeruginosa sont les souches multirésistantes les plus répandues et doivent faire l’objet d’une surveillance particulière [8]. S’agissant du SARM sa dissémination est largement rapportée dans le monde. Des études européennes situent toujours le SARM comme principal germe multirésistant malgré la baisse ces dernières années de son incidence [9,10]. Une étude publiée en 2009 par la direction générale de la santé Française comparant l’incidence du SARM en France par rapport à 9 pays comparables à la France a montré [11] : une forte endémie au Québec, Etats-Unis, Irlande et Royaume-Unis ; une régression sensible en Belgique ; une régression très forte au Danemark (de 30% à 1%) et une endémie très faible aux Pays-Bas et Nouvelle-Zélande. En Afrique, les données sur le SARM semblent plus hétérogènes selon les pays : si le nombre de souches de SAMR apparaît relativement élevé en Afrique noire (21 à 30 %), il est plus faible au Maghreb avec des pourcentages inférieurs à 10 % [12] ; comme c’est le cas dans notre service où la proportion de SARM parmi tous les GMR isolés, est de l’ordre de 5,3%, nous situe parmi les services de faible prévalence de SARM.

A.baumannii , pathogène opportuniste, émerge ces dernières décennies comme agent d’infections nosocomiales potentiellement épidémiques. L’incidence des infections à A.baumannii a considérablement augmentée durant les 20 dernières années, en particulier dans les unités de réanimation et de chirurgie, services où le risque de colonisation et d’infection est important, vu le terrain particulier des patients et la fréquence des manoeuvres invasives. C’est surtout en contexte nosocomial que ce germe est retrouvé. Il était responsable de 7 % des pneumonies nosocomiales en 2003 et de 1,3 % des bactériémies nosocomiales entre 1995 et 2002 aux États-unis, de 1,2 % des infections nosocomiales en France en 2001, avec une plus grande incidence en été (chaleur, humidité, air conditionné). Il est retrouvé dans 15,6 % des pneumonies nosocomiales à BGN et 30,5 % des infections urinaires nosocomiales en réanimation en France. Des épidémies ont été rapportées avec des souches multirésistantes dans tous les continents, notamment en France métropolitaine et en Polynésie française, avec possibilité de transfert d’un hôpital, voire d’un pays à l’autre. Une colonisation prolongée (8-42 mois) peut affecter 17 % des patients [13]. Dans notre étude, le germe multirésistant le plus incriminé était l’A.baumannii rapporté ces dernières années par plusieurs études nationales [2,14] comme principale bactérie multirésistante au niveau des services de réanimation, mais ce constat est différent de celui rapporté par des études européennes qui rapportent toujours le SARM comme principal GMR, en raison de l’efficacité des mesures de lutte contre l’infection nosocomiale. P. aeruginosa est un microorganisme fréquemment impliqué dans la survenue d’IN dans les services de réanimation, où il évolue par bouffées épidémiques sur un fond endémique [15].

En réanimation, les patients souvent immunodéprimés, sont habituellement intubés, ventilés, sondés et porteurs de cathéters périphériques et centraux ; le risque de contamination et d’infection est majeur [16]. L’étude un jour de l’European prévalence of infection in intensive care (EPIC) incluant 10038 patients dans 147 unités de soins intensifs dans 17 pays d’Europe a montré que 20,6% des patients étaient porteurs d’une infection nosocomiale, et que P.aeruginosa était en cause dans 28,7% des cas [17]. Pour les EBBLSE : La prévalence de production de BLSE parmi les entérobactéres isolées de patients admis en soins intensifs est très variable d’un pays à l’autre, et même d’un centre à l’autre. De nombreuses études ont montré que E. coli , K. pneumoniae , K. oxytoca , et P. mirabilis sont les espèces prédominantes [18].

ETIOPATHOGENIE

En France, selon le Comité Technique National des Infections Nosocomiales (1999) [19] « Les bactéries sont dites multirésistantes aux antibiotiques lorsque du fait de l’accumulation de résistances naturelles et acquises, elles ne sont plus sensibles qu’à un petit nombre d’antibiotiques habituellement actifs en thérapeutique ». L’acquisition d’une résistance résulte soit d’une mutation du génome bactérien, soit de l’acquisition d’un gène de résistance (plasmide ou transposon ou intégron). L’expression de la résistance peut être une inactivation enzymatique de l’antibiotique, une modification de cible de l’antibiotique, une diminution de la perméabilité de la bactérie pour l’antibiotique ou une extrusion de l’antibiotique hors de la bactérie (efflux). Plusieurs mécanismes de résistance peuvent coexister. Certains mécanismes de résistance sont spécifiques, concernant un antibiotique ou une famille d’antibiotiques (par exemple, les bêtalactamases) ; d’autres sont non spécifiques et peuvent toucher différentes classes d’antibiotiques (fréquents avec les phénomènes d’imperméabilité ou d’efflux). Au fur et à mesure de la découverte de nouveaux antibiotiques, les bactéries ont progressivement accumulé dans leur matériel génétique les gènes conduisant à la multirésistance [19,20]. Ces BMR sont plus fréquemment rencontrées en réanimation en raison de la pression de sélection qui y règne et de la proximité des patients porteurs de telles bactéries. Selon les « 100 recommandations » du Comité Technique National des Infections Nosocomiales [21, 22, 23], sont considérées comme BMR et doivent faire l’objet d’une surveillance, les souches bactériennes suivantes :

Rôle des antibiotiques dans l’émergence des germes multirésistants Il est actuellement établi que l’utilisation des antibiotiques représente le facteur de risque le plus important dans le développement des résistances bactériennes [36,37]. Le recours à des antibiotiques surtout en réanimation entraîne une pression de sélection responsable de l’émergence des BMR [36, 38, 39, 40]. Ceci est d’autant plus marquée que le nombre des patients traités est important et que la durée de l’antibiothérapie est longue [36, 41]. Dès 1989, une étude avait démontré une corrélation directe entre la consommation des β- lactamines et l’émergence de Klebsiella pneumoniae résistante aux C3G [42,43]. De même un parallélisme a été montré entre la consommation de ceftazidime et la fréquence des résistances [42, 44]. Les données épidémiologiques de l’hôpital Claude Bernard ont montré dès les années 1980 que l’utilisation de péfloxacine était responsable de l’émergence rapide de souches résistantes y compris les SARM [42]. Pedersen et al. [45,46] ont étudié 1717 épisodes de bactériémies communautaires colligées entre 1992 et 1996 dans un centre hospitalier Danois.

Pour la plupart des germes responsables, il existait une relation nette entre un usage antérieur d’antibiotiques au cours des mois précédents, la bactériémie et le profil de résistance du germe causal. Ainsi, pour E.coli par exemple, une prescription d’antibiotiques au cours des 30 jours précédents la bactériémie était associée à 2 à 6 fois plus de résistance du germe à l’ampicilline qu’en l’absence d’antibiothérapie antérieure. De même, une prescription datant de trois à six mois avant la bactériémie multipliait le risque de résistance d’E.coli à l’ampicilline par 1,5. Harbarth et al. [46,47] ont souligné à partir de 354 patients admis pendant cinq ans dans un centre hospitalier Américain qu’en cas d’infection nosocomiale, une exposition antérieure aux fluoroquinolones, aux céphalosporines de troisième génération, à l’ampicilline-sulbactam ou à l’imipénème était un facteur de risque de résistance du germe causal aux antibiotiques initialement déjà prescrits.

Nseir et al. [46,48] ont démontré la présence d’une relation étroite entre la nature et la durée de l’antibiothérapie et l’émergence de GMR. Dans un collectif de 239 patients ayant séjourné plus de 48 heures en réanimation, ils ont identifié 77(32%) patients ayant développé soit une colonisation, soit une infection liée à un germe multirésistant. En analyse multivariée, les facteurs indépendants associés à ces germes résistants étaient l’utilisation des fluoroquinolones (OR=3,3 ; p< 0,001) et la durée du traitement antibiotique (OR=1,1 par jour de traitement ; p<0,001). Plusieurs études ont montré que l’utilisation des fluoroquinolones est un facteur de risque d’apparition des résistances chez les BGN [49,50,51] ; de colonisation et d’infection à BGN non fermentants [48,49,52,53,54,55] ; et d’émergence de SARM [48,49,56,57,58]. La donnée constante, commune à toutes ces études, est la suivante : l’utilisation d’un ATB pendant plus de 24 heures dans les jours qui précèdent l’épisode infectieux favorise l’émergence des bactéries résistantes non seulement à cet ATB mais aussi à d’autres molécules. C’est la spirale de la résistance. Ainsi l’amélioration de l’usage des ATB est un élément indispensable au contrôle de l’émergence des BMR.

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Table des matières

INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODES
I. Matériel d’étude
1. Présentation de l’étude
2. Critères d’inclusion
3. Critères d’exclusion
II. Méthodes d’étude
RESULTATS
I. Incidence
II. Données démographiques
1. L’âge
2. Le sexe
3. Le motif d’hospitalisation
4. L’état de santé antérieur
5. Les maladies antérieures recherchées
6. Le service d’origine
7. Les scores de gravité
III. Les procédures de soins invasives
IV. Les paramètres clinici-biologiques et le retentissement de l’infection à GMR
V. Les paramètres bactériologiques
1. La répartition des BMR en fonction du site infectieux
2. Répartition des BMR en fonction des sites prélevés
3. Profil bactériologique
3.1. Profil bactériologique global
3.2. Les antibiotiques utilisés
3.3. Profil de sensibilité des germes isolés
VI. La prise d’antibiothérapie préalable
VII. Délai
1. Entre admission et premier prélèvement à visée diagnostiquepositif
2. Entre VM et infection à GMR
3. Entre ATB initiale et infection à GMR
VIII. Données thérapeutiques
IX. Evolution
1. La durée de séjour
2. Mortalité
DISCUSSION
I. Incidence
II. Etiopathogénie
1. Microorganismes en cause
1.1. Cocci Gram positifs
1.2. Bactéries Gram négatifs
2. Réservoirs et modes de transmission
Les infections à germes multirésistants en réanimation
3. Rôle des antibiotiques dans l’émergence des GMR
III. Facteurs de risque des infections à GMR
IV. Les différents sites d’infection
1. pneumonie nosocomiale à GMR
1.1. Epidémiologie
1.2. Facteurs de risque
1.3. Profil bactériologique de résistance
2. Infections urinaires nosocomiale à GMR
2.1. Epidémiologie
2.2. Facteurs de risque
2.3. Profil bactériologique de résisistance
3. Bactériémies nosocomiale à GMR
3.1. Epidémiologie
3.2. Facteurs de risque
3.3. Profil bactériologique de résistance
4. Infection nosocomiale du site opératoire à GMR
4.1. Epidémiologie
4.2. Facteurs de risque
4.3. Profil bactériologique de résistance
5. Infections nosocomiales à GMR liées aux cathéters
5.1. Epidémiologie
5.2. Facteurs de risque
5.3. Profil bactériologique de résistance
V. Profil de résistance des GMR aux ATB
1. SARM
2. Entérobactéries productrices de bêtalactamases
2.1. E.coli
2.2. Klebsiella pneumoniae
3.A.baumannii
4.P.aeruginosa
VI. Traitement
VII. Evolution
1. Durée de séjour
2. Mortalité
VIII. Prévention
1. Prévention de la transmission croisée
1.1. L’identification des patients porteurs de BMR
1.2. Isolement géographique
1.3. Isolement technique
1.4. La chimiodécontamination
2. Bon usage des antibiotiques
2.1. Recommandations d’utilisation des antibiotiques
Les infections à germes multirésistants en réanimation
2.2. Stratégies d’utilisation des antibiotiques en réanimation
3. Evaluation et surveillance des stratégies de prévention
3.1. Surveillance des BMR
3.2. Evaluation de la situation épidémiologique et des moyens disponibles
CONCLUSION
RESUMES
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE

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