LES PROCEDES DE TRANSFORMATION DU PIPER NIGRUM

LES PROCEDES DE TRANSFORMATION DU PIPER NIGRUM

Le poivre

Le poivre est une épice originaire de la côte ouest de l’Inde (côte de Malabar) dans l’état du Kerala. Au moyen âge, les épices, rares et recherchées étaient utilisées comme monnaie d’échange. C’est de là que vient l’expression « payer en espèces (épices) ». Le poivre, alors considéré comme le roi des épices, était autrefois échangé contre de l’or et des pierres précieuses (Schweiggert, Carle, et al., 2007). Si le poivre n’est plus considéré comme un produit de luxe, il reste aujourd’hui l’épice la plus populaire et la plus largement utilisée au monde pour ses qualités aromatiques et de conservateur ainsi que pour ses propriétés médicinales (Mamatha, et al., 2008). 463 000 tonnes de poivre ont été produites en 2014 dont près du tiers par le seul Vietnam, premier pays producteur devant l’Indonésie et l’Inde. Madagascar avec 7 100 tonnes produites la même année, arrive en 8ème position (figure 1).

L’ensemble de la production de 2014 représentait une valeur de plus de 950 millions de dollars (FAO Statistics Division, 2017). Le poivrier est une liane tropicale du genre Piper, commune en Asie (83 % de la production mondiale), en Amérique du Sud (11 %) et en Afrique (6 %). D’un point de vue botanique, sa classification est la suivante : Règne : Végétal ; Embranchement : Spermaphytes ; Sous-embranchement : Angiospermes ; Classe : Dicotylédones ; Sous-classe : Magnolides ; Ordre : Piperales ; Famille : Piperaceae ; Genre : Piper. Parmi les 700 espèces recensées du genre Piper (Sumathykutty, et al., 1999), le poivre noir ou Piper nigrum est la plus commune. Il s’agit d’un poivre domestiqué, comme l’est également le Piper cubeba, poivre à queue d’Indonésie. Cependant, la grande majorité des espèces demeure sauvage, c’est-à-dire non cultivée et souvent même non exploitée ou de façon marginale. Plusieurs espèces de poivres sauvages poussent dans les Iles du Sud-Ouest de l’Océan Indien. Si les poivres sauvages (Tsperifery) malgaches sont aujourd’hui exploités, le Piper borbonense, poivre à queue sauvage réunionnais ne l’est pas ; seules ses feuilles sont parfois utilisées en pharmacopée alors que ses fruits ne sont pas connus et très peu consommés. Le poivre est principalement consommé et apprécié pour ses vertus culinaires, c’està- dire sa capacité à rehausser le goût et l’arôme des plats (Dhas, et al., 2003; Schweiggert, Carle, et al., 2007). Il est également connu et utilisé pour ses propriétés fonctionnelles antimicrobiennes et anti-oxydantes (Nisha, et al., 2009; Suresh, et al., 2007).

La qualité du poivre

La qualité est définie par la norme ISO 9000 (International Standard Organization, 2015) de la façon suivante : « aptitude d’un ensemble de caractéristiques intrinsèques d’un objet à satisfaire des exigences ». Ces exigences peuvent être implicites ou explicites. Parmi les exigences explicites, les exigences règlementaires sont des exigences d’application obligatoire ; il y en a peu pour le poivre. Le règlement CE 2073/2005 (Commission of the European Communities, 2005) donne des exigences très générales sur les critères microbiologiques applicables aux denrées alimentaires ; le poivre doit notamment être exempt de salmonelles. Il existe en revanche quelques exigences concernant les teneurs maximales en mycotoxines. Ainsi le règlement CE 1881/2006 (Commission of the European Communities, 2006) limite la teneur en aflatoxines totales à 10 ppb et en aflatoxines B1 à 5 ppb tandis que le règlement CE 105/2010 (Commission of the European Communities, 2010) limite la teneur en ochratoxines A à 15 ppb. Plusieurs organismes – l’European Spice Association, la Commission du Codex, Alimentarius, l’International Pepper Community, l’United States Département of Agriculture, l’American Spice Trade Association ou encore l’International Standard Organization, ont établi des normes pour le Piper nigrum.

Ces normes fournissent des spécifications sanitaires, sensorielles et chimiques. Bien que non règlementaires et d’application volontaire, ces normes sont pourtant souvent imposés lors des transactions commerciales. Les spécifications qui y sont données concernant la qualité sanitaire : corps étrangers, teneurs maximum autorisées pour les bactéries pathogènes (Salmonella et E. Coli) et les mycotoxines (aflatoxines et ochratoxines) ainsi que la qualité sensorielle sont souvent incomplètes, subjectives et parfois divergentes. Néanmoins trois référentiels (European Spice Association, 2011; International Pepper Community, 2015; International Standard Organization, 1998) donnent pour le poivre noir, des caractéristiques chimiques précises et assez homogènes ; elles sont reportées dans le tableau 2.

L’arôme : huile essentielle et composés d’arôme

L’arôme et l’odeur du poivre sont en grande partie conférés par l’huile essentielle. Par définition, une huile essentielle est le liquide concentré et hydrophobe des composés volatils d’une plante obtenu par entraînement à la vapeur d’eau. Dans le cas particulier des agrumes l’huile essentielle est obtenue par expression (à froid) tandis que des méthodes plus couteuses telles que l’extraction au CO2 supercritique peuvent être employées pour des produits à haute valeur ajoutée. Pour Sumathykutty, et al. (1999), dans la mesure où les teneurs (par exemple 1,6 % dans Piper attenuatum et 14,5 % dans Piper cubeba) et les compositions varient significativement d’une espèce à l’autre, l’étude des huiles essentielles peut être considérée comme un outil de caractérisation taxonomique des différents poivres. Pour Jirovetz, et al. (2002), le limonène, le β-pinène, l’α-phellandrène, le delta-carène, l’asaricin et l’élimicine confèrent au poivre noir son arôme caractéristique. Pour Jagella, et al. (1999), l’α- pinène, l’α-phellandrène, le myrcène, et le limonène sont les composés aromatiques clefs du Piper nigrum. La composition de l’huile essentielle est également un critère permettant de juger de la qualité des poivres. Ainsi, pour Schulz, et al. (2005) un arôme de poivre optimal est obtenu si la teneur en monoterpènes (en excluant α et β-pinène) est élevée alors que dans le même temps la teneur en pinènes est faible.

Évolution des polyphénols

Le brunissement enzymatique, largement décrit dans la littérature scientifique, consiste en une oxydation enzymatique des composés polyphénoliques par les phénolases (polyphénoloxydases et peroxydases) en quinones très réactives qui se polymérisent ensuite pour donner, fréquemment, des composés bruns (Guyot S., 2014). En plus des concentrations en enzymes et en phénols, le pH, l’activité de l’eau, la concentration en éléments minéraux tels que fer ou cuivre ainsi que temps et température influencent la vitesse de réaction. Or, les barèmes de traitement thermique (temps et températures) appliqués varient considérablement selon les sources : de 2 min à 82°C (Ravindran, 2000) à 10 min à 100°C (Schweiggert, Mix, et al., 2005).

On comprend donc que le blanchiment pourra, selon les cas, favoriser la réaction de brunissement enzymatique ou la limiter. En effet, selon Dhas (2003), un blanchiment modéré permettrait l’apparition d’un brunissement uniforme en favorisant (par la mise en contact enzyme – substrat) l’oxydation des phénols par la phénolase alors qu’un blanchiment plus intense désactiverait au contraire les enzymes impliqués limitant du même coup le brunissement du poivre. De même, selon Mangalakumari (1983), la catalyse non observée à température ambiante, serait optimisée vers 75 °C et inactivée à une température de 100 °C pendant quelques minutes. De son côté, Ravindran (2000), observe le même noircissement brillant et uniforme sur le poivre, quels que soient les barèmes de blanchiment appliqués : 2,5 min à 80 °C ou 100 °C. Gu (2013) suggère que le brunissement ne serait pas uniquement d’origine enzymatique. Il pourrait également provenir d’une oxydation purement chimique des polyphénols (Renard C., 2014) ou de réactions de Maillard (Horvathova, et al., 2007).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1. LE POIVRE
1.1.1. Généralités
1.1.2. Anatomie et structure du grain de poivre (Piper nigrum)
1.1.3. Composition du grain de poivre et évolution au cours de la maturité
1.2. LES PROCEDES DE TRANSFORMATION DU PIPER NIGRUM
1.2.1. Principales étapes mise en oeuvre
1.2.1.1. Récolte
1.2.1.2. Egrappage
1.2.1.3. Séchage
1.2.1.4. Nettoyage / Tri
1.2.1.5. Conditionnement et stockage
1.2.2. Quelques étapes spécifiques
1.2.2.1. Le décorticage
1.2.2.2. La décontamination
1.2.2.3. Le blanchiment
1.3. LA QUALITE DU POIVRE
1.3.1. Définitions, normes et règlementation
1.3.2. Déterminants de la qualité et composés d’intérêts
1.3.2.1. Le piquant : la pipérine et les composés analogues
1.3.2.2. L’arôme : huile essentielle et composés d’arôme
1.3.2.3. La couleur : composés et mécanismes impliqués
1.3.2.3.1. Evolution des caroténoïdes
1.3.2.3.2. Évolution des polyphénols
1.3.2.3.3. Réactions de Maillard
1.3.3. Facteurs influençant la qualité du poivre
1.4. CONCLUSION DE L’ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE ET OBJECTIFS DE LA THESE
MATERIEL ET METHODES
2.1. MATIERE PREMIERE
2.1.1. Poivre collecté à Madagascar
2.1.2. Poivre collecté à la Réunion
2.2. CONSERVATION DES ECHANTILLONS ET PREPARATION DES LOTS
2.3. PROCEDES MIS EN OEUVRE
2.3.1. Blanchiment, étuvage et séchage
2.3.2. Cinétique de séchage
2.4. PREPARATION DES ECHANTILLONS
2.5. METHODES D’ANALYSES
2.5.1. Mesure de la masse des grains de poivre
2.5.2. Mesure de la longueur et du diamètre des grains de poivre
2.5.3. Mesure de la teneur en matière sèche
2.5.4. Mesure de la teneur en huile essentielle
2.5.5. Mesure de la teneur en eau
2.5.6. Mesure de la teneur en piperine
2.5.7. Identification et quantification des composés de l’huile essentielle
2.5.7.1. Séparation sur colonne polaire
2.5.7.2. Séparation sur colonne apolaire
2.5.7.3. Identification
2.5.7.4. Quantification sur colonne apolaire
2.5.8. Mesure de la teneur en sucres solubles et en amidon
2.5.9. Mesure de la teneur en glucose et en fructose
2.5.10. Mesure de la teneur en lipides
2.5.11. Mesure de la teneur en polyphénols
2.5.12. Mesure de la teneur en caroténoïdes
2.5.13. Mesure de la teneur en cellulose, hémicellulose et lignine
2.5.14. Mesure de la teneur en acides aminés
2.5.15. Mesure de la teneur en composes minéraux
2.5.16. Mesure de la teneur en 5-Hydroxyméthylfurfural
2.5.17. Mesure des activités enzymatiques
2.5.18. Mesure de la couleur
2.6. TRAITEMENTS STATISTIQUES
RESULTATS
3.1. CHAPITRE 1. TRAITEMENTS POST RECOLTE DES POIVRES SAUVAGES A MADAGASCAR
3.1.1. Article paru
3.1.2. Synthèse du Chapitre 1 et perspectives
3.2. CHAPITRE 2. MORPHOLOGIE, ANATOMIE ET CARACTERISATION BIOCHIMIQUE DU PIPER BORBONENSE
3.2.1. Article soumis
3.2.2. Synthèse du Chapitre 2 et perspectives
3.3. CHAPITRE 3. IMPACT DU STADE DE MATURITE SUR LE PIQUANT, L’AROME ET LA COULEUR DU PIPER BORBONENSE
3.3.1. Article soumis
3.3.2. Synthèse du Chapitre 3 et perspectives
3.4. CHAPITRE 4. IMPACT DU BLANCHIMENT, DE L’ETUVAGE ET DU SECHAGE SUR LE PIQUANT, L’AROME ET LA COULEUR DU PIPER BORBONENSE
3.4.1. Article paru
3.4.2. Synthèse du Chapitre 4 et perspectives
3.5. CHAPITRE 5. ETUDE DES MECANISMES BIOCHIMIQUES IMPLIQUES DANS LE BRUNISSEMENT DU PIPER BORBONENSE AU COURS DU PROCEDE
3.5.1. Article en préparation
3.5.2. Synthèse du chapitre 5 et perspectives
DISCUSSION GENERALE
4.1. DEUX PROCEDES TRADITIONNELS MIS EN OEUVRE A MADAGASCAR
4.2. LE PIPER BORBONENSE, UN POIVRE ORIGINAL DONT LA QUALITE EST INFLUENCEE PAR LA MATURITE ET LES PROCEDES
4.2.1. La typicité du Piper borbonense et des poivres sauvages malgaches
4.2.2. Cueillir à maturité pour avoir le meilleur potentiel de qualité
4.2.3. Le procédé et ses impacts : bonne conservation du piquant et de l’arôme mais dégradation de la couleur
4.3. MECANISMES IMPLIQUES DANS LE BRUNISSEMENT DU PIPER BORBONENSE AU COURS DU PROCEDE
4.4. PROPOSITION D’ITINERAIRES DE TRANSFORMATION DURABLES POUR LES POIVRES DE MADAGASCAR ET DE LA REUNION
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
LISTE DES ARTICLES SCIENTIFIQUES
ANNEXES

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