LES PROBLEMES FONCIERS

Le foncier africain et ses spécificités

    Le problème relatif au foncier en Afrique noire a fait l‟objet de plusieurs théories explicatives. Le problème est souvent situé dans la confrontation ou l‟interaction entre une société traditionnelle et la législation moderne (IIED, 1999).10En fait, KOUASSIGAN GUY ADJETE dans L‟homme et la terre. Droits fonciers coutumiers et droit de propriété en Afrique occidentale montre l‟existence en Afrique noire d‟un système foncier complexe, variable suivant les régions et les ethnies mais qui reposait sur une conception négro africaine de la terre en prenant l‟exemple des Myènes au Gabon. En effet, le système foncier en Afrique noire particulièrement celui du Sénégal se fondait sur des valeurs traditionnelles et des pratiques coutumières. Dans cet ouvrage, l‟auteur aborde la question du régime foncier et montre que la terre n‟a pas la même signification selon les niveaux de développement et qu‟elle n‟est pas toujours perçue comme un capital foncier mais il a aussi des aspects religieux, techniques, juridiques ou économiques pouvant prédominer. D‟ailleurs, cette idée est partagée dans (LE ROY et al, 1995)11 en affirmant qu‟ « Il est fondamental, selon l’acception française d’un “ bien ”, d’évaluer ce dernier en termes d’argent. Or ce n’est pas le cas en Afrique, tout au moins pas généralement, étant donné que les choses ne sont pas toutes considérées comme des biens, étant tantôt considérées comme hors du domaine du commerce et tantôt comme transférables, quoique sans aliénation complète. En l’absence d’un contrôle intégral, la “ chose ” n’est pas, au sens strict, un “ bien ”. La terre n’est tout de même pas qu’une chose anonyme et interchangeable. Ce n’est pas seulement une richesse, mais aussi parfois “ une personne ” (au sens traditionnel) que l’on peut faire parler (comme les morts). Il s’agissait également (quelquefois, tout au moins) d’une divinité détenant des pouvoirs vitaux qu’il convient de traiter avec précaution. C’est dans cette optique que nous proposons d’utiliser le concept de “ patrimoine commun ” (KOUASSIGAN, 1966) va plus loin en soulignant le contact avec la civilisation européenne comme le résultat d‟une superposition de régimes fonciers très différents. L‟auteur essaye de faire une synthèse des droits fonciers traditionnels en Afrique occidentale. Le droit foncier est de caractère communautaire. Il se distingue du droit d‟usage qui est accordé à un ménage ou un individu. Il est également évoqué dans cet ouvrage la difficulté de faire une distinction entre le droit foncier et le droit de la famille auquel il est intimement lié. Le chef détenant une autorité générale ou uniquement sur la terre doit veiller au respect du principe de non inaliénabilité du sol. Ceci s‟explique par le caractère sacré que recouvre le sol mais aussi pour des raisons économiques ou sociales. Il n‟est pas possible d‟assimiler les droits fonciers traditionnels à des droits de propriété. Il est aussi question dans cet ouvrage un examen des modalités du passage d‟un droit foncier coutumier à un droit de propriété en soulignant que le développement des plantations tend à transformer le droit de culture à un droit de propriété. En effet, La propriété foncière était collective et inaliénable. Les familles exerçaient un droit d‟usage sur les terres qu‟elles transmettaient conformément au système du patriarcat. La terre considérée comme un patrimoine familial n‟était pas dit tout conçue comme une valeur monétaire. Il existait divers systèmes de transactions (prêt, location, métayage…) assortis de redevances ou de « cadeaux » qui permettaient aux familles non détentrices de terres et aux immigrants d‟accéder à la terre. La colonisation a introduit des changements importants dans le système foncier traditionnel, avec l‟instauration d‟un droit de propriété individuelle de la terre qui pouvait faire l‟objet de transactions. Le BRIS et al, (1982)12 dans son ouvrage intitulé Enjeux fonciers en Afrique Noire souligne les formes nationales de colonisation comme étant des facteurs influant dans la différenciation des mesures foncières avec la souplesse de l‟administration coloniale anglaise qui conforte les coutumes précoloniales par opposition aux français se réservant la possibilité d‟exproprier massivement ces communautés sous le couvert des « terres vacantes sans maitres ». Cet ouvrage réunissant plusieurs auteurs de disciplines différentes, évoque la problématique foncière en Afrique noire en montrant que le rapport foncier est inscrit dans une pratique sociétaire plus grande. De plus, les structures foncières mises en place durant la période coloniale et accompagnées par les pratiques capitalistes doivent faire l‟objet de cohabitation avec d‟autres formes organisationnelles. Il est aussi évoqué dans cet ouvrage les méfaits du mimétisme administratif transposant certaines politiques étrangères de l‟ancienne métropole en Afrique surtout dans le domaine de l‟urbanisme en niant les réalités sociales et culturelles qui prédominent et aussi de la centralité de l‟Etat sur les questions foncières. Nous pouvons retenir à travers cet ouvrage, que les enjeux du foncier dans les pays d‟Afrique noire peuvent se lire à la fois sur l‟organisation de la société, le renforcement du pouvoir étatique et la maitrise de l‟espace national. La question de la non-aliénabilité de la terre en Afrique est réfutée par Christian Lund dans son article,13 intitulé Régimes fonciers en Afrique. Remise en question des hypothèses de base où en citant certains auteurs comme Shipton et autres affirmant que « Les pratiques des populations peuvent néanmoins ébranler, contourner et neutraliser la législation et le droit coutumier. Cela n‟implique pas forcément que les populations recourent à des actions bien organisées et préparées, mais qu‟elles poursuivent leurs intérêts personnels au quotidien et négocient leur situation avec bon sens. C‟est ainsi que les terres prêtées, louées et promises peuvent devenir non échangeables ; les terres qui sont hypothéquées pour un prêt sont par voie de conséquence transférables ; et les “ gages sont parfois des ventes déguisées, lorsque ces dernières sont plus formellement interdites ” (Shipton, 1989) ». Cependant, le texte de Catherine Coquery VIDROVITCH dans « Enjeux fonciers en Afrique Noire » explique que la mise en gage est très différente de la vente de terres en ces termes « Dans une société rurale ignorant la circulation monétaire, la terre seule, en effet, fournit l’occasion de se procurer les ressources nécessaires : certes, la mise en gage s’est largement développée à l’époque coloniale en des termes monétaires (pour permettre de payer l’impôt (…) mais la transaction s’insérait dans le cadre même de la coutume respectée : on ne vendait pas alors la terre – probablement jamais – mais on l’engageait exactement de la même façon dont on mettait, pour la même raison, un individu en gage – fillette, adolescent ou jeune adulte: il s’agissait à proprement parler d’un échange de prestations – don et contre-don – qui liait les deux parties aussi longtemps qu’existaient entre elles cet engagement. Une différence majeure avec une vente à l’occidentale, ou même une hypothèque ou une rente, était l’absence de toute limitation de durée : l’opération n’est jamais forclose. Celui qui gage une terre conserve le droit de la récupérer, de même que ses descendants, du moins en principe. Il en conserve également l’initiative puisque le bénéficiaire du gage ne dispose pas, en revanche, du pouvoir d’exiger le remboursement de la dette contractée. Ainsi, le gageur et le gagé sont liés et sont appelés à le rester, le cas échéant, par-dessus les générations; on est loin du concept de vente, où le nouveau propriétaire n’a plus rien de commun avec l’ancien ; on retrouve bien, au contraire, la complexité et la durée des liens d’interdépendance personnelle. Les sociétés africaines rurales ne connaissaient pas la monétarisation, la seule valeur de la terre se limitait à la production agraire et les échanges étaient récurrents et se faisaient sous forme de troc.

Urbanisation

    L‟urbanisation est définie dans « l‟encyclopédie Larousse » comme étant un phénomène démographique se traduisant par une tendance à la concentration de la population dans les villes. Il s‟agit d‟un processus de transitions d‟une société rurale à une société plus urbaine. Elle est mesurée dans l‟augmentation de la proportion de la population vivant dans des établissements urbains (UNFPA, 2007). Cette définition montre que l‟explosion démographique est à la base du phénomène d‟urbanisation et se manifeste par une forte concentration de population dans les établissements humains au détriment du monde rural. Pour Brunet et al (1992), l‟urbanisation en plus d‟être un accroissement de la population avec différentes formes dont l‟étude demeure intéressant. A travers cette définition, on peut retenir que l‟étude de l‟urbanisation va au-delà de la forte concentration de la population en milieu urbain mais également une vue sur les différentes formes que présentent l‟urbanisation, présentant un caractère particulier d‟une région à une autre. Selon Lévy et Lussault (2003), cette urbanisation s‟accompagne aussi d‟une agglomération des activités. En effet, la concentration d‟activités du secondaire et du tertiaire demeure indispensable pour parler de ville. D‟ailleurs pour Wackermann (2005) la définisse comme “une transformation plus ou moins rapide du paysage rural en paysage urbain, processus entrainant de profondes mutations environnementales, structurelles et fonctionnelles”. C‟est dans cet ordre d‟idée que Georges et Verger explique l‟urbanisation à travers “le processus de développement des villes, en nombre d‟habitants, en extension territoriale, en termes aussi de mode de vie ; la concentration croissante de la population dans les villes elles-mêmes a marqué la principale forme de l‟urbanisation autrefois (densification, remplissage du bâti) au sens de l‟extension des espaces urbanisés “. Ces différentes définitions montrent que l‟urbanisation englobe plusieurs aspects de l‟occupation du sol et de la consommation d‟espace à savoir le développement de l‟habitat, la réalisation d‟infrastructures et d‟équipements et la mise en œuvre d‟activités. De plus, cette urbanisation ne se limite pas aujourd‟hui à la simple concentration de population dans les établissements urbains et des activités mais sa dimension d‟extension territoriale et ses différents effets sont plus qu‟importants d‟autant plus que l‟urbanisation dakaroise est plutôt marquée par son extension territoriale dans la périphérie engendrant d‟importants bouleversements sociale et spatiale.

Les causes des conflits

    Les conflits en général sont très récurrents dans les zones à forts enjeux fonciers. Et Diamniadio est une commune où diverses acteurs sont présents et s‟activent pour disposer de terre. Les raisons de ces conflits sont variées parmi lesquelles on peut retenir :
– Le double emploi : la commune est confrontée aux conflits liés à la vente d‟un terrain à plusieurs personnes. .
– Les désaffectations de la collectivité locale pour cause de mise en valeur sans préavis.
– Les expropriations faites par l‟Etat pour cause d‟utilité publique et dont les dédommagements posent souvent problèmes.
– Les erreurs administratives
– Les problèmes de limites sur les terrains
Le double emploi est la cause première des conflits observés dans la zone de Diamniadio. Ils sont le fait de personnes malintentionnées profitant de la pression foncière exercée dans cette pour vendre un terrain à plusieurs personnes. La deuxième cause de conflit est la désaffection de terres. Elle consiste à retirer l‟usage d‟une parcelle antérieurement affectée à une personne physique ou morale notamment quand celleci se fait sans préavis. En effet, la parcelle affectée doit nécessairement être mise en valeur, l‟absence de mise en valeur est une cause de désaffectation de la parcelle. Cependant, la loi ne dégage pas le niveau de mise en valeur nécessaire pour conserver le terrain. Les causes ci-après peuvent être à l‟origine de cette opération d‟après les articles 9, 11, 12 du décret 72-1288 relatif aux conditions d‟affectation et de désaffectation des terres du domaine national :
– A la demande de l‟affectataire ;
– L‟affectation prend fin de plein droit au décès de la personne physique ou à la dissolution du groupe affectataire ;
– Une absence ou insuffisance de la mise en valeur ou une inobservation répétée et grave des règles fixés en matière d‟utilisation des terres ;
– Cessation de mise en valeur personnelle des terres, ou avec l‟aide de sa famille ;
– Lorsque l‟intérêt général de la commune exige que ces terres reçoivent une autre affectation ;
– La révision générale des affectations est également possible, dans le cas où l‟évolution des conditions démographiques ou culturales l‟exige. Par vœu adopté à la majorité absolue des membres du conseil, celui-ci peut demander cette révision.
Les expropriations sont la troisième cause de conflit au niveau de Diamniadio. C‟est un droit qui relève de l‟Etat pour asseoir sa politique d‟aménagement du territoire. Cependant, il arrive qu‟une telle opération se heurte à une opposition radiale de population car étant un facteur de déséquilibre pour leur cadre de vie. Les autres causes de conflit sont le fait des erreurs administratives mais également celles concernant les limites de propriété sur le terrain.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE: CADRE THEORIQUE ET OPERATOIRE
CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE ET OPERATOIRE
I. Revue critique de la littérature
II. Problématique de recherche
1. Contexte
2. Justification
3. Objectifs
4. Hypothèses
III. Analyse conceptuelle
CHAPITRE II : METHODOLOGIE
I. La documentation
II. Le travail de terrain
1. L‟enquête qualitative
2. L‟enquête quantitative
DEUXIEME PARTIE: PRESENTATION DE LA COMMUNE DE DIAMNIADIO
CHAPITRE 1 : LES CARACTERISTISQUES PHYSIQUES ET HUMAINES DE DIAMNIADIO
I. Les caractéristiques physiques
A. Relief et Composition du Sol
B. Climat et Végétation
C. Hydrographie
D. Pluviométrie
11. Les caractéristiques humaines
1) L‟évolution administrative
2) L‟historique de peuplement
CHAPITRE II. UNE DIVERSITE DES ACTIVITES ECONOMIQUES
I. L‟Agriculture
II. L‟élevage
III. Le commerce
IV. L‟artisanat
V. Le transport
VI. L‟industrie
TROISIEME PARTIE ANALYSE DES RESULTATS
INTRODUCTION
CHAPITRE I: PRESSION DEMOGRAPHIQUE ET DYNAMIQUE D‟OCCUPATION DU SOL A DIAMNIADIO
I. COMPOSITION ET STRUCTURE DE LA POPULATION
1). Composition de la population
2). Structure de la population
II. Croissance démographique et pression foncière a Diamniadio
III. La rareté et la cherté de la ressource foncière
IV. Situation du foncier de Diamniadio
1. La loi relative au domaine national
2. La situation résidentielle des chefs de ménage
3. Titres de propriété et modes d‟acquisition
4. Niveau de lotissement
CHAPITRE II : L‟INSTABILITE DU MARCHE FONCIER ET LES ENJEUX SUR LES CONFLITS FONCIERS
I. L‟évolution du prix foncier dans la commune
II. Les conflits fonciers
1. Les causes des conflits
2. Les acteurs
3. Le règlement des conflits
CHAPITRE III: LE FONCIER AGRICOLE SOUS LA PRESSION D‟UNE URBANISATION GALOPANTE
I. Les exploitations agricoles
II. Les pertes de terres agricoles
CONCLUSION GENERALE
RECOMMANDATIONS
BIBLIOGRAPHIE

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