Les phases de dévelopement d’un médicament

Les phases de dévelopement d’un médicament

Historique et enjeux économiques

Avant le développement de la médecine moderne, les médicaments étaient principalement des remèdes à base de plantes ou de minéraux, utilisés pour soulager les symptômes dont souffraient les patients sans apporter nécessairement de solution pour traiter la maladie sous-jacente[1]. Les avancées en chimie au cours du XIXe siècle ont rendu possible l’identification, l’extraction et la purification des molécules actives présentes dans ces remèdes[1, 2, 3]. Les travaux de Pasteur et de ses successeurs ont aidé à identifier les causes des maladies (microbes, virus, parasites, champignons, déréglement de mécanismes biologiques…). Malgré cela, et jusqu’à la moitié du XXe siècle environ, les médicaments étaient découverts principalement par l’étude des substances thérapeutiques naturelles ou simplement par sérendipité[4]. Ainsi, c’est totalement par hasard que Fleming découvrit le premier antibiotique (la péniciline) en 1928[5]. Le processus de découverte des médicaments s’est ensuite progressivement rationnalisé. Le développement des chimiothèques et des méthodes de biologie moléculaire a rendu possible le criblage de plus en plus de composés chimiques sur des cellules vivantes[3]. L’essor de la génétique moléculaire au cours des années 70 a permis d’identifier plus rapidement les protéines à cibler et de les tester directement[2, 3]. Depuis la fin des années 80, le développement de la bioinformatique (génomique comme structurale) a également permis de mieux optimiser les composés (méthodes QSAR), puis de guider leur conception[2]. Au cours des années 90, la découverte de nombreuses molécules actives a été possible grâce à l’utilisation des techniques de criblage à haut débit. Dans le même temps, les conditions d’entrée des médicaments sur le marché se sont progressivement durcies pour assurer la sécurité des patients. Ainsi, malgré ces avancées, le coût de développement d’une nouvelle substance chimique (NCE : New chemical entity) a progressivement augmenté pour dépasser le milliard de dollars au cours des années 2000[6]. Le développement des médicaments candidats est également une entreprise risquée, puisque la plupart des projets sont arrêtés avant la fin des études cliniques, pour des raisons diverses (toxicité, manque d’efficacité, problème de brevet…)[7]. L’industrie pharmaceutique est constituée d’entreprises parmi les plus grosses du monde, ce qui leur permet d’avoir les moyens financiers nécessaires pour pouvoir développer en parallèle plusieurs médicaments candidats. Le milieu académique et les entreprises de plus petites tailles font néanmoins partie intégrante de cette industrie en relayant et apportant l’innovation nécessaire dans les premières phases de la conception d’un médicament. Les preuves de concepts développées dans ces petites entreprises sont généralement revendues aux « big pharma » pour réaliser les phases cliniques. Le nombre de nouvelles molécules mises sur le marché varie d’année en année, mais est relativement stable depuis les 20 dernières années[8], autour de 30 molécules par an pour le marché américain . L’augmentation quasi exponentielle du coût de développement d’un médicament[6, 9] reste toutefois problématique . Il est donc de plus en plus important de trouver de nouvelles voies de développement tout en essayant de diminuer les risques et les coûts de chaque étape, notamment au tout début d’un projet lorsque l’investissement est encore limité.

Le développement d’un médicament se déroule en plusieurs phases[10, 11]. La première phase, dite de découverte, est l’étude des mécanismes d’action liés à une maladie, et la détermination de molécules pour bloquer ces mécanismes. Elle se divise en plusieurs étapes : l’étude de la pathologie, la génération de touches (target-to-hit), la sélection de têtes de séries (hit-to-lead) et l’optimisation des têtes de séries  [11]. A la fin de cette phase, plusieurs dizaines ou centaines de molécules ont été sélectionnées et testées sur un modèle simple (tests biochimiques ou phénotypiques). Les molécules les plus prometteuses (ayant une grande affinité pour la cible ou une bonne efficacité contre l’infection) sont ensuites conduites en phase préclinique. La phase préclinique consiste à réaliser une première estimation de l’efficacité et de la toxicité des molécules à l’aide de modèles animaux.

Les molécules présentant des propriétés concluantes à l’issue de la phase préclinique passent en phase d’essais cliniques où la molécule est testée pour la première fois sur des volontaires humains[12, 13]. Les essais cliniques sont décomposés en 4 phases distinctes[12]. Durant la phase I, la molécule est administrée à un petit nombre de volontaires sains afin de tester sa toxicité et son évolution cinétique (cette phase peut être traitée différemment pour certains composés anticancéreux). Les molécules passant la phase II (non toxiques et aux propriétés cinétiques appropriées) sont testées sur un petit nombre de patients malades, afin de déterminer la plus petite dose efficace et d’estimer les effets secondaires éventuels à plusieurs doses. L’efficacité du nouveau médicament est évaluée en phase III dans une étude à grande ampleur impliquant de nombreux patients volontaires. La molécule testée est administrée à une partie des patients, tandis que l’autre partie est soumise à un traitement de référence ou à un placebo dans le cas où aucun traitement n’existe. Les essais la de phase III permettent de déterminer avec précision les doses et modes d’administration les plus efficaces et les risques associés au médicament. A la suite de ces essais, l’industriel peut demander une autorisation de mise sur le marché (AMM) aux autorités de sécurité du médicament. Il doit faire la preuve de l’efficacité et de l’absence de dangerosité du médicament[11]. Enfin, la phase IV correspond aux études post-commercialisation sur le long terme.

Le coût de développement varie d’un projet à un autre, mais augmente sensiblement au cours des différentes phases précliniques et cliniques . A chaque étape du projet, le médicament peut être jugé dangereux ou inefficace et le développement arrété[14], ce qui signifie généralement une perte conséquente pour l’industriel qui développe le projet[7]. Il est donc crucial de diminuer le taux de perte, et donc de diminuer le risque inhérent à chaque projet. Pour cela, un effort particulier doit être réalisé dès les phases d’étude du mécanisme et précliniques pour éviter de porter plus loin des projets voués à l’échec tout en restant innovant[15]. La multiplication des familles moléculaires est une voie de diminution du risque : on peut plus facilement s’affranchir d’une famille s’avérant posséder un inconvénient rédhibitoire s’il est possible de se rabattre sur une autre famille également prometteuse .

Durant ma thèse, je me suis intéressé au développement rationnel de médicaments basés sur de petite molécules chimiques ciblant une protéine. Je m’inscris exclusivement dans la phase de découverte, au niveau de l’étude du mécanisme et de la découverte des touches in silico. Mon but est de déterminer de nouvelles méthodes permettant de mieux tirer partie des modèles du fonctionnement de la  protéine cible afin de sélectionner des molécules plus pertinentes pour les phases de criblage et donc de multiplier le nombre de touches à coût constant.

La phase de découverte : définition d’une cible biologique

A la base même d’un projet de développement d’un médicament se trouve la pathologie. Le développement rationnel de médicaments implique de déterminer le mécanisme sous-jacent à la maladie : mécanisme d’infection d’un virus ou d’une bactérie, cible d’une toxine, voies déréglées par un cancer ou une maladie génétique. La première étape d’un projet consiste donc à déterminer ce mode de fonctionnement ainsi qu’un angle d’attaque potentiel pour traiter la pathologie.

Modélisation du mécanisme pathogénique 

L’établissement du mécanisme biologique fait intervenir de nombreuses méthodes issues de disciplines diverses. Dans le cadre d’agents infectieux, le séquençage et l’annotation du génome de l’agent pathogène permet d’avoir une première idée du rôle de certaines protéines, mais rend également possible la production des protéines du pathogène par génie génétique. Les études de localisation de l’expression des protéines (micropuce ADN, microscopie confocale, immunofluorescence, …), la détermination des interactions entre protéines (double hybride, spectrométrie de masse, …) et les méthodes de knockout ou d’extinction de gène permettent d’affiner le modèle de fonctionnement et de déterminer les gènes essentiels de la pathologie. Les protéines produites par ces gènes peuvent alors être étudiées en détail, ce qui fournit de nombreuses informations pouvant être utilisées pour la recherche d’effecteurs. Ces études peuvent être très longues et donner lieu à de multiples interprétations ; elles constituent la base de la recherche fondamentale en biologie.

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Table des matières

Introduction
1 Les phases de dévelopement d’un médicament
1.1 Historique et enjeux économiques
1.2 La phase de découverte : définition d’une cible biologique
1.2.1 Modélisation du mécanisme pathogénique
1.2.2 Etude structurale de la cible
1.2.3 Détermination d’un site orthostérique ou allostérique
1.3 Trouver et optimiser une « touche »
1.3.1 Criblage haut-débit
1.3.2 Criblage virtuel basé sur la structure de la cible
1.3.3 Criblage virtuel basé sur la structure du ligand
1.3.4 Optimisation d’une touche (hit-to-lead)
1.4 Phases précliniques, cliniques et autorisation de mise sur le marché
2 La recherche de nouvelles stratégies d’inhibition in silico
2.1 Principes physiques de l’association protéine-ligand
2.1.1 Thermodynamique de l’association protéine-ligand
2.1.2 Modèles dynamiques de l’association protéine-ligand
2.2 L’arrimage moléculaire (docking)
2.3 La dynamique moléculaire
2.3.1 Principe général de la dynamique moléculaire
2.3.2 Ensembles thermodynamiques, thermostats et barostats
2.3.3 Le champ de force
2.3.4 L’intégrateur et la génération des vitesses intitiales
2.3.5 Le solvant
2.3.6 Les logiciels de dynamique moléculaire
2.3.7 Les dérivés de la Dynamique Moléculaire
2.4 Calcul de chemins de transition
2.4.1 Intérêt, principe et méthodes de calcul de chemins de transition
2.4.2 L’approche POE (Path Optimization and Exploration)
2.5 Les cavités au sein des protéines
2.5.1 Intérêt de l’analyse des cavités
2.5.2 Détection des cavités
2.5.3 Implémentations et logiciels de détection des cavités
2.5.4 L’analyse dynamique des cavités
3 Détermination d’inhibiteurs du virus de la dengue : exemple et genèse de l’utilisation de la dynamique des cavités pour la conception de médicament
3.1 Pathologie, mode d’action du virus et stratégie d’inhibition
3.1.1 Pathologie et implications socioeconomiques
3.1.2 Mécanisme d’infection et stratégie d’inhibition
3.1.3 Particularités de la cible
3.2 Chemin de transition de la forme préfusion à la forme postfusion
3.3 Dynamique moléculaire et sélection des structures
3.4 Criblage et sélection des molécules
3.5 Tests préliminaires
4 Objectifs de la thèse
4.1 Proposition d’inhibiteurs potentiels pour différentes cibles
4.2 Développement d’outils d’analyse dynamique des cavités
4.2.1 Suivi des cavités
4.2.2 Analyse de la dynamique des cavités et sélection de conformations pour le criblage
4.2.3 Développement d’un logiciel pour l’automatisation des analyses des cavités au sein des protéines
Conclusion

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