Les outils des sages-femmes pour intervenir en cas de pleurs du nourrisson

Les réponses parentales aux pleurs

Comme décrit précédemment, les pleurs sont un outil puissant dans le processus de l’attachement. Ces pleurs activent le caregiving chez les parents. Ce caregiving parental complémente le système d’attachement de l’enfant. En effet, le caregiver veillerait à ce que l’enfant soit protégé et à ce qu’il puisse rester dans un état organisé. Ensemble, le caregiving et l’attachement forment une dyade d’auto-régulation qui permet à l’enfant de se développer sainement (Bekhechi et al., 2016). Le caregiving serait d’autant plus efficace lorsque le caregiver sait lire et comprendre les signaux émis par l’enfant, possède une volonté d’y répondre et emprunte finalement des stratégies adaptées. Une fois les pleurs taris, un sentiment de plaisir et de satisfaction récompenserait le caregiver. Or, si ce dernier n’y parvenait pas, il serait susceptible de ressentir de la colère, de la tristesse ou encore de l’anxiété (Bekhechi et al., 2016). Tereno & Guédeney (2016) expliquent que des facteurs externes peuvent entraver le caregiving. Le stress, par exemple, peut gêner la disponibilité parentale nécessaire à donner des réponses adéquates à l’enfant. Ceci, parce que chez ces personnes, leur système d’attachement, qui se trouve être en concurrence avec le système de caregiving, serait activé. Il serait important que le caregiver se protège d’abord lui-même avant d’être capable de protéger autrui.

Lors d’un développement harmonieux, l’enfant émet un signal pour faire part de ses besoins, il est entendu par le caregiver et voit ses besoins satisfaits. L’enfant change alors son comportement : il communique par un sourire ou par une baisse de tension corporelle avec le caregiver. Ce dernier voit ses actions récompensées par une réponse positive ce qui augmente son sentiment de compétence et le plaisir de procurer des soins. Il s’agit d’une spirale vertueuse qui permet au caregiver de prendre confiance en lui comme parent. A l’inverse, peu en importent les raisons, si le caregiver ne répond pas de manière adaptée aux signaux de l’enfant ou que ce dernier ne « récompense » pas les soins par un signe de son bien-être mais par des pleurs continus, le caregiver peut ressentir des sentiments négatifs, tels que frustration, colère et honte. Comme décrit antérieurement, de tels sentiments peuvent agir sur la capacité à donner des réponses sensibles aux besoins de l’enfant. Dans ce cas, il s’agirait d’un cercle vicieux qui démontre l’interdépendance des systèmes d’attachement de l’enfant et de caregiving du parent. Le système de caregiving parental est donc influencé par le type d’attachement de l’enfant, mais aussi par des facteurs environnementaux, tels que le stress vécu, la qualité de la relation conjugale, le bien-être socio-économique et les liens avec la famille élargie par exemple (Kobak & Mandelbaum, 2003 ; Cowan & Pape Cowan, 2009 ; Bekhechi et al., 2016). La naissance de la relation parent-enfant est par conséquent non seulement le fruit d’interactions entre les acteurs principaux, mais s’inscrit aussi dans un contexte complexe qu’il faut prendre en considération.

La dimension éthique

Pour ce présent travail, nous avons essayé de respecter les idées et arguments des auteurs. Il est toutefois possible que nous ayons mal interprété leurs propos, et ceci contre notre gré. Nous sommes conscientes que cette revue de littérature n’est pas exhaustive. Elle permet seulement une vision limitée de la question de recherche et nos conclusions sont, de ce fait, tout à fait discutables. Lors du choix des articles, il n’y avait pas de souci d’éthique soulevé, car l’intervention, conçue dans un but de bienfaisance, ne posait pas de problèmes liés à la justice ou à la non-malfaisance, par exemple (AMM5, 1964). Par ailleurs, toutes les études ont respecté la confidentialité et, à part l’étude de Kurth et al. (2010) qui se base sur les données de la Fédération Suisse des Sages-femmes (FSSF), tous les participants ont donné leur consentement. Nash, Morris & Goodman (2008), tenus au devoir de protection de l’enfance de par leur rôle professionnel, ont précisé cet aspect aux parents. De plus, les parents ayant été signalés auprès des instances de protection de l’enfance ont été exclus. Par ailleurs, une des sept exigences6 d’Emanuel, Wendler & Grady (2000) concer-nant l’éthique dans les recherches médicales, a suscité notre attention, à savoir la sélection équitable.

A plusieurs reprises, nous avons discuté du fait que les per-sonnes allophones étaient exclues des études. Cette décision se conçoit aisément car est plus compliqué de faire remplir des questionnaires ou mener des interviews avec des personnes ne comprenant pas la langue. Toutefois, elle soulève la question de la justice. En effet, les personnes ne parlant pas la langue et ne connaissant souvent pas très bien le réseau sont plus susceptibles d’être dépourvues des ressources nécessaires lorsqu’il s’agit de faire face aux pleurs excessifs de leurs bébés. Par ailleurs, les personnes allophones présentent aussi plus souvent des facteurs de risques psychosociaux et sont, d’après les études, encore une fois plus à risque d’être confrontées à la problématique soulevée dans cette présente revue de littérature. Des interventions holistiques devraient pour cette raison être étudiées quant à leur faisabilité, entre autres avec une population à risque, même si cette dernière n’arrive pas bien à s’exprimer dans la langue nationale. Ceci permettrait d’assurer la reproductibilité sur le terrain et, ainsi, augmenter l’équité dans les soins. L’Office Fédéral de la Santé Publique (OFSP) est conscient de cette disparité dans les soins ; un rapport avec des recommandations concernant la santé maternelle des migrants a été élaboré (Rapport du Conseil Fédéral, 2015). Toutefois, « les raisons de ces disparités sont complexes et les données disponibles en Suisse n’en fournissent qu’une explication partielle » (Section Migration et santé de l’OFSP).

Selon Mauron (2007) du Conseil d’Ethique des HUG, l’éthique clinique se base sur trois types de sources dont une tradition de réflexion éthique propre à chaque profession. Pour les sages-femmes, cette tradition est soulignée par le Code de Déontologie pour les sages-femmes (Confédération internationale des sages-femmes, ICM, 2013). Dans son préambule, l’ICM souligne que l’objectif est d’améliorer les soins donnés aux femmes, bébés et familles. Dans la pratique des sages-femmes, le point (e) souligne que « les sages-femmes servent de modèles en matière de promotion de la santé pour les femmes […] pour la famille […] ». La question de savoir comment promouvoir une relation saine entre parent et enfant s’inscrit tout à fait dans cette quête de promotion de la santé, non seulement de la femme, mais aussi de la famille et de l’enfant. Enfin, le Code de Déontologie International pour les sages-femmes (IV.b) exige que « les sages-femmes développent et partagent des connaissances sur leur métier grâce à diverses méthodes dont le contrôle par les pairs et la recherche. » (FSSF, 1994, p.3). Nous considérons que le présent travail peut être vu comme l’une de nos premières expériences en ce sens sur le chemin de notre vie de professionnelles.

La solidité des analyses des résultats

L’étude qualitative a utilisé un processus adéquat pour extraire des résultats. Les interviews ont été transcrites en moins de sept jours pour annoter également la communication non verbale. Les sujets relevant ont été extraits à l’aide d’une grille de codage. Cependant, il est étonnant que tous les résultats ne soient pas donnés avec le nombre de citations concernées, ce qui serait plus pertinent pour prendre en compte ce travail. Toutes les études quantitatives (Kurth et al., 2010, Schmid et al., 2011, Bolten et al., 2012 et Salisbury et al., 2012) ont effectué une statistique robuste testée par des analyses de régression. Ils ont utilisé également différents outils pour mesurer les variables continues, catégorielles et ordinales. De plus, pour toutes ces études, un facteur était considéré comme significatif avec un p < 0.05. Kurth et al. (2010) livre les P values dans une forme abrégée à deux chiffres après la virgule ce qui donne un moins bon aperçu de la pertinence d’un résultat. Dans cette même étude, il manque aussi une définition de ce que sont des pleurs excessifs. Par ailleurs, comme le regrettent les auteurs, des facteurs importants quant aux pleurs, telle que la manière d’alimenter, le soutien social ou la qualité de la relation avec le partenaire, n’étaient pas à leur disposition.

De même, chez Bolten et al. (2012), les données maternelles et néonatales (âge maternel, gestité, âge gestationnel, poids à la naissance, entre autres) sont prises en compte en tant que facteurs de confusion, mais des facteurs tout aussi importants comme par exemple la satisfaction du suivi de la grossesse ou de la relation avec le partenaire ne le sont pas. Dans l’étude de Schmid et al. (2011), beaucoup de facteurs ont été analysés, cependant, dans les tableaux, peu de données sont présentées. Par ailleurs, seuls les P values des résultats significatifs y sont notées. Le tableau de l’annexe répertoriant plus de résultats, ne présente aucune P value alors que dans le texte, elles y figurent. Dans l’étude de Bolten et al. (2012) et Salisbury et al. (2012), il est étonnant que les résultats soient uniquement présentés dans le texte et qu’aucun tableau ne les reprenne. L’étude randomisée (Salisbury et al., 2012) a recruté un nombre de participants trop faible pour présenter des résultats significatifs. Alors que leur intervention paraît très prometteuse, il est dommage qu’un si petit nombre (62 familles, soit une trentaine par groupe) ait été inclus dans l’étude. En plus, il paraît difficile de par la complexité de leur intervention de connaître le facteur qui influençait le plus les pleurs ainsi que les réponses parentales données à ces derniers.

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Table des matières

Remerciements
Résumé
Mots-clefs
Abstract
Keywords
Glossaire des abréviations
Tables des matières
1. Le questionnement professionnel
2. Le cadre de référence théorique
2.1. L’attachement
2.1.1. L’attachement sécure
2.1.2. L’attachement insécure évitant
2.1.3. L’attachement insécure ambivalent
2.1.4. L’attachement désorganisé
2.1.5. Les comportements de l’attachement
2.2. Les pleurs
2.2.1. La courbe physiologique des pleurs
2.2.2. Les définitions des pleurs excessifs
2.2.3. Les réponses parentales aux pleurs
2.3. Les outils des sages-femmes pour intervenir en cas de pleurs du nourrisson
2.3.1. Le sentiment de compétence
2.3.2. Le soutien social
2.3.3. L’écoute active et la sage-femme comme base sécure
2.3.4. La préparation à la naissance et à la parentalité (PNP)
2.3.5. Les représentations parentales
2.3.6. Les interventions par des programmes comportementaux
2.4. L’intérêt de la problématique
3. La dimension éthique
4.La méthodologie
4.1. Les bases de données utilisées
4.2. La détermination des mots-clés
4.3. Les critères de sélection, d’inclusion et d’exclusion
4.4. Le processus de sélection / L’utilisation des bases de données
4.5. La sélection finale d’articles
4.6. Les limites et contraintes de la démarche de recherche d’articles
4.7. La recherche de littérature pour la construction du cadre de référence
5. La description et l’analyse critique de la revue de littérature
5.1. Les tableaux récapitulatifs
5.2. L’analyse critique des articles
5.2.1. Les publications
5.2.2. La méthodologie
5.2.3. L’éthique dans les études choisies
5.2.4. Les interventions et outils de mesure
5.3. L’analyse transversale des résultats
5.3.1. Les réponses parentales aux pleurs
5.3.2. Les représentations parentales des pleurs
5.3.3. Le sentiment de compétence
5.3.4. Les liens entre pleurs et relations au sein du couple
5.3.5. Les facteurs de risque des pleurs
5.3.6. Les facteurs protecteurs des problématiques des pleurs
5.3.7. L’influence d’une intervention
6. La discussion
6.1. Les stratégies de coping et réponses parentales aux pleurs
6.2. Les représentations parentales face aux pleurs
6.3. Le sentiment de compétence
6.4. Le soutien social
6.5. Les effets des pleurs excessifs sur la vie de couple
6.6. Les facteurs de risque des pleurs
6.7. Les facteurs protecteurs des problématiques de pleurs
6.8. L’influence d’une intervention
6.9. La synthèse
7. Le retour dans la pratique
7.1. Les informations basées sur l’évidence
7.2. Les formations initiale et continue
7.3. Le suivi global de la sage-femme
7.4. L’inclusion des pères
7.5. Le réseau et la collaboration interprofessionnelle
7.6. Les populations migrantes
7.7. La politique de santé
7.8. Les perspectives de recherche
8. Les forces et faiblesses de notre revue de littérature
9. La conclusion
10. La liste des références bibliographiques
11. La bibliographie
12. Les annexes

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