Les obstacles pour un aménagement adéquat d’une ville

FONCIER

   Le Petit Larousse définit le foncier comme un bien immobilier. Le terme peut être utilisé aussi pour désigner les terrains constructibles, base de toute opération de promotion immobilière. Dans cet exercice nous considérons le foncier à la fois comme support et habitat. Le support parce que portant des activités. En d’autres termes c’est le substrat, c’est à dire le sol ou bien la partie superficielle de l’écorce terrestre (TRICART). En milieu rural et surtout en ville le foncier constitue un objet de convoitise. Et sa valeur ne cesse de croître. Les investissements faits sur le sol ces dernières années à travers la multiplication des immeubles et les litiges fonciers enregistrés entre personnes physiques ou entre personnes morales (Commune de MBOUR et CR de Malicounda, Commune de Thiès et CR Fandéne etc.) prouvent que le sol est un enjeu et un secteur clé de notre économie. Aussi pour toute occupation légale la loi a prévu une autorisation ou un titre foncier. Par habitat nous entendons un milieu physique dans lequel évolue un individu ou un groupe de personnes.

Touba: la longue marche du plus gros village au monde à la ville moderne

   Malgré ses 600 000 habitant environ selon le RGPH 2014 ou 1.060.462 habitants selon les enquêtes ménage du CAUS, la ville de Touba était considérée d’un point de vue administratif comme une communauté rurale c’est-à-dire « un certain nombre de village appartenant au même terroir, unis par une solidarité résultant notamment du voisinage, possédant des intérêts en commun et ensemble capable de trouver les ressources nécessaires à leur développement ». Celle-ci se nommait Touba Mosquée et comptait officiellement 74 villages parmi lesquels celui de Touba Mosquée était le chef lieu de la communauté rurale. Cependant cette situation a changé avec l’entrée en vigueur de l’Acte III de la Décentralisation. Ainsi la commune de Touba qui compte actuellement 88 villages est située au centre Ouest du pays, la Commune de Touba Mosquée est limitée au nord par la commune de Darou Mouhty (Département de Kébémer), au Sud par la commune de Kael (Département de Mbacké), à l’Est par la commune de Dahra (Département de Linguère) et à l’Ouest par les communes de Missirah, Touba Fall et Dalla Ngabou. Du fait de cette situation géographique assez favorable, la commune de Touba Mosquée est devenue au fil des années un important carrefour commercial par lequel transitent beaucoup de marchandises provenant des villages environnantes mais aussi des autres centres urbains du pays et même de la sous-région. Cette localité couvre une superficie de 29.995 ha répartie en 13 principaux quartiers (voir carte 4) que sont Darou Khoudoss, Gouye Mbind, Darou Miname, Touba Guédé, Touba Mosquée, Keur Niang, Khaira, Guédé Bousso, Same, Darou Marnane, Ndame, Madyana, Dianatoul Mahwa et Touba Bagdad. Ces quartiers faisaient partis des villages de l’ancienne communauté rurale de Touba Mosquée (voir Tableau N°1) Ces quartiers se différencient en fonction de leur localisation dans l’espace urbain. C’est ainsi qu’on distingue les quartiers centraux situés au sein de la rocade comme Darou Khoudoss, Darou Miname, Gouye Mbind et Touba Guédé. Ensuite, on a des quartiers centraux qui ont franchis la rocade. Ces quartiers ont connu au fil des années une remarquable croissance démographique au point qu’aujourd’hui leurs limites s’inscrivent au-delà de la rocade. Il s’agit de Touba Mosquée, Darou Marnane, Keur Niang, Khaira et Guédé Bousso. Enfin on a les quartiers situés au-delà de la rocade mais qui font partis quand même de l’espace urbain toubien. Il s’agit de Same, Ndame, Madyana et Dianatoul Mahwa. La ville de Touba est ordonnée de manière radiocentrique par rapport à la grande mosquée qui se présente comme le cœur de la ville. Le centre de ce schéma circulaire préconçu par la volonté de Dieu reste la principale considération religieuse. Nous avons en haut la carte administrative de la commune de Touba qui montre les villages que compose la ville. La carte met en exergue aussi la zone bâtie de la  ville mais aussi les infrastructures comme la route nationale et les routes secondaires mais aussi la voie ferrée. Touba est une grande ville, peuplée de plus d’un millions d’habitants, donc a nécessairement besoin d’espace pour l’habitat. Ainsi c’est ce que cette carte veut montrer mais aussi rendre visible les villages les plus peuplés comme Darou Khoudoss, Touba Mosquée, Darou Miname, Sourah ; Darou Tanzil et Sam qui constituent ensemble une conurbation qui rassemble la majeure partie de la population de Touba.

L’état des lieux de l’expansion urbaine galopante

   Le développement urbain de la ville de Touba connait une situation très particulière. Même au-delà de nos frontières, on retient de Touba une ville avec ses caractéristiques de cité religieuse. Mais, la particularité de Touba relève du fait qu’elle s’est imposée, en seulement un siècle d’existence, alors que cette ville n’a été ni un point d’appui à la pénétration coloniale au Sénégal comme l’ont été Saint-Louis ou Dakar, ni un centre administratif ou à vocation originellement économique, encore moins un centre adossé à une voie importante de communication. Jusque vers la fin des années 70, Touba, petite ville à la lisière du Ferlo, ne comptait que 30.000 habitants. Lesquels se consacraient essentiellement à l’agriculture, luttant ainsi contre les aléas naturels comme la sécheresse. Touba va cependant connaître une évolution majeure à la fin des années 70. Il s’agit d’une évolution se résumant en une expansion démographique et qui va complètement bouleverser son mode de vie et de fonctionnement. D’une situation de ville de pèlerinage et de retraite pieuse, elle va passer à celle d’une métropole économique de 250 000 habitants dans les années 90, dont 50 % évoluant dans le secteur tertiaire, particulièrement dans le commerce. N’ayant, en effet, aucune contrainte spatiale sauf au Sud où son expansion est freinée par la ville de Mbacké, Touba s’étend à un rythme jusqu’ici inégalé en Afrique. Le taux de croissance de l’occupation des terres était de plus de 3% en 1990. Il était de 8% en 2010. L’occupation spatiale de Touba qui était de 755 hectares en 1887, est passée en 1975 à 1926 hectares et en 1988 à 3600 hectares. Actuellement la superficie de la ville religieuse couvre 30.000 ha, faisant de Touba la plus importante ville du Sénégal à cette date, du point de vue de la superficie occupée, dépassant ainsi la Communauté Urbaine de Dakar qui occupe actuellement 8.000 hectares de la Pointe des Almadies à Bargny. Parallèlement, le taux d’évolution démographique suit la même pente ascendante. De 3,2 % annuel à la fin des années 90, ce taux a atteint 12 % pour la période de 2010. La population de la ville religieuse est estimée aujourd’hui à plus de 600 mille habitants d’après le recensement de 2014 et plus d’un millions d’habitants selon le Cabinet d’Architecture, d’Urbanisme du Sénégal chargé d’élaborer le Plan Directeur d’Urbanisme Touba, Horizon 2020. La population de la ville était déjà de 132.399 habitants en 1989, tandis que la capitale administrative dont dépend Touba, en l’occurrence Diourbel, n’hébergeait dans le même temps que 76.000 habitants. La cité religieuse ignore l’occupation anarchique des sols à laquelle expose généralement la croissance urbaine précipitée dans les pays en voie de développement. Touba impressionne par la bonne maîtrise de l’organisation et de l’espace. Il n’y a pas de quartier flottant. Son plan radiocentrique, avec la mosquée qui constitue le centre de la ville, y est pour beaucoup. Ayant le plus fort taux de croissance démographique, soit 10%, l’explosion démographique n’est pas sans conséquence. Touba connaît toutes les difficultés de toutes les grandes villes : explosion démographique, paupérisation croissante, insalubrité du fait de la faiblesse de l’assainissement, une insuffisance de la couverture sanitaire. Toutes choses qui font qu’il se pose, ainsi, le problème du maintien de l’équilibre entre le sacré et l’économique.

Un secteur tertiaire dominé par l’informel

   Touba, la capitale du mouridisme, connait une importante activité commerciale. Les mourides semblent avoir une certaine propension pour le négoce. Actuellement, avec le recul de la culture arachidière, beaucoup parmi les mourides (48,45% de la population active) sont devenus des commerçants, ne pouvant généralement rien faire d’autre parce que souvent sans instruction « occidentale » (voir graphique 7) ni qualification professionnelle. Au niveau de Touba, le commerce bénéficie de conditions toutes particulières. Cette activité est encouragée par une franchise administrative : les marchandises ne sont pas taxées dans les limites de la ville sainte, ce qui renforce le dynamisme du secteur. Donc le secteur secondaire de Touba est dominé par le commerce en général mais particulièrement l’informel. Ainsi ce secteur dit informel qu’on peut considérer comme un sous-secteur du tertiaire est constitué d’une multitude de métiers plus ou moins structurés et qui sont le plus souvent une création spontanée des populations. Les composantes les plus significatives sont l’artisanat, les marchés, les emplois ruraux plus ou moins réguliers, les marchands ambulants (voir graphique 8). Les actifs du secteur informel avoisinent 76.000 personnes. La ville de Touba est une ville foncièrement religieuse c’est ce qui explique la part élevée de l’éducation coranique dans la population de Touba. Il faut aussi signaler que l’éducation occidentale est strictement interdite à Touba c’est pourquoi hormis l’école primaire de Darou Khoudoss construite par Sérigne Cheikh Mbacké Gaindé Fatma la carte scolaire de Touba dans le domaine de l’éducation occidentale est presque vierge. Même si la ville de Touba n’abrite pratiquement pas d’école française, actuellement la plupart des jeunes de Touba fréquente cette école, rien qu’à voir le nombre d’élèves qui sont inscrits dans les écoles de la ville de Mbacké et d’étudiants dans les universités du Sénégal on pourra évaluer le nombre importants d’apprenants originaires de Touba et qui fréquentent l’école française. La répartition de la population selon le secteur d’activité montre clairement la prédominance du commerce. Ainsi constatant que la majeure partie de la population active de la ville de Touba travaille hors de la cité religieuse et ont pour occupation le commerce. En effet cette part importante du commerce dans les domaines d’activité des populations de Touba est au dépend de l’agriculture qui voit sa part s’effriter de plus en plus du fait de l’expansion territoire galopante de la ville de Touba et qui a tendance à remplacer les terres cultivables en habitation. L’artisanat aussi occupe une place importante dans la répartition de la population active de la ville de Touba car tous les jeunes qui ne sont pas occupés par le commerce apprennent un métier et c’est essentiellement l’artisanat qu’ils choisissent comme la menuiserie, la tapisserie etc.

Les chefs de village : gestionnaires délégués des terres de leur localité

   Dans les différents villages que constitue la commune de Touba, il y a un chef qui est désigné par le Khalife Général des mourides et qui est chargé d’assurer l’administration du village, aidé en cela par les chefs de quartiers appelés dans certains villages auxiliaires du chef de village. Dans les prérogatives du chef de village, il y a la gestion foncière qui lui est déléguée en plus de la collecte des taxes rurales et bien d’autres missions qui incombent à la bonne marche du village. Pour ce qui concerne le domaine d’intervention qui intéresse notre étude c’est-à-dire la gestion foncière, le chef du village est le mandataire légitime pour gérer les terres du village et ceci sous la houlette du khalife lignagère ou du khalife de cheikh. Selon les chefs de villages que nous avons rencontré durant nos travaux de terrain, ils n’ont aucun pouvoir sur les terres du village sinon être le représentant du marabout et exécuter les recommandations du Khalife Général des Mourides. Ainsi il assiste au lotissement du village et sur ordre de l’autorité religieuse il attribue gratuitement les terres. Quand il ya transaction entre deux personnes, ils le feront en sa présence et c’est lui qui va délivrer l’acte de vente qui sera le seul papier administratif que détiendra l’acheteur car à cause du statut particulier de la ville qui est assise sur un Titre Foncier qui appartient au Khalife de la confrérie il n’ya aucun autre titre individuel pour une personne tierce ou une structure. C’est eux aussi qui veillent au respect scrupuleux des recommandations du Khalife du village. Ainsi selon le chef du village de Darou Salam II « L’attribution des parcelles est gratuite mais il faut impérativement donner trente (30.000) FCFA qui seront versé dans les fonds de financement de la grande mosquée du village. Concernant les autres conditions, d’abord il faut être marié(e), ou avoir des enfants à entretenir, être disposé à venir habiter avec son conjoint(e) ou sa famille dans un délai de trois jours, pouvoir observer scrupuleusement les préceptes de l’Islam et les interdits de la ville de Touba (interdit de fumer, de porter des habits indécent etc.), il est aussi interdit d’y élever des chiens ou des troupeaux de bœufs surtout et c’est à moi de veiller au respect de cela »

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Table des matières

INTRODUCTION
CONTEXTE ET JUSTIFICATION
PROBLEMATIQUE
ANALYSE CONCEPTUELLE
COMMUNAUTE RURALE
GESTION URBAINE
FONCIER
DROIT COUTUMIER
KHALIFE GENERALE
DECENTRALISATION
EVOLUTION SPATIALE
HYPOTHÈSES DE RECHERCHE
Hypothèse principale
Hypothèses spécifiques
OBJECTIF DE L’ÉTUDE
Objectif général
Objectifs spécifiques
METHODOLOGIE
REVUE DE LA LITTÉRATURE
La planification et la préparation
La recherche documentaire
Les travaux de terrain
Villages Touba ville
Le traitement des données et rédaction du document
PREMIERE PARTIE : Touba, ville modèle avec une expansion territoriale galopante
CHAPITRE I : Une localité aux potentialités naturelles limitées
I.1.1. L’historique de la fondation de la cité
I.1.2. une bourgade a l’origine hostile à la vie humaine
I.1.2.1. Un relief plat
I.1.2.2. des sols dépourvus de sève nourricière
I.1.2.3. l’hydrogéologie avec une eau peu potable
I.1.2.4. une pluviométrie toujours déficitaire
I.1.2.5. des vents et une température accablant
I.1.2.6 Une végétation clairsemée
CHAPITRE II : La position géographique de Touba, une ville carrefour
II.1.1 Touba: la longue marche du plus gros village au monde à la ville moderne
II.1.2.Touba, ville à la croisée des chemins
CHAPITRE III : Les raisons d’une expansion urbaine fulgurante de la ville de Touba 
I.3.1 L’état des lieux de l’expansion urbaine galopante
I.3.2 Une explosion démographique insaisissable
I.3.3 Les raisons religieuses et sociales
I.3.3.1 Les raisons religieuses
I.3.3.2 Les raisons sociales
I.3.4 Les avantages économiques
I.3.4.1 La part du secteur primaire s’effrite
I.3.4.2 Un secteur secondaire marginalisé
I.3.4.3 Un secteur tertiaire dominé par l’informel
DEUXIEME PARTIE : Touba, l’unique ville possédant un Titre Foncier : Gestion familiale des terres de la cité et ses conséquences
CHAPITRE I : La gestion familiale du foncier de Touba
II .1.1 Le Khalife Général : un chef terrien au pouvoir absolu
II.1.2 Les Khalifes lignagères: dépositaires de l’héritage foncier de leur père
II.1.3 Les Khalifes des Cheikh : les lieutenants du mouridisme
II.1.4 Les chefs de village : gestionnaires délégués des terres de leur localité
II.1.5. Gestion foncière : Touba contrôlée par un système informatique
CHAPITRE II : Les conséquences d’une gestion foncière particulière
II.2.1 Le conseil municipal, une autorité locale sans réel pouvoir dans un domaine transféré
II.2.2 Impossibilité d’obtenir une propriété privée dans le périmètre de la ville de Touba
II.2.3 La présence de l’Etat dans le territoire de Touba : un paradoxe
TROISIEME PARTIE : L’organisation spatiale du périmètre territorial de Touba
Chapitre I : Touba, un titre foncier avec des limites flexibles
III.1.1 : l’exterritorialité du périmètre de Touba
III.1.2 : Touba, une ville moderne avec un lotissement parfait
CHAPITRE II : La structuration spatiale de la ville de Touba
III.2.1. L’occupation du sol
III.2.2. La structure urbaine
III.2.3. Le statut d’occupation
III.2.4 La situation foncière
CHAPITRE III : Les obstacles pour un aménagement adéquat de la ville
III.3.1 : Le non respect des lois en vigueur au Sénégal concernant le foncier
III.3.1.1. Concernant la loi sur le Domaine National
III.3.2.2. Concernant le code de l’urbanisme
III.3.2.2.1 Le certificat d’urbanisme
III.3.2.2.2. L’autorisation de construire
III.3.2.3.Concernant le code des collectivités locales
III.3.2. La non application du plan directeur d’urbanisation
III.3.2. La spéculation foncière
III.3.3. L’insuffisance des infrastructures sociales de base
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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