Les obstacles pour l’accès des femmes aux postes de décision

Le Niger est un vaste territoire abritant une population très diversifiée composée de plusieurs groupes ethnolinguistique qui vivent en harmonie. Ce sont les Hausa, les ZarmaSonghay, les Touareg, les Peulh, les Arabes, les Gourmantché, les Boudouma, les Kanuri et les Toubou. La population féminine (50,7%) est légèrement plus élevée que la population masculine (49,3%). La configuration du pays en termes de peuplement est le produit d’un long processus historique qui a jalonné la trajectoire des différents groupes en présence. Ces derniers ont su tisser à travers l’histoire des relations d’alliances matrimoniales, de parenté à plaisanterie, de coexistence pacifique qui constituent actuellement le socle qui cimente l’unité nationale. Les rapports que les membres d’un groupe entretiennent entre eux sont régis par des rapports aînés/cadets. Ils sont de ce fait inégalitaires. Dans ce contexte, les femmes et les enfants sont les plus lésés dans les prises de décision pour lesquelles leur avis n’est pas demandé quelle qu’en soit la situation. Dans l’imaginaire collectif traditionnel de ces sociétés, la femme est considérée comme un être inférieur par rapport à l’homme. La propriété foncière qui est prévue dans la loi est rarement appliquée pour le cas des femmes en matière d’héritage et parfois son avis compte peu ou est rarement sollicitée dans la prise des décisions en matière matrimoniale. Il en est de même en ce qui concerne la gestion des instances politiques. En effet, l’avènement de la démocratie pluraliste en 1991 et la multiplication des partis politiques qui s’en est suivi, ont été peu favorables à l’affirmation de personnalités féminines nigériennes dans les espaces du pouvoir. Il est cependant important de noter que les femmes ; citadines et rurales ayant ou non une occupation professionnelle, se sont alliées soit au parti au pouvoir, soit à un parti d’opposition dont elles se sentirent proches pour des raisons affectives, régionales ou ethniques ou tout simplement pour faire aboutir des revendications de besoins réels. Ces revendications étaient fortement marquées par des préoccupations sociales (santé, protection sociale, amélioration des conditions de vie des femmes…) et par l’égalité des droits juridiques. Toutefois, nous constatons sous l’influence de la modernité importée (le développement des moyens de communication, l’argent, l’exode, l’élévation de l’instruction, etc.), l’émergence des associations féminines, des avancées positives dans le sens de l’amélioration de la condition de la femme dont entre autres l’adoption de la loi sur le quota, la ratification de la convention sur l’élimination de toutes formes de discriminations à l’égard des femmes (CEDEF) . Même si par ailleurs, la mauvaise interprétation de la religion et les us et coutumes font de certains concepts de l’approche genre (égalité, pouvoir…) un tabou, il faut admettre que la société (tradition, culture) n’a pas une emprise absolue sur les individus. En effet, les rapports marchands et capitalistes qui ont bouleversé ces communautés ont tendu à produire des types de relations sociales dans lesquelles les individus comptent, agissent par eux-mêmes, sans interférer à la communauté ou à la tradition. Par exemple dans le domaine matrimonial, aujourd’hui les intéressés ont leur mot à dire, les unions forcées tendent à disparaître dans ces sociétés, l’individu est libre de choisir son partenaire.

Au Niger, la problématique du genre a fait l’objet d’institutionnalisation et d’opérationnalisation par diverses organisations (l’élaboration d’une politique nationale genre par l’Etat à travers le Ministère de Promotion de la Femme et de la Protection de l’Enfant 2009-2018 entre autre), cependant les acquis sont restés très faibles.

C’est pourquoi cette étude sur « genre et pouvoir politique : la représentativité féminine dans les instances de décision des partis politiques au Niger, loin d’être un travail visant seulement à constater, par les statistiques, les inégalités entre les hommes et les femmes en matière d’exercice du pouvoir politique, se veut aussi une contribution à l’identification des raisons qui expliquent les disparités constatées aux différents niveaux de prise de décision dans les instances politiques. Le Niger compte une quarantaine de partis politiques ; ainsi pour des raisons d’ordre matériel et temporel nous nous limiterons aux instances suprêmes des deux grands partis politiques à savoir le MNSD Nassara (Mouvement National pour la Société de Développement) et le PNDS Tarayya (Parti Nigérien la Démocratie et le Socialisme). Le premier étant le plus grand parti nigérien avec 47 députés dont 8 femmes était anciennement parti-Etat, tandis que le PNDS est né en 1991 dans la dynamique de la démocratisation et a une option de Gauche, compte 25 députés dont 2 femmes. Ils sont donc assez représentatifs du paysage politique nigérien. De nos jours, le parlement étant dissous, aucun des partis politiques ne dispose de députés et une crise politique forte oppose ces deux grands partis.

CADRE THEORIQUE

Revue de la littérature

Ces dernières années, plusieurs études et rapports ont porté sur le genre à travers le monde. Il est particulièrement question de la persistance des inégalités et inéquités dans l’accès, la répartition, le contrôle et la gestion des ressources entre les hommes et les femmes. S’agissant du continent africain, ces travaux font état de disparités profondes dans les traitements que les sociétés réservent aux enfants des deux sexes, notamment dans l’accès à l’école et à la culture, la représentation des hommes et des femmes dans les instances électives et les nominations aux postes de décision. Cette préoccupation date cependant d’au moins une génération. Ainsi, pour Christine Bard, c’est dans les années 1970 que des anthropologues féministes américaines réfléchissant aux rapports de pouvoir entre hommes et femmes, ont introduit la notion de « genre » : elles faisaient ainsi référence au rôle social des uns et des autres par opposition au sexe biologique, pour montrer que la place des femmes et des hommes dans la société est avant tout le produit d’une culture. Dans Le Deuxième sexe, ouvrage paru en 1949, Simone de Beauvoir avait, on le sait, déjà professé : ‘on ne naît pas femme, on le devient’. En effet, pour elle, la citoyenneté politique n’est pas neutre, elle a été historiquement, sociologiquement et politiquement masculinisée à travers un ensemble de représentations sociales qui identifient l’individualité au masculin et l’altérité au féminin. Au niveau international, la Conférence de Mexico de 1975 a marqué une étape importante dans le renouvellement des thématiques en matière d’égalité des sexes. Car, dans le plan d’action adopté par les gouvernements figurait la nécessité d’associer davantage les femmes aux processus décisionnels. Ainsi, pour la première fois la question du sexe du pouvoir était évoquée ; la revendication d’une égale représentation des sexes au sein du pouvoir politique a donc figuré tôt dans les textes internationaux. Pour ces auteurs, les premières apparitions de la notion d’égalité des chances remontent à la déclaration de Philadelphie, du 10 mai 1944, à la constitution de l’Organisation internationale du travail de 1945-46 et à la Convention 111 de cette institution de 1958. La Convention sur l’élimination de toutes formes de discriminations à l’égard des femmes, dite Convention CEDAW, adoptée par l’Assemblée Générale de l’ONU le 18 décembre 1979 « est l’un des instruments fondamentaux de la mise en œuvre d’une politique d’égalité qui a opéré un saut qualitatif entre égalité formelle et égalité des chances ; entre proclamation d’égalité des chances et pratique de l’égalité » ; cette convention encourage les Etats signataires à adopter des mesures pour améliorer la participation politique des femmes.

ANALYSE ET INTERPRETATION DES RESULTATS 

Les obstacles pour l’accès des femmes aux postes de décision

La faiblesse du niveau de scolarisation et de l’alphabétisation des femmes et des filles par rapport aux hommes contribue pour une grande part à la faible représentativité des nigériennes dans les instances de décision (tableau n°3 p33). Ici, 78% des femmes ont certes un niveau d’études supérieures cependant il convient de relativiser car, il s’agit là d’un domaine bien spécifique où il faut un minimum de bagages intellectuels, mais aussi il ne faut pas perdre de vue que ces femmes font partie des quelques rares intellectuelles du pays. En effet, au Niger, des statistiques récentes (PNG 2009 -2018, SDRP 2008- 2012) ont montré que très peu de femmes ont été scolarisées : l’analphabétisme touche 88% des femmes (PNG 2009- 2012). Outre la faible scolarisation des femmes, la présence timide des femmes au sein des bureaux des partis politiques qui est d’ailleurs une des conséquences de ce dernier facteur, constitue également un obstacle à leur accession aux postes de décision (11 femmes sur 112 membres au MNSD- Nassara et 31 femmes sur 182 au PNDS Tarayya ; 19 femmes enquêtées contre 61 hommes). Cela s’explique du fait qu’au Niger le travail sur la participation politique des femmes est particulièrement difficile à cause des barrières sociales, religieuses et culturelles, incluant le nombre de groupes ethniques différents et l’opposition des groupes religieux comme nous le montre le tableau n°12 p39 où 54% des leaders politiques ainsi que 26,32% de leurs collègues femmes sont contre l’idée d’une quelconque égalité des sexes au Niger. Dans la législature précédente par exemple, la seule femme parlementaire du Niger quoique bien immergée dans l’arène politique n’avait pas tout le soutien espéré comme nous le montrent les éléments d’analyse du tableau n°10 p37 sur les relations que les hommes et les femmes entretiennent au sein des formations politiques étudiées. C’est ainsi que 80% des hommes comprennent ces relations en termes de complémentarité puisqu’ aucun développement n’est possible sans la composante femme qui représente d’ailleurs un peu plus de la moitié de l’humanité ; tandis que 19,68% défendent l’idée de subordination de la femme, car pour eux, il n’est pas question que la femme prétende aux mêmes responsabilités que l’homme. Tout au long des entretiens, ces derniers n’ont cessé de s’appuyer sur la religion et la tradition pour défendre leur idée. D’un point de vue boudonien, il s’agit là du rôle des effets de disposition culturelle propres à la société nigérienne face auxquels les acteurs politiques masculins sont placés et qui, dans une large mesure, tendent à leur croire ou accroire qu’ils sont, pour ainsi dire, nés pour gouverner, et que chacun doit connaître sa place : aux hommes la politique et plus largement l’accès à la sphère publique et aux femmes le confinement aux tâches domestiques et l’implication dans des activités de production et de reproduction. Dans un tel contexte, de « bonnes raisons» sont vite trouvées pour légitimer leur appropriation des positions de pouvoir d’influences dans les instances phares des partis politiques. L’invocation de la religion et de la tradition n’est donc ni plus ni moins qu’une stratégie visant à éloigner les femmes des lieux du pouvoir, à les marginaliser voire à les exclure complètement. On peut donc penser que les concurrents masculins utilisent spécifiquement une stratégie de disqualification de la femme, même cultivée et volontaire : par exemple à travers l’établissement de profils de postes où du fait des critères exigés seuls les hommes peuvent compétir. Ces critères tels que le montre l’analyse des textes et statuts des partis, mettent largement l’accent sur la disponibilité constante et permanente, la capacité de coordination des structures, la détention d’un certain niveau d’études ou d’un certain statut matrimonial, la capacité à produire un leadership fort, etc. Ce sont là autant de discriminants excluant d’office les femmes dés lors même qu’elles n’ont généralement pas un niveau d’études élevé, ou encore qu’elles sont difficilement disponibles tout le temps, étant donné les contraintes familiales et parentales.

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Table des matières

Introduction
PREMIERE PARTIE: CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
CHAPITRE I CADRE THEORIQUE
Revue de la littérature
CHAPITRE II. CADRE METHODOLOGIQUE
DEUXIEME PARTIE : PRESENTATION, INTERPRETATION ET ANALYSE DES RESULTAS DE L’ENQUETE
CHAPITRE III : PRESENTATION DES RESULTATS DE L’ENQUETE
CHAPITRE IV : INTERPRETATION ET ANALYSE DES RESULTATS DE L’ENQUETE
Conclusion générale
Bibliographie
TABLE DES MATIERES
ANNEXES

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