Les notions de responsabilité sociale de l’entreprise et de gouvernance partenariale

La responsabilité sociale des entreprises (RSE) est désormais communément intégrée dans le vocabulaire des organisations. En effet, peu importe la posture des firmes vis-à-vis du développement durable, il s’agit d’une notion qui fait sens auprès des acteurs socioéconomiques qui s’en saisissent pour la majorité.

La RSE remet en question depuis toujours les systèmes capitalistes dans lesquels les entreprises se sont longtemps développées. Aujourd’hui décriée par la presse, les ONG, ou encore le grand public, la notion de capitalisme a été durant son âge d’or, le moteur d’une croissance au profit de l’économie, de l’innovation technologique et scientifique, mais aussi de la mondialisation et de la consommation de masse. Pourtant ce système est désormais en proie à de vives critiques. En effet, les entreprises qui populairement y sont associées voient leur responsabilité assignée aux inégalités sociales, à la pollution, à la destruction de la biodiversité ou encore aux différentes formes de gaspillage. Les finalités des firmes sont en ce sens détractées et accusées de vouloir générer du profit au détriment de la société et des individus qui la composent. La RSE permet alors de crédibiliser l’activité des entreprises qui peuvent ainsi justifier un engagement et une stratégie responsables, basés sur la création d’une richesse partagée. Elles peuvent par conséquent se détacher de l’image qui les caractérise comme œuvrant dans une logique de croissance individuelle, motivées par le cumul des richesses dans le seul intérêt de satisfaire les actionnaires. En d’autres termes, la RSE permet à l’entreprise de sortir du stéréotype qui l’astreignait aux carcans capitalistiques, mais aussi de souligner son rôle en tant qu’actrice économique et responsable. On assiste alors à un glissement sémantique entre l’entreprise créatrice de richesse pour le seul bénéfice de ses actionnaires vers l’entreprise créatrice de valeur pour elle-même et pour autrui. Les organisations doivent pour ce faire se tourner vers leurs parties prenantes avec lesquelles elles cohabitent au sein d’un écosystème (Uzan, 2013) où chaque acteur dispose de ses propres attentes, de ses propres compétences et de ses propres intérêts.

La RSE qui peut s’appréhender comme la traduction du développement durable au sein des entreprises a connu un développement accru depuis les années 1990. Progressivement, les recherches sur la RSE ont succédé aux travaux sur l’éthique (Naro, 2005). En France, on souligne la création d’une plateforme nationale d’actions globales en faveur de la RSE qui est constituée par de multiples parties prenantes. Cette plateforme contribue sur le mode délibératif (Uzan, Heraut-Zérigui, 2016) à étendre une politique RSE au niveau national. Par ailleurs, la littérature (Bowen, 1953 ; Carroll, 1979 ; Freeman, 1984 ; Igalens, Point, 2009 ; Pesqueux, 2012 ; Uzan, 2012 ; Mercier, 2014) s’est efforcée à expliquer et définir la RSE sur le mode compréhensif et critique (Uzan, Heraut-Zérigui, 2016).

De même, la responsabilisation des firmes entraine un élargissement qui résonne sur trois dimensions organisationnelles (Uzan, 2015). Tout d’abord, les entreprises décloisonnent leurs frontières et élargissent leur gouvernance, laissant la parole aux parties prenantes qui sont appréhendées comme des acteurs stratégiques et consultées pour améliorer la visibilité et l’activité des organisations. Ensuite, la performance n’est plus seulement abordée sous son aspect économique, en effet, les firmes œuvrent désormais à être performantes sur les aspects sociaux, sociétaux et environnementaux. Par conséquent, on parle de performance globale (Carroll, 1979, 1995 ; Reynaud, 2003; Germain et Trébucq, 2004 ; Baret, 2006 ; DohouRenaud et Berland, 2007, Uzan et Heraut-Zerigui ; 2015) qui s’appréhende comme une performance quadri-axiale (Uzan, 2013). Enfin, les entreprises développent la mesure de leur performance. En effet, elles ne se contentent plus d’un unique reporting financier, mais complètent leurs données financières par un rapport de développement durable qui doit exposer leurs performances extra-financières.

Le cheminement jusqu’à la problématique

Ainsi, la RSE est aujourd’hui un concept intégré dans le paysage économique des organisations. Dans la continuité de la prise de conscience par les firmes de leur impact sur la société et son environnement, les entreprises s’inscrivent de plus en plus dans une démarche de crédibilisation de leur image qui ne peut plus se satisfaire à la seule efficacité financière. Notion transversale, la RSE renvoie à la capacité des entreprises à responsabiliser leurs processus face aux attentes des parties prenantes. La standardisation des principes de responsabilité sociale et le souci de performance globale, ont ouvert la gouvernance des entreprises qui accueillent désormais des interlocuteurs variés au sein de ses prises de décisions, les incitant ainsi à collaborer. Le schéma classique de la gouvernance actionnariale doit aujourd’hui s’adapter et se transformer, mettant en exergue des parties prenantes jusqu’à présent écartées de la sphère décisionnelle.

Parmi ces parties prenantes, nous avons décidé de nous intéresser aux organisations non gouvernementales (ci-après ONG). Acteur souvent considéré comme secondaire et qualifié machinalement de « groupe de pression » (Mach, 2002), nous souhaitons connaître le statut de ce partenaire dans la responsabilisation des firmes. Appui opérationnel pertinent et reconnu par le grand public (Novethic, 2006), les ONG permettent en l’espèce de matérialiser un lien parfois difficile à maintenir entre l’entreprise et la cible de ses actions RSE. Face à une littérature abondante sur les notions clés de nos travaux, à savoir : la RSE, la gouvernance, les parties prenantes, les ONG, les rapports entre les firmes et la sphère non gouvernementale et la performance, nous avons souligné un manque s’agissant de l’impact des ONG sur la performance globale et l’éventuelle mesure qui pouvait en résulter.

Évolution du paradigme : du positivisme au post-positivisme

Popper (1963) rompt avec le modèle inductif plébiscité dans la conception positiviste. En effet, pour l’auteur, la démarche inductive qui tend à tirer de l’observation du monde des règles générales, peut conduire le chercheur vers « des conclusions erronées, car elle n’est pas valide d’un point de vue logique » (Avenier, Gavard Perret, 2012). C’est pourquoi l’approche poppérienne préconise une méthode déductive, voire hypothético-déductive. En ce sens pour Popper, une théorie doit pouvoir être réfutée par l’expérience afin de présenter un caractère scientifique valable. En ce sens, il n’y a pas de « critère de vérité », mais des « critères de progrès » (Avenier, Gavard-Perret, 2012). Bien que les apports poppériens fussent critiqués par la littérature des sciences humaines et sociales, ils ont laissé entendre qu’un aménagement du positivisme était possible. En effet, comme le souligne Riccucci (2010) « toute observation est imparfaite et faillible et sujette à des inexactitudes ». Dès lors que le chercheur reconnaît cette faillibilité, il admet qu’« il n’est pas toujours possible de saisir pleinement et parfaitement la réalité dans sa globalité » (Avenier, Gavard-Perret, 2012). Ainsi, bien qu’il faille optimiser l’atteinte de la réalité, Riccucci (2010) souligne que « ce but ne pourra jamais être réalisé ». Néanmoins, pour les post-positivismes, le chercheur devra « tout mettre en œuvre pour tendre vers une objectivité maximale » (Avenier, GavardPerret, 2012) en contrôlant avec rigueur sa recherche et ses modes de collecte des données.

Le post-positivisme qui est perçu par la littérature comme une « réforme fondamentale des principes positivistes » (Corman, 2005), incite le chercheur, à la différence du positivisme, à multiplier ses méthodes de collectes de données (Avenier, Gavard-Perret, 2012). De même, comme le soulignent Avenier et Gavard-Perret (2012) le chercheur post-positiviste s’applique à « réfuter des hypothèses plutôt qu’à les vérifier ». Ils acceptent également « l’existence de l’erreur » (Riccucci, 2010) et estiment les résultats d’une recherche comme « probables tant qu’ils ne sont pas réfutés » (ibid.).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
1. CONTEXTE DE LA RECHERCHE
2. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES DE RECHERCHE
2.1 LE CHEMINEMENT JUSQU’A LA PROBLEMATIQUE
2.2 LES HYPOTHESES DE RECHERCHE
3. LA CONCEPTION DU PROCESSUS DE RECHERCHE
3.1 L’OBJET DE LA RECHERCHE
3.2 CADRE EPISTEMOLOGIQUE DE LA RECHERCHE
3.2.1 Comprendre l’épistémologie
3.2.2 La posture épistémologique de notre recherche
3.3 STRATEGIES DE LA RECHERCHE
3.3.1 Une recherche rythmée par l’abduction
3.3.2 Une recherche à vocation exploratoire
3.3.3 Une recherche qualitative
3.4 TRIANGULATION DES DONNEES
4. ELABORATION DU DESIGN DE LA RECHERCHE
CHAPITRE 1 : L’EXAMEN DES CONCEPTS STRUCTURANT LE SUJET : LES NOTIONS DE RESPONSABILITE SOCIALE DE L’ENTREPRISE ET DE GOUVERNANCE PARTENARIALE
1.1 L’ENRACINEMENT DE LA RSE
1.1.1 Les fondements de la RSE
1.2.2 L’encadrement de la RSE
1.1.3 L’impact de la RSE sur la stratégie de l’entreprise
1.2 L’OUVERTURE DES GOUVERNEMENTS DES FIRMES : LA GOUVERNANCE PARTENARIALE
1.2.1 Les origines actionnariales de la notion de gouvernance d’entreprise
1.2.2 Vers une gouvernance élargie de l’entreprise : la gouvernance partenariale
1.2.3 La mise en place d’une gouvernance élargie
1.2.4 Vers une gouvernance de type réseau reflet d’un écosystème interactif
1.3 SYNTHESE DES CONCEPTS MOBILISES SUR LA RSE ET LA GOUVERNANCE
CHAPITRE 2 : LA CARACTERISATION DES ACTEURS DU SUJET : DEFINITION DES NOTIONS DE PARTIES PRENANTES ET D’ORGANISATION NON GOUVERNEMENTALE (ONG)
2.1 LES PARTIES PRENANTES AU CENTRE DE L’ATTENTION DES STRATEGIES RSE
2.1.1 Aux origines de la notion de parties prenantes
2.1.2 Définition et typologie du concept de parties prenantes
2.1.3 L’impact sur la gouvernance des entreprises avec la théorie des parties prenantes
2.2 LES ONG PARTIES PRENANTES DES ENTREPRISES
2.2.1 Approche historique de la notion d’ONG
2.2.2 Approche théorique de la notion d’ONG
2.2.3 Typologie des ONG et champs d’action
2.3 SYNTHESE DES CONCEPTS MOBILISES SUR LES PARTIES PRENANTES ET LES ONG
CHAPITRE 3 : PRESENTATION DE L’EPICENTRE DU SUJET : LES RELATIONS ENTRE LES ONG ET LES ENTREPRISES
3.1 COMPRENDRE LA NATURE DES RELATIONS ENTRE LES ONG ET LES ENTREPRISES
3.1.1 Approche longitudinale des rapports entre les ONG et les entreprises
3.1.2 Les motivations des entreprises et des ONG dans la collaboration
3.1.3 Les conséquences et les retombées stratégiques des collaborations entre les entreprises et les ONG
3.1.4 Un antagonisme encore existant
3.2 LA MATERIALISATION DES RAPPORTS COLLABORATIFS : LES DIFFERENTES FORMES D’EXPRESSION
3.2.1 Les expressions mécénales
3.2.2 Les expressions stratégiques
3.2.3 Les expressions partenariales
3.2.4 Les expressions orales : le dialogue comme matérialisation collaborative du rapport ONG – entreprises
3.3 SYNTHESE DES CONCEPTS MOBILISES SUR LES COLLABORATIONS ENTRE LES ONG ET LES ENTREPRISES
CHAPITRE 4 : PRECISION ET CENTRAGE SUR L’ENJEU DU SUJET : LA PERFORMANCE GLOBALE DES ENTREPRISES
4.1 LA PERFORMANCE : UN CONCEPT MULTIDIMENSIONNEL AU CŒUR DE LA STRATEGIE DES FIRMES
4.1.1 Présentation d’une notion centrale et dominante en sciences de gestion
4.1.2 La mutation du concept de performance : du système classique et financier à un système multidimensionnel et global
4.1.3 Décryptage d’une notion plurivoque : Les composantes extra-financières de la performance
4.2 MESURER LA PERFORMANCE : UNE PROBLEMATIQUE DE TAILLE FACE A UNE VARIABILITE DE PRATIQUES IMPORTANTE
4.2.1 Présentation de l’approche traditionnelle de la mesure de la performance
4.2.2 De l’approche financière à l’approche extra-financière de la mesure des performances de l’entreprise
4.2.3 Panorama des différents outils de mesure de la performance extra-financière
4.3 SYNTHESE DES CONCEPTS MOBILISES SUR LA PERFORMANCE ET LA MESURE DE LA PERFORMANCE
CONCLUSION 

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