Le dépistage comme stratégie de santé publique

Le dépistage comme stratégie de santé publique

a. Les lois : En France, le dépistage de la trisomie 21 (T21) doit obligatoirement faire l’objet d’une information claire et précise de la part du professionnel de santé envers la femme enceinte ou le couple. Ainsi, plusieurs lois ont été promulguées :
– L’arrêt Perruche (1), rendu en 2000 par la Cour de Cassation, permet d’indemniser un enfant né porteur d’un handicap à la suite d’une faute médicale.
– La loi Kouchner du 4 mars 2002 (2), sur le droit des patients, stipule que la naissance d’un enfant handicapé ne peut être un motif d’indemnisation.
– Le décret du 23 juin 2009 (3), fixe les règles de bonne pratique du dépistage et du diagnostic prénatal de la T21 avec les marqueurs sériques. Il fait suite à des recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) de 2007.
– Le décret n° 2014-32 du 14 janvier 2014, relatif aux diagnostics anténataux du Code de la Santé Publique (4) décrit les modalités d’information et de consentement de la femme enceinte et précise la nature des règles de bonnes pratiques qui devront être établies.
b. Ce que les sociétés savantes préconisent : les recommandations de la HAS Concernant le dépistage, la HAS rappelle qu’en première intention, il faut favoriser autant que possible le dépistage du premier trimestre (5).
En 2005, elle publie sur l’information des femmes enceintes (6) : « La femme enceinte doit être informée de l’objectif, de l’utilité, des bénéfices escomptés, des conséquences et des inconvénients de chaque examen de dépistage avant que celui-ci ne soit pratiqué. Le fait qu’elle puisse accepter ou refuser un examen doit être clairement établi ». Elle rappelle que l’information demande du temps et de la disponibilité ; le professionnel peut la moduler selon la situation et la délivrer progressivement si besoin. Il doit créer un climat d’écoute. Ainsi le 12 juin 2013 (5,7), elle émet une nouvelle publication afin d’harmoniser les pratiques tant en matière de dépistage que d’information : « Ces recommandations s’adressent […] à tous les professionnels qui participent d’une manière ou d’une autre au dépistage de la trisomie 21 […], aux réseaux de périnatalité et aux organismes professionnels qui accompagnent et organisent l’analyse des pratiques et/ou la formation des professionnels concernés ». Enfin, très récemment, en avril 2017 (8), elle publie ses recommandations concernant le nouveau schéma de dépistage intégrant le développement croissant du diagnostic prénatal non invasif (DPNI) ou test d’ADN libre circulant dans le sang maternel (ADNlc). Elle rappelle alors l’importance d’une information neutre, fiable et complète. L’information est un enjeu crucial. Concernant les tests ADNlc, il faut laisser un temps de réflexion aux patientes afin de leur permettre un libre choix à l’aide d’une information appropriée. Aussi, l’effet de cette information sur l’anxiété des patientes et le lien mère enfant apparait important à prendre en compte.
c. Coût et prise en charge : Actuellement, le test de dépistage de la T21 en France est pris en charge par l’Assurance Maladie à 100% pour la prise de sang et à 70% pour l’échographie du premier trimestre durant laquelle est faite la mesure de la clarté nucale (CN) (9). Jusqu’à présent le DPNI n’est pas pris en charge par l’Assurance Maladie et coûte 390€ (10). Certains centres prennent en charge ce dépistage pour leurs patientes s’il y a indication à le faire (sous condition que les femmes fassent suivre leur grossesse et prévoient d’accoucher dans cette maternité) tels que la maternité Jeanne de Flandre au CHRU de Lille, le CH de Douai, la maternité de Port Royal à Paris. Récemment, l’AP-HP (assistance publique des hôpitaux de Paris) a annoncé qu’elle allait ouvrir une plateforme automatisée pour élargir les possibilités de dépistage. Cependant ces centres restent une minorité.
d. Les sources d’information et les outils disponibles : Depuis plusieurs années de nombreux organismes ont réalisé consensuellement des fiches d’information pour les patientes et les couples : l’INPES (Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé), le CNGOF (Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français), la SFR (Société Française de Radiologie), la FNMR (Fédération Nationale des Médecins Radiologues), le CNSF (Collège National des Sages Femmes), le CFEF (Collège Français d’Echographie Fœtale), le CMG (Collège de Médecine Générale). [Annexes 3] Dans certaines maternités, des brochures d’information sont distribuées en plus des informations orales.

Vulgariser une information médicale, transmettre un message de santé

   Nous savons que toute situation à caractère scientifique ou professionnelle impose des transformations dans une situation d’enseignement et d’apprentissage tel que la simplification, la suppression de certaines variables,… Ici transmettre un message de santé s’apparente à un acte d’enseignement, c’est le fait d’informer : « faire savoir quelque chose à quelqu’un, porter quelque chose à la connaissance de quelqu’un »1. On parle de vulgarisation lorsqu’il s’agit d’expliquer des informations médicales à une personne non initiée (11) : vulgariser, c’est « reprendre largement, faire entrer dans les habitudes du grand public, de l’ensemble d’une société (pour un art, une connaissance, une idée, une pensée) ; mettre à la portée des non spécialistes des notions, des théories de différents domaines de savoirs ». D’après cette définition, il est évident que dans les métiers de la santé la vulgarisation est une activité quotidienne essentielle, non seulement vis-à-vis du devoir d’information envers les patients mais aussi pour qu’ils apprennent et comprennent comment agir sur leur santé afin d’en être de vrais acteurs. Le but est alors de savoir utiliser des mots du quotidien pour parvenir à expliquer des notions médicales parfois complexes. Par exemple, il est préférable d’utiliser le terme d’épaisseur de nuque plutôt que de clarté nucale. Ainsi, savoir communiquer est une véritable compétence professionnelle qui requiert parfois un apprentissage et doit toujours faire l’objet d’une posture réflexive. C’est alors dans la didactique professionnelle que l’on trouve les outils pour analyser les interactions verbales au sein d’une situation de travail, les compétences mobilisées et les conditions/le cadre nécessaire à ces interactions.

Qualité et clarté de l’information, communication avec le professionnel

   La moitié des parents (9/19) expliquent qu’ils n’ont pas posé plus de questions au professionnel ni ne se sont pas vraiment interrogés sur le dépistage car ils n’étaient pas dans une catégorie à risque. Ils précisent tous qu’ils auraient voulu en savoir plus s’il y avait plus de risques pour leur bébé. Ils ont trouvé les explications suffisantes. P6 « on se serait plus investis si on était en effet dans les cas de figure […] là on n’était pas dans ce contexte là ». M10 « là je suis pas concernée alors je suis pas intéressée […] il n’y aura pas le risque alors on laisse tomber ».
– Points forts : La majorité des parents se sont sentis libres de poser des questions (11/19), seuls 3 disent ne pas avoir eu la place de le faire. Spontanément 10 personnes interrogées déclarent que les informations étaient claires et 4 disent qu’elles ne l’étaient pas. Ensuite pour 11 personnes les explications étaient suffisantes : M6 « on attendait les résultats avant de voir la suite […] je voulais pas penser au pire, je voulais faire étape par étape » et M9 est contente de la façon dont sa médecin traitant lui a donné les informations « à chaque consultation […] elle a été étape par étape, elle a pas été trop vite » ; mais c’était insuffisant pour 3 parents.
– Reproches : M4 me confit que son conjoint n’était pas satisfait des explications de leur gynécologue, elle le dit plus anxieux qu’elle à propos de la grossesse « si vous interrogez mon conjoint, il va vous dire qu’il a trouvé qu’on n’avait pas été bien informés […] il aurait aimé qu’on lui explique mieux et il a toujours besoin qu’on lui explique plus ». Pour elle les explications n’était pas claires : « En fait il y a tellement de paperasse et de choses que, dans un rendezvous, on a plein de questions […] j’essayais de tenir un dossier de grossesse mais on vous fait faire des prises de sang, vous mettez là, vous comprenez rien à ce qu’on vous envoie donc moi j’ai bêtement imprimé tout ce qu’on me donnait, j’ai ramené et j’ai écouté ce qu’on m’a dit » « Mais je trouve que c’est pas très clair ». Elle rapporte que la gynécologue n’a pas respecté le rythme mensuel des consultations à cause des jours fériés et des ponts. De plus elle ne s’est pas sentie libre de poser toutes ses questions « oui mais quand on se fait expliquer une fois la chose et qu’on n’a pas compris, on n’ose pas dire ‘‘bah je comprends pas’’. C’est médical. Moi les probabilités… Je suis nulle en maths, faut qu’on m’explique 10 fois avec un schéma donc euh… Voilà, en général les sages femmes, tout ça, elles vous expliquent les choses mais les médecins on sent bien qu’ils ont pas le temps de vous faire un cours de médecine donc euh… […] Fin donc, j’avoue que je m’en suis remis aux médecins et j’ai dis ok, si on doit pas le faire, on doit pas le faire… » Alors elle dit s’être fiée aux professionnels. Elle se souvient aussi avoir eu du mal à comprendre pourquoi elle devait faire des prises de sang régulièrement car elle était de rhésus négatif. « On peut pas toujours tout comprendre et on et toujours un peu intimidé face aux médecins. Qu’ils sont quand même un peu débordés tous et que quand on a une question, en général on la garde un peu pour la sage femme ». C8 n’a pas posé beaucoup de questions et les parents émettent des reproches envers leur gynécologue qu’ils qualifient de « assez brut de décoffrage […] très bref […] pas très explicatif […] pas trop de pédagogie […] il n’a pas beaucoup de temps […] très médical ». P8 précise « c’est comme 99% des gens, c’est ça : quand ça va pas on s’y intéresse mais là… ». Il aurait aimé plus d’explications « Avec du recul ouais. C’est vrai que c’est quand même important et intéressant. Puis, si on a des prochains enfants ». Ils disent tous deux « c’est lui qui maitrise […] on se laisse un peu guider effectivement ». Ils auraient aimé que le gynécologue leur présente plus le dépistage comme un choix « qu’il nous le présente en disant est-ce que vous voulez le faire ? ». P8 est déçu de l’annonce du sexe du bébé par le gynécologue. Il aurait aimé plus d’explications de la part du gynécologue, savoir comment se font les choses et pourquoi on les fait « il aurait pu effectivement prendre 2 minutes et nous expliquer les tenants et les aboutissants ».
– Confiance et satisfaction : C6 a fait confiance à sa gynécologue « on s’est complètement laissés guider par les professionnels ». Cependant ils ne sont pas entièrement satisfaits du suivi « elle a pas le temps […] pas pédagogue du tout […] c’est d’ailleurs pour ça que j’avais finalement fait un suivi en sage-femme libérale […] on avait pas le temps de parler de toute façon […] mais elle est bien professionnellement » le père précise « C’est notre premier enfant et on avait envie d’être accompagnés et guidés et là c’était pas le cas ». C1 est très satisfait de la communication avec le gynécologue, il n’y avait pas de tabous. Pour M5 il n’y avait pas de tabous avec son gynécologue car il connait bien sa famille, il la tutoie. Pour M11 sa gynécologue était « très bien, elle expliquait bien les choses ». M12 étant pédiatre elle connaissait déjà tout le fonctionnement du dépistage, de plus la gynécologue qui a suivi sa grossesse était une fille de sa promo donc elle se sentait très à l’aise avec elle. Pour la notion de risque P7 explique « on nous l’avait expliqué mais après je pense qu’en tant que parent, on l’entend plus en tant qu’une certitude. On essaie de se convaincre que c’est une certitude malheureusement [en riant avec la mère] ».

Le dépistage : une décision de couple ?

   La majorité des patientes disent que la réalisation du dépistage est une décision de couple, certains en ont parlé avant la grossesse et d’autres se sont posés la question seulement au moment de la présentation du dépistage. Toutefois, quelques patientes expriment clairement qu’elles l’auraient fait quelque soit l’avis du père, elles ont donc bien compris l’aspect légal du dépistage. Effectivement, l’embryon n’a pas de statut juridique tant qu’il n’est pas né et la mère a le droit de disposer librement de son corps. Ainsi, seules les mères peuvent choisir de faire ou non les examens de dépistage et de diagnostic concernant le fœtus. Cette précision spontanée de leur part démontre aussi qu’elles sont habituées à prendre leurs propres décisions et qu’elles sont autonomes dans leur vie quotidienne..

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : CADRE CONCEPTUEL
I. Modalités de dépistage et de diagnostic de la Trisomie 21 en France
1) Le dépistage comme stratégie de santé publique
2) Le dépistage combiné
3) Le nouveau dépistage combiné : tests ADNlc ou DPNI (8)
II. Transmettre une information en santé : didactique professionnelle et langage en situation de travail
1) Vulgariser une information médicale, transmettre un message de santé
2) Didactique professionnelle
3) Langage en situation de travail.
4) Les actions au travail : tâches et activités
5) Transmettre une information : une situation d’apprentissage
DEUXIEME PARTIE : ETUDE QUALITATIVE EN SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES 
I. Présentation de l’étude
1) Le thème et le choix du sujet
2) Objectifs
3) Problématique
4) Hypothèses de recherche
5) La méthodologie
II. Les résultats
1) Population de l’étude
2) Modalités d’information
3) Explications fournies par les professionnels de santé
4) Connaissances et compréhension du dépistage
5) Le ressenti face à cette information
TROISIME PARTIE : ANALYSE ET DISCUSSION
I. Critique de la démarche de recherche
1) Limites et biais de l’étude
2) Points forts de l’étude
II. Validation et infirmation des hypothèses : analyse thématique
1) Hypothèse 1 : Les professionnels de santé transmettent correctement l’information sur le dépistage
2) Hypothèse 2 : Les modalités et les enjeux du dépistage semblent ne pas toujours être compris par toutes les patientes et les couples
3) Hypothèses 3 : Les patientes et les couples sont satisfaits des informations apportées par les professionnels pendant la grossesse
III. Autres thèmes soulevés
1) La confiance envers les professionnels et le système de soins français
2) Le dépistage : une décision de couple ?
3) La présence des pères en consultation et leurs réactions
4) Réflexions sur le dépistage et la maladie
5) Le ressenti face au dépistage
IV. Perspectives d’amélioration, propositions et ouverture
1) Pour aider les professionnels
2) Pour compléter mon étude
CONCLUSION
ANNEXES

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