Les fondements de l’epistemologie classique

LES FONDEMENTS DE L’EPISTEMOLOGIE CLASSIQUE

La source de nos connaissances a fait l’objet de polémiques entre empiristes et rationalistes. Les premiers soutiennent que nous ne pouvons connaître qu’après expérience. Toutes nos connaissances d’après eux proviennent de l’expérience, tandis que pour les seconds nous pouvons, partant de notre seule raison, accéder à la connaissance vraie sans faire usage de l’expérience. Cette controverse entre ces deux courants est relatée par Popper en ces termes : « le rationalisme classique défend la conception selon laquelle il est également possible (dans certaines circonstances) de décider par des « arguments rationnels », donc a priori, c’est-à dire sans interroger l’expérience, de la vérité ou de la fausseté des propositions portant sur la réalité […]. L’empirisme classique défend le point de vue opposé. Sa thèse fondamentale est que l’on ne peut décider qu’a posteriori, c’est-à-dire par l’expérience de la vérité ou de la fausseté d’un énoncé portant sur la réalité. De cette thèse fondamentale, l’empirisme classique tire des conséquences inductivistes : il croit pouvoir en conclure que les lois de la nature doivent être dérivées de l’expérience, c’est-àdire induites. » .

La méthode inductive

Depuis Francis Bacon, la méthode inductive a été considérée comme la méthode des sciences empiriques ou sciences naturelles. Elle a d’abord élu domicile en Angleterre avant de se répandre sur le reste du monde. En quoi consiste –t-elle ?

Elle est généralement définie comme le passage d’énoncés singuliers dont nous avons eu l’expérience à des énoncés universels dont nous n’avons pas eu l’expérience. Les inductivistes, de cette manière, soutiennent que cette méthode est la seule capable de nous aider à décider de la vérité des théories. En effet, Angèle Kremer- Marietti, dans son article « L’épistémologie de Sir Karl Popper est-elle irrésistible ? », nous distingue plusieurs sortes d’induction : nous avons d’abord, nous dit-elle, l’induction par généralisation empirique directe, c’est-à-dire celle qui passe du particulier au général ; ensuite l’induction par réformes de théories, c’est-à dire l’induction amplifiante qui passe d’un nombre limité de cas observés à une relation causale généralisée ; enfin les inductions statistiques dont elle dit qu’elles sont aptes à généraliser des jugements de probabilité. Mais au-delà de cette pluralité d’induction telle que nous l’a décrite Angèle Kremer-Marietti, est-il raisonnable de partir de ce que nous savons sur le passé pour anticiper sur le futur ?

Ne pouvons- nous pas nous tromper en croyant que les cas non encore expérimentés ressembleraient à notre expérience du passé ? La réponse de ce fervent croyant en la méthode inductive, en l’occurrence Reichenbach, est sans ambiguïté. Il soutient que « Le « principe d’induction » détermine la vérité des théories scientifiques. L’éliminer de la science ne signifierait rien de moins que priver celle- ci de son pouvoir de décider de la vérité ou de la fausseté des théories. Il est clair que sans lui la science ne garderait plus longtemps le droit de distinguer ses théories des créations fantasques et arbitraires de l’esprit du poète » Pour Reichenbach donc et les inductivistes d’une manière générale, la méthode inductive est le socle sur lequel doit reposer toute la science pour espérer pouvoir distinguer les théories vraies des non vraies. Bien plus, pour eux, il n’est pas pensable de l’éliminer de la science. Se soustraire d’elle c’est cesser de faire de la science ou de penser scientifiquement.

Cependant, malgré la foi des empiristes en la méthode inductive, celle-ci sera d’abord remise en cause par David Hume. Ensuite, elle sera invalidée par l’auteur de Conjectures et réfutations. Que lui reprochent-ils au juste ? David Hume est le premier à avoir formulé une critique de l’induction. A son avis, celle-ci pose problème parce que le fait de vouloir partir des expériences du passé pour justifier celles du futur ne peut pas être démontré rationnellement. Autrement dit, pour Hume, nos expériences du passé peuvent ne pas ressembler à celles à venir. Bien plus, nos attentes, en voulant justifier l’universel par le particulier, peuvent être déçues car rien ne nous garantit que la nature suivra le même mouvement. Ces inquiétudes face à l’induction font dire à Hume que « La raison ne peut jamais nous montrer la connection d’un objet avec un autre, même si elle est aidée par l’expérience et par l’observation de leur conjonction constante dans tous les cas passés. Donc, l’esprit passe de l’idée ou de l’impression d’un objet à l’idée d’un autre, ou à la croyance en un autre, il n’est pas déterminé par la raison mais par certains principes qu’il associe l’une avec l’autre les idées de ces objets et qui les unit dans l’imagination. » .

Mais si d’après Hume, l’induction ne peut pas avoir de justification rationnelle, qu’estce qui fait penser aux inductivistes qu’à partir de certains cas observés nous pouvons généraliser ? La réponse du penseur Ecossais à ce niveau est très claire. C’est donc par simples suppositions ou par habitudes que nous pensons qu’à partir de certains cas observés ou expérimentés, nous pouvons penser que d’autres dont nous n’avons pas expérimentés, observeront les mêmes comportements. N’est-ce pas ce qui lui fait dire dans Enquête sur l’entendement humain qu’ « En réalité, tous les arguments tirés de l’expérience se fondent sur la ressemblance que nous découvrons entre les objets naturels et qui nous engage à attendre des effets semblables à ceux qui, à ce que nous avons trouvé, suivent de tels objets. Bien que personne, sinon un sot ou un fou, ne prétende jamais discuter de l’autorité de l’expérience ou rejeter ce grand guide de la vie […]. » .

Toutefois il faut rappeler que Hume, malgré sa critique de l’induction, c’est-à-dire malgré le fait de refuser à celle-ci un fondement rationnel, ne l’invalide pas non plus. Car il reste convaincu que même si, rationnellement, il est impossible de démontrer l’induction, il n’en demeure pas moins qu’on peut la fonder psychologiquement. Qui plus est, l’auteur du Traité de la nature humaine considère l’habitude et la répétition comme étant des sources de connaissance pour l’homme.

D’ailleurs, c’est le fait de vouloir fonder psychologiquement l’induction qui l’opposa à Sir Karl. Celui-ci est d’accord avec lui quand il dit que l’induction ne repose sur aucun fondement rationnel. Cependant, l’auteur de La logique de la découverte scientifique s’oppose à tout fondement psychologique de l’induction.

Sa critique de l’induction est donc une critique de la critique de David Hume parce qu’il trouvait cette dernière insuffisante. Ainsi Popper ne passera pas par mille chemins pour dénoncer les ambiguïtés que comporte la méthode inductive. Dans son épistémologie, l’induction n’est plus d’actualité. Elle est donc inutile et inefficace, à ses yeux, pour servir de critère de démarcation entre science et non-science. Pour cette raison, il la rejette simplement. C’est cette incapacité de l’induction à servir de critère de démarcation, c’est-àdire de séparation de la science des autres domaines de savoir, qui pousse Popper à dire : « En rejetant la méthode inductive, pourrait-on dire, je prive la science empirique de ce qui parait être sa caractéristique la plus importante et ceci signifie que je lève les barrières qui séparent la science de la spéculation métaphysique. Je répondrai à cette objection que ma principale raison de rejeter la méthode inductive est précisément qu’elle ne fournit pas de marque distinctive appropriée au caractère empirique, non métaphysique, d’un système théorique ; en d’autres termes, je la rejette parce qu’elle ne fournit pas de critère de démarcation adéquat. » .

En plus de cela, Popper affirme que l’observation de plusieurs cygnes blancs ne nous permet en aucun cas de croire que tous les cygnes sont blancs. Cela s’explique par le fait que nous courons toujours le risque de pouvoir rencontrer dans le futur un cygne non blanc qui invaliderait notre croyance à la proposition : « Tous les cygnes sont blancs» Mais en refusant, toute autorité à la méthode inductive, sur quel postulat méthodologique, outre celle-ci, Popper compte-t-il s’appuyer pour donner plus de crédibilité à son critère de scientificité ? La seule méthode qui compte pour Sir Karl est la méthode déductive de contrôle ou le rationalisme critique. Celle ci, contrairement à celle dite inductive laquelle consiste à justifier les énoncés universels par des énoncés particuliers, se donne comme tâche principale de soumettre à de sévères tests les théories scientifiques pour les éliminer au cas où elles seraient erronées sinon les maintenir momentanément en cas de conformité avec des énoncés de base.

En définitive, nous pouvons dire qu’avec Sir Karl, la méthode inductive doit être écartée du champ de la science pour la seule et simple raison qu’en plus d’être incohérente, elle nous entraîne dans une régression à l’infini. C’est ainsi qu’en la rejetant, le philosophe Popper s’attaque forcément aux positivistes du Cercle de Vienne ; plus précisément à leur critère de scientificité, c’est-à-dire la vérification ou la justification des théories scientifiques.

Le positivisme logique

En proclamant la « mort » de la méthode inductive, dans son épistémologie, Sir Karl s’attaque aux valeurs qui unissent les membres du Cercle de Vienne. Ce dernier est un mouvement d’intellectuels, regroupant philosophes, logiciens (comme Rudolf Carnap, Otto Neurath, Moritz Schlick), mathématiciens (Kurt Gödel), physicien (Philippe Franck) etc. Ce mouvement s’est constitué à partir de 1922 autour de la personne de Moritz Schlick. En effet, malgré leur appartenance à des domaines différents, les membres du Cercle de Vienne se partageaient un certain nombre de croyances.

D’abord ils faisaient de la science un discours certain et précis, pensant qu’elle pouvait être vérifiée voire confirmée par l’observation et par l’expérience. Ainsi, ils la défendaient contre toute irrationalité, c’est-à-dire contre tout savoir qui ne pouvait pas faire l’objet de vérification par l’expérience. Ensuite, partant de l’analyse logique du langage, ils croyaient pouvoir unir la science. Et enfin, à la question du critère de démarcation entre science et non-science, ils soutenaient que la vérification des théories par l’expérience était la seule valable. Les propositions scientifiques étaient, selon les néo-positivistes, celles qui requièrent un certain sens et une signification.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I. LES FONDEMENTS DE L’EPISTEMOLOGIE CLASSIQUE
a) La méthode inductive
b) Le positivisme logique
c) Le rationalisme cartésien
DEUXIEME PARTIE
II. LE CRITERE DE DEMARCATION : SCIENCE ET NON- SCIENCE
a) La falsifiabilité ou critère de scientificité des théories
b) Choix et corroboration des théories
c) Rationalisme critique et statut de la métaphysique
TROISIEME PARTIE
III. PROGRES ET VERITE CHEZ POPPER
a) La conception poppérienne de l’erreur
b) La vérité chez Popper : une quête sans fin
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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