Les fondements de la theorie de la justice comme equite

John RAWLS enseignait l’histoire de la philosophie morale en dispensant des cours sur les théories des auteurs classiques à l’université de Harvard mais aussi sur sa propre théorie. Nous en avons l’illustration dans ces propos de Bertrand Guillarme introduisant l’ouvrage de RAWLS intitulé La justice comme équité. Une reformulation de Théorie de la justice : « L‟enseignement de Rawls était organisé de manière comparative : il présentait, sur quelques thèmes choisis, les thèses d‟un grand auteur classique (Hobbes, Locke, Rousseau, Kant, Hegel, Mill ou Marx) puis celle de sa propre théorie, de manière à engager ses étudiants, souvent débutant en philosophie, dans une réflexion pratique personnelle ». Précisons que la Philosophie analytique dominait dans les départements de philosophie en Amérique. Cette philosophie étudiait essentiellement la logique, la philosophie du langage et ne s’occupait pas des questions de justice et d’éthique. Rawls, étant conscient que la justice est fondamentale pour tout système politique, utilise les instruments de la Philosophie analytique et de l’Économie politique en les transférant dans le domaine de la Philosophie politique pour élaborer sa théorie de la justice. À cet effet, son premier ouvrage intitulé Théorie de la justice (1971) découle de son article portant sur la justice publié en 1958 . Après cette œuvre, il a continué à publier des articles qui ont donné naissance à des ouvrages tels que Justice et démocratie (1993), Libéralisme politique (1995) entre autres. Il reste l’un des philosophes politiques les plus étudiés au XXème siècle. C’est la raison pour laquelle Luc Foisneau et Véronique Munoz-Dardé dans leur introduction à l’ouvrage de Rawls intitulé Justice et critique écrivent :

« Depuis 1971, la Théorie de la justice est devenue un best-seller lu dans le monde entier, statut inattendu pour une œuvre de philosophie assez technique. Des milliers de livres et d‟articles lui ont été consacrés. Ainsi, Rawls est venu se joindre à la petite liste des grands classiques de la théorie politiques : Aristote, Platon, Hobbes, Locke, Rousseau, Kant, Mill, Marx, etc. » .

LA POSITION ORIGINELLE COMME JUSTE PROCEDURE DE LA COOPERATION SOCIALE

La position originelle est l’hypothèse selon laquelle les membres de la coopération sociale se trouvent dans une situation où ils sont en parfaite méconnaissance de ce qui sera leur statut social. En effet, ils sont appelés à choisir les principes qui gouverneront leur société. Ces personnes désignées comme représentants dans cette situation initiale peuvent être nommées des partenaires. Comment peut-on comprendre une telle appellation dans le jargon rawlsien ? Pour répondre à cette question, Luc Foisneau, dans l’introduction à l’ouvrage Justice et critique, écrit : «Les « partenaires », ce sont chacun de nous, vous et moi, lorsque nous délibérons sur les principes sans que notre perspective soit faussée par nos préjugés ou nos situations sociales respectives» .

Il est important de préciser que la position originelle n’est pas une situation historique réelle : « il faut ici se souvenir que la position originelle n‟est pas un lieu mais un point de vue qu‟on est toujours susceptible de réadopter » . Par conséquent, la position originelle n’est qu’une hypothèse. Elle est appelée par Robert Nozick une « hypothétique situation de choix » . Autrement dit, elle n’a jamais existé dans le temps. La position originelle est un dispositif qui permet à ces partenaires de mieux délibérer sur la question des principes de justice . De ce fait, elle est aux yeux de Catherine Audard un « processus heuristique idéal » . Parler de la coopération sociale suppose que les principes de ce contrat reposent sur un accord dès le départ. C’est pourquoi Rawls affirme ces propos : « L‟idée intuitive de la théorie de la justice comme équité consiste à se représenter les principes premiers de la justice comme faisant eux-mêmes l‟objet d‟un accord originel dans une situation initiale définie de manière adéquate » . Pour que cette démarche soit objective, il faut que les partenaires aient des informations générales sur la nature des principes de la justice à choisir mais sur aussi la manière dont ils doivent choisir ces principes. En ce sens, Rawls écrit :

« L‟accord initial comporte ainsi deux parties :
En premier lieu, un accord sur les principes de justice politique destinés à la structure de base (par exemple ceux de la justice comme équité) ; et En second lieu, un accord sur les principes de raisonnement et les règles de la preuve à la lumière desquels les citoyens doivent décider si les principes de justice s‟appliquent, quand et dans quelle mesure ils sont satisfaits, et quelles législations politiques les réalisent mieux dans les conditions sociales existantes » .

Après avoir parlé de l’accord initial, comment pouvons-nous décrire les individus choisis comme représentants ? Pour décrire ces personnes, nous allons dire qu’elles sont libres, égales et rationnelles. La liberté et l’égalité permettent d’avoir un contrat équilibré. Car, les partenaires sont tous au même pied d’égalité c’est-à-dire que la raison du plus fort ne règne pas. Selon François Ost, si la personne qui prend part au contrat est une personne libre, elle a toujours la possibilité de revoir ses objectifs. Mais aussi elle ne reçoit aucune contrainte extérieure puisqu’elle est autonome et pourvue d’une égale dignité . Il faut noter, cependant, que l’équilibre dans le contrat ne garantit pas la justice. Nous en avons l’illustration dans cette assertion :

« Bien entendu, le fait qu‟une situation soit un équilibre, et même qu‟un équilibre stable, ne signifie pas qu‟elle soit juste ou correcte. Cela signifie seulement que, étant donné l‟évaluation que les hommes font de leur position, ils agissent efficacement pour la préserver. Il est clair qu‟in équilibre fondé sur la haine et l‟hostilité peut être stable ; chacun peut penser que tout changement possible serait encore pire » .

Au regard de ces propos, une situation équilibrée ne peut être considérée que comme un pas vers une procédure juste. Ainsi, il est intéressant pour les partenaires d’avoir cette symétrie, car chacun d’eux choisit par rapport à un équilibre réfléchi . C’est la raison pour laquelle l’auteur de la Théorie de la justice avance ces propos : « La théorie de la justice comme équité est une théorie de nos sentiments moraux tels qu‟ils se manifestent dans nos jugements bien pesés en équilibre réfléchi » . Par ailleurs, la reproduction de la justice est très importante chez John Rawls, et cela n’est possible que si les partenaires sont à la fois rationnels et raisonnables. Jacques Bidet le souligne dans les propos suivants :

« C‟est en tant que rationnels et raisonnables que les citoyens se reconnaissent comme libres et égaux et exigent des principes à partir desquels on pourra définir des institutions justes, assurant non seulement une liberté et une égalité ponctuelles, mais un régime reproducteur de liberté et d‟égalité, c‟est-à-dire de justice » . 

Le concept de rationalité revêt une importance capitale parce qu’il peut paraître qu’un être rationnel soit appelé à choisir des principes qui visent la réalisation de ses intérêts particuliers. Cependant, la rationalité dans la situation initiale est limitée, car il y a une certaine forme de restrictions de l’information. Pour mieux expliciter cette idée, Rawls fait recours au concept de voile d’ignorance. À ce propos, il souligne :

« Par exemple, si un homme savait qu‟il était riche, il pourrait trouver rationnel de proposer le principe suivant lequel les différents impôts nécessités par les mesures sociales doivent être tenus pour injustes ; s‟il savait qu‟il était pauvre, il proposerait très probablement le principe contraire. Il faut, pour se représenter les restrictions nécessaires, imaginer une situation où tous seraient privés de ce type d‟information. Il faut exclure la connaissance de ces contingences qui sème la discorde entre les hommes et les conduit à être soumis à leurs préjugés. De cette façon, on parvient tout naturellement à l‟idée du voile d‟ignorance » . 

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LES FONDEMENTS DE LA THEORIE DE LA JUSTICE COMME EQUITE
CHAPITRE I : LA POSITION ORIGINELLE COMME JUSTE PROCEDURE DE LA COOPERATION SOCIALE
CHAPITRE II : LES PRINCIPES DE LA JUSTICE ET LA QUESTION DE LEUR PRIORITE
CHAPITRE III : LES INSTITUTIONS CONFORMES À LA THEORIE DE LA JUSTICE COMME EQUITE
DEUXIEME PARTIE LES INEGALITES ECONOMIQUES ET SOCIALES AU SENEGAL
CHAPITRE I : LES INEGALITES D’ACCES A L’EDUCATION ET À LA FORMATION
CHAPITRE II : DE LA REPARTITION DES CHARGES ET DES RICHESSES
CHAPITRE III : LE SYSTEME DE CASTES
TROISIEME PARTIE : LECTURE DES DEUX PRINCIPES DANS LE CONTEXTE SENEGALAIS
CHAPITRE I : DU RESPECT DU DEVOIR DE FAIR-PLAY
CHAPITRE II : DU STATUT DE L’EGALITE DES CHANCES DANS LE SYSTEME EDUCATIF ET DANS LA REPARTITION DES CHARGES
CHAPITRE III : DU RAPPORT DES CASTES AU PRINCIPE D’EGALE LIBERTE
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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