Les filières actuelles de traitement des déchets municipaux

La notion de déchets

Historiquement, la définition d’un déchet est celle d’un bien dont son propriétaire ne veut plus et qui est destiné au rebus. Ainsi, la loi du 15 juillet 1975 relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux en France et la loi sur la qualité de l’environnement au Québec définissent un déchet comme « tout résidu d’un processus de production, de transformation ou d’utilisation, toute substance, matériau, produit ou plus généralement tout bien meuble abandonné ou que son détenteur destine à l’abandon. » (France, 1975, Loi n°75- 633; Québec, 1979, Loi L.Q.E., chapitre Q-2). En France, cette loi a donné lieu à 27 articles du Code de l’environnement qui ont pour objectifs les deux principaux facteurs favorisant l’établissement d’une règlementation sur les déchets à cette époque: la protection de la santé publique et celle de l’environnement. Au début des années 1990, un changement de paradigme se produit et le caractère exploitable du déchet apparait dans la règlementation. En France, c’est l’adoption de la loi n°92-646 du 13 juillet 1992 relative à l’élimination des déchets ainsi qu’aux installations classées pour la protection de l’environnement qui amorce le changement en renforçant la loi de 1975 par l’ajout d’alinéas relatifs à la valorisation éventuelle des déchets (France, Loi n° 92-646, 1992).

Au Québec, cette qualité de ressource est introduite de la même manière dans la Loi sur la qualité de l’environnement en 1999 (Québec, Loi L.Q.E., chapitre Q-2, 1999). Avec ces différents textes, le déchet revêt donc un potentiel exploitable. Pour autant, sa définition ne change pas. Il est toujours assimilé à un bien dont le détenteur n’en perçoit plus l’utilité immédiate ou qui n’assure plus la fonction pour laquelle il était destiné. Aussi, est qualifiée de déchet toute matière qui aurait été mal utilisée. Un exemple est cité par Pongrácz and Pohjola (2004) en agriculture et en aquaculture, où des substances (nutriments, nourriture) terminent en déchets parce qu’ils sont utilisés en trop grandes quantités et n’atteignent pas leurs cibles (plantes, poissons). Seadon (2010) suggère ainsi que le concept de déchet est le résultat d’un mode de pensée inadéquat, dit « en bout de tuyau ». Cette vision ne se focalise pas sur le véritable problème qui serait une utilisation inefficiente des ressources, aussi bien en amont qu’en aval de la production du déchet. En outre, il apparait inapproprié de qualifier de déchet un bien qui présente des caractéristiques ayant encore une valeur pour une entité, quelle qu’elle soit (Pongrácz & Pohjola, 2004). Par ailleurs, l’expression « le déchet des uns fait la fortune des autres », avancée par Gérard Bertolini, directeur de recherche au CNRS, reflète la complexité de la notion de déchets, qui est à la fois un élément dont on souhaite se défaire et une ressource potentielle (Bertolini, 2002).

Dans cette optique et afin de souligner le caractère exploitable d’un déchet, le Québec utilise le terme « matière résiduelle » (Québec, Loi L.Q., chapitre Q-2, 1999). Certains auteurs, pour leur part, proposent de redéfinir ce qu’est un déchet. Au lieu qu’un objet devienne un déchet par la volonté d’abandon de son détenteur, l’idée est de donner une définition fondée sur la possibilité qu’a l’objet de remplir ou non sa fonction initiale (Pongrácz & Pohjola, 2004). Ainsi, si une entreprise stocke des pièces de rechange pour des machines qui ont été remplacées, la définition traditionnelle fait que ces pièces sont considérées comme des déchets, alors qu’elles peuvent être utilisées par une autre entreprise se servant toujours des mêmes machines (Pongrácz & Pohjola, 2004). Enfin, un déchet peut également se définir par sa valeur d’échange économique, qui est traditionnellement négative à la fin du processus de production du déchet, et qui doit devenir positive dans le cas d’un non-déchet (Bertolini, 2004). Néanmoins, bien que le terme de « déchet » fasse débat, les principes actuellement mis en oeuvre pour sa gestion font largement appel à sont potentiel exploitable. Comme le mentionnent Hultman and Corvellec (2012), il serait peut-être plus juste de parler de « Gestion des ressources » que de « Gestion des déchets ».

Les principes de gestion des déchets « Le meilleur déchet est celui qui n’existe pas ». Cette expression populaire traduit le premier principe (Réduction) de la hiérarchie des 3RV-E (Réduction, Réemploi, Recyclage, Valorisation et Élimination), cadre théorique fondateur de la gestion des déchets moderne. Au Québec, la démarche des 3RV-E est apparue dans la première Politique de gestion intégrée des déchets solides en 1989. Il y est alors mentionné que « la réduction, le réemploi, le recyclage, la valorisation et l’élimination doivent, dans cet ordre, devenir les assises d’une gestion intégrée des déchets solides au Québec » (Ministère du Développement Durable de l’Environnement et des Parcs, 2010, p. 2) sans pour autant préciser une définition des termes composant la hiérarchie. Elle sera donnée plus tard dans le rapport « Déchets d’hier, ressources de demain » rédigé par le Bureau d’Audiences Publiques sur l’Environnement (BAPE) en 1997. Ce rapport, prélude à la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles 1998-2008, reprend en effet la hiérarchie des 3RV-E, en précisant toutefois qu’elle doit être validée par des « études d’opportunité écologique et, le cas échéant, des analyses du cycle de vie » (BAPE, 1997, p. 50). En France, la notion de hiérarchie des voies de traitement apparait explicitement pour la première fois dans l’alinéa II de l’article L541-1 du Code de l’environnement où il est préciser de « mettre en oeuvre une hiérarchie des modes de gestion des déchets consistant à privilégier, dans l’ordre: a) la préparation en vue de la réutilisation, b) le recyclage, c) toute autre valorisation, notamment la valorisation énergétique, d) l’élimination » (France, Article L541-1, Alinéa II, 2010).

En dehors de la notion de réduction à la source, cette hiérarchie, appliquée telle qu’elle, présente cependant certaines limites, comme l’avait pressenti le BAPE. D’une part, ce classement ne tient pas compte des besoins du marché. Un produit recyclé, ou valorisé, n’est vraiment une ressource (utile) que s’il a un débouché et que les consommateurs sont prêts à l’acheter (Hamzaoui-Essoussi & Linton, 2010; Oyedele, Ajayi, & Kadiri, 2014). D’autre part, si cette condition est remplie, des objectifs de performance technique, au moins similaires à ceux du matériau qu’il remplace, doivent être atteints (Cox, 2015). Enfin, la hiérarchie n’intègre pas la question du transport, et du territoire en général, qui peut amputer en partie ou totalement les bénéfices économiques et/ou environnementaux d’un éventuel recyclage (Brambilla Pisoni et al. 2009; Larsen et al. 2010). Cette notion est toutefois abordée ailleurs dans la règlementation (France, Article L541-1, Alinéa I, 2000).

Dans une approche plus large que la hiérarchie des 3RV-E, la philosophie des 4R-VD (Réduction, Récupération, Réutilisation, Recyclage, Valorisation et Disposition) prône une gestion intégrée des déchets plutôt qu’une hiérarchie des actions (Hausler, 1999). Cette approche systémique s’inscrit dans le cadre de référence du PNUE (Programme des Nations Unies pour l’Environnement) établi « pour concevoir et implémenter de nouveaux systèmes de gestion des déchets et pour analyser et optimiser les systèmes existants » (Seadon, 2010). Contrairement aux 3RV-E, une gestion intégrée n’avantage pas certaines solutions mais énonce des principes permettant aux gestionnaires de développer leurs propres systèmes en fonction des conditions locales. Le principe fondamental, et qui apparait dans la définition du PNUE, est la notion de système.

Un système est « un ensemble d’unités ou d’éléments en interaction et qui forment un tout intégré ayant pour objectif de fournir un service » (Seadon, 2010). Autrement dit, en restant dans un premier temps au niveau du système « gestion des déchets », il est avantageux de considérer l’ensemble des activités liées à la récupération et au traitement (collecte, transport, tri, traitement, enfouissement des résidus ultimes) pour la conception d’un système globalement performant (Bing et al., 2016; McDougall, White, Franke, & Hindle, 2001). A un second niveau, la vision systémique s’étend aussi au contexte territorial dans lequel s’inscrit la gestion des déchets: celle-ci n’est en effet qu’un élément d’un système beaucoup plus grand (ville ou région). Or, si le déchet est considéré comme une ressource, la performance de la valorisation dépend des produits qu’il remplace, de leur mode de production et des caractéristiques du territoire (Steubing et al., 2014). Une perspective holistique allant donc au-delà du système « gestion des déchets » est ainsi nécessaire pour mesurer les réels bénéfices des services rendus (Bing et al. 2016; Larsen 2009).

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE
1.1 La gestion des déchets
1.1.1 La notion de déchets
1.1.2 Les principes de gestion des déchets
1.1.3 Les filières actuelles de traitement des déchets municipaux
1.1.3.1 La collecte et le tri
1.1.3.2 Le transfert et le transport
1.1.3.3 Le traitement et la valorisation
1.2 Les outils d’aide à la conception des filières de traitement
1.2.1 Localisation des sites de traitement
1.2.2 Taille et nombre des sites de traitement
1.2.3 Niveaux de hiérarchisation du réseau de transport
1.3 La dimension territoriale dans la conception de filières de traitement
1.3.1 L’impact relatif des activités de transport
1.3.2 La prise en compte des spécificités territoriales
1.3.3 Les indicateurs de performance
CHAPITRE 2 PRÉSENTATION DU PROJET DE RECHERCHE
2.1 Problématique de recherche
2.2 Hypothèses de recherche
2.3 Objectifs de recherche
CHAPITRE 3 ARTICLE 1: UNE ANALYSE SPATIALE DE STRUCTURES DE TRANSPORT DES DÉCHETS HIÉRARCHISÉES SOUMISES À DES CONDITIONS TERRITORIALES CHANGEANTES
3.1 Abstract
3.2 Introduction
3.3 Methodology
3.3.1 The spatial distribution scenarios
3.3.2 The economic model
3.3.3 Creation and spatial analysis of the structures
3.3.3.1 Creation of the structures
3.3.3.2 Spatial analysis of the structures
3.4 Results
3.4.1 Comparison of the hierarchical and non-hierarchical waste transport structures
3.4.2 Sensitivity analysis on the payload (PL)
3.4.3 Spatial analysis of the structures
3.5 Discussion
3.6 Conclusion
CHAPITRE 4 ARTICLE 2: UNE APPROCHE TERRITORIALE POUR L’ÉVALUATION DE L’ÉCHELLE SPATIALE D’UNE FILIÈRE DE TRAITEMENT DES DÉCHETS
4.1 Abstract
4.2 Introduction
4.3 Methodology
4.3.1 Collection and transport model
4.3.2 Waste-to-biomethane recovery model
4.3.2.1 Biomethane production
4.3.2.2 Costs and embedded energy assessment
4.3.3 Performance indicators
4.3.3.1 Profitability assessment
4.3.3.2 District’s economic and energetic contribution to the supply chain’s global efficiency
4.4 Description of the case study: Montreal
4.5 Results and discussion
4.5.1 Districts contribution to the global efficiency
4.5.2 Districts contribution with other management strategies
4.5.2.1 Alternative facility location
4.5.2.2 Alternative treatment technology
4.5.3 Perspectives on the approach
4.6 Conclusion
CHAPITRE 5 ARTICLE 3: UNE APPROCHE TERRITORIALE DE LA VALORISATION DES DÉCHETS: L’EFFET À L’ÉCHELLE D’UNE UNITÉ TERRITORIALE D’UNE DÉCENTRALISATION DE LA FILIÈRE
5.1 Abstract
5.2 Introduction
5.3 Methodology
5.3.1 Territorial approach of a recovery chain’s design
5.3.1.1 Recovery potentials
5.3.1.2 Transport capacity
5.3.2 Description of the scenarios
5.3.2.1 Waste collection and transport
5.3.2.2 Waste recovery
5.3.3 Primary fossil energy assessment
5.4 Description of the case study: Montreal, Canada
5.5 Results and discussion
5.5.1 Recovery potentials for centralized systems
5.5.2 Recovery potentials for decentralized systems
5.5.3 Transport capacity
5.6 Conclusion
CHAPITRE 6 DISCUSSION
6.1 Synthèse des travaux de recherche
6.1.1 Synthèse de l’article 1 – Hiérarchisation du système de transport
6.1.2 Synthèse de l’article 2 – Taille d’un site de traitement
6.1.3 Synthèse de l’article 3 – Performance de la décentralisation à l’échelle des zones du territoire
6.1.4 Approche territoriale pour la conception d’une filière de traitement
6.2 Particularités de l’approche territoriale proposée
6.2.1 Principes généraux
6.2.2 Intérêt et retombées de l’approche
6.2.3 Recommandations et limites de l’approche
6.2.4 Perspectives
6.3 L’applicabilité à d’autres secteurs
CONCLUSION
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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