Les facteurs de risque de rupture du ligament croisé antérieur chez la femme

La femme, de plus en plus sportive, présente des caractéristiques qui lui sont propres : en termes d’anatomie, d’hormones, de contrôle neuromusculaire, mais aussi en termes de mental, et d’écoute de soi.

CONTEXTE

Pourquoi étudier la population féminine ?
Harmon et al. (1) évoquent le lien entre le titre IX et l’augmentation de la participation des femmes dans les compétitions. Le titre IX, loi fédérale votée en 1972 aux États-Unis, a accordé les mêmes moyens aux femmes qu’à leurs homologues masculins dans les programmes sportifs scolaires et universitaires. Il interdit toute discrimination sur la base du sexe. Cet amendement a donc permis l’éclosion de la participation féminine dans les différents sports. Il existe une prédisposition accrue à la rupture du LCA chez la femme, sex-ratio pouvant aller de 2 jusqu’à 8 (1). La participation féminine a été multipliée par 9 depuis l’adoption du Titre IX (Hewett et al. (2)).

Si l’on se réfère au rapport fourni par le Ministère des Sports, le nombre de licences délivré aux femmes est en constante augmentation (+ 1,99 % entre 2008 et 2014). De plus selon Hewett et al. (3), la participation des femmes au sport à haut niveau n’a cessé de croître ces 30 dernières années. Les blessures du LCA, en constante augmentation chez la femme, est en corrélation avec cette participation croissante. L’athlète féminine est exposée 4 à 6 fois plus que son homologue masculin à une blessure du LCA. Prodomos et al. (4) estiment à 100 000 les blessures du LCA aux USA. Dans cet article, le sexratio homme-femme, concernant le risque de blessure du LCA peut aller jusqu’à 9. Selon les auteurs, ce sex-ratio évolue en fonction des sports ; et celui-ci reste approximatif, puisqu’il n’existe pas d’étude systématique sur les différents sports. Si le sex-ratio varie d’une étude à l’autre, l’impression qu’il en ressort est que l’athlète féminine est plus exposée que son homologue masculin aux blessures du ligament croisé antérieur. Le mécanisme qui explique la disparité entre les deux sexes est probablement multifactoriel ; il existe de nombreuses théories expliquant ce sex-ratio. De nombreux facteurs de risques sont identifiables.

Dans la vie de tous les jours, le LCA subit une traction de 150N. Lors d’activité sportive, cette traction varie de 400 à 750N. La résistance mécanique maximale acceptable est de 1700 N. Elle diminue avec l’âge, elle augmente avec la vitesse d’exécution du mouvement et avec l’entraînement. Franzesi et al. (5) estiment que la limite supérieure de traction supportable par le LCA est de 2 200 N. Or, cette valeur n’est valable que pour un LCA sain, chez un sujet jeune. Au-delà de cette valeur, le LCA est susceptible de se rompre. Les changements de direction, les accélérations ou décélérations brutales, la réception unipodale non contrôlée sont des causes probables responsables de l’augmentation de la charge que subit le LCA, responsable alors de lésion (Voskanian et al. (6)).

Il existe deux types de mécanisme de lésion du LCA : 

– Rupture du LCA lors d’un choc violent, on parle de mécanisme « avec contact » considéré comme un véritable accident. Elle représente un faible pourcentage, 20 30%.
– Rupture du LCA lors d’un mécanisme « sans contact », représentant 70-78% des causes de rupture chez l’athlète féminine (Voskanian et al. (6)). La définition du non-contact a été donné par Marshall, c’est « une force appliquée sur le genou au moment de l’accident, mouvement propre de l’athlète sans contact avec un autre athlète ou objet ».

Grabau et al. (7) admettent que le risque de blessure de l’appareil ligamentaire de l’articulation du genou est particulièrement élevé si la charge sur les ligaments ne peut être compensée par les os et les muscles sus et sous adjacents. Suite à une analyse vidéo (7), ils ont mis en évidence que la rupture du LCA, lors d’un mécanisme sans contact, est souvent corrélée à :
– Une position en valgus du genou
– Une extension quasi-complète
– Et une rotation du tibia .

Quant à eux Bencke et al., définissent le mécanisme de lésion sans contact, lors des mouvements de coupe ; il correspond à un effondrement du genou en valgus, proche de l’extension complète, le tout combiné à une rotation (interne ou externe) (8). Il devient donc nécessaire de définir la position de valgus du genou, qui correspond en réalité à un valgus dit dynamique, et la notion de mouvement de coupe. Le valgus dynamique est défini par Grabau et al. (7) soit par une abduction du tibia vers l’extérieur soit par un mouvement de rotation dans le genou. Cette position du genou entraîne des conséquences dans les articulations sus (adduction de hanche) et sous-jacentes (éversion de la cheville) (fig. 2). Le mouvement de coupe latérale est défini par Bencke et al. (8). Le but est de stimuler le joueur dans une direction, puis de manière inattendue lui demander de changer de direction. On peut donc considérer de manière plus globale que le mouvement de coupe latérale correspond à un déplacement vif sur le côté opposé à la jambe pivot. Ramesh et al. définissent le mouvement de lésion sans contact du LCA comme une hyper extension du genou, lorsque le tibia se déplace en avant du fémur. Cette position entraîne une mise en tension trop importante du ligament, responsable de la lésion.

Hewett et al. affirment que la plupart des blessures sans contact surviennent lors de décélérations, de réceptions de tâches, ou de déplacements latéraux ; tout cela joint à une surcharge externe du genou. Malgré les nombreuses études, traitant ce sujet, il semble difficile de définir un seul mécanisme de rupture, de nombreux facteurs entrent en jeu. Les lésions sans contact sont retrouvées généralement dans les sports à pivot. Il semble nécessaire de définir la notion de pivot, celle-ci fera partie des critères de sélection des articles. Un sport est qualifié à pivot lorsque celui-ci entraîne des mouvements de rotations et de torsion sur le genou qui sollicite plus particulièrement le ligament croisé antérieur. Il s’oppose au sport dans l’axe, qui lui ne peut être délétère pour le LCA. Dans cette revue, j’ai décidé de me focaliser sur les sports à pivot collectifs (football, volley-ball, basketball…). La lésion du LCA représente un véritable problème de santé publique, de par les conséquences à la fois économiques, psychologiques, et médicales qu’elles entraînent. Les données du PMSI recueillies par l’HAS nous permettent d’avoir une idée du nombre de ligamentoplasties réalisées chaque année. Ce chiffre est en constante augmentation.

FACTEURS DE RISQUE

Un facteur de risque est défini comme un élément ayant un impact sur l’apparition d’un événement. Dans le cadre de ce mémoire, les facteurs de risques seront séparés en deux, les facteurs dits intrinsèques et les extrinsèques.

Facteurs intrinsèques
Les facteurs intrinsèques sont les facteurs propres à l’individu tels que le sexe, l’âge, l’anatomie, le comportement. Hewett et al. (2) semblent mettre trois facteurs étiologiques en évidence pour expliquer la disparité entre les sexes ; à savoir les facteurs de risque anatomiques, hormonaux et neuromusculaires. Cependant, ce ne sont pas les seuls. En effet, il existe aussi des facteurs de risque biomécaniques et musculo-squelettiques.

Facteurs anatomiques :
De nombreuses hypothèses ont été émises sur l’impact de la morphologie de la femme sur les lésions du LCA.
– La diminution des encoches fémorales ; l’encoche fémorale est un important stabilisateur de genou. Emerson (9) émet l’hypothèse qu’une encoche inter condylienne étroite prédispose le genou de la femme a plus de lésion du LCA.
– L’augmentation de l’angle Q ; l’angle Q, ou angle quadriceps correspond à l’intersection entre la ligne de force du quadriceps (représentant l’axe longitudinal de la cuisse) et l’axe du tendon rotulien. La valeur physiologique est comprise entre 13° et 15°. Selon Hewett et al. (10), les femmes ont un bassin plus large, ce qui expliquerait l’augmentation de l’angle Q. Cette augmentation entraîne une force plus importante au niveau de la face latérale de la rotule.
– L’augmentation de la laxité ligamentaire ; elle augmente le valgus dynamique et l’hyper extension du genou .

Facteurs hormonaux (Perlemuter et al. (11)) 

Le cycle menstruel peut être séparé en deux phases : la phase folliculaire et la phase lutéale. La phase folliculaire correspond à la première phase, elle peut durer entre 10 et 14 jours en fonction du cycle. Elle débute au premier jour des règles et se termine avec l’ovulation. La phase lutéale correspond à la deuxième partie du cycle, c’est pendant cette période que le corps jaune se forme. La principale hormone ayant une influence est l’œstrogène, plus précisément l’œstradiol (hormone sexuelle féminine). Son taux évolue tout le long du cycle menstruel ; il demeure bas au début du cycle, réalise un pic avant l’ovulation (on se situe à proximité du 14ème jour du cycle), il diminue ensuite pendant la phase lutéale mais demeure tout de même plus élevé qu’à la phase folliculaire. Ce taux connaît ensuite un second petit pic, lors de la phase lutéale (jours 20-24). La sécrétion d’œstrogène s’accroît aussi pendant la grossesse. Il existe deux autres hormones ayant un impact, la progestérone et la relaxine. La progestérone est à son niveau le plus bas pendant les règles, début du cycle menstruel (jour 1 à jour 6). Sa concentration commence à augmenter à la fin de la phase folliculaire. Cette hormone est sécrétée par le corps jaune pendant la phase lutéale (Herzberg et al. (12)). Concernant la relaxine, c’est une hormone polypeptidique myorelaxante, sécrétée par le corps jaune. Son taux augmente aussi pendant la grossesse. Cependant, les moyens précis par lesquels les hormones peuvent contribuer aux risques de lésions restent flous (2). Il se trouve que peu d’études ont été réalisées sur l’impact des hormones, des phases du cycle menstruel, et de la prise de contraceptifs hormonaux sur les lésions du ligament croisé antérieur. Même si au cours de la dernière décennie, le nombre d’étude a doublé, leurs preuves scientifiques restent faibles (12). De plus, les études réalisées se contredisent souvent entre elles, il est donc difficile de conclure.

Facteurs biomécaniques

– Le placement des articulations lors de réalisation de tâches, les femmes présentent des schémas qui leurs sont propres. L’atterrissage sur une jambe, le déplacement latéral et les autres mouvements susceptibles d’être vus lors de la pratique sportive diffèrent de ceux des hommes (Hart et al. (13)) ;
– Le valgus dynamique, décrit précédemment. La femme présente, en statique un valgus plus important que l’homme. Ce valgus est majoré lors de mouvement, il est souvent assimilé à un mauvais contrôle du genou ;
– Le contrôle du tronc : le tronc est considéré comme l’équilibre central. Un mauvais contrôle du tronc peut entraîner des réactions en chaîne sur les articulations sousjacentes.

Facteurs musculo-squelettiques :
La raideur articulaire active correspond au déplacement angulaire régulé par le moment externe de l’articulation, définition donnée par Ford et ses associés. Elle est calculée comme la pente de la courbe moment-angle. Le moment de force équivaut à la capacité d’une force à créer une rotation. La raideur articulaire active peut-être contrôlée volontairement par un recrutement musculaire, permettant ainsi une stabilisation dynamique de l’articulation (14) ; la stabilisation du genou est possible par la co-contraction des ischio-jambiers et du quadriceps (15). Granata et al. définissent la raideur articulaire active comme la rigidité en rotation. Plus simplement, la raideur active correspond à la raideur musculaire. Plus le muscle est hypoextensible, plus la force nécessaire pour déformer celui-ci devra être importante. Une diminution de la raideur serait susceptible d’augmenter le risque de blessure. En effet, la raideur des ischio-jambiers est considérée comme protectrice du ligament croisé antérieur, car elle permet de « freiner » la translation tibiale antérieure (14; 15).

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Table des matières

Introduction
I- Contexte
II- Facteurs de risque
a- Facteurs intrinsèques
b- Facteurs extrinsèques
III- Anatomie
a- L’articulation
b- Le LCA
IV- Hypothèses
V- Pertinence
a- Intérêt de la revue pour le masso-kinésithérapeute
b- Intérêt de la revue pour le sportif
VI- Objectifs
Méthodologie
VII- Méthode
a- Sources de recherche
b- Types d’études
c- Modèle PICO
d- Équation de recherche
e- Sélection des études
f- Méthode d’extraction des données
g- Analyse des données
h- Synthèse des résultats
Résultats
VIII- Description des études
a- Diagramme de flux
b- Études exclues
c- Études incluses
IX- Risques de biais
a- Grille NOS
b- Les biais
X- Résultats
a- Présentation des résultats de chaque étude
b- Critère de jugement principal
Discussion
XI- Analyse des principaux résultats
a- Facteurs de risque intrinsèques
b- Facteur de risque extrinsèque
XII- Applicabilité des résultats et pertinence clinique
XIII- Qualité de preuve
XIV- Biais potentiels
Conclusion
Travaux cités
Abstract

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