Les études psychométriques auprès des traumatismes crâniens non accidentels (TCNA)

L’âge au moment du traumatisme

Qu’il soit accidentel ou infligé, il est connu qu’un TCC subi en bas âge interagit sur la maturation et le développement du jeune enfant. Il est de fait reconnu que les habiletés émergentes ou en développement sont davantage fragiles que celles déjà acquises chez l’enfant. Le potentiel cognitif de ce dernier étant encore peu développé, un TCC en jeune âge peut entrainer des effets cognitifs irréversibles exponentiels à moyen/long terme (Anderson & Moore, 1995; Anderson et al., 1997,2009; Taylor & Alden, 1997). Il n’est donc pas surprenant que la littérature souligne des taux de morbidité plus importants chez les plus jeunes victimes de TCC comparativement à celles plus âgées (Anderson & Moore, 1995; Anderson et al., 2004, 2010; Babikan & Asarnow, 2009, Crowe et al., 2012; Donders & Warschausky, 2007; Duhaime, Christian, Moss, & Seidl, 1996; Ewing-Cobbs et al., 1997; Kieslich, Marquardt, Galow, Lorenz, & Jacobit, 2001; Levin, Song, Ewing-Cobbs, Chapman, & Mendelson, 2001; Max et al., 1999; Taylor & Alden, 1997).

À cet effet, en comparaison aux victimes plus âgées, qui présentent une rapide évolution cognitive six mois post-TCC, la courbe de récupération cognitive des plus jeunes victimes se montre déclinante ou plate au cours de la première année, indiquant des difficultés chez ces derniers à développer des habiletés cognitives au même rythme que leurs pairs (Ewing-Cobbs et al., 1998). D’une part, en raison de leur anatomie, les nourrissons se veulent plus vulnérables aux TCe. De fait, en proportion le cerveau du bébé est plus large et plus lourd que celui de l’adulte alors que la musculature de son cou est immature pour supporter pleinement le poids de sa tête, fragilisant ainsi le cerveau devant les forces rotatoires et de cisaillement (Ashton, 2010; Case, 2008; Duhaime et a1., 1987; Hahn et a1., 1988; Margulies & Thibault, 2000). De même, le cerveau du nourrisson est entouré d’un crâne mince et mou dont les sutures ne sont pas terminées (i.e. fontanelles ouvertes) qui ne permettent donc pas l’absorption complète des chocs (Case, 2008; Hahn et a1., 1988; Margulies & Thibault, 2000).

De même, en considération de l’espace sous-arachnoïdien plus grand et de la dure-mère davantage fixée, le cerveau du jeune bébé se veut davantage vulnérable aux traumas potentiels (Hahn et a1., 1988). Les blessures ainsi infligées au cerveau en jeune âge sont susceptibles de nuire au développement cérébral en interrompant le réseau neuronal existant, interférant ainsi avec le développement des différentes fonctions cognitives (Altimier, 2008; Babikan et a1., 2009; Hebb, 1942). D’autre part, certains auteurs ont quant à eux établi que la relation entre l’âge au moment du traumatisme et le pronostic n’est pas complètement linéaire (Ashton, 2010; Gogtay et a1., 2004; Kolb, Gibb, & Gomy, 2000; Semrud-Clikeman, 2001). À cet effet, ils suggèrent d’abord la présence d’une période critique (i.e. entre 1 et 5 ans) où le cerveau est le plus susceptible de compenser pour les effets des blessures subies (i.e. plasticité cérébrale). Les TCC antérieurs à l’âge d’un an ne bénéficieraient donc pas de ce phénomène de protection. De même, il est rapporté que la synaptogénèse, l’élagage synaptique ainsi que la myélinisation du cerveau se produisent à des moments distincts selon les différentes structures/aires cérébrales (Casey, Tottenham, Liston, & Durston, 2005). Ainsi, les séquelles potentielles d’un TCC en bas âge sont également fonction de la relation complexe entre le niveau de développement cérébral de la structure/aire lésée et le moment où survient le traumatisme (Anderson et al. , 2010; Asthon, 2010). Conséquemment, puisque 1) l’anatomie de leur cerveau les rend plus vulnérables aux lésions diffuses; 2) que la période de plasticité cérébrale n’est pas atteinte en raison d’un manque de tissu sain pouvant compenser les lésions subies; et 3) qu’ ils en sont qu’aux premières étapes dans leur maturation cérébrale, plusieurs auteurs proposent que la première année de vie de l’enfant représente le moment le plus à risque pour un pronostic défavorable suite à un TCC (Ashton, 2010; Anderson et al., 2009; Crowe et al., 2012; Hahn et al., 1988; Kochanek et al. , 2007; van Heugten et al. , 2006).

Mécanismes responsables du TCC

La littérature indique également des taux de mortalité et de morbidité plus importants chez les victimes de TCNA comparativement à celles de TCA (Adamo, Drazin, Smith, & Waldman, 2009; Bechtel et al., 2004; Beers, Berger, & Adelson, 2007; Bonnier, Nassogne, & Evrard, 1995; Chevignard & Lind, 2014; Ewing-Cobbs et al. , 1998, 1999; Hafiz & Saffari, 2011 ; Hymel, Makoroff, Laskey, Conaway, & Blackman, 2007; Irazuzta, McJunkin, Danadian, Arnold, & Zhang, 1997; Keenan, Runyan, & Nocera, 2006a, 2006b; Keenan, Hooper, Wetherington, Nocera, & Runyan, 2007; King et al., 2003 ; Myhre, Gf0gaard, Dyb, Sandvik, & Nordhov, 2007; Oluigbo, Wilkinson, & Stence, 2012; Reece & Sege, 2000; Risen et al., 2014; Risen, Suskauer, DeMatt, Slomine, & Salorio, 2014; Vinchon, Defoort-Dhellemmes, Desurmont, & Dhellemmes, 2005). Au plan de la mortalité, les études soulignent qu’ entre 13 et 36 % des TCNA décèderont des suites de leurs blessures contre 6 à 12 % chez les TCA (Barlow et al., 2005). Quant à la morbidité, il est connu que les séquelles varient principalement en fonction du type de lésions induites (Maguire et al., 2009). De fait, les TCA impliquent généralement des blessures focales, résultant d’un impact d’une partie spécifique de la tête (Bonnier, Marique, van Hout, & Potelle, 2007; Gerber & Coffman, 2007; Hymel, Bandak, Partington, & Winston, 1998). Dans la majorité des cas, les dommages sont perçus au site de l’impact (coup) ainsi qu’au site opposé (contrecoup).

En contrepartie, des dommages diffus résultant de l’étirement et du bris des axones sont plus fréquemment induits par les TCNA (Ashton, 2010; Bonnier et al., 2007; Chevignard & Lind, 2014; Gerber & Coffman, 2007; Semrud-Clikeman, 2001). À cet effet, certains auteurs ont émis l’hypothèse que chez les plus jeunes victimes de TCC, la récupération serait davantage liée à l’étendue des dommages neurologiques plutôt qu’à leur localisation (Catroppa, Anderson, Morse, Haritou, & Rosenfeld, 2008; Power, Catroppa, Coleman, Ditchfield, & Anderson, 2007). Conséquemment, les victimes de lésions diffuses seraient donc plus à risque de présenter une évolution défavorable (Asthon, 2010; Anderson et al., 2005; Ewing-Cobbs et al., 1997, 2006). Ces résultats sont toutefois partiellement tributaires de l’âge au moment du traumatisme, puisque le TCN A survient généralement plus tôt dans le développement de l’enfant « 2 ans) comparativement aux TCA où l’étendue de l’âge des victimes est beaucoup plus grande (Duhaime et al., 1996; Kieslich et al. 2001; Kraus, 1990). Cette combinaison, connue sous le modèle du double hasard (i .e. “double hazard” in jury mode!), ramène donc la question de l’âge au moment du traumatisme comme facteur de risque, mais soulève aussi l’intéressante question des mécanismes de production comme cause dans l’évolution défavorable des TCNA (Anderson et al., 2005; Kriel, Krach, & Panser, 1989).

Études comparant les TCNA aux TCA La consultation du Tableau 4 (voir Appendice A) permet de constater qu’à ce jour, seulement quelques études ont comparé les séquelles cognitives induites par les TCA et les TCNA en utilisant des instruments psychométriques reconnus. De fait, la plupart des études ont comparé les TCA aux TCNA d’un point de vue purement descriptif. Par exemple, Keenan, Runyan, Marshall, Nocera et Merten (2004) ainsi que Bechtel et ses collaborateurs (2004) ont respectivement comparé à leur congé d’hôpital 80 TCNA à 72 TCA et 15 TCNA à 67 TCA, dont tous les TCC avaient été subis avant l’âge de 2 ans. Ils ont conclu que les TCNA étaient nettement plus à risque de souffrir d’une condition épileptique (12,5 % TCNA contre 0 % TCA – Keenan et al., 2004) et (53 % TCNA vs 6 % TCA – Bechtel et al., 2004). Des résultats similaires ont également été obtenus par Hafiz et Saffari en 2011 (80,4 % TCNA vs 13 % TCA) ainsi que par Myhre et ses collaborateurs (2007) qui ont indiqué des taux plus élevés chez les TCNA sans toutefois en spécifier l’ampleur. De leur côté, Irazuzta et ses collaborateurs (1997) relevaient un plus faible risque de décès chez les TCA (7,1 %) comparativement à 61 % chez les TCNA. Dans le même ordre d’idées, Vinchon et ses collaborateurs (2005) ont comparé 57 TCNA à 93 TCA, tous ayant subis le TCC avant l’âge de 24 mois. Évalués en moyenne 6,2 mois après le TCC en utilisant la version pédiatrique modifiée par Ewing-Cobbs du Glasgow Outcome Scale (Ewing-Cobbs et al., 1999), ils concluaient que les TCNA présentaient une évolution plus défavorable, telle qu’illustrée par des retards développementaux chez 23,6 % des TCNA contre 5,4 % des TCA, des difficultés neurologiques chez 12,3 % des TCNA comparativement à 2,1 % des TCA ainsi que des problèmes comportementaux chez 12,3 % des TCNA contre 1 % des TCA. Finalement, 21 % des victimes de TCNA présentaient des difficultés visuelles contre 2,1 % chez les TCA et une condition épileptique était rapportée chez 24,6 % des TCNA contre 4,3 % des TCA. De leur côté, les études d’Ewing-Cobbs (1998, 1999) ont, en plus d’apporter des considérations plus précises au plan des séquelles, permis quelques comparaisons de groupes.

Dans l’étude de 1998, les auteurs ont comparé 20 TCNA (10,6 mois en moyenne lors du TCC) à 20 TCA (35,6 mois en moyenne lors du TCC) en utilisant le Bayley Scale Infant Development (BSID), le Mc Carthy et le Mullen Scales of Early Learning (MSEL) en moyenne 1,3 mois après le TCC. Alors qu’aucune différence n’était notée quant aux séquelles motrices (i.e. 45 % dans les 2 groupes), 45 % du groupe TCNA obtenaient des résultats les situant au niveau de la déficience intellectuelle contre seulement 5 % dans le groupe TCA. Dans leurs études de 1999, ces mêmes auteurs ont comparé 25 TCNA à 23 TCA, tous ayant subi le trauma antérieurement à leur 2e anniversaire, en utilisant le MSEL et le Scales of Independance Behavior Revised (SIB-R). Trois ans après le trauma, ces auteurs soulignaient que 40 % des TCNA se situaient au deçà de 3 écarts-types sous la norme au plan des apprentissages contre 4,3 % chez les TCA. Au niveau adaptatif, un rendement inférieur à trois écarts-types était également relevé chez 25 % des TCNA contre 13 % chez les TCA.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Sommaire
Liste des tableaux
Liste des figures
Remerciements
Introduction
Contexte théorique
La sévérité comme facteur d’influence
L’âge au moment du traumatisme
Mécanismes responsables du TCC
Études comparant les TCNA aux TCA
Études à long terme
Les études psychométriques auprès des traumatismes crâniens non accidentels (TCNA)
Les séquelles neurologiques, motrices et visuelles
Difficultés langagières et cognitives
Les séquelles comportementales et adaptatives
Les études longitudinales réalisées auprès des victimes de traumatismes crâniens non accidentels
Méthodes
Objectif de l’étude
Description de la victime
Temps de mesures
Instruments d’évaluation
Évaluation complémentaire au temps
Résultats
Variable 1 : Langage réceptif
Variable 2 : Fluidité verbale
Variable 3 : Mémoire verbale
Variable 4 : Mémoire visuelle
Variable 5 : Attention auditive
Variable 6 : Attention visuelle
Variable 7 : Inhibition motrice
Variable 8 : Planification
Variable 9 : Flexibilité mentale (i .e. shifting)
Variable 10 : Intégration visuomotrice
Portrait neuropsychologique à long terme
Discussion
Limites de la présente étude
Conclusion
Références
Appendice A. Synthèse des études comparant les TCNA aux TCA
Appendice B. Synthèse des études à long terme
Appendice C. Synthèse des études psychométriques des TCNA
Appendice D. Liste des tests énoncés

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *