Les enjeux de l’intégration de l’eTandem en didactique des langues-cultures étrangères

« Pendant l’année 2000, un groupe d’étudiants ouvrent un forum sur un cours de grammaire du chinois à forte affluence pour échanger, partager et mutualiser, en dehors de tout cadre institutionnel. Une nouvelle ère commençait… » (Joël Bellassen, 2015) .

Avant la vague du Web 2.0, nous ne pouvions pas imaginer ce genre d’échanges hors d’une classe de langue. Cependant, aujourd’hui, la communication via Internet est omniprésente. Nous sommes entrés au vingt-et-unième siècle, ère digitale où l’individu est devenu captif de toutes sortes de nouvelles technologies comprenant les techniques de l’information, de l’audiovisuel, des multimédias, d’Internet, des télécommunications, et des réseaux sociaux. Ces nouvelles technologies jouent un rôle de plus en plus central dans l’évolution des sociétés et affectent significativement les moyens de communication. La mobilité physique est remplacée par la communication en ligne et les échanges professionnels internationaux de tout type et de tout niveau s’effectuent par Internet. Par exemple, la mondialisation des marchés et la montée en puissance du commerce en ligne influencent considérablement notre vie quotidienne, en nous permettant d’obtenir des produits du monde entier sans sortir de chez nous. L’impact des nouvelles technologies se manifeste aussi dans l’internationalisation de l’éducation, un bon exemple étant les MOOCs, phénomène marquant dans le monde de l’enseignement supérieur. MOOC signifie « Massive Open Online Course » que l’on peut traduire par « cours en ligne ouvert et massif » (CLOM). Ces cours, de niveau universitaire, diffusés souvent gratuitement et accessibles sur Internet, sont accessibles pour tout le monde.

L’acquisition-apprentissage des langues-cultures étrangères (LC2) : différentes perspectives 

Dans un premier temps, en distinguant les notions d’acquisition et d’apprentissage, nous présentons différentes théories sur l’acquisition et l’apprentissage des langues et cultures étrangères (LC2) : béhaviorisme, cognitivisme et constructivisme, socioconstructivisme et interactionnisme. C’est dans cette dernière perspective que nous nous positionnons : l’acquisition/apprentissage des LC2 selon la perspective interactionnelle. La présentation se focalise sur les points suivants :

• les théories sur l’acquisition/apprentissage en général, leur croisement avec les théories linguistiques ainsi que quelques repères historiques ;
• leur regard respectif sur l’acquisition/apprentissage des LC2 en mettant l’accent sur quatre éléments : la langue ou le langage comme objet ou objectif d’acquisition/apprentissage ; le rôle ou la place de l’enseignant et surtout de l’apprenant (passif ou actif) ; la nature et la fonction de l’interaction (mécanique ou communicative); l’environnement d’acquisition/apprentissage de la LC2 (interaction sociale).

Dans un deuxième temps, nous nous intéressons plus spécifiquement aux approches interactionnistes et situons deux courants principaux : le courant input interactionniste nordaméricain, qui se centre sur les interactions entre natifs/non natifs et sur la définition du rôle de l’input (l’exposition aux données de la langue cible) et de l’output (la production en langue cible) dans l’acquisition d’une L1 ou d’une L2; l’approche interactionniste francophone, qui se focalise sur les séquences interactionnelles favorables à l’acquisition/apprentissage d’une LC2. Le point commun entre ces deux courants est que l’acquisition se construit dans l’interaction. Les notions d’input (input compréhensible, input prémodifié, input modifié) et d’output (production) de la perspective interactionniste sont très pertinentes pour notre projet de recherche. Elles nous aideront à comprendre le mécanisme de l’échange en eTandem : quels types de stratégies développe le natif pour aider le non-natif (hypothèse : il modifie son input pour qu’il soit plus compréhensible pour son partenaire) et comment le non-natif réagit (hypothèse : il accepte ou refuse). Les outils proposés par les approches interactionnistes nous permettent de comprendre les conditions et les mécanismes socio-interactifs (négociations interactives, tâches communicatives, structures de participation, etc.) qui cadrent les processus d’acquisition/apprentissage.

Dans un troisième temps, comme notre intérêt de recherche porte sur l’acquisition de la LC2 et la communication exolingue, en particulier les échanges en eTandem, nous introduisons la notion de communication exolingue. Nous analysons l’acquisition qui s’effectue par et dans la communication exolingue dans ses liens avec le contrat didactique, l’acquisition formelle/informelle et l’apprentissage institutionnel/non institutionnel.

Le béhaviorisme

Le béhaviorisme est une théorie de psychologie de l’apprentissage apparue au début du 20ème siècle. Cette théorie, combinée avec le courant structuraliste en linguistique, a fortement influencé l’enseignement et l’apprentissage des langues étrangères.

Le béhaviorisme naît des travaux expérimentaux sur les comportements des animaux et des humains. Les études montrent que les animaux et les humains développent certaines habitudes après avoir été conditionnés pendant un certain laps de temps. L’émergence de ces nouvelles habitudes correspond au conditionnement classique pavlovien stimulus-réponse : il s’agit d’un changement de comportement résultant d’un changement conditionné. Skinner (1957) ajoute que l’apprenant est influencé par son environnement (stimulus) auquel il réagit (réponse) et reçoit à son tour une réaction (renforcement). Le renforcement positif associé à la réponse permet d’accroître la probabilité d’apparition de celle-ci tandis que le renforcement négatif la diminue ou l’annule (Gaonac’h, 1991 : 30).

Le cognitivisme et le constructivisme

Le cognitivisme est un courant de pensée de la psychologie des années 50. Il étudie les phénomènes de la cognition liés à la connaissance, à la mémoire, à la perception et au raisonnement. Ce courant regroupe différentes théories et modèles de l’apprentissage et de l’enseignement. Tandis que les béhavioristes s’intéressent aux comportements observables de l’apprenant, les cognitivistes s’intéressent aux processus mentaux de l’apprenant. Les cognitivistes prennent en compte le mécanisme stimulus-réponse (input-output), mais cherchent à savoir ce qui se passe dans la boite noire en relation avec les processus mentaux mis en œuvre lors de l’apprentissage. De ce fait, le courant cognitiviste se développe selon deux versions de la psychologie : la première prend pour postulat la théorie du traitement de l’information (Gagné, 1985 ; Ausubel et al., 1968) et la seconde s’appuie sur l’appropriation progressive et effective de stratégies mentales (stratégies cognitives et métacognitives, notion initiée par Brunner, développée par Tardif, 1992). La théorie du traitement de l’information considère le cerveau de l’apprenant comme un ordinateur, un système complexe de traitement de l’information. Dans une situation donnée, l’apprenant traite les informations qu’il reçoit (l’entrée, soit l’input) de son environnement pour produire un output. La mémoire joue un rôle important dans ce processus et pour atteindre l’objectif attendu. Pour les tenants de la théorie des stratégies cognitives d’apprentissage, l’apprenant n’est plus un receveur passif (point de vue des béhavioristes), mais un intervenant actif au centre du processus d’apprentissage. Pour déployer le processus de « traitement » de l’input et de l’output, il met en œuvre ses propres stratégies cognitives et métacognitives. Les deux versions complètent la conception de l’apprentissage de la perspective cognitiviste : l’apprentissage signifie l’acquisition de nouvelles connaissances ou capacités. A propos des travaux de Miller et Bruner, les connaissances qu’un individu possède déjà, explicites ou implicites, sont le principal déterminant de ce que cet individu peut apprendre. L’apprentissage est un processus dans lequel l’apprenant joue un rôle central et actif en mettant en œuvre ses connaissances (y compris ses stratégies d’apprentissage) pour acquérir un nouveau système. Pour que cet apprentissage soit plus efficace, il est nécessaire d’équiper l’apprenant avec un matériel d’apprentissage bien structuré et hiérarchisé, ou autrement dit, de rendre l’activité mentale de l’apprenant structurante. Par contre, il n’est pas clairement expliqué comment l’individu joue le rôle central du processus d’apprentissage.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
Partie 1 Cadre théorique
Chapitre 1 L’acquisition-apprentissage des langues-cultures étrangères (LC2) :
différentes perspectives
1.1 Présentation de quelques théories de l’acquisition/apprentissage des languescultures étrangères (LC2)
1.1.1 Le béhaviorisme
1.1.2 Le cognitivisme et le constructivisme
1.1.3 Le socioconstructivisme et interactionnisme
1.1.4 Synthèse
1.2 Interaction et acquisition : courants et conceptions
1.3 La communication exolingue
1.3.1 La notion de communication exolingue et ses caractéristiques
1.3.2 L’apprentissage et la communication exolingue
1.3.3 Le contrat didactique dans la communication exolingue
1.3.4 Apprentissage formel et informel, institutionnel et non institutionnel
1.4 Notions transversales
1.4.1 Médiation et médiatisation (acquisitionnelles et didactiques)
1.4.2 Stratégie d’apprentissage et stratégie de communication
1.4.2.1 Les stratégies d’apprentissage
1.4.2.2 Les stratégies de communication
1.4.2.3 De la négociation du sens à la négociation de la forme
1.5 Synthèse
Chapitre 2 Trois perspectives didactiques : actionnelle, interculturelle et technologique
L’enseignement-apprentissage des LC2 dans la perspective actionnelle
2.1.1 La notion de perspective actionnelle
2.1.2 La notion de co-action
2.1.3 La perspective actionnelle et la culture d’apprentissage chinoise
L’approche interculturelle pour l’enseignement-apprentissage des LC2 :
développer des compétences interculturelles dans l’interaction avec autrui
2.2.1 La notion d’approche interculturelle
2.2.2 Le développement de la prise de conscience interculturelle et la compétence interculturelle
2.2.3 La didactique
Les TIC pour l’enseignement-apprentissage des LC2
2.3.1 Un regard historique sur les TIC dans la didactique des LC2
2.3.2 Un projet TIC pour les LC2 : quels enjeux ?
Synthèse
Chapitre 3 L’eTandem : état de l’art et expériences
3.1 L’apprentissage en tandem : notions et historique
3.1.1 L’apprentissage en tandem
3.1.2 Historique de l’application du tandem dans l’enseignement-apprentissage des langues et cultures
3.2 De l’interaction en tandem face-à-face à l’interaction en eTandem, quels changements ?
3.2.1 Des conversations en présentiel aux conversations à distance : quels changements ?
3.2.2 Contextes spatiaux des échanges en tandem et en eTandem : asymétrie vs symétrie
3.2.3 Equilibre entre apprentissage formel et informel
3.2.4 Interculturalité en face-à-face et à distance
3.3 L’eTandem institutionnalisé
3.3.1 Nouveaux savoir-faire
3.3.2 Collaboration entre équipes pédagogiques
3.3.3 Coordination et collaboration entre institutions
3.4 Synthèse
Partie 2 Analyse macro et micro d’un dispositif eTandem chinois-français
Chapitre 4 Présentation du dispositif eTandem chinois-français
4.1 Le contexte et la problématique du projet eTandem chinois-français
4.1.1 Le potentiel des échanges en eTandem chinois-français
4.1.2 Les défis
4.1.3 Les soutiens institutionnels
4.2 La conception pédagogique du dispositif eTandem chinois-français
4.2.1 Les objectifs pédagogiques
4.2.2 Les participants visés
4.2.3 Les TIC et l’interface bilingue du dispositif
4.2.4 Le module d’ingénierie pédagogique : ADDIE itérative
4.2.5 Déroulement du cours eTandem chinois-français
4.2.5.1 L’inscription
4.2.5.2 Formation préparatoire
4.2.5.3 La formation des binômes
4.2.5.4 La première rencontre
4.2.5.5 Le déroulement de chaque séance thématique : les activités d’apprentissage avant, pendant et après l’échange
4.2.5.6 L’évaluation
4.3 Le développement du dispositif eTandem chinois-français : design et recherche
4.4 Présentation du développement du dispositif eTandem chinois-français
4.4.1 Une vision globale
4.4.2 Le projet pilote
4.4.3 Le deuxième cycle : première mise en place du dispositif (année académique 2010- 2011)
4.4.4 Le troisième cycle : intégration curriculaire initiale du dispositif (année académique 2011-2012)
4.4.5 Le quatrième cycle : intégration du dispositif dans le cursus (année académique 2012-2013)
4.4.6 Le cinquième cycle : exploitation du dispositif pour les cours en présentiel (année 2013-2014)
4.5 Synthèse
Chapitre 5 Analyse macro : description et analyse des relations entre les facteurs du dispositif eTandem chinois-français
5.1 Identification et analyse des facteurs structurants dans le dispositif eTandem
chinois-français avec la théorie de l’activité
5.2 Les contradictions dans la phase apprenant
5.2.1 Affordances technologiques des apprenants
5.2.2 Intégration des tâches dans le cursus
5.2.3 Tâches ouvertes ou tâches fermées : dilemme
5.2.4 Organisation du cours : facilitateur ou obstacle de l’échange
5.2.5 Décalage au niveau des compétences langagières
5.2.6 Statut du cours et participation asymétrique
5.2.7 Enjeux autour de la réciprocité
5.3 Les contradictions de la phase enseignante
5.3.1 Gestion du temps
5.3.2 Soutien pédagogique et développement de l’autonomie
5.3.3 Divergences de conception pédagogique : obstacle à l’ancrage plus profond du eTandem dans le cursus
5.4 Les contradictions dans la phase institution
5.5 Synthèse
Conclusion

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *