Les Dynamiques Communicationnelles dans la Recherche en Ecologie

Des rapports aux savoirs en écologie 

L’écologie est un sujet particulièrement riche pour analyser les pratiques de communication des chercheurs et les relations entre sciences et sociétés. D’abord, son approche systémique remet en cause la rationalité des sciences expérimentales et l’idéologie du progrès en pointant les limites des ressources et les interdépendances des unités du vivant. Les chercheurs moteurs du développement de l’écologie scientifique tels que Haeckel, Vernadsky ou Lokta défendent d’ailleurs une science articulée à une vision politique du rapport à la nature (Deléage, 1991). Cette critique du progrès est portée et amplifiée par le mouvement écologiste et les penseurs de l’écologie politique (Boy, 1999 ; Illich, 1973 ; Charbonneau, 1980 ou Gorz, 1975) ; en contraste, les militants écologistes développent une véritable expertise sur un certains nombre de questions (Ollitrault, 2001). Aussi, les rapports entre sciences et politiques se complexifient puisque, comme le décrit Beck (2001), « la science devient cause (partielle), médium de définition, et source de solution des risques. » (p 341). L’écologie est alors un lieu de tensions entre différentes formes de rationalité et de modèles de mobilisation des savoirs. D’ailleurs, les connaissances locales, par exemple celles des pêcheurs dans le travail de Forbes (Schneider, 2000), celles des naturalistes amateurs, ou plus généralement des profanes, sont très importantes dans les sciences de plein air (Charvolin, Micoud et Nhyart (eds.), 2007) telles que l’écologie. Enfin, la publicité sociale à laquelle sont soumises les problématiques environnementales, participe également à la montée de nouveaux référentiels gestionnaires des savoirs mobilisés (Jeanneret, 2010). Cette pluralité de rapports aux savoirs liée à l’écologie et l’hybridité des questions environnementales a passionné plus d’un chercheur et il me faudra bien l’ensemble de ce travail pour en discuter les apports.

Pourtant, en tant qu’ancienne étudiante en « Biologie des organismes et des populations » , cette pluralité me parait quelque peu escamotée. Il me faudra attendre ma troisième année de licence à Montréal pour entendre parler d’enjeux de conservation et, par exemple, voir apparaître dans l’enseignement, des controverses liées à l’usage des ressources. L’écologie ne m’est pas apparue, en tant qu’étudiante dans le monde académique, aussi débordante d’objets hybrides que je me l’imaginais. Aussi, j’ai bien vite préféré la manière dont on parlait de l’écologie de l’extérieur avant de revenir aux pratiques des chercheurs, non pas comme le lieu d’une origine, mais en tant que point de tension pertinent.

Une approche communicationnelle 

Les problématiques environnementales convoquent une diversité d’acteurs, d’éléments de nature, de discours et de pratiques. Une approche par la communication et la médiation des savoirs ne s’attache pas à identifier l’origine scientifique d’un processus linéaire mais précisément à penser les transformations et les discontinuités à l’œuvre. Nous verrons dans un premier chapitre comment la question de la biodiversité a été construite comme un sujet pertinent et légitime par la communauté de recherche française. Ce résultat est le fruit d’une convergence complexe ; les processus de communication à l’œuvre s’appuient fortement sur l’inscription de la question de la biodiversité à l’agenda international et rencontrent des enjeux professionnels, scientifiques, institutionnels, etc.

S’il n’y a pas d’origine unique dans les processus de communication à l’œuvre, l’entrée sur le terrain délimite déjà un ensemble d’où se construit ma problématique ; mon premier choix a été celui de la « biodiversité ». Il semblait qu’à bien des égards, la question de la biodiversité réactive le projet interdisciplinaire (Barbault, 1993) et le lien avec des interlocuteurs nonchercheurs. Ce choix génère un tropisme vers le changement et la nouveauté : que découvrent les chercheurs et quelles pratiques sont réellement nouvelles ? Pour réinscrire l’émergence de la question de la biodiversité dans le temps et les pratiques, je me suis intéressée à la production de références  qui visent à construire cette nouveauté.

Eprouver et penser l’hybride par une articulation 

Les pratiques de communication dans les pratiques de recherche peuvent faire l’objet d’une multiplicité d’approches mettant l’accent sur les processus cognitifs, sociaux, médiatiques, institutionnels, politiques, etc. Mon ambition est de saisir ces processus en interaction par l’analyse des médiations, ma démarche se constitue alors au carrefour de plusieurs tensions entre des postures et des choix qui me tiennent à cœur. D’abord, la volonté de prendre en compte la vie et le rôle des objets mais aussi les pratiques effectives des acteurs et les débats qui les occupent. Ensuite, l’ambition de désignation du pouvoir et de ses mécanismes de fonctionnement, tout en reconnaissant la capacité d’agir des acteurs ; et donc de tenter d’assumer une position propre avec mes outils et catégories théoriques sans pour autant produire un travail critique dans le « dos des acteurs ». En effet, l’accès aux terrains nécessite d’accepter un certain nombre de contraintes, celles que subissent les acteurs eux-mêmes, et auxquelles j’accepte également de me soumettre partiellement. Par exemple, le choix de participer à une réflexion collective (l’animation transversale du programme DIVA) est conditionné par une acceptation partielle de la communication en termes d’efficacité de transmission d’un message ou du moins en termes d’interface entre science et politique. Je ne peux pas, dans un second temps, faire table rase de cette expérience partagée et me borner à produire une analyse complexifiant cette vision une fois que les contraintes ne pèsent plus. Mon choix a été d’ajuster autant que possible mes outils à ce qui fait sens pour les acteurs ; en l’occurrence, la conception en termes d’interface résonne avec la notion de « mondes sociaux » à travers laquelle s’élaborent l’interactionnisme symbolique et l’usage qui en est fait dans les études de sciences (Strauss, 1992 ; Fujimura, Star et Gerson, 1987).

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Table des matières

INTRODUCTION
Des rapports aux savoirs en écologie
Une approche communicationnelle
Eprouver et penser l’hybride par une articulation
Trois catégories souples
PARTIE 1. CONSTITUTION DE COLLECTIFS
Suivre la constitution de collectifs, un point d’articulation entre SIC et STS
La biodiversité, un vecteur de rationalités environnementales ?
Conception relationnelle du terrain
Des premiers terrains aux hypothèses
Chapitre I. Le succès de la question de la biodiversité
I. Production de référence et réécriture pour une convergence d’opportunités
II. Agencements de réseaux au sein du PNDBE
III. Standardisation : le projet comme solution d’un problème d’interface
Conclusion du Chapitre I
Chapitre II. Entrer dans les collectifs : relations, places et identités
IV. Chercheuse en communication : une entrée consensuelle
V. Enjeu d’une « recherche finalisée », le projet Inbioprocess
VI. Le lien à l’action publique, le programme DIVA
Conclusion du Chapitre II
PARTIE 2. DISPOSITIFS DE LA RECHERCHE: PROCESSUS ORGANISATIONNELS ET MEDIATION
La notion de dispositif
Projet, travail d’articulation et d’alignement
Financement sur projet et évolution des pratiques professionnelles
Foisonnement documentaire versus importance des réunions et sorties
Chapitre III. Un dispositif tourné vers l’efficacité
VII.L’ « action » comme unité de collaboration
VIII. L’alignement des actions et les compétences communicationnelles
IX. Le dialogue interprofessionnel : d’une prise en charge collective à son
individualisation
Conclusion du Chapitre III
Chapitre IV. Le programme DIVA : de la confrontation à l’action collective
X. Echanger sur la complexité des choix
XI. Mutualiser pour agir
Conclusion du Chapitre IV
PARTIE 3. PRODUCTION SYMBOLIQUE, STANDARDS ET VALORISATION DE LA COMMUNICATION
Standards et évolution des discours à propos de sciences
Quelles conceptions de la communication environnementale ?
Le projet comme objet communicationnel, un vecteur de valeurs managériales
Faire parler des textes, modalités de cadrage des situations et questionnaires
Chapitre V. Autour des standards, la vie des objets textuels
XII.Ajustement aux standards
XIII. Performativité des standards ?
XIV. DIVA, alignement et flexibilité
Conclusion du Chapitre V
Chapitre VI. La sur-médiatisation du rapport aux destinataires
XV. Prescription relationnelle
XVI. La mobilisation de figures et de modèles médiatiques
Conclusion du Chapitre VI
CONCLUSION

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