Les divinités en lien avec leurs attributs mythologiques 

ÉTAT DE L’ART

Les textes fondateurs de ce mythe tel qu’on le connaît sont tout d’abord le récit d’Apulée, au IIème siècle dans ses Métamorphoses, qui est la première trace écrite de l’histoire de Psyché. Une version de Jean de La Fontaine, en 1669, remet les aventures de Psyché au goût du XVIIème siècle. Puis, deux années plus tard, la pièce proposée par Molière, aidé de Corneille, Quinault et mise en musique par Lully, en 1671, il s’agit de la version sur laquelle est basée notre étude. Bien qu’elle ne raconte pas vraiment les différentes épreuves de Psyché, elle reste, dans les grandes lignes, fidèle au mythe tel que nous venons de le raconter. L’adaptation théâtrale nécessite toutefois des modifications, comme l’explique Yan Duffas, l’un des metteurs en scène dont nous étudierons le travail, durant un entretien que nous avons pu réaliser avec lui en avril 2020 . Il est difficile, au théâtre, de faire tenir un secret à l’obscurité dans laquelle se rencontrent les personnages. Il relève le choix fait par Molière de matérialiser, dans le texte, cette obscurité par l’ignorance de Psyché du nom de son mari. Le metteur en scène soulève que cette solution est « une belle adaptation » qui utilise le texte et les mots comme un réel ressort de l’intrigue.
Dans le cadre de notre mémoire de recherche, deux ouvrages en particulier nous ont permis d’étudier les différentes représentations et interprétations du mythe à travers le temps. Il s’agit tout d’abord de Les métamorphoses de Psyché, essai sur la décadence d’un mythe de Jean de Palacio, publié en 2000 aux éditions Séguier, qui fournit une étude du mythe sous le prisme du mouvement littéraire et artistique du décadentisme de la fin du XIXème siècle et des différentes versions qui en découlent, que ce soit dans la littérature ou dans la peinture. Nous nous sommes également appuyés sur, L’invention d’un mythe : Psyché Allégorie et fiction, du siècle de Platon au temps de La Fontaine, de Véronique Gély publié chez Champion en 2006, qui retrace l’histoire littéraire du mythe, l’étudie sous différents prismes comme celui de l’allégorie ou encore celui d’une étude théologique du mythe. Ces différentes lectures nous ont été très utiles pour comprendre plusieurs visions de la figure de Psyché et ouvrir le champ des possibles de ce mythe, qu’elle soit représentée tantôt sous les traits d’une jeune fille ingénue tantôt sous ceux d’une « fille légère ». Jean de Palacio nous fait comprendre qu’elle est parfois une combinaison des deux facettes d’une même pièce. Étant chez les uns l’opposé de ce qu’elle est chez les autres, il le résume de la façon suivante.
Et on retrouve, dans l’inventaire réalisé après le décès d’Armande Béjart, un ensemble pour la pièce Psyché qui contient « quatre jupes, deux corps ainsi que deux tonnelets» qui ne sont pas décrits, mais qui, en nombre, correspondent à la description présente dans l’inventaire après décès de Molière. Enfin, nous nous sommes beaucoup appuyés sur les travaux de Christian Delmas relatifs à la question du mythe dans le théâtre au XVIIème siècle ainsi que sur ses études plus précises du cas de Psyché (lien de la pièce avec le type de théâtre dans lequel elle s’inscrit, avec la musique et les machineries, etc.).
Sur la question de l’étude des costumes, d’autres textes présentent un grand intérêt pour ce travail. Trois ouvrages publiés aux éditions Lampsaque retiennent notre attention. Le premier : L’habit de théâtre, histoire et poétique de l’habit de théâtre en France au XVIIème siècle de Anne Verdier, publié en 2006, permet de poser des questions très concrètes (qui les finance, qui les fabrique, qui les conserve une fois que la pièce n’est plus jouée…) tout en permettant de saisir les enjeux des costumes du XVIIème siècle. Cet ouvrage regroupe de surcroît un nombre impressionnant de sources relatives aux costumes de cette époque. Le deuxième ouvrage, publié en 2007, s’intitule Arts et usages du costume de scène, sous la direction d’Anne Verdier, Olivier Goetz et Didier Doumergue. Ce sont les actes du colloque «L’habit de théâtre et son double : us et usages du costume de scène » organisé en 2005 par les universités de Nancy 2 et de Metz. Il porte sur le costume tant dans ses techniques et méthodes de fabrication que sur le prisme de la réception par le spectateur.
Le troisième ouvrage, que l’on peut articuler avec le précédent correspond lui aussi aux actes d’un colloque, ayant eu lieu en 2013 et intitulé « Le Costume de scène, objet de recherche». Il y est question de la façon dont plusieurs champs de recherche peuvent s’emparer des costumes de scène et comment leur étude peut se faire à la fois à travers l’histoire de l’art ou bien à travers le champ de la sociologie, en tant qu’image, qu’un objet du quotidien ou au contraire en tant qu’objet «extra-quotidien». Ces trois ouvrages présentent des méthodologies sur l’étude du costume très intéressantes et sur lesquelles se baseront beaucoup des analyses de ce travail.
Lorsque nous étudions les costumes de différentes mises en scène, il faut aussi garder à l’esprit que ceux-ci servent, ou peuvent servir, le travail dramaturgique du metteur en scène. Ils portent un sens, qui permet d’éclairer les souhaits de ces derniers. Colette Huchard, une costumière, explique dans un article publié dans la revue Études théâtrales en 2010, que « donner au vêtement sa fonction dramaturgique sur un plateau est un travail complexe où se mêlent simplicité et sophistication . ». Nous étudierons donc ces costumes à la lumière de ce qu’en disent les créateurs, que ce soit lors d’entretiens que nous avons réalisés avec eux ou qu’ils ont pu donner à d’autres personnes ou bien au travers différents dossiers de presse, de production ou pédagogique.

CORPUS

Nous avons pu constater que la pièce Psyché de Molière avait depuis sa première création et jusqu’à la fin du XXème siècle, assez peu été mise en scène, en effet nous pouvons estimer à trois ou quatre le nombre de fois où la pièce a été jouée dans une version longue laissant comprendre toute l’intrigue et pas simplement quelques fragments. On observe toutefois une recrudescence des mises en scène de la pièce entre 2000 et 2017, période durant laquelle elle a été mise en scène quatre fois. Il est intéressant de voir cette réapparition de la pièce et du mythe sur les scènes de théâtre et de se demander pourquoi les metteurs en scène contemporains réinvestissent cette pièce au moment où ils le font.
Notre étude cherchera donc à comprendre comment, au XXIème siècle, les artistes costument les personnages de divinités du mythe de Psyché présents dans la pièce éponyme de Molière.
De manière assez logique, les différentes divinités présentes dans la pièce ne sont probablement pas représentées de la même façon au XXIème siècle et au XVIIème siècle lors de la création de la pièce. Dans un premier temps, il va de soi que la mode a bien évidemment évolué, et que les acteurs des mises en scène actuelles des pièces du XVIIème siècle, ne sont plus vêtus des mêmes costumes qu’ont pu admirer les spectateurs du XVIIème. Les modes, les techniques et les goûts ont évolué. On peut en plus imaginer que les costumes des personnages de divinités subissent des changements encore plus importants entre les différentes époques, car ils incarnent des notions ou des éléments dont les représentations évoluent aussi en fonction des modes, des techniques et des goûts de la société. Ces personnages ancrés dans le merveilleux, représentaient au XVIIème une certaine vision du monde. Au XXIème siècle ils traduisent aussi une vision du monde mais qui est, différente, propre à l’époque et que nous souhaitons interroger.
On peut ajouter que l’utilisation des divinités et des thèmes mythologiques est intéressante, car, déjà au XVIIème, elle invite à porter un regard sur un passé et une société très lointaine, sur des croyances et sur un système hiérarchique que l’on ne peut qu’imaginer, et se représenter à travers les quelques traces qui en restent. Mettre en scène ces pièces et ces personnages aujourd’hui, c’est porter un regard sur cette époque passée (le XVIIème) qui observait déjà un passé encore plus lointain (l’Antiquité) et tenter d’en donner une représentation qui nous semble juste. Nous chercherons ainsi à comprendre comment ces retours en arrière s’opèrent à travers les costumes des mises en scènes contemporaines de la pièce.
Pour cette étude, nous travaillerons sur quatre spectacles, tous les quatre crées au XXIème siècle, par des équipes artistiques francophones. Trois ont été créés en France et le quatrième en Suisse.
Le premier est une mise en scène proposée par Yan Duffas, en 2000, au théâtre de l’Athénée Louis Jouvet de Paris. C’est la première pièce que Yan Duffas ait mise en scène à sa sortie du Conservatoire, Initialement, il s’agissait d’une sorte de projet de fin d’études.
La direction du théâtre de l’Athénée, qui venait de rénover sa salle à l’Italienne, a contacté le metteur en scène pour lui proposer de monter son spectacle dans leur salle. En effet, le théâtre cherchait des pièces à machines qui incluraient aussi des passages avec de la musique jouée en direct. Le projet de fin d’étude a donc été retravaillé pour s’adapter à la salle et en exploiter les ressources. Yan Duffas explique avoir, au départ, choisi cette pièce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, parce que c’est une œuvre collective, la seule ralliant Molière et Corneille et qu’il était intéressé par l’écriture qui s’en dégageait. Ensuite, parce que c’est une pièce qui, au vu des descriptions qui en restent, des frais engagés par Molière et sa troupe, de sa longueur, et de la complexité des décors et machineries, avait reçu une réputation de pièce particulièrement « immontable ». Le challenge était donc pour lui de travailler le texte de la pièce dans une version «simplifiée» de la mise en scène originale.
La dernière raison de ce choix, et probablement la plus importante pour le metteur en scène, est qu’il voyait « un parcours initiatique », celui de Psyché, une jeune femme qui découvre l’amour et le « plaisir charnel », à travers une écriture qu’il qualifie comme empreinte de « sensualité ». Il a donc voulu travailler particulièrement sur ce parcours initiatique et sur le destin de la jeune femme. Pour cette mise en scène, nous disposons d’un entretien que nous avons pu réaliser avec Yan Duffas, en avril 2020 , dans lequel il s’exprime sur ses choix de mise en scène et de création des costumes. Nous n’avons pas d’image ou de captation, mais les intentions du metteur en scène sont bien expliquées et nous donnent une idée assez claire de l’aspect de la pièce.
La deuxième mise en scène que nous étudierons est une version proposée par Julien Balajas et Claire Bodin, à l’Opéra de Toulon en 2009. Elle inclut, en plus du texte, des éléments musicaux des partitions de Lully. La partition correspond à la fois à la version collective de 1671, ainsi qu’à version proposée par Lully en collaboration avec Thomas Corneille, sous la forme d’une tragédie lyrique en 1678. Claire Bodin juge important de signaler que « les intermèdes musicaux du Psyché de 1671 seront intégralement repris dans cette tragédie . » Ce spectacle est donc empreint d’un univers musical baroque tout en affirmant le souhait, du metteur en scène et de la directrice musical, de ne pas être une reconstitution des spectacles de l’époque. Il est basé sur le travail collectif d’une troupe théâtrale et d’une troupe de musiciens, rappelant le travail collectif de Molière et Lully pour la version de 1671. Un des grands changements de cette mise en scène est de déplacer l’action dans les années 1900-1920, une époque qui, pour les créateurs, illustre un des éléments les plus importants de la pièce : la place des femmes dans la société, et la question de l’émancipation féminine. Pour eux également, l’un des éléments les plus important de la pièce est la découverte de l’amour et la sensualité des personnages de Psyché et d’Amour ainsi que leur passage à l’âge adulte. Pour cette mise en scène, les sources sont seulement quelques images, ainsi que des éléments de communication et un dossier pédagogique de la pièce.
La troisième mise en scène étudiée pour ce travail est celle proposée en 2013 par Véronique Vella à la Comédie-Française. Elle propose, elle aussi, une version mise en musique, par un musicien présent sur scène. L’idée était pour elle de travailler sur plusieurs points. D’abord les rapports entre les personnages, ceux plutôt compliqués qui lient les divinités entre elles, et d’autres, plus simples et moins conflictuels, comme la très belle relation père/fille entre Psyché et le roi. Elle souhaitait aussi travailler su r l’imaginaire, autour de la pièce et de sa réputation «immontable» ainsi qu’autour d’un imaginaire lié à l’enfance, à une joie enfantine éprouvée au moment de découvrir un spectacle, travailler sur l’idée qu’« il existe toujours un spectacle dans notre vie qui, tout d’un coup, pour toutes sortes de raisons, produise en nous une joie d’enfant, nous rappelle l’émotion ressentie la première fois qu’on a vu tel ou tel autre spectacle » un peu comme si elle voulait travailler à créer un spectacle «Madeleine de Proust». Un autre élément important dans sa mise en scène est l’idée d’utiliser la salle Richelieu de la Comédie-Française sans la dissimuler par un décor qui la ferait disparaître, mais plutôt en l’utilisant comme directement intégrée au décor . Un autre élément qui a motivé le choix de cette pièce pour la metteuse en scène, et qui rejoint en ce point les deux premières mises en scène, est le fait qu’elle traite de la naissance d’une première histoire d’amour qui ferait basculer les personnages de l’adolescence à l’âge adulte. Les sources disponibles pour l’étude de ce spectacle sont des photographies, un entretien donné à Laurent Muhleisen, conseiller littéraire de la ComédieFrançaise , ainsi que des éléments de communication autour de la pièce.
La dernière œuvre du corpus est une mise en scène proposée par Omar Porras, en 2017 au Théâtre Kléber-Méleau, à Renens (Suisse). Ce metteur en scène est très intéressé par la notion de mythe, sa transmission et les différentes versions qui peuvent en exister. Il s’intéresse à ces questions dans sa version de Psyché qu’il titre Amour et Psyché, comme un mélange entre les différents titres des textes qu’il convoque : Les amours de Psyché et Cupidon, de Jean de La Fontaine ou encore la pièce Psyché de Molière. Il dit, dans sa note d’intention : « A l’origine de mon désir de mise en scène, il y a donc le mythe et la manière de le transmettre . » Cette question, comme il le précise, est au cœur de son travail de metteur en scène et de ses choix de pièces. Il s’intéresse à l’origine du mythe et cherche à le représenter à travers des images liées aux arts premiers, qui remontent bien plus loin que le XVIIème siècle de Molière. Il est, lui aussi, attiré par l’histoire entre Psyché et Amour, une relation interdite, qui ne devrait pas exister. Il s’intéresse aux moyens que trouve cet amour pour exister malgré tout, au parcours de Psyché qui « accepte ce voyage et ces épreuves, pas forcément comme souffrance, mais comme chemin » et qui finira par accéder à l’amour qu’on lui interdisait. Omar Porras envisage, lui aussi, le parcours de Psyché comme un « rite initiatique ». Nous pourrons appuyer notre étude de cette mise en scène sur de nombreuses photographies, une captation mise à disposition par le théâtre TKM, des dossiers pédagogiques ainsi qu’un dossier de presse.
Un certain nombre de points communs sont donc repérables entre les œuvres du corpus. Par rapport au texte original de la pièce de Molière, tous ont opéré des coupures. Certains ont même ajouté des éléments de textes comme ceux de La Fontaine ou d’Apulée, s’autorisant une assez grande liberté avec l’œuvre. Véronique Vella explique que « comme la versification est extrêmement complexe, parfois même farfelu, passant de l’alexandrin à des vers de huit, de sept, de dix, les coupes étaient donc plus faciles à faire qu’à l’intérieur d’une œuvre très pure . » Tous ont cherché à conserver l’intrigue en opérant des coupes dans le texte pour l’alléger, et rendre la pièce moins longue. Aucun des metteurs en scène n’a souhaité procéder à une reconstitution du spectacle baroque tel qu’il a été présenté en 1671. Ils s’autorisent donc tous une grande liberté par rapport au texte initial tout en conservant les principaux épisodes. Les quatre mises en scène interrogent le destin de Psyché sous le prisme du parcours initiatique, de la découverte de l’amour, du passage à l’âge adulte. Toutes les mises en scène font appel à de la musique : qu’elle soit enregistrée ou jouée en direct. Elle garde une place privilégiée dans les spectacles. Elle peut prendre la forme d’interprétations assez fidèles des partitions proposées par Lully dans la version de Julien Balajas et Claire Bodin ou encore d’une « Kora africaine » pour celle de Yan Duffas. À l’inverse, la danse présente dans la version de 1671, n’est plus utilisée de façon systématique dans les versions contemporaines. Seuls Julien Balajas et Claire Bodin font appel à « une danseuse chorégraphe symbolisant l’omniprésence de la danse à la cour de Louis XIV », Sarah Berreby. La version de Véronique Vella fait, elle aussi, mention d’un « travail chorégraphique » réalisé avec Elliot Jenicot. Les autres génériques ne comptent pas de danseurs, de danseuses ou de chorégraphes. Sur le plan méthodologique, cette étude se base essentiellement sur des études de photographies ou de descriptions des costumes réalisés pour les mises en scène. Ceux-ci sont étudiés dans leurs formes plastiques, d’un point de vue iconographique, ainsi qu’en lien avec l’histoire du vêtement. Ils sont aussi étudiés d’un point de vue technique, par rapport aux choix de tissus et de matériaux des créateurs. Nous pourrons rencontrer des photographies de costumes mais aussi des croquis de travail, qui nous donnent une idée des intentions des créateurs pour les personnages. Les costumes de chaque mise en scène sont étudiés en lien avec les autres costumes de la même mise en scène mais aussi avec les costumes du même personnage des autres mises en scène. Pour certains personnages, grâce à l’article de Jérôme de la Gorce, cité plus haut, les dessins des costumes sont disponibles.
Les costumes de ces personnages pourront donc aussi être comparés aux dessins des costumes du spectacle de Molière. Les costumes sont aussi étudiés en lien avec d’autres éléments comme le reste de la scénographie ou des éléments d’histoire de l’art.
D’abord, nous verrons comment se comportent ces costumes dans leur environnement scénique. L’ensemble visuel est-il harmonieux ? Sont-ils cohérents entre eux ? Avec les autres personnages ? Ou, au contraire, les personnages détonnent-ils dans la scénographie proposée ? Nous étudierons ainsi les costumes par rapport aux décors, aux autres personnages (d’un point de vue purement visuel) et aux différentes temporalités représentées par les metteurs en scène. Cela correspondra à une première analyse des personnages, en scène, dans leur « ici et maintenant » de la représentation.
Ensuite, nous étudierons les personnages dans leur environnement social, dans leurs liens directs et hiérarchisés avec les autres personnages, la hiérarchie est-elle visible ? Quels effets produisent les divinités sur les autres personnages ? Et les mortels sur les divinités ? Quel genre de relations entretiennent-ils ? L’idée sera ici d’étudier les personnages d’un point de vue relationnel et de voir si ces relations sont visibles à travers les costumes des personnages. Nous verrons ainsi une deuxième strate de la construction de ces personnages dans leur propre positionnement vis-à-vis des autres membres de leur histoire. Puis nous verrons les divinités en lien avec leur environnement iconographique. Leurs costumes font-ils référence à des œuvres d’art ? Reprennent-ils les codes des attributs mythologiques ? Ces attributs traduisent-ils des relations entre les personnages ? Nous chercherons à voir si ces personnages s’inscrivent dans une tradition visuelle et iconographique. Nous nous demanderons aussi quels effets de telles références peuvent produire. Ici, nous nous éloignerons encore de la scène et de l’intrigue, de l’ « ici et maintenant » des personnages, pour replacer leurs costumes dans une histoire de l’art qui dépasse les frontières de la représentation scénique.
Enfin, nous terminerons en étudiant les divinités sous le prisme de leur lien à leur environnement naturel. Sont-ils des êtres en accord avec la nature ? Leur donne-t-elle leur force ? Quel est leur rapport à l’âge et au temps qui passe ? Nous verrons ainsi comment chaque metteur en scène choisit de lier, ou non, ces divinités à la nature et aux lois de cette dernière. Dans cette partie, nous pourrons étudier les personnages et leurs costumes à travers des enjeux plus grands encore, qu’ils ne voient pas forcément et qui les dépassent. Que ce soient les enjeux de la pièce ou encore des éléments sur lesquels ils n’ont pas de prise et ne peuvent pas intervenir. Cela nous permettra d’étudier le sens de leurs caractères, de qui ils sont et de pourquoi ils font ce qu’ils font, en dehors des enjeux purement dramatiques de l’intrigue la pièce.

LES DIVINITÉS EN LIEN AVEC LEUR ENVIRONNEMENT SCÉNIQUE

Parce que les costumes de théâtre ne fonctionnent pas seuls, mais sont intégrés à tout un environnement avec lesquels ils entrent en relation, nous avons choisi de présenter, dans un premier temps, les scénographies dans lesquelles ils s’inscrivent. Ce choix, de commencer par présenter le cadre du spectacle, avant de se concentrer sur les costumes, nous a paru d’autant plus important dans le cas d’intrigues incluant des éléments fantastiques, mythologiques et qui s’éloignent du réalisme. En effet, la scénographie – et par extension les costumes – doit alors donner à voir et à comprendre ces éléments hors du commun. On étudiera donc ici les scénographies dans lesquels s’inscrivent les costumes à travers différents axes. D’abord, nous observerons quelles différences visuelles sont mises en place avec les mortels. Ensuite, nous verrons quelle temporalité est créée sur scène. Puis nous verrons dans quel cadre est utilisé « le théâtre à machines ». Ces observations nous permettrons de définir quel est l’ici et maintenant des divinités dans ces mises en scène.

QUELLE DISTINCTION ENTRE LES MORTELS ET LES DIVINITÉS ?

Dans une pièce mettant en scène des divinités et des mortels, une des réflexions à mettre en place pour les metteurs en scène et les costumiers avec qui ils travaillent est de savoir si, et comment, ils souhaitent mettre en place des différences entre ces deux catégories de personnages ; et s’ils veulent que les dieux et les humains se ressemblent ou bien s’ils veulent qu’ils soient très différents les uns des autres. Nous verrons dans les paragraphes suivants les choix faits par les metteurs en scène des spectacles contemporains, par quels procédés, mise en scène permet de différencier les mortels des divinités ?

Des différences marquées

Dans son livre Théâtre et musique, Dramaturgie de l’insertion musicale dans le théâtre français (1550-1680), Bérénice Louvat-Molozay explique que les thèmes mythologiques étaient nombreux dans les pièces à machines, car la présence de chants permettait de différencier les divinités et les mortels. Les parties chantées étaient attribuées aux divinités et les parties parlées aux mortels.
Elle place ici les machines au même rang que la musique pour marquer ces différences, celles-ci permettant des déplacements qui ne pourraient pas avoir lieu autrement, comme des vols ou, dans le cas de Psyché, la scène de l’enlèvement de Psyché par Zéph yr. Les machines sont l’apanage des divinités et de leurs actions, laissant les êtres humains sur le sol de la scène. Les humains n’accèdent pas seuls aux machines qui permettent de matérialiser les pouvoirs des divinités et leurs capacités surhumaines.
Lors de l’entretien mené avec Yan Duffas, celui-ci explique qu’il a voulu marquer une différence entre les divinités et les mortels par le biais des costumes. Cette différence tient en plusieurs points. D’abord les couleurs utilisées pour chaque groupe : il utilise des couleurs chaudes, ocres, marrons, beige pour les mortels et des couleurs plutôt froides, bleus, gris pale ou des nuances de blanc pour les divinités. Ensuite, il fait aussi une différence sur les matières utilisées : il dit vouloir utiliser pour les mortels des matières comme des ficelles, des cordages, et pour les costumes des divinités des tissus comme le lycra. On peut observer que ces différentes matières ont des textures très distinctes, on pourrait définir les ficelles et cordages comme des matières rugueuses, rêches, alors que les lycras son plus lisses, doux. Instinctivement, on peut penser que les costumes des divinités étaient plus confortables, avec un contact sur la peau plus agréable. Il dit aussi avoir utilisé des fausses fourrures pour les divinités. Encore une fois, cette matière peut être rattachée à l’idée de douceur et de confort. La troisième différence qu’il a voulu marquer tenait aussi dans le lien avec les apparences. En effet, il explique qu’il a souhaité que les mortels semblent très concernés par leur apparence, quitte à en arriver à un point un peu ridicule et qu’au contraire les divinités ne cherchent pas vraiment à se conforter à d’éventuelles règles qui régiraient les apparences et les façons de se vêtir. Ils ne s’encombrent pas de carcans d’une société des apparences à laquelle ils ne semblent pas s’intéresser outre mesure.

QUELLE TEMPORALITÉ REPRÉSENTÉE ?

Un autre élément qui fait une grande partie de l’univers scénique d’un spectacle est la temporalité dans laquelle il s’inscrit. Un des avantages du théâtre est que les artistes peuvent y représenter des temporalités très différentes de celle contemporaine de la mise en scène. Les artistes peuvent aussi décider de ne pas fixer dans une époque particulière leur intrigue, ou bien de multiplier les références à plusieurs époques pour illustrer, à travers plusieurs prismes, l’histoire qu’ils veulent mettre en scène. Quels choix temporels font les metteurs en scène des spectacles de notre corpus ?

L’époque « de la mythologie »

Dans un premier temps, on peut penser que c’est l’époque racontée, c’est-à-dire l’antiquité, qui est représentée. Psyché est un conte mythologique apparu pour la première fois au IIème siècle, mais le personnage faisait déjà une apparition chez Platon au Vème siècle avant notre ère. Molière lui-même, dans les costumes de son spectacle , utilise des images rappelant l’Antiquité. En effet, la plupart des personnages portent des tonnelets que l’on définit comme « Vêtement[s] de scène court, en usage au XVIIème siècle, porté[s] par les hommes et donné[s] comme évoquant l’antiquité . » D’autres personnages, comme Jupiter, dont nous étudierons le costume plus tard, portent aussi, dans la version de 1671, des habits faisant appel aux représentations de la mythologie.

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Table des matières
Introduction 
État de l’art 
Corpus 
I Les divinités en lien avec leur environnement scénique 
1) Quelle distinction entre les mortels et les divinités ?
a) Des différences marquées
b) Des différences effacées
c) Un effet miroir
2) Quelle temporalité représentée ?
a) L’époque « de la mythologie »
b) Le XVIIe siècle
c) Une époque différente
d) Un temps hybride
3) Quels effets scéniques pour donner à voir ces personnages ?
a) Le théâtre à machines
b) Une scène plus dépouillée
II Les divinités en lien avec leur environnement social
1) Quel lien entretiennent-elles avec leur entourage direct ?
a) l’entourage leur apporte de l’importance
b) L’entourage fait apparaître un décalage
2) Quelle interaction possible dans une société basée sur les apparences ?
a) Entretenir les apparences
b) Des relations basées sur l’incompréhension
3) Des personnages en marge de la société ?
a) La nudité
b) Un monde différent de celui des humains
III Les divinités en lien avec leurs attributs mythologiques 
1) Des références assumées ?
a) Amour
b) Jupiter
c) Vénus
2) Des attributs qui traduisent des liens entre les personnages ?
a) Transfert Amour/Psyché : annonce d’un destin commun ?
b) Transfert Jupiter/Vénus : une beauté empreinte de pouvoir
3) Des attributs détournés ?
a) Pour créer un effet extraordinaire
b) Des images modernisées
IV Les divinités en lien avec leur environnement naturel
1) Des divinités qui puisent leur force dans la nature ?
a) Les divinités naturelles secondaires
b) Les divinités naturelles principales
2) Quel rapport à l’âge ?
a) L’âge, révélateur de leur puissance
b) La jeunesse d’autres personnages en contraste
3) Psyché, une transformation ?
a) Des indices sur son destin
a) Les épreuves
Conclusion 
Bibliographie
Table des illustrations 
Annexe 1 : Génériques des mises en scène étudiées 
Annexe 2 : entretien avec Yan Duffas 
Annexe 3 : Histoire de la mode
Annexe 4 : Références picturales 
Annexe 5 : Références littéraires
Annexe 6 : Référence culture populaire 

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