Les difficultés liées à la maîtrise de la langue et aux outils

La légitimité du sujet

Au mois de septembre 2014, des évaluations en français et en mathématiques provenant de la circonscription de Lens ASH ont été passées dans la classe de 5 ème A. Cellesci ont permis de dégager les points d’appui et les difficultés des élèves dans ces domaines, mais pas seulement. En effet, les compétences évaluées sont pour certaines des compétences transversales en Histoire : répondre à une question, comprendre un énoncé, repérer dans un texte des informations explicites, lire un tableau à double entrée.
Ces évaluations montrent que dix élèves sur dix-sept n’ont pas acquis la compétence « dégager le thème d’un texte » ; soit 59% des élèves. Le pourcentage est identique concernant la compréhension d’énoncé.
En ce qui concerne le repérage d’informations explicites dans un texte, 75% des élèves ont acquis cette compétence d’après ces évaluations ; la compréhension est repérée comme point fort pour un nombre important d’élèves de la classe. Ces évaluations montrent également que 35% des élèves n’ont pas acquis la compétence « répondre à une question par une phrase ».
Enfin, 30% des élèves ne maîtrisent pas la lecture d’un tableau et 70% celle d’un graphique.
La synthèse de ces résultats individuels est présentée dans l’annexe 1.
Même si le repérage d’informations explicites dans un texte est une compétence acquise pour une grande majorité des élèves, ces évaluations révèlent que la compréhension de texte (le thème d’un texte, la compréhension d’énoncé) reste difficile, et plus largement, la compréhension de documents (tableau, graphique).
Une des problématiques fondamentales repérées chez les élèves de Segpa est celle de l’organisation du temps : ils sont dans l’incapacité à l’appréhender. Cette difficulté, repérée pour ma part de façon perceptive, a alors fait l’objet d’une évaluation diagnostique en septembre 2014, de manière à identifier plus spécifiquement les compétences dans ce domaine. Cette évaluation est présentée dans l’annexe 2.
Cette évaluation révèle que 41% des élèves ne maîtrisent pas la localisation dans le temps ; plus de 70% des élèves de la classe ont des difficultés à apprécier la durée, le temps qui passe. 82% des élèves ne maîtrisent pas les acquisitions objectives du temps ; et enfin 65% n’apprécient pas le sentiment de « temps » (annexe 3).
Ces difficultés de repérage dans le temps sont prégnantes en histoire. Les élèves de Segpa peinent à se repérer sur une frise et à mémoriser les évènements historiques, pourtant déjà travaillés en grande partie à l’école élémentaire. Ce qui a motivé mon choix de présenter un écrit traitant de l’histoire, c’est de trouver les moyens qui pourraient répondre à ces difficultés.
Comme je l’ai énoncé dans l’introduction, je souhaitais au départ m’orienter vers une pédagogie de projet, mêlant plusieurs disciplines, de manière à intéresser davantage les élèves, faire des ponts entre les connaissances et créer de la motivation. Après diverses lectures, je me suis penchée sur les écrits de Jean Pierre Terrail, professeur de sociologie au CNRS. Il dit qu’il faut « se méfier de certaines de nos bonnes intentions en tant qu’enseignant : par exemple, insister sur la fonction instrumentale des apprentissages alors que c’est mettre en évidence leur fonction cognitive qui est la meilleure source d’une motivation suffisamment solide ; par exemple ne mettre en œuvre qu’une pédagogie du concret alors qu’il n’est pas de progrès cognitif si l’on ne permet pas à l’élève de passer de la chose à l’idée».
La meilleure source de motivation est alors la construction des savoirs.

Analyses des difficultés des élèves

Les difficultés liées à la structuration du temps

Les élèves de Segpa ont de réelles difficultés à se repérer et à se projeter dans le temps.
A l’âge de onze-douze ans, l’appréhension du temps n’est pas achevée. Elle comporte bien des degrés d’abstraction, ce n’est que progressivement que l’enfant parvient à une forme d’objectivation.
Les élèves ne possèdent pas cette capacité de recul qui consiste à s’extraire du présent en faisant abstraction du présent. Ils ont également des difficultés à situer un événement, un personnage par rapport à ce qui l’a précédé ou suivi ; ils ne possèdent pas cette habileté chronologique ni la capacité à comprendre la réalité du passé à travers notamment l’évocation (témoignages et documents).
Les difficultés à identifier les transformations du monde depuis les origines, à relier les événements passés par une causalité probable, à voir la continuité, la permanence sont autant de difficultés qui perturbent la compréhension de l’histoire.

Les difficultés liées à la maîtrise de la langue et aux outils

Les documents en histoire sont majoritairement des textes. Un élève qui a des difficultés en lecture et en compréhension est vite en difficulté dans cette discipline.
En Histoire, les textes recèlent des difficultés particulières : des inférences, des sous-entendus qui demandent pour être compris que l‘élève soit capable de se référer au contexte, un lexique spécifique et une langue parfois éloignée de celle des élèves.
Outre les documents écrits, l’interprétation des documents iconographiques peut également poser problème.
Liliane Hamm , établit pour la lecture d’image un schéma d’analyse sur plusieurs niveaux.
Le premier niveau d’analyse concerne la dénotation, la simple reconnaissance de ce qui est représenté. A ce stade, peuvent se poser des difficultés de décodage et des difficultés en lien avec les différences culturelles de chacun. Le deuxième niveau est la connotation, la lecture interprétative de l’image. A ce niveau, l’accès au sens peut poser des difficultés chez certains élèves.

Les fondements théoriques

Nous avons tous appris un nombre impressionnant de savoirs historiques à l’école.
Mais nous pouvons nous demander ce qu’il reste de ces connaissances des années plus tard.
Inversement, pour les savoirs mémorisés, nous pouvons nous interroger sur les raisons pour lesquelles ils sont restés en mémoire.
Les enseignants veulent faire acquérir de nombreuses connaissances aux élèves. Mais bien souvent, celui qui travaille le plus dans la classe est le maître et non les élèves. Les professeurs souhaitent faire progresser les élèves et leur faire construire des savoirs.
Néanmoins, ils ne savent pas comment s’y prendre. Les enseignants constatent que les leçons semblent comprises sur le coup par les élèves, mais qu’ils ne parviennent pas à réinvestir ce qui a été appris.
Les cours d’histoire, enseignés de façon magistrale ou classique (thème donné – étude de documents – leçon), génèrent chez la plupart des élèves passivité et ennui. Les éléments étudiés ainsi ne restent pas en mémoire. L’alternative à cela peut être la démarche socioconstructiviste des savoirs dans laquelle les élèves cherchent et apprennent en cherchant ; ils deviennent acteurs de leurs apprentissages. Le fait de rechercher la compréhension de faits historiques permet alors de mémoriser naturellement les savoirs. Entre alors en jeu la mémoire épisodique : l’individu se voit en tant qu’acteur des événements mémorisés. Il mémorise alors non seulement un événement qu’il a vécu, mais tout le contexte particulier de cet événement.

La construction des savoirs

Le discours tenu par les enseignants concernant les savoirs non mémorisés en histoire est souvent dû à un manque de motivation. C’est également la première hypothèse à laquelle j’avais pensé.
Gérard de Vecchi se demande : « Et si la motivation n’était que le résultat de quelque chose de plus profond : la prise en compte du sens ? ». En effet, les activités proposées aux élèves sont souvent dénuées de sens pour eux. Il est alors nécessaire d’en donner dans les activités proposées. L’enseignant peut déterminer le sujet à traiter au départ mais doit s’interroger sur la place de l’apprenant dans les autres étapes : celui-ci pourrait définir les objectifs avec lui en passant par une prise de conscience de ses intérêts ; les élèves pourraient trouver une démarche à suivre sans que celle-ci ne soit pas imposée par le professeur ou déterminer les activités par rapport au problème posé. L’élève doit être placé dans des situations qui l’interpellent, qui lui pose problème. L’attitude du maître et les situations qu’ils proposent sont très importantes.
Selon A. Dalongeville, les élèves « n’apprennent vraiment que les savoirs qu’ils construisent ». Cette construction du savoir passe par une remise en question de leurs représentations et par une reconstruction permettant de créer le nouveau savoir.
Pour Gérard de Vecchi, le « vrai travail de construction n’a pu être réalisé que par chacun d’entre nous ». Il compare les savoirs aux aliments : « personne ne peut manger à notre place ; on peut simplement nous préparer des mets, nous inciter (ou nous obliger !) à nous nourrir, mais il est impossible d’avaler et de digérer pour nous ». Seul l’élève est capable de construire son propre savoir. Il appartient au maître de lui en donner les moyens.
Il y a une cinquantaine d’années, un bon enseignement était considéré lié aux qualités de l’enseignant. Jacques Carbonnel a montré qu’aujourd’hui, il ne suffit pas d’enseigner, il faut que l’apprenant soit acteur de ses apprentissages et ce sont les activités de construction des savoirs, par la remise en question des pré-conceptions, qui doivent être privilégiées dans les tâches scolaires.
Mais il n’est pas évident que les élèves acceptent volontiers la remise en cause de leurs représentations mentales. Cela oblige l’élève à entrer en conflit avec lui-même. Les représentations mentales des élèves sont des points d’appui pour l’enseignant qui peut alors mettre en place des activités adaptées.

L’émergence des représentations mentales

« Tout individu, enfant ou adulte, appréhende le monde non pas directement mais à travers une grille d’analyse correspondant à un ensemble de modèles explicatifs qui lui permettent de donner du sens à tout ce qui l’entoure . » Ce sont ces modèles explicatifs qui l’on appelle représentations mentales. Pour Monique Lafont, la représentation serait pour chaque individu « son réel, sa manière de penser le monde (…) à un moment donné de l’histoire ». Pour Michel Develay, la représentation que nous avons du monde ne constitue pas qu’une vision partielle du réel c’est-à-dire son rapport au monde au moment présent. Pour lui, « la représentation inscrit le sujet qui l’exprime dans son rapport d’objectivité au monde».
Construire un savoir, c’est s’engager sur un chemin qui mènera vers un lieu ignoré. Cette démarche est à la base de toute construction des savoirs. On part de ce que l’on sait pour aller plus loin en passant par des ruptures successives et en ajustant les nouveaux apports à nos conceptions initiales.

La capacité de décentration

Une pré-conception fréquente chez les élèves et qui fait obstacle au savoir historique est la tendance à l’anachronisme : ils projettent sur les siècles passés les institutions, règles juridiques et pratiques d’aujourd’hui, et attribuent aux personnages du passé des façons d’être et de penser de leur époque.
Pour remettre en cause cette façon de penser, il est possible de mettre les élèves en situation de décentration volontaire lors d’activités telles que les documents imaginaires ou les jeux de rôles dans lesquelles il s’agit à l’oral ou à l’écrit d’adopter le point de vue de personnage historique.

Les documents imaginaires

Ce type d’activité rend les élèves en imagination acteurs de l’histoire en leur demandant de rédiger un document s’adressant à un destinataire imaginaire également.
L’enseignant donne des consignes concernant le contexte, l’identité des auteurs et des destinataires, l’objectif du document à rédiger, de manière à mettre les élèves en situation problème. Le maître doit veiller à ne pas donner trop de contraintes, qui pourraient limiter l’imagination.
Pour réussir ce type de tâche visant à produire un document imaginaire avec un certain nombre d’éléments imposés, les élèves doivent faire l’effort de se décentrer. Eu égard aux difficultés des élèves dans le domaine conceptuel, ce type d’activité permet de travailler l’abstraction. En effet, les élèves de Segpa ne se représentent pas le but à atteindre, ils n’anticipent pas, ne mettent pas en place les liens de causalité et ne situent pas dans le temps.
Ce type de tâche a également l’avantage de mettre mentalement les élèves en situations d’acteurs de l’histoire et non pas de spectateurs.
Pour réaliser cette activité, les élèves doivent réunir un ensemble d’informations sur l’époque travaillée. Même si l’enseignant fournit une partie des documents et des informations, les élèves sont demandeurs car ils en ont besoin pour réaliser l’exercice. Dès lors, on s’éloigne de la pédagogie dite transmissive.
De plus, les élèves adoptent une façon d’être de penser différente de la leur. « Il y a la contrainte de reconstruire une logique de pensée et d’action qui est celle d’un acteur de l’histoire et qui, du même coup, fait apparaître celle que l’élève a spontanément comme relative. Non seulement un tel exercice vient contrecarrer la tendance spontanée à l’anachronisme, mais elle contribue à donner une figure concrète à la profondeur du temps historique en rendant sensible à l’élève la distance historique.»

Pratique de classe et analyse

Pour Gérard de Vecchi, il faut faire en sorte que « l’élève ne reste plus cantonné dans un apprentissage plus mémorisé que construit ». Pour reprendre ses propos, l’élève doit être un « détective du passé », « un chercheur, un vrai ». L’élève est au cœur des apprentissages.
L’enseignant doit mettre en place des situations didactiques permettant la construction des savoirs par l’élève.
Pour mettre en place ce type de séance, j’ai tout d’abord recherché à faire émerger les conceptions préalables des élèves pour mettre ensuite en place des situations-problèmes.

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Table des matières
INTRODUCTION 
PREMIER PARTIE : Analyse de la situation
1) La classe de 5 ème Segpa
2) L’histoire : définitions et attentes
3) La légitimité du sujet
4) Analyses possibles des difficultés des élèves
a) Les difficultés liées à l’appréhension du temps
b) Les difficultés liées à la maîtrise de la langue et aux outils
DEUXIEME PARTIE : les fondements théoriques
1) La construction des savoirs
a) L’émergence des représentations mentales
b) Le conflit cognitif et socio-cognitif
 Les situations-problèmes
 Le travail de groupes
2) La capacité de décentration
a) Les documents imaginaires
b) Les jeux de rôle
TROISIEME PARTIE : Pratique de classe et analyse
1) Situations favorisant la construction des savoirs
a) Un exemple d’émergence des représentations mentales
b) Mise en place de situations-problèmes en histoire
 Exemple de situation-problème sur les château-fort
 Exemple de situation-problème : Jeanne d’Arc
2) Situations stimulant l’abstraction
3) Bilan
4) Les limites de ces situations
CONCLUSION 
BIBLIOGRAPHIE 
SOMMAIRE DES ANNEXES
RESUME

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