Les différentes techniques d’analyse de sensibilité

La simulation numérique des procédés de mise en forme (emboutissage, formage, forgeage, …) qui était, il y a encore une vingtaine d’années, balbutiante dans le milieu industriel, suscite désormais un très grand intérêt. L’utilisation des logiciels de simulation numérique devient à l’heure actuelle de plus en plus fréquente et quasi incontournable. Les renseignements apportés sont nombreux. Ils facilitent la prise de décision sur le choix du processus de fabrication, le choix du matériau, etc. Ils assurent également le moyen d’éviter la mise au point de prototypes. Par souci de compétitivité et de qualité, ces logiciels doivent d’une part, être rapides et d’autre part, être capables de reproduire le plus fidèlement les phénomènes observés, l’objectif étant d’obtenir des résultats aussi proches que possible de l’expérience. Pour résumer, les logiciels de simulation numérique sont indispensables à la compétitivité et contribuent à améliorer une gamme de forgeage et à diminuer les coûts de fabrication (augmentation de la durée de vie des outils, diminution du nombre d’opérations, …). Dans cette optique, le Centre de Mise en Forme des Matériaux (CEMEF) de l’Ecole des Mines de Paris a développé et continue de développer en particulier deux codes de simulation numérique du forgeage, l’un en 2D FORGE2®, l’autre en 3D FORGE3®.

Le travail d’analyse de sensibilité, thème de cette thèse, s’inscrit dans le cadre du projet SIMULFORGE, consortium regroupant un grand nombre d’entreprises françaises. Ce travail revêt une grande importance et répond à une véritable demande de la part des industriels. Il consiste à calculer le gradient de fonctions coût Ö à optimiser par rapport à un nombre plus ou moins grand de paramètres _. Parmi les fonctions coût recensées par les industriels, citons :
– le taux de remplissage des gravures
– l’énergie totale de mise en forme
– la force maximale de forgeage
– les défauts géométriques, replis, aspiration
– le critère de qualité de l’écoulement basé sur la température maximale, sur la déformation cumulée, sa valeur minimum ou l’écart entre ses valeurs extrêmes
– le critère de qualité de l’écoulement basé sur le cisaillement interne ou la pression hydrostatique
– le critère d’endommagement des outils basé sur la contrainte normale maximale, la pression hydrostatique maximale, la température maximale, …

Les différentes techniques d’analyse de sensibilité 

La méthode des Différences Finies (D .F.)

Cette méthode est très simple à mettre en œuvre numériquement. Différentes variantes peuvent être rencontrées dont notamment les Différences Finies décentrées à droite ou à gauche et les Différences Finies centrées . Les Différences Finies centrées offrent une meilleure précision que les Différences Finies décentrées. On trouve des applications des D.F. en forgeage, pour l’optimisation de préformes (Becker et al. 1989) ainsi que dans le domaine de l’identification de paramètres rhéologiques par analyse inverse en 2D (Tillier 1998) et en 3D (Boyer 2001).

Cependant, pour une fonction _(_) où le vecteur _ est de dimension n, le calcul de sensibilité par quotients différentiels décentrés nécessite (n+1) évaluations de la fonction coût tandis que 2n évaluations de celle-ci sont nécessaires pour un calcul centré, ce qui est très coûteux. Dans le domaine du forgeage 3D, une seule simulation d’une gamme de forgeage (donc une évaluation de _) peut nécessiter plusieurs jours de calcul donc on se rend tout de suite compte du coût «pharaonique» des D.F., proportionnel au nombre de paramètres. De plus, (Tortorelli et al. 1991) et (Ghouali 1997) mettent en exergue l’importance du choix de l’incrément de perturbation __. Un choix de __ trop grand ou trop petit peut conduire à des résultats totalement erronés. Dans le cas du forgeage, les remaillages sont fréquents et il faut en plus considérer une nouvelle source d’imprécision liée au transport des variables, de l’ancien maillage vers le nouveau. (B_lan 1996) montre qu’au bout de seulement de quelques remaillages, les erreurs dues au transport des variables sont supérieures aux variations de la fonction coût étudiée. Les D.F. n’ont plus aucun sens quelle que soit la valeur de la perturbation choisie. Il est alors indispensable d’utiliser une analyse de sensibilité analytique.

Les méthodes analytiques

Nous utilisons le terme « analytique » afin de bien faire la différence avec les méthodes numériques (Différences Finies). C’est la plus précise des méthodes de différentiation mais elle nécessite souvent des développements assez lourds en terme de calculs. Deux approches générales sont envisageables : l’approche variationnelle et l’approche discrète.

Les méthodes variationnelles

Nous regroupons, sous la dénomination variationnelle, les méthodes dites « globales» où la fonction coût _ et le résidu R sont différentiés sous leur forme variationnelle ou intégrale (Rousselet 1983) (Pironneau 1984) (Tsay et al. 1990) (Poldneff et al. 1993) et les méthodes dites « locales » dans lesquelles les sensibilités de _ et R sont obtenues par différentiation des équations continues régissant le problème direct (Badrinarayanan et al. 1996) (Ghouali 1997) (Srikanth et al. 2000) (Zabaras et al. 2000) (Zabaras et al. 2003).

Un des intérêts de ces méthodes est que la différentiation des équations ne nécessite pas la connaissance du code éléments finis (Haftka et al. 1992). Dans le cadre des procédés instationnaires, ces méthodes sont délicates à mettre en œuvre si on en juge le nombre réduit de travaux leur étant dédiés. Un exemple d’utilisation de la méthode variationnelle est proposé par Zabaras et Srikanth (Srikanth et al. 2000) dans le domaine de l’optimisation de forme : un lopin de forme cylindrique est écrasé à 50% entre deux tas plats. Les auteurs remarquent, à la fin du procédé, qu’un léger bombé apparaît sur la surface libre (la partie qui n’est pas en contact avec les outils) du cylindre. Le but du problème est de trouver la préforme optimale afin d’obtenir un cylindre parfait en fin de procédé (et donc d’éliminer le bombé). La surface du lopin est décrite par des courbes de Bezier et le matériau a un comportement viscoplastique. La préforme optimale est trouvée au bout de huit itérations . Les auteurs montrent que les sensibilités calculées par la méthode variationnelle sont très proches de celles déterminées par la méthode des D.F., l’écart est inférieur à 0.1%. De plus, le gain en temps CPU apporté par la méthode variationnelle par rapport à la méthode des D.F. est de 62.5%.

Les méthodes discrètes

Les méthodes discrètes constituent l’approche la plus couramment employée dans la littérature. La différentiation est effectuée après discrétisation par éléments finis de la formulation faible du problème direct (Balagangadhar et al. 2000) (Paul et al. 2003). A partir de maintenant, nous considérons nos fonctions coût _ et le résidu R sous leur forme discrétisée, c’est-à-dire que _ et R dépendent explicitement des coordonnées X des nœuds du maillage, de V le champ nodal des vitesses et de _ le vecteur des paramètres :

Ö =Ö (X (µ),V (µ),µ) et R = R(X (µ),V (µ),µ) (5)

(Dantzig et al. 1993) utilise cette approche pour un problème 2D de solidification d’un crystal. De nombreuses extensions de cette méthode au forgeage existent, et particulièrement dans le domaine de l’optimisation de forme pour des procédés instationnaires : en 2D (B_lan 1996) (Vieilledent 1999) (Castro et al. 2000) (Zhao et al. 1997) et en 3D (Sousa et al. 2001). (Tortorelli et al. 1994) affirme que pour les problèmes stationnaires, effectuer une analyse de sensibilité avant ou après discrétisation par éléments finis est équivalent si cette discrétisation est cohérente. Quelle que soit la méthode analytique choisie (variationnelle ou discrète), il existe deux techniques pour calculer le gradient de la fonction coût _ : la méthode directe et la méthode de l’état adjoint. Il est cependant bien plus aisé de décrire ces deux techniques pour les méthodes discrètes.

La méthode directe

La méthode directe est largement utilisée en optimisation structurale (Haftka et al. 1992) et en optimisation dans le domaine de la mise en forme (Kusiak et al. 1989) (Fourment et al. 1996) (Zhao et al. 1997) (Antúnez 1998) (Chung et al. 1998) (Gao et al. 1999) (Wright et al. 1999) (Castro et al. 2000) (Zabaras et al. 2000) (Castro et al. 2002) (Gre_ovnik et al. 2002). Parmi ces publications citons tout particulièrement les travaux pionniers de (Castro et al. 2000) et (Castro et al. 2002) dans le domaine de l’optimisation de forme en forgeage 3D. Les auteurs étudient un cas de forgeage où un problème de remplissage intervient. L’idée est de paramétrer les outils de forgeage et ensuite de modifier leur forme afin de remplir correctement la matrice finale. La méthode directe d’analyse de sensibilité est utilisée et ces sensibilités sont intégrées dans un algorithme d’optimisation à direction de descente. La forme optimale des outils est obtenue au bout de six itérations, la matrice finale est parfaitement remplie.

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE 1 LES DIFFÉRENTES TECHNIQUES D’ANALYSE DE SENSIBILITÉ
1.1 LA MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES (D .F.)
1.2 LES MÉTHODES ANALYTIQUES
1.2.1 Les méthodes variationnelles
1.2.2 Les méthodes discrètes
1.3 LA MÉTHODE SEMI-ANALYTIQUE
1.4 LA MÉTHODE AUTOMATIQUE
1.5 BILAN ET CONCLUSIONS
BIBLIOGRAPHIE
CHAPITRE 2 SIMULATION DU PROCÉDÉ DE FORGEAGE PAR LE LOGICIEL FORGE3
2.1 FORMULATION DU PROBLÈME
2.1.1 Les équations du problème continu
2.1.2 Formulation faible continue du problème
2.2 DISCRÉTISATION DU PROBLÈME
2.2.1 Discrétisation temporelle
2.2.2 Discrétisation spatiale
2.2.3 Gestion incrémentale du contact
2.2.4 Résolution numérique
2.3 REMAILLAGE ET TRANSPORT DES VARIABLES
BIBLIOGRAPHIE
CHAPITRE 3 ANALYSE DE SENSIBILITÉ PAR LA MÉTHODE DE L’ÉTAT ADJOINT
3.1 DESCRIPTION DE LA MÉTHODE DE L’ÉTAT ADJOINT
3.1.1 Formulation du problème
3.1.2 Les équations
3.1.3 Commentaires importants
3.2 TECHNIQUE SEMI-ANALYTIQUE DE CALCUL DES DÉRIVÉES
3.3 TRAITEMENT DES TERMES DE CONTACT ET DE FROTTEMENT
3.4 REMAILLAGE ET TRANSPORT « ADJOINT »
3.4.1 Remaillage
3.4.2 Transport « adjoint » des variables
BIBLIOGRAPHIE
CHAPITRE 4 LES DIFFÉRENTES FONCTIONS COÛT
4.1 L’ÉNERGIE TOTALE DE MISE EN FORME
4.1.1 Choix du critère et implémentation
4.1.2 Calcul des dérivées
4.2 LA DÉTECTION DES REPLIS DE MATIÈRE
4.2.1 Choix du critère et implémentation
4.2.2 Résultats
4.3 LE REMPLISSAGE DE LA MATRICE FINALE
4.3.1 Présentation du défaut de remplissage et choix du critère
4.3.2 Expression du volume non rempli par une technique de projection
4.3.3 Calcul des dérivées
BIBLIOGRAPHIE
CHAPITRE 5 VALIDATIONS DE LA MÉTHODE DE L’ÉTAT ADJOINT
5.1 ECRASEMENT D’UN CUBE ENTRE TAS PLATS
5.1.1 Validation analytique
5.1.2 Validation par la méthode des Différences Finies (D.F.)
5.1.3 Prise en compte du remaillage
5.2 CAS DU TRIAXE
5.2.1 Validation par la méthode des Différences Finies (D.F.)
5.2.2 Prise en compte du remaillage
5.3 TEMPS DE CALCUL ET STOCKAGE
5.3.1 Estimation du stockage
5.3.2 Cas du triaxe : stockage et temps de calcul
BIBLIOGRAPHIE
CHAPITRE 6 APPLICATION DE LA MÉTHODE DE L’ÉTAT ADJOINT À UN CAS INDUSTRIEL : L’ENGRENAGE ASCOFORGE
6.1 DESCRIPTION DU CAS
6.2 PRÉSENTATION DU CAS D’OPTIMISATION
6.2.1 Paramétrisation polynômiale 2D du lopin
6.2.2 Génération du maillage
6.2.3 Choix de la fonction coût et des paramètres d’optimisation
6.2.4 Contrainte de volume constant
6.3 PARAMÉTRISATION DU DOMAINE VOLUMIQUE
6.4 VALIDATION PAR LA MÉTHODE DES DIFFÉRENCES FINIES (D.F.) DES CALCULS DE DÉRIVÉES
6.5 ANALYSE DE SENSIBILITÉ SUR LE PROBLÈME RÉEL ET ESSAIS D’OPTIMISATION
6.5.1 Analyse de sensibilité et optimisation
6.5.2 Commentaires : temps de calcul et stockage
BIBLIOGRAPHIE
CONCLUSION

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